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Septembre 1762


Les cris des mouettes emplissaient les hauteurs de gréments des navires mouillant dans le port de la Revenante, en une enthousiaste cacophonie qu’accompagnaient les exclamations des marins, les grincements des charrettes et des cordages et le grondement profond, sourd, des flots venant lécher les quais de déchargement grouillant de vie. Les formes bicolores se poursuivaient dans le ciel dégagé, plongeaient parfois vers la surface mousseuse de la mer, ou vers les dalles souillées des quais de pêcherie pour grapiller quelques reliquats des cargaisons transportées plus tôt dans les entrepôts. Parfois, certaines descendaient vers les toits et les poutres de bois pour s’y installer, ou s’approchaient trop près des étales et des devantures, repartant après avoir été chassées avec force piaillements. Le navire avec lequel ils étaient parvenus jusqu’à cette plateforme commerciale grouillante de vie, le Soupire de la reine, était amarré au bout du second quai intérieur, près de la jetée, ses voiles blanches nettement pliées et sécurisées. L’équipage s’échinait encore, cuisant sous les rayons de la journée et la gifle du vent iodé, tandis que d’autres navires paraissaient désertés par leurs équipages. Les ponts de bois vides s’étendaient là, comme une invitation au voyage, une promesse de l’immensité que ces fiers destriers de la mer parcouraient régulièrement. Leur périple depuis les glaciers de Nyn-Tiamat jusqu’aux rivages de Calastin lui avait permis d’admirer longuement les prouesses que ces géants des mers pouvaient accomplir, et de s’émerveiller de leur robustesse et de l’ingéniosité de leur construction. De prime abord, ce n’était peut-être qu’une coque de bois flottante, mais lorsqu’on voulait bien se donner la peine d’observer de plus près, on se rendait aisément compte qu’il y avait bien davantage à voir. Pourtant, malgré un voyage riche d’enseignements, Ivanyr était d’humeur morose. Le roulis du navire l’avait conduit à d’étranges rêveries, et le soupire des embruns avait dépeint en son esprit des paysages et des occurrences étranges.

A présent installé à l’ombre d’un entrepôt, il passait le temps en observant le déchargement d’un navire tout juste accepté à quai. Le collecteur de la taxe d’amarrage était venu recevoir le prix du séjour des mains du capitaine, puis avait autorisé les premières manutentions pour le transfert de la cargaison. Les premières caisses commençaient tout juste à être soulevées par élingage, et les premières charrettes préparées. Purnendu était partit en éclaireur, s’engageant à l’intérieur de la ville sans lui, sans doute un peu pour l’épargner, mais sans doute avait-il d’autres motivations… Encore une fois, il ne comprenait pas le chaton, comme il n’avait pas compris pourquoi l’autre avait décidé de l’accompagner hors de Nyn-Tiamat pour retrouver des vampires qu’il n’avait jamais vu de sa vie. L’excuse de l’intérêt purement médical à l’égard de son protégé avait certaines limites, et Ivanyr ne faisait que soupçonner certaines possibilités ayant conduit le félin à lui emboîter le pas sur la route des autres îles, sa méfiance ayant d’ailleurs mal acceptée de ne pas comprendre ce qui se passait. Pourtant, Purnendu ne lui avait jamais fait de mal et s’avérait aussi loyal qu’utile, alors il ravalait ses angoisses, son pessimisme, et il lui donnait une chance. Il le lui devait après tout. Mais en attendant, il se retrouvait sans rien à faire, à part mijoter dans son coin, et il commençait à s’ennuyer ferme. Ce n’était tout de même pas très juste que son chaton de compagnon de voyage puisse explorer cette ville alors qu’il était coincé tout seul ici à jouer les ornements, hey, lui aussi il était curieux ! Les marins avaient décrit ce lieu comme une plaque tournante de commerce et de voyages, une ville d’union et d’infinies possibilités, lui rendant des éloges enthousiastes. Etait-ce ensuite étonnant qu’il veuille la découvrir par lui-même pour jauger de leurs dires ?

Oh et puis tant pis ! Il n’avait absolument aucune idée de quand l’autre allait revenir et il n’avait pas envie de rester indéfiniment sur place, autant partir de son côté quitte à revenir plus tard. Se redressant sèchement, il prit garde de rabattre totalement l’amplitude de sa capuche sur son visage, laissant la légère brume d’eau de mer brouiller ses vibrations, puis sortit de l’ombre du bâtiment qui l’avait abrité pour se diriger vers l’une des artères principales menant hors des quais de déchargement. La route pavée était encombrée de charrettes et d’individus, majoritairement humains, à quelques exceptions près. Nulle part pourtant il n’y avait de Graarh. Du moins, nulle part où il portait le regard, et celui-ci ne parvenait pas à se fixer, tant il y avait à voir autours de lui. Caladon était la première ville qu’il voyait de ses propres yeux, et qu’on ne lui décrivait pas simplement par des récits. Sous sa capuche, le vampire cilla plusieurs fois, pupilles sensiblement dilatées par la lumière, l’excitation et les centaines d’informations que son esprit enregistrait tant bien que mal tandis qu’il se gavait de la vision de la Revenante. Il y en avait trop ! Bien trop pour tout voir en une fois, bien plus encore pour le décrire ! Quel lieu curieux que celui-ci, comment ces elfes, humains et vampires pouvaient-ils vivre les uns à coté des autres sans sembler davantage perturbés. La ville semblait encore être en construction, mais ce qu’ils avaient pu accomplir en si peu de temps forçait le respect. Le tintamarre se transformait progressivement, depuis le concert industrieux du port et de ses abords, l’artère conduisait ensuite à une chorale de voix et de bruits divers, domestiques sans doute, mais il restait douloureux pour les oreilles sensibles du vampire, dont les sens s’avéraient plus fins que ceux des humains, et qui de plus n’était pas très habitué à de telles proportions sonores.

Etrangement, pourtant, le bourdonnement de ruche de la ville semblait noyer ce qui ne cessait de chuchoter dans les recoins vulnérables de son esprit. Passé le premier instant de déséquilibre, il se découvrait une clarté d’esprit certaine dans cet environnement pourtant opulent en stimulations intellectuelles. Se glissant hors du flot, il s’installa sur une margelle, et attendit un peu, s’octroyant le confort d’une observation plus minutieuse pendant quelques instants plutôt que de continuellement surveiller où il mettait les pieds en plus de se démancher le cou pour capturer toutes les images intéressantes qui se multipliaient autours de lui comme autant de champignons. L’une d’entre elle retint toutefois davantage son attention, et le vampire se redressa vivement en essayant de suivre des yeux la forme poilue et étrangère qu’il avait cru apercevoir. Un Graarh ? Ils étaient également coutumiers de cette ville finalement ? Voilà qui semblait bien étrange tout de même, ça ne cadrait pas, pas du tout. Et il ne ressemblait pas du tout à Purnendu non plus, à bien y regarder. Illusion d’optique ? Non décidément, il fallait qu’il voit ça de plus près, depuis le temps qu’il voulait voir d’autres membres de cette race ! Se glissant de nouveau dans la foule, il tenta donc de suivre le félin tant bien que mal, et manqua de se faire renverser par une charrette en coupant la file en sens inverse. Ah, il allait vers le port ? Peut-être que finalement, tout le monde serait content dans cette histoire, et il ferait gentiment semblant de n’être pas partit du tout. Lèvres légèrement pincées pour retenir son excitation, il se glissa cependant dans l’ombre d’une grosse caisse de bois pour s’assurer de ne pas être vu immédiatement sur les quais tandis qu’il jaugeait la façon dont il pouvait approcher de l’autre.

Peine perdue semblait-il. Est-ce que les Graarh n’étaient pas sensés ne pas aimer les nouveaux arrivants ? Etre méfiants ? Se glissant jusqu’à l’entrée de l’entrepôt aussi discrètement que possible, Ivanyr fut plus que satisfait de découvrir que cette zone du port ne semblait pas très utilisée pour le moment, lui permettant de s’approcher sans mal et sans devoir répondre à la moindre question. Dans le pire des cas ? Il se contenterait de dire qu’il s’était perdu. La suite cependant lui retira toute envie de rire… et plus d’une heure plus tard, dans l’un des postes de gardes de la ville, il se demandait encore ce qu’il lui avait prit d’agir aussi impulsivement. Il se demandait tout autant, incidemment, comment de telles choses pouvaient bien exister. Le simple rappel lui emplissait la bouche de venin, et il gardait résolument les lèvres closes et les poings serrés dans les plis de sa cape pour éviter de faire quelque chose qu’il regretterait encore davantage que le reste. Fermé et froid, son regard bouillant restait résolument détourné des humains présents dans la pièce, fixant avec entêtement le mur le plus proche avec l'envie irrépressible d'y écraser son poing. Aussi, lorsque la porte s'ouvrit sur de nouveaux arrivants et une odeur encore inconnue, il failli manquer complètement l’événement. Et pourtant, avec une subtilité fracassante, poigne d'acier dans un gant de velours, l'impression vint s'imposer à lui… Ce fut d'abord un léger frémissement, comme en l'écho à quelque terrible retenue, comme un rugissement retenu, qui semblait tout de même frapper, déchirant à demi-mot. Puis ce fut ce goût sur la langue, délicatement iodé, mais était-ce le sel du vent marin ou toute autre chose ? Cillant, le vampire se tourna enfin, pour planter avec franchise ses prunelles dans celles du nouveau venu.

De LA nouvelle venue, en réalité. La scrutant avec fixité, comme s'il la disséquait couche par couche, le vampire finit néanmoins par légèrement retrousser les lèvres un bref instant, avant de briser enfin le contact visuel. Sur l'autre chaise, le capitaine de navire qu'il avait 'volé' se levait déjà pour interpeller la demoiselle, mais lui restait muré dans son silence, la détaillant avec un mélange d'amusement détaché faisant briller ses yeux et de curiosité non dissimulée. Il ne dissimulait pas davantage sa méfiance, car même si elle l'intriguait, il ne savait absolument pas s'il devait la classer chez les alliés potentiels ou chez les ennemis déclarés. La cacophonie de la voix du marin lui étrillait les oreilles, mais il se contenta de soupirer en lui décochant un coup d'oeil clairement hostile et tout sauf repentant. Avec un soupire, il attendit simplement que l'autre finisse par reprendre son souffle, puisqu'il y était obligé, et prit enfin la parole, rompant le soudain silence de son ton profond et vibrant comme le roulis de la mer. « Il dit la vérité, j'ai effectivement rendu la liberté aux Graarh qu'il retenait comme esclaves » Le terme était lacé du dégoût qu'il lui inspirait, portant comme une nausée. « Et si véritablement c'est un crime que de rectifier une injustice pareille, alors je paierais sans rechigner pour mon exaction, vous n'avez pas à vous en faire, qui que vous puissiez être » Se décrispant enfin, d'un seul coup et totalement, il laissa l'onde de soulagement courir sur lui comme une eau fraîche et remua légèrement les doigts pour savourer l'impression de liberté et de légèreté que cela lui apportait. Il assumait parfaitement ce qu'il avait fait, ne regrettait en rien et était certain d'avoir raison…. Alors il n'avait nulle raison de se torturer. « Vous êtes juge donc ? Je n'ai jamais vu de tribunal de ma vie, vous allez probablement devoir me dire tout ce que je dois faire » L'entournure de sa bouche s'arqua sensiblement « Ces messieurs ne m'avaient pas prévenu que j'étais forcé de les suivre, et j'ai malheureusement malmené l'un d'entre eux. Mais je vous assure que je suis de bonne volonté quand on consent à m'expliquer les choses »

descriptionCollier brisé [Autone] EmptyRe: Collier brisé [Autone]

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« Je n’ai pas terminé ma lettre. Quel est l’empressement? Je ne crois pas que terminer ma phrase va mettre fin au monde tel qu’on le connait, me trompé-je, capitaine? »

Elle releva la tête de son air nonchalant, un sourcil se levait inconsciemment au-dessus de l’autre. L’officier grommela un peu, mais elle avait raison. Cette affaire pouvait attendre une quinzaine de minutes. Autone sourit, légèrement et presque moqueuse, puis se repencha sur sa lettre. Quelques temps plus tard elle posa sa plume et se leva. Elle n’était pas habillée pour marcher les rues. Sa robe était trop longue, mais au moins, sa couleur ne pouvait être ternie. Le rossignol attrapa sa cape, qui ne lui servait vraiment qu’au confort et sa ceinture. « Je suis prête. » Derrière sa porte, un autre garde attendait. On la mena jusqu’à un poste de garde situé aux embarcadères de la ville.

Elle entra et retira sa cape, la posa sur le dossier de la chaise où elle s’assied ensuite. Elle remarqua la chevelure blanche, qui lui fit penser aussitôt à Aldaron. Cela la fit sourire, une expression qui s’éteint aussi vite qu’elle était apparue. Le capitaine se mit à articuler sa plainte, elle fronça les sourcils. Celui là parlait comme si elle était déjà au courant de tout ce qui se passait. C’est lorsqu’elle comprit ce dont il s’agissait qu’elle pâlit. Elle le laissa parler un moment sans vraiment écouter. Autone tenta de rester concentrée, elle jeta un regard au capitaine qui signifiait qu’elle aurait voulu connaître les détails avant de partir.

« Malheureusement on ne m’a pas informé des détails du conflit avant mon arrivée. » Elle jeta un regard bref au garde qui l’avait escorté. « Vous allez devoir recommencer et m’expliquer calmement. Capitaine, vous avez de l’encre et du papier, n’est-ce pas? »
Elle se mit à noter la plainte alors que marin le lui expliquait. Elle perdait le fil par moment. Entre temps elle remarqua que l’accusé l’observait, croisa son regard de manière sérieuse pour l’en dissuader. Elle avait l’habitude de confronter les regards pour plusieurs raisons. D’abord cette vie dans Gloria, puis cette satanée coure Aldarienne aux nobles qui ne savaient pas se mêler de leurs propres vies.

Cinq esclaves. Elle aurait voulu aller en son sens et le défendre, mais il ne s’aidait vraiment pas. Un, deux, encore elle aurait pu l’aider. Cinq? Il y avait encore espoir qu’il soit riche.

Elle fut surprise lorsque sa voix prononça honnêtement ses gestes. La petite conseillère se retint de sourire. Elle aurait tant voulu condamner l’esclavagiste et récompenser le vampire. Elle ne put retenir son sourire amusé, malgré sa tête qui faisait signe de négation, lorsqu’il parla de ses gardes. Elle parvint tout de même à se retenir de rire. « Je suis conseillère du Bourgmestre. Mon nom est Autone Falkire.
À quel montant auriez-vous vendu ces personnes? »


Elle nota le nombre de pièce d’or sur son parchemin et soupira. Il s’agissait presque de la totalité de sa fortune.

« La cité vous compensera une partie des profits perdus. Monsieur restera détenu au poste jusqu’à ce qu’il trouve un moyen de repayer sa dette. » Elle se retourna vers le vampire à la chevelure argentée. « Si vous avez des proches, dans la cité, qui puissent vous aider à payer, nous irons les chercher pour vous. À moins que vous ayez 1250 pièces d’or sur vous. »
Un garde lui emmena une bourse bien garnie, qu’elle offrit au plaignant.

« Une dernière chose. Je ne peux pas autoriser une chasse à l’homme dans la cité libre. Cela pourrait effrayer et mettre en danger tous les citoyens de Caladon. Je vous invite donc à signer…Un contrat nous promettant de ne pas poursuivre les Graärh libérés. Sans quoi nous nous permettons de vous refuser le reste du remboursement. »

Elle sourit, mais cela semblait peu sincère. Elle écrit deux contrats identiques de manière rapide et les fit signer au plaignant. « Merci à vous, vous pouvez quitter. »

Ce marin était moins que satisfait, c’était certain. Mais elle avait fait plus de sacrifices que ce qu’il ne le méritait. Deux gardes dirigèrent Achroma vers la cellule unique du poste. Autone leur demanda de quitter pour s’entretenir avec l’accusé. Ils hésitèrent, appuyant sur la sécurité de la dame.

« L’homme n’est pas agressif et il est derrière les barreaux. Je peux tout à fait me défendre si le besoin se présente, merci pour votre inquiétude. »

Lorsque les gardes sortirent, restant à la porte en cas de problème, elle daigna s’emmener une chaise et s’asseoir. Et là, la façade tombait comme un mur qui tonitruait dans sa chute.

« S’il s’agissait d’un seul Graärh, j’aurais payé sans problèmes pour votre libération. Et j’achèterais tous les Graärh de cet archipel pour les affranchir si j’en avait l’or. Mais j’ai une famille à nourrir…

Cinq…vous êtes ambitieux. »


La petite conseillère soupira, elle aurait préféré faire le contraire, détestait obéir aux lois injustes. Elle aurait voulu qu’on ne la mêle pas à des cas pareils. Quelqu’un d’autre aurait pu faire ce travail à sa place et elle l’aurait demandé, si on l’avait prévenue. Elle se concentrait à ne pas laisser sa tête divaguer dans des souvenirs d’horreur. Le tintement des pièces, elle l’entendait sonner les heures de son dégoût.

« J’aimerais utiliser mon poids politique pour faire abolir l’esclavage, au moins dans cette ville. Je ne sais pas si qui que ce soit me suivra. »

Et elle ne devait sa victoire électorale qu’à Aldaron qui l’avait fortement pistonné. Elle ne savait pas si elle pouvait faire cela, mais elle était certaine de ne pouvoir faire autrement.

descriptionCollier brisé [Autone] EmptyRe: Collier brisé [Autone]

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L’attitude de cette femme l’amusait mais il y avait toujours chez elle quelque chose qu’il ne parvenait pas à circonvenir correctement, un petit quelque chose sur lequel il ne parvenait pas à mettre de nom. Et ça attisait sa curiosité plus que de rigueur, le cuisant du besoin d’effacer ce trouble, le frustrant et le vexant que quoi que ce soit puisse ainsi lui glisser entre les doigts comme une anguille. Intérieurement, dans l’intimité de ses pensées, il caressait l’idée de l’ouvrir couche par couche pour regarder en elle ce qui pouvait bien l’étriller à ce point. Il pouvait presque sentir ses doigts fourmiller de l’envie de décoller cette peau délicate pour vérifier si la réponse ne se trouvait pas en-dessous… mais les humains étaient des créatures fragiles non ? Il n’était pas curieux au point de vouloir lui faire du mal. Elle ne lui en avait pas donné raison. Tout à cette controverse, le vampire avait fini par revenir la fixer, savourant le dilemme qui lui venait comme il aurait savouré un met, avec beaucoup de sérieux, et presque autant de satisfaction. En vérité, si, peut-être aurait-il pu le faire, même si elle n’avait rien d’une ennemie… mais il restait qu’il avait besoin de fouiller la ville à la recherche de sa famille, et probablement d’autres esclaves Graarh, et s’il lui faisait du mal, il pouvait faire une croix sur tout ses beaux projets. Et ça, c’était strictement hors de question. Alors mieux valait coopérer. Voilà exactement pourquoi il s’était finalement décidé à prendre la parole. Rester sage, faire semblant, se contenter de voguer avec le flot et d’en tirer partie au bon moment. Nier ne lui aurait rien apporté, il avait été pris la main dans le sac, et de toute façon, il n’avait tout simplement pas envie de le faire.

Plutôt que de la braquer, mieux valait s’en faire une alliée autant que possible, dans cette situation. Se fendant d’un léger sourire un peu gauche, il haussa simplement des épaules en la voyant si amusée par ses déboires avec la garde, en signe de dérision. La suite, pourtant, n’avait rien d’amusant, à aucun endroit. Refroidit, il toisa le plaignant du coin de l’œil, le sentant frémir légèrement tout en tentant de se murer dans son ire pour ne pas perdre la face. Ah, alors malgré les airs de cette ville, les vieilles craintes restaient tout de même, ancrées comme de vieilles souches, par leurs racines décharnées, vaille que vaille. Qu’il craigne donc. Si seulement ça pouvait lui passer l’envie de mettre un collier à une créature libre ! « Pas sur moi, je crains que non » Il n’avait pas envie d’avouer qu’il s’agissait là d’une fortune exorbitante pour lui, mais surtout, cela l’irritait davantage encore à l’égard de ce rebut d’humanité. S’engraisser sur le dos d’esclaves était pathétique, lamentable. L’envie lui tordait les tripes de récupérer un de ces fameux colliers de servitude pour le lui fusionner au cou et le balancer avec une lourde pierre au fond de la baie. Est-ce qu’il aimerait ces horreurs à ce moment ? Cependant, outre cette hargne sous-jacente, son être se cabra sous l’opportunité qu’on lui donnait. Une opportunité en or massif ! Cette conseillère devait connaître pratiquement tous les individus notables de la cité, et si sa famille se trouvait ici, aucun doute qu’ils étaient plus que notables. Elle allait peut-être être son ticket pour des retrouvailles rapides. Se forçant au calme, il conserva le silence et se contenta de jouer les prisonniers dociles sur l’instant, jaugeant le moment où il pourrait intervenir. Il viendrait forcément.

L’autre quitta les lieux avec force imprécations étouffées, et Ivanyr le suivit un moment, dénué de toute expression, avant de se lever bien gentiment pour être conduit en cellule. S’étirant lentement, il fit le tour de cette cage avec une nonchalance affectée, et consentit, après une poignée de minutes, à reposer les yeux sur la jeune femme. Elle semblait prêtre à s’exprimer, il ne fit rien pour la couper et l’écouta jusqu’au bout sans rien dire, impavide face à elle. Au début, il pensa déverser sur elle la mauvaise humeur que l’esclavagiste lui avait causée, mais elle semblait déjà si frêle et fragile qu’il n’y vit aucun bénéfice. Non seulement elle ne lui apporterait pas la satisfaction de se rebiffer correctement, mais en plus, elle était, semblait-il, du même avis que lui, au moins sur le fond. Ou bien était-ce la forme ? Et puis, en continuant de l’observer fixement, intensément, comme si ses prunelles allaient soudain prendre feu, il comprit ce qui le perturbait depuis le début. Non… à bien y regarder… il avait sans doute la direction générale de ce qui le toquait, mais pas le fond. Pas encore, sans doute. S’obligeant à adoucir son expression, il la couva un instant de plus avant d’enfin rompre le silence tombé par son refus de conversation. « Avez-vous déjà été vendue, mademoiselle conseillère ? Mademoiselle… Falkire, c’est cela ? » Il pencha la tête « C’est Elanéen comme nom, n’est-ce pas ? Pourtant vous n’avez pas l’accent d’Elena la Robuste, je n’arrive pas à le resituer… » Soit elle avait pris un faux nom, soit elle était mariée à un homme d’Elena. « Mais je digresse, vous n’avez peut-être pas envie de faire connaissance » Lui aussi s’installa, croisant ses longues jambes avec la dignité naturelle d’un prince, et posa un coude sur sa jambe pour soutenir son menton d’un poing… comme un roturier.

Son regard pétilla d’amusement, puis se fit glacé alors qu’il repensait à ce qu’elle venait de lui dire. Son malaise face au sujet abordé était palpable, et en même temps, il ne l’avait pas forcée, c’était elle qui prenait sur elle de lui en parler. Il n’avait pas de merci à avoir dans ce cas-là. « Je ne pense pas qu’acheter tous les Graarh de l’archipel soit vraiment la panacée au problème. Cela ne ferait qu’encourager le commerce, puisque des imbéciles aux cœurs tendres sont prêts à se saigner aux quatre veines pour les libérer. » Le ton était calme, docte, pragmatique, observateur malgré le dégoût qui brillait dans ses yeux. Un soupire quitta ses lèvres. « Et en même temps, j’ai sans doute été un peu impulsif. Je ne suis pas certain que ma solution soit la bonne non plus. Peut-être faudrait-il décapiter tous les esclavagistes… ou bien autre chose encore. Je suppose que le premier pas serait déjà une prise de conscience générale qu’il est lamentable de réduire ainsi un être tout à fait semblable à nous autres, qui a autant droit à la dignité et la liberté que n’importe qui … » Un instant, les orbes céladons furent rendus vitreuses par la rage, avant qu’il ne déglutisse et se reprenne « Belle prestation, vraiment… de quoi est-ce qu’on a l’air à leurs yeux ? Nouveaux venus sur cet archipel, et l’une de nos premières actions s’avère voler l’un des droits les plus inhérents à toute créature sentiente ? » Le cynisme saturait sa voix, et il s’en rendit rapidement compte. « Peut-être que la solution serait politique oui… un outil pour se faire entendre de la masse… » De nouveau, il haussa les épaules, se sentant soudainement drainé de sa vivacité et de sa juste réprobation. Une immense fatigue manqua le faire vaciller.

* C’est toujours pareil, ça finit immanquablement… pareil…. *

Fermant un bref instant les yeux, le vampire laissa un silence pesant retomber entre eux. Il avait besoin de retrouver son maintien, s’il voulait éviter de se faire mal, et à elle avec lui. Tout cela n’était pas simplement outrageant et pathétique, c’était également à ses yeux une preuve de l’anéantissement durable de toutes les valeurs respectables de leurs peuples. D’infâmes questions commençaient à lui saturer lentement l’esprit, qu’il peinait à repousser, à garder à distance pour ne pas être noyé sous leur poids et leur miasme. Finalement, l’une d’entre elles parvint tout de même à franchir la barrière de ses lèvres. « Je me demande… ont-ils l’impression de savourer davantage leur propre liberté en la refusant à d’autres ? Est-ce un tel plaisir pervers, ou bien, allez savoir, qu’ils se soient dédiés jusqu’à en perdre toute forme de raisonnement éthique et objectif à l’attrait de l’or, pour combler le gouffre infranchissable de leur cœur ? Ils vont être déçus si c’est le cas » Il rouvrit les yeux, l’observa de nouveau, pensivement. « Vous, vous n’avez pas oublié le goût des larmes… est-ce que je me trompe ? »

descriptionCollier brisé [Autone] EmptyRe: Collier brisé [Autone]

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Elle se leva d’un coup brusque, elle aurait renversé cette chaise si elle l’avait pu. Mais elle aurait eu l’air ridicule à tenter de le faire, tant elle était faible. Et sa légèreté l’empêchait de l’envoyer vaciller au sol dans son geste. Non, lorsque Autone se levait, son corps, son visage, ses yeux montraient sa colère vive, mais ses gestes étaient silencieux et discrets.

Pâle comme l’ivoire de ses défenses, elle s’éloigna pour lui tourner le dos. Autone s’approcha de son bureau et posa les doigts sur le papier, caressa de son pouce et de son index la texture. Une nausée lui venait au nez, elle sera les dents et se concentrait sur sa respiration. Sa main se posa sur sa plume, elle caressait, entre son index et son majeur, l’extrémité douce de l’objet. N’étais-ce pas entièrement sa faute, de toutes manières? N’avait-elle rien à se plaindre? Elle qui s’était enfuie pour éviter un mariage, elle qui était restée, malgré sa liberté. Elle aurait pu faire autre chose, de moins payant, de moins confortable. Oublier cette idée de luxe que de s’éduquer. Elle l’avait fait en pensant aux livres, au papier, aux connaissances.
Mais la première fois, ça n’avait rien à voir avec le papier, non?

« Madame Falkire. Je porte le nom de mon mari. »

Prononça-t-elle, sans lui faire face. Puis elle se retourna, et s’avança vers la cellule, restant à une certaine distance. Comme pour protéger les blessures qu’il n’avait pas déjà ouvertes, béantes en elle. Mais ce mage semblait pouvoir faire cela sans épées et sans poignard.
« J’avais douze ans. Et j’ai été chanceuse, comparée à eux. Ça n’a rien à voir avec l’esclavage que les Gräarh subissent. C’est un marché de l’innocence. Les larmes m’empêchaient de voir leur visage. Et parfois, la nuit, confuse, j’imaginais leurs corps comme des poignards. Le mien sur un tremblement de terre qui n’allait jamais cesser. »

Elle secoua la tête, un sourire amer aux lèvres en le regardant. Il allait probablement être dégoûté de sa réponse. Elle n’allait pas le laisser demander, dans cette attitude de domination de la situation. Pourquoi la dénigrait-il quand elle tentait de l’aider?

« Ce qui est incompréhensible est que les humains n’ont jamais accepté l’esclavage avant notre arrivée sur l’archipel. Ce sont les vampires qui faisaient cela. Et c’est sur ce point que je veux insister. Si les vampires prenaient esclaves humains, avant, les hommes et femmes de Caladon peuvent reconnaître qu’il s’agit d’une abomination. Et s’ils reconnaissent cela, s’ils reconnaissent que la liberté est une chose aussi fondamentale et qu’après tout, ils se battent pour la leur. Si l’esclavagisme est interdit à Caladon, d’autres citées pourront prendre exemple sur la revenante. »

Elle baissa les yeux un moment. Sa posture restait droite, comme elle ne laissait personne lui faire courber l’échine.  « Et j’ai encore plusieurs contacts à Selenia qui m’écouteront. »

Bien qu’elle s’en était fait ennemie en devenant conseillère pour Caladon, elle se battait justement pour que les citées libres ne soient pas vues comme des rebelles appartenant au territoire des Kohan, mais un royaume à part entière.

« L’esclavage est enraciné dans le profit, avant tout. Je pense que…si les humains n’avaient pas eu recours aux esclaves avant aujourd’hui, c’est parce qu’ils n’en avaient pas besoin. Mais après toutes les guerres… Je ne sais combien de fois j’ai vu des reconstructions. Ils croient peut-être que nous ne pouvons le faire nous-même. Il faut donc leur montrer qu’ils n’ont pas besoin d’esclaves. »  


Pour ce qui était du marché qu’elle avait subi, ça n’arrêterait jamais.

« Vous avez une manière provoquante de faire connaissance. Si c’est ce que vous vouliez.

À moins que vous soyez politicien, je ne crois pas que vous étaler mes plans vous sera utile. Pourquoi tentez vous de me déstabiliser quand je tente de vous aider? »

descriptionCollier brisé [Autone] EmptyRe: Collier brisé [Autone]

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La voir soudainement se relever le fit ciller plusieurs fois, et il lui décocha un regard plein d’une candide innocence, mirant ce petit corps frémissant d’indignation comme s’il s’agissait du premier exemple du genre qu’il croisait. Ce qui était peu, ou prou, le cas, d’ailleurs. Il se pencha en avant, très légèrement, ouvrant davantage ses yeux de gemme pour la regarder faire, admirant la retenue et se demandant tout à la fois si elle allait exploser, ou hurler, ou se calmer, incapable de placer son avis sur l’un ou sur l’autre. Elle était très pâle, d’ailleurs, presque autant qu’un vampire, pourtant son petit cœur battait… il battait si fort sur l’instant qu’il avait l’impression de sentir la vibration à-même sa peau, le faisant frissonner. «  Oh… » Un sourire lui vint, sincère cette fois, même si toujours gauche, crocs révélés. «  D’accord, Madame alors » fit-il d’une voix légère qui adoucissait son vibrato naturel. Il se garda de poursuivre et de lui demander s’il était en vie. La tension sous-jacente lui suffisait à déduire une réponse toute faite, et il ne trouvait aucun plaisir dans l’idée de la forcer à admettre à voix haute ce qui devait déjà la tourmenter. Ça n’avait rien de drôle, et de toute façon elle poursuivait déjà sur sa lancée. Il la laissa dire, sans se défaire de son sourire, le regard brillant de plaisir, attrapant toutes les petites mimiques de son visage et de son corps, écoutant avec attention son intonation… par jeu, pour se détacher du caractère morbide du sujet sur lequel ils conversaient, il tentait de deviner d’où elle était originaire. La conclusion de sa tirade à son encontre le surpris néanmoins, et lui arracha l’ébauche d’un renâclement amusé. «  Je n’essaye pas de vous déstabiliser ! » très amusé, il ne chercha pas à dissimuler son incrédulité. «  Pourquoi pensez-vous cela ? C’est vous qui m’avait parlé de l’esclavage, vous n’étiez pas obligée… comme vous n’êtes pas tenue de m’aider, Madame Falkire »

Il secoua légèrement la tête, faisant ondoyer ses mèches platines, et reprit, avant qu’elle ne risque de se vexer de ses mots. «  Je ne vais pas refuser la main que vous me tendez, cela dit » Hésitant un instant, il se releva finalement pour approcher des barreaux, et donc de son interlocutrice. Réprimant un nouvel éclat de rire, il ne put que noter qu’il allait devoir se démancher le cou, ou se mettre à genoux, pour lui parler en face à face. Elle était réellement beaucoup plus petite que lui. Pas une nordique donc, ça c’était certain. «  Vous n’étiez pas forcée de me raconter votre passé si vous ne le vouliez pas… même si j’avais bien deviné. Vous auriez pu mentir, je n’aurais rien vu, ou alors je n’aurais rien dit. Ça vous tient donc beaucoup à cœur, ou bien est-ce que je fais fausse route ? » De joueur, son ton se fit lentement plus doux, plus sérieux «  On ne peut pas comparer les deux situations, elles sont toutes les deux condamnables chacune à leur manière. Elles sont toutes les deux révoltantes… » Penchant la tête, le vampire l’observa un instant sans rien dire. Il était incapable de se mettre à sa place, incapable d’essayer de ressentir ce qu’elle devait ressentir. Tout ce qu’il savait, comprenait, était intellectuel. Mais ça ne l’empêchait pas de la trouver dure avec elle-même. Avait-elle peur de s’adjuger le statut de victime à la hauteur des autres ? Et si c’était le cas, pourquoi donc ? Qu’est-ce qui pouvait bien la bloquer, l’asphyxier. «  Je suis curieux de savoir pourquoi vous pensez que votre sort à été moins terrible que le leur. Je n’arrive pas à en comprendre la logique. En revanche, je pense savoir une chose : les humains ont tendance à ne pas adjuger les mêmes états aux autres races » Après un instant de réflexion, il ajouta «  A bien y réfléchir, aucune race ne fait vraiment l’effort de considérer les autres comme eux-mêmes… C’est inacceptable quand c’est eux, mais dès qu’il s’agit d’un allogène, j’ai l’impression que cela devient acceptable, ou que, quand ça ne l’est pas, c’est uniquement par intérêt »

Le coin de ses lèvres s’incurva sur une ébauche d’expression vénéneuse, qui disparue bien vite, et à la place, il soupira, et se détourna à son tour. «  Mais je suis d’accord, une interdiction serait déjà un bon pas en avant. Vous ne devriez pas douter de vous, d’ailleurs regardez, il suffit que je vous étrille un peu pour que les hésitations disparaissent. Vous avez l’air prête à mener une campagne à vous toute seule » Retournant s’asseoir, il s’adossa lourdement, épaules sensiblement en avant, bien loin de vouloir impressionner qui que ce soit. Il resta muet un moment, pondérant ses propos, dans une joyeuse cacophonie interne, passant de l'un à l'autre, puis revenant sur le premier, pour finalement les laisser de coté, en aborder un autre, revenir, et… «  Vous pensez donc que les humains ont accepté l'esclavage parce qu'ils ne croient plus en eux-même ? » Il poussait volontairement l'effet, et déformait légèrement ses paroles «  Je ne suis pas certain que ce soit vraiment leur rendre service que d'en arriver à une telle explication. Rien ne justifie de tels actes, encore moins si c'est pour se sentir mieux… Regardez, je n'ai que quatre années de souvenirs, ce n'est pas pour ça que je vais aller voler la mémoire des autres ! » Non, il se contentait de les faire parfois un peu tourner en bourrique. Bon, hm, elle n'avait pas à le savoir ça. De toute façon, ce qu'il faisait était bénin, en comparaison, et nul n'était parfait. Mais il y avait une différence entre l'imperfection et le manquement. On pouvait accepter le premier, quand le second n'était pas tolérable. «  Je ne sais pas la raison qui les pousse à agir ainsi, je n'ai fais qu'ébaucher, mais en vérité, mes hypothèses sont aussi oiseuses que la question est complexe… et je ne suis pas certain que savoir pourquoi aide à la résolution du problème. Je crois avoir connu quelqu'un d'excessivement mauvais, autrefois, dont je connaissais les failles, et pourtant exploiter son passé n'a servit à rien »

Perplexe, il secoua légèrement la tête, et se donna un instant le temps du repos avant de se décider à tenter d'alléger un tant soit peu l'atmosphère. «  Pour en revenir à votre envie de m'aider, vous savez, ces barreaux ne sont pas vraiment un problème... »

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Elle croisa les bras, entre ouvrit les lèvres en s’apprêtant à dire que si son aide était si optionnelle qu’il le signifiait, elle pourrait alors partir. Pourquoi s’obstiner à lui parler quand il ne faisait que tirer sur les cordes sensibles comme un enfant qui ne savait pas quelles notes un instrument pouvait produire? Elle lui avait parlé de son opinion concernant l’esclavage, pas de détails personnels. Puis avec question indiscrète venait réponse indiscrète. C’était une tentative de domination que de poser une question à laquelle l’autre ne peut pas répondre, de montrer sa perspicacité et de l’intimider par la même occasion. C’est pour cela qu’elle répondait.

La petite veuve poussa un soupir, décroisant les bras, lorsqu’il lui dit qu’il ne refuserait pas son aide. Elle se sentit moins insultée et le laissa parler en restant de marbre.

Elle avait été chanceuse, c’était un fait. « Ça n’a rien à voir avec une distance émotionnelle dû à la différence raciale. J’ai survécu parce que je savais qu’il fallait se taire, être discrète, ne pas se plaindre. Je savais qu’en ayant l’air déjà résigné, plutôt qu’en me battant pour fuir, je ne ferais pas long. Là où les Graärh appartiennent entièrement à leurs maîtres, du moins selon eux, et où leur servitude est totale, moi je ne servais qu’à une chose. Alors que les Graärh doivent faire tout ce qu’on leur ordonne, que leurs maîtres ont droit de vie ou de mort sur eux. Moi, je ne devais pas être abimée. Ma survie m’était assurée. Après quelques mois, j’étais libre. C’est là où j’ai été chanceuse. »  

Elle soupira à nouveau et marqua une pause.

« Je pourrais vous laisser sortir sans appeler les gardes. Les laisser tenter de vous rattraper en vain. Et partir comme un criminel, dire adieu à une vie publique. Si cela ne vous dérange pas, je ne suis pas dans votre chemin. »


Un sourire s’esquissa sur le coin de ses lèvres.

« Vous avez raison, cela me tient à cœur. C’est pour cela que je vous ai parlé de l’esclavage. Je voulais dire que je n’étais pas en désaccord avec vos actes, que j’étais prête à trouver un moyen de vous sortir d’ici parce que je ne vais pas mettre quelqu’un au cachot pour avoir libéré des esclaves. »

Peut-être était-ce pour sa propre conscience égoïste, pour ses principes. Quoi qu’il en soit, elle n’allait pas laisser la situation ainsi. « À profil haut, il vous serait plus facile de libérer d’autres Graärh. Cependant, est-ce quelque chose que vous désirez faire? Ou juste une impulsion qui ne se reproduira pas. »  

Elle s’approcha d’avantage des barreaux, pour faire face au vampire inconnu, le regarder dans les yeux.
« J’ai vu plus d’un manipulateur. Au point où je reconnais leurs cycles, leurs techniques, leurs mots qui reviennent comme un motif. Ils disent tous la même chose, avec des mots à peine différents.

Vous auriez su, si je vous avais menti. Parce que votre question se répondait par elle-même. Vous m’avez suggéré sans me le dire qu’il fallait que je fasse quelque chose même si je ne croyais pas être capable. »  


Et d’une seconde à l’autre, cela avait changé. Autone était instable, elle passait du noir au blanc sans réfléchir. Mais elle n’avait pas l’habitude de laisser d’autres mener ses actions.


« Si vous voyez une atrocité que vous ne pouvez tolérer et que vous souhaitez y mettre fin, je peux trouver une alliance dans votre maniement des mots. Et si vous souhaitez cette alliance, je peux tenter de parler à une personne qui possède suffisamment d’or pour vous libérer. Mais cela ne dépend que de vous. »  

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Il avait, en vérité, parfaitement saisit qu'il devait rester entre ces quatre murs bien sagement jusqu'à ce que l'on ait réglé la question de sa punition. Bien sûr, il n'était pas obtus après tout, cela tombait sous l'évidence. Mais il jouait après tout les enfants en pleine découverte, se faisant passer pour un peu moins bien dégrossis qu'il n'était réellement, alors il n'aurait aucun scrupule à plaider qu'il ne savait pas devoir rester là-dedans si l'envie lui prenait de sortir. D'ailleurs, c'était exactement ce qu'il comptait faire, juste pour s'amuser et les pousser un peu. Souriant, il glissa entre deux reprises de souffle de la jeune femme. «  En même temps, même si vous étiez en travers de mon chemin, si je voulais partir maintenant, ça ne changerait rien pour moi. Dans le meilleur des cas je vous ignore, dans le pire vous vous en mordez les doigts. Cette ville me considère déjà comme un criminel, non ?  » Néanmoins, ils avaient tous deux conscience que pour l'instant il n'avait pas bougé. De son point de vue à lui, c'était parce qu'il ne s'ennuyait pas et ne se sentait pas menacé par sa restriction. Elle n'entamait pas réellement sa liberté puisqu'il était volontairement venu là, en se laissant faire. De plus, il fallait avouer que cette petite humaine était intéressante. Quelconque de prime abord, elle avait néanmoins un répondant intéressant et il sentait en elle ces faiblesses sur lesquelles il avait mit le doigt mais qui demandaient néanmoins bien davantage d'observation attentive. Il se le représentait comme un maillage complexe dont on circonviendrait rapidement la globalité, mais dont chaque maillon s'avérerait intriguant en lui-même. Et il tirait sur l'un, puis sur l'autre, avec une réelle fascination. Au sourire qu'elle esquissa, le sien s'effrita néanmoins, comme un écho inversé, alors qu'il la mirait davantage, ses yeux céladon brillant sourdement dans la luminosité tamisée des lieux. En un sens, il aimait l'entendre dire qu'elle était de son côté. Pas parce que cela le rassurait sur ses propres convictions, il n'avait besoin de personne pour lui tenir le flambeau, et il n'avait besoin de personne pour lui dire qu'il avait raison. Parce qu'il était convaincu d'avoir raison, tout simplement. S'il aimait l'entendre dire qu'elle était de son côté, c'était uniquement parce qu'il trouvait la démarche particulièrement gracieuse, outre le fait que cela signifiait qu'il pouvait potentiellement compter sur une aide quelconque de sa part pour ses objectifs.

Et ça, quand on ne connaissait personne, ça n'avait pas de prix.

Serrant les yeux comme un chat paresseux, il s'accordant un moment de silence avant d'énoncer ses pensées. «  Mettre quelqu'un au cachot pour avoir défendu la liberté d'autrui. Ironique, non ?  » La légère note éraillée et acide s'estompa bien vite «  Je dois avouer que je n'ai pas un avis bien arrêté sur cette ville. On m'a dit qu'il s'agissait d'un grand centre de commerce et de passage, mais je ne sais pas si j'y trouverais ce que je recherche. Et si je ne trouve pas ce que je recherche alors y être considéré comme un criminel m'indiffère  » Le regard qu'il portait sur elle restait franc et parfaitement clair. Si jamais il n'avait aucune raison de s'attacher cette ville, le vampire ne voyait pas du tout pourquoi il devrait se complaire à se montrer sous un autre jour que ce qu'il était. Mais tout partait de ce pivot. Certes, il pouvait tout à fait continuer à simplement libérer les Graarh de force dans Caladon, au risque d'avoir encore maille à partir avec la garde et de façon bien plus violente, et en même temps, si sa famille se trouvait ici, alors il avait tout intérêt à se donner une bonne image pour ne pas les mettre en danger. Hors il fallait qu'il s'assure de cette situation avant toute autre chose. Parfaitement conscient de se trouver dans une situation plus précaire que son interlocutrice l'imaginait et n'ayant pas du tout envie de se révéler il finit par reprendre. «  Dans l'hypothèse où cette ville serait bien ce que je cherche, je serais parfaitement satisfait de vous aider… Néanmoins, avant de vous endetter auprès de vos contacts, pourquoi ne pas essayer de demander aux miens ? » Il s'agissait là d'un énorme coup de bluff. S'il se trompait et que les autres ne se trouvaient pas à Caladon, alors il aurait l'air très bête. Mais c'était un moindre risque à prendre comparé aux revenus si jamais il avait tiré au sort la bonne ville. Il fallait absolument qu'ils soient ici, cela serait la meilleure des solutions, une aubaine pour lui. Tout à ses pensées, il jaugea la petite femme en se demandant si elle allait accepter sa suggestion, puis se rabroua immédiatement. Pourquoi ne le ferait-elle pas ? C'était tout aussi confortable pour elle. Demander des renseignements sur de potentiels habitants de Caladon serait moins gourmand en faveurs que de demander à faire libérer arbitrairement un criminel.

«  Cymoril Veanya. Cybele Paulus. Elric Dorne » énonçât-t-il sans une hésitation de plus. «  Cymoril est ma sœur. Cybele et Elric des amis proches… et puisque, je suppose, il serait temps de me rappeler à mes manières, on m'appelle Ivanyr Veanya » Cymoril reconnaîtrait forcément le nom qu'elle lui avait donné. Se fendant d'un sourire à l'apparence flegmatique, l'amnésique glissa avec taquinerie. «  Je suppose que je vais rester sagement là-dedans pendant ce temps histoire que vous sachiez où me trouver. À moins que vous ne souhaitiez revenir me voir le temps que l'on retrouve mes compagnons ? Je dois avouer que la perspective de parler aux barreaux n'est guère intéressante… Je déplorerais que notre conversation se termine si vite » Le ton caressant avait beau être joueur, il ne dépareillait pourtant pas de franchise. «  Vous avez des opinions fort intéressantes, Madame Falkire et j'adorerais les voir rouées davantage… autant que connaître ma… partenaire dans le crime ? » Penchant légèrement la tête, il souffla avec cette tranquille curiosité «  Vous étiez utilisée comme un outil… on vous gardait en vie tout en vous déniant votre humanité réelle. Exactement comme on leur déni leur propre intégrité. Là où leurs chaînes peuvent ne jamais quitter leurs corps, les vôtres n'ont disparues que physiquement et peinent à le faire mentalement… où bien suis-je encore une fois dans l'erreur ? La marque est tout aussi indélébile. Pour moi la seule différence… c'est que j'ai encore moins de chance de combattre ce que vous avez subi que ce qu'eux sont contraints d'endurer » Pinçant légèrement les lèvres, il finit par conclure, comme il poserait une pierre «  Là où j'aime manier les mots, vous, vous savez réellement ce que vous avez vécu. C'est quelque chose que je ne peux pas imiter. J'espère sincèrement que vous pourrez trouver les miens… vous et moi ? Je pense que nous pourrions faire d'intéressants progrès ensembles. J'adore la perspective…. »

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Elle l’observa de bas en haut alors qu’il lui répondait dans son arrogance presque prudente. Son sourcil gauche se levait, bien que ce geste fût inconscient. Il lui vint à l’esprit un moment de savoir qui se tenait devant elle. Soit cette personne possédait un égocentrisme désagréable, soit il était en effet une personne puissante qui connaissait sa force. Mage, probablement, considérant l’absence d’armes sur lui alors qu’il avait donné du fil à retordre aux gardes. Il n’allait pas non plus détruire ses barreaux avec ses mains nues, comme il semblait prétendre pouvoir s’en débarrasser facilement. Dans tous les cas, l’humilité n’était pas sa plus grande vertu.

Puis il parla de quelqu’un qui pourrait possiblement payer sa dette. La veuve des rivières s’empressa d’aller jusqu'à son bureau pour prendre sa plume et tira un papier vers son côté du bureau. Elle attendit qu’il prononce les noms avant de les écrire. Puisqu’il était entre des barreaux, il pouvait toujours la voir même lorsqu’elle s’éloignait. Puis elle revint avec le papier, marqué d’encre, dans les mains.

Elle s’assied, le regardant dans les yeux alors qu’il s’adressait à elle. Puis elle sourit, satisfaite de cette dernière note.

« Il y a des choses que je désire encore apprendre et pouvoir retracer quelqu’un rapidement est l’une de ces choses. Je connais quelqu’un dans cette ville qui, par le passé, m’a assuré pouvoir retracer n’importe qui avec seulement un nom. »


Elle croisa et jambe et posa ses yeux sur les noms tracés entre ses doigts. Elle pencha la tête sur le côté et murmura  « Ivanyr Veanya… » Comme pour se souvenir.  « Cette personne est, malheureusement, très occupée. Je pourrais certainement jouer ici et là avec quelques contacts et essayer de faire cela moi-même. Mais je préfère faire affaire avec ceux en qui j’ai confiance. »

Emprunter des espions pour faire un travail qu’elle pouvait faire elle-même, alors que ceux là pouvaient s’acheter facilement avec quelques pièces. Elle ne savait pas jusqu’à quel point elle pouvait avoir confiance en Aldaron, mais certainement plus que ses autres collègues, dont elle s’était peu rapprochée.

« D’une manière ou d’une autre, vous vous retrouverez ici le temps que je trouve ces personnes. Et si je comprends bien, vous ne pouvez m’indiquer dans quelle région de la ville ils habitent où se tiennent. Cela aurait été bien plus rapide. »  


Elle avança le torse, s’appuyant les coudes sur ses genoux, et le visage dans ses mains, un sourire espiègle aux lèvres et ce sourcil qui se levait toujours de sa volonté propre.

« Je me demande ce que vous voudriez tant savoir sur votre, partenaire de crime, comme il vous plait à me décrire. Vous en savez plus sur moi déjà que beaucoup d’autres. Et plus que je n’en sais sur vous. Cependant, si vous avez oublié, il serait cruel de vous demander d’où vous venez. »

Alors que lui avait insisté pour savoir d’où venait ce nom Elenien.  « Peut-être une fois en dehors de ces barreaux, ce sera moins dangereux pour moi de vous parler de famille et de métier. Cependant pour l’instant, je ne sais rien de vous. Si cela vous amuse, je peux prendre un peu de temps pour vous accompagner. Mais donnez-moi une garantie. Dites-moi quelque chose sur vous et en échange, posez-moi une question. »
En réalité, cela l’amusait. Il y avait longtemps qu’elle n’avait pas été un peu spirituelle et espiègle.

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Le perfectionnisme serait-il de ses qualités dissimulées en défauts ? Ou à tout le moins savait-elle comment s'entourer, une meilleure capacité chez un dirigeant que nombre de vertus que l'on acclamait si aisément. Et cela pouvait donc lui servir, dans l'immédiat, puisqu'elle proposait de mettre cet entourage à la recherche des siens. «  J'en suis fort aise » Il n'allait certes pas cracher sur plus de facilité dans son entreprise. Conforté dans l'idée qu'elle allait se lancer sur cette piste en premier lieu, il savoura la sensation presque physique d'être bientôt réuni avec sa famille, les individus qui lui manquaient pour se sentir parfaitement à l'aise et satisfait. Il fallait qu'il les retrouve, sinon il vivrait indéfiniment avec cette infernale sensation de manque, d'être incomplet… Elle reprenait la parole, le tirant de sa rêverie, et par pure mesquinerie, il passa, certes métaphoriquement, une griffe sur son tableau. «  Ah ? Vous n'avez aucun registre de population pour cette ville ? Enfin j'imagine, s'il fallait compter le nombre d'esclaves, vous n'en auriez pas fini » C'était gratuit et la lueur de ses yeux brûlants était à la fois mauvaise et enfantine, brillante d'un amusement revanchard. C'était de bonne guerre également. Mais elle était plus solide que cela non ? Il n'allait certainement pas la faire reculer avec si peu… du moins il espérait sincèrement car elle risquait tout autant de le décevoir que de devenir un jouet tout indiqué quand il avait envie de se dégrader. Si elle voulait se lancer dans une controverse sur l'esclavage, elle allait bien devoir montrer sa force de caractère aux autres, alors pourquoi ne pas en prendre une petite mesure dès à présent ?

Enfin, il pouvait tout aussi bien attendre d'être sorti pour cela. «  Désolé, mais si je dois rester là-dedans un moment, je vous jure d'inventer un sortilège pour localisation en temps réelle d'un individu... » Une petite minute… il n'y avait pas un sortilège qui lui permettait de faire ça ? Voilà qui était perturbant. Maintenant qu'il y pensait, si, il lui semblait bien qu'il existait un sortilège de cette trempe… ou bien est-ce qu'il confondait ? Qu'est-ce que cela pouvait être frustrant parfois d'avoir la mémoire sans dessus-dessous. Et qu'est-ce qu'elle… ah mais elle souriant ? Voilà qui était agréable. Penchant la tête, il revint à elle avec un intérêt ravivé une fois de plus. Elle savait décidément comment le garder avec elle, même involontairement. Pourtant, ce qu'elle proposait ne lui plaisait guère. Un juste retour des choses pour ses précédentes extravagances sans aucun doute. Bon joueur, il eut l'ombre d'un fin sourire matois. «  Il s'agit moins de cruauté que d'inefficacité, si vous voulez mon avis… j'avoue qu'il est étrange de vouloir demander à un amnésique des informations sur son passé. De toute évidence, je ne peux pas vraiment répondre » Ivanyr eut un geste nonchalant de la main, comme pour indiquer une certaine impuissance devant l'offre faite par son interlocutrice. Pour autant, il ne se sentait pas abattu ni contraint par celle-ci. «  Et puis, je ne vois pas l'intérêt de me comparer à quelqu'un d'autre. Je ne cherche pas à en savoir plus sur vous qu'un autre, je cherche à savoir qui sera mon alliée… tout simplement »

Il voulait savoir ses forces et ses faiblesses, sa façon de penser et de réagir, en fin de compte, tout ce qui était important dans une collaboration. S'il ne savait pas à qui travaillait avec lui, alors il était en danger. Et il détestait se sentir en danger. Ça n'avait rien d'amusant. «  Mais vous avez raison, vous ne savez rien de moi. Exactement ce que je veux effacer chez moi. C'est un marché dans les deux sens et cela me va très bien » Il croisa les bras, se redressa de toute sa taille et planta ses iris dans les siennes. Pensif, il resta une poignée de minutes silencieux avant de s'adresser à elle de nouveau. «  Je suis venu ici avec un Graarh du nom de Purnendu. C'est un guérisseur. Et un ami. Mon seul ami, en vérité. J'ai vécu un an auprès de lui sur Nyn-Tiamat. Et je dois avouer que c'est d'abord pour lui que je suis si attaché à ne pas laisser son peuple être victime des nôtres… toute considération éthique mise à part. Si jamais on lui mettait un collier au cou ? Je crois que je tuerais cette personne sur le champ... » Il eut un sourire mauvais qui dévoila ses crocs «  Et je n'en ressentirais aucune tristesse à le faire... » Il la laissa faire sienne l'information, puis, comme un enfant capricieux, décida de déséquilibrer un peu le jeu de son socle d'origine. «  J'apprécie énormément l'île. La neige est une merveille. J'ai l'impression diffuse qu'elle a bercée mon enfance, lorsque j'étais humain. Je la trouve plus agréable à l'oeil que cette ville, par exemple… et pourtant, bien que ce soit la première fois que je viens ici, je pense avoir déjà vu Caladon avant... »

Il donnait trois informations d'un coup, mais en vérité, c'était uniquement parce qu'il n'avait pas vraiment envie de lui poser de question précise. Il voulait juste la connaître. «  Pourquoi avez-vous prit votre rôle actuel ? Quels sont vos souhaits ? Avez-vous peur d'être différente ? » Il allait poursuivre lorsque ses yeux s'arrondir de surprise et qu'il sursauta brusquement. «  Oh mais je sais ! » Bon sang, évidemment, pourquoi est-ce que ça lui revenait forcément après coup ? «  Il y a un sort que je peux lancer pour vous aider à retrouver ma famille ! Cela vous donnera une idée plus précise du lieu où ils se trouvent... » Il croisa les poings sur son torse, laissa la magie le propulser, mentalement, puis après un instant, il émit un léger sifflement de satisfaction. «  Ils habitent le quartier intérieur, quelque part près d'une place… je n'arrive pas à aller plus loin malheureusement, il faudrait que je vous fasse partager la sensation si je voulais faire mieux… et je ne sais pas comment, si c'est seulement possible. Mais cela est- déjà mieux que rien » Secouant la tête, il se rendit compte qu'il avait dévié du sujet de l'instant. «  Que disiez-vous avant que je ne vous coupe la parole fort peu poliment ? » Avait-elle même eut le temps d'en placer une, en vérité ?

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Autone ne se sentit pas blessée par la remarque sur l’esclavagisme, elle garda son sourire et gloussa même un peu. Peut-être aurait-il voulu qu’elle se sente coupable d’être au conseil de cette ville qui acceptait l’esclavagisme? Elle n’en savait rien, mais c’était le genre de choses qu’elle aurait dit à un dirigeant, quelques années plus tôt.

Elle sursauta un brin en voyant le sourire acéré. Cela se vit dans le clignement de ses yeux, mais son corps resta immobile, puis elle pencha la tête sur le côté. Elle sourit, lorsqu’il parla de la neige, et resta silencieuse un moment en pensant à cette humanité à laquelle il référait au passé. Elle se souvenait d’un vampire, dans Morneflame, de la morsure de Matis, de Merithyn qui la prévenait : Si Matis se transformait, elle serait effacée de sa mémoire.

Étais-ce la raison pour laquelle on oubliait le visage d’un proche lorsque la mort nous le dérobait? La mort mange la mémoire.

Elle fixa le vide un moment en silence, puis prononça avant de rattacher son regard au sien. « La différence a une valeur fragile. Elle se brise comme le crystal sous l’instinct de survie. Mais la protéger, c’est empêcher la force de l’âme de s’éteindre. C’est survivre, après les tempêtes et les guerres. Se conformer, c’est sauver son corps pendant la crise et perdre ce qu’il y a à l’intérieur par la suite.
J’ai bien plus peur du contraire.

Je n’ai jamais perdu la mémoire, mais je ne signifiais pas vous demander des informations sur votre passé. Même si vous ne vous souvenez pas de ce qu’il y avait avant, vous savez qui vous êtes aujourd’hui. Certains se raccrochent à des choses aussi brutes qu’une émotion constante qui les anime. D’autres se définissent par ce qu’ils aiment. Le passionné, le colérique, le poète, le guerrier. On ne peut jamais vraiment retirer à une personne tout ce qu’elle est. Peu importe les morceaux qu’il vous manque, il y a des certitudes qui restent. »


Elle se redressa et réfléchit à nouveau un moment en le regardant. « Savez vous si vous avez été transformé récemment? Si votre amnésie est causée par cela ou si elle est apparue ensuite?

J’ai déjà aperçu ce sort dans un livre, il y a longtemps, mais votre description est vague. Je ne connais aucun moyen non plus de transmettre les sensations. »


Elle hésita à continuer, n’ayant pas forcément envie de vendre ses contacts aussi facilement. Mais s’il s’enfuyait, il lui glisserait entre les doigts et elle avait l’impression qu’il serait bien plus utile sans être recherché. La veuve des rivières s’approcha de la cellule, au point où les barreaux étaient tout près de son visage, pour murmurer, être certaine que les gardes aux portes ne l’entendraient pas.

« Je vais faire un caprice. Je pourrais faire aller chercher mon contact si j’ai une situation suffisamment…urgente pour le déranger. Il me faut une raison assez solide pour avoir à m’en remettre à une autorité supérieure. Si vous éclatez les barreaux et que vous fuyez, sortant du poste de garde et que vous me laissez vous rattraper…Je peux vous restreindre magiquement avec des sorts que les gardes ne connaissent pas. J’ordonnerai votre transfert dans le poste de garde central de Caladon, ce sera plus près du quartier intérieur qu’ici. Et je demanderai que le Bourgmestre vienne pour m’aider à régler ce cas. Qu’en dites-vous? »

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Voilà qui était éclairant sur la façon dont elle pensait. De toute évidence, l’humaine tenait énormément à cette notion de différence, elle semblait particulièrement sensible et délicate pour elle, sans doute personnellement plus que par simple symbolisme. L’observant avec tranquillité, il adjugea de bon cœur qu’elle n’avait pas tort, c’était une noble façon de penser… mais la question n’était pas aussi centrée qu’elle le laissait entendre, en vérité. C’était justement son expérience personnelle, quelle qu’elle soit, qui la dirigeait naturellement vers une réponse telle que celle qu’elle lui avait fournis. Voilà qui était curieux… à quel point sa propre expérience influençait-elle ses propres mots, et la façon dont il analysait une situation ? La suite néanmoins l’égaya une fois de plus. « Je n’ai guère l’intention de vous contredire, et pourtant… vous admettiez qu’il était cruel de me demander d’où je viens. C’est une information on ne peut plus factuelle et complètement dépourvue de toute forme d’interprétation psychologique réelle. Car même si je devais considérer un lieu plus qu’un autre comme ma patrie d’origine, cela resterait un lieu, concret. Néanmoins je rejoins votre point de vue, un individu ne se construit pas entièrement sur son passé… et celui-ci se tisse à chaque instant. Il suffit du temps qui passe » Avec un air pensif, il ajouta après quelques instants « Vous avez donc peur de ne pas être différente, de perdre votre unicité ? Pourtant, dans le cadre de votre poste de conseillère, votre vie n’est nullement en jeu. Vous n’êtes pas opposée à un choix éthique entre votre survie et votre unicité. Votre seule opposition, c’est le regard et l’appréciation de vos pairs et votre peuple. C’est une situation fondamentalement différente de celle d’une guerre par bien des aspects… Vivez-vous par votre titre ? Est-il nécessaire au point de vous retirer votre différence, ou bien encore êtes-vous capable de sacrifier temporairement une part de vos idées pour mieux les atteindre par la suite ? Le regard que l’on pose sur vous, quelle valeur peut-il avoir à vos yeux ? »

Ivanyr pencha la tête, mutin. « Qu’est-ce qui fait l’unicité ? L’imposition d’un moule à la masse ? Ou bien de très nombreuses personnes se découvrant des avis similaires, en toute coïncidence, qui d’années en années, formant une communauté, imposent leur idéologie par l’écrasante force du nombre ? Que cherches-t-on ensuite à blâmer en réfutant l’appartenance globale ? A quel point la différence est-elle proverbiale et à quel point sa valeur est-elle biaisée par les travers de nos races ? » Il s’englobait, lui et les vampires, dans la controverse. N’étaient-ils pas d’anciens humains ou elfes après tout ? Pas très différents, en fin de compte. « Et une personne quittant son unicité pour adhérer à la théorie du nombre effectue-t-elle réellement une action que l’on peut réprouver ? Le changement, fait rationnel alors en cause, n’est ni bon ni mauvais… » Avec un soupire appréciateur, il retint un nouveau sourire plein de crocs. « Ah j’adore la controverse, mais je m’égard. Je n’aime guère les sentences toutes faites. Elles s’éloignent souvent de la notion fondamentale à toutes nos nations et nos peuples. Elle se veut trop parfaite et absolue, c’est ce que je reproche aussi aux Baptistrels » Voilà une raison qui était venue d’elle-même. Il savait ne pas les aimer, mais n’avait jamais, jusqu’à présent, trouvé les mots pour expliquer ce dégoût qu’il ressentait à leur égard. Pour autant, l’humaine n’avait rien fait pour qu’il la mette arbitrairement dans le même sac que les autres, et il se sentait d’humeur objective à présent, même si cela pouvait bien rapidement changer. « Mais c’est votre avis personnel, et si ça vous fait peur de ressembler aux autres, il n’y a pas lieu à condamnation, ne vous méprenez pas sur mes diatribes » Chacun avait des peurs plus ou moins rationnelles au regard des autres, ça faisait justement partie du grand jeu des différences et des ressemblances. Et en fin de compte, elle avait répondu à sa question.

« Je ne sais pas par quoi mon amnésie est causée. Mais je n’ai pas le sentiment d’être un nouveau-né en tout cas » La question était cependant pertinente et relevait d’un problème que seule, une fois encore, une morte aurait pu résoudre. Il était pourtant loin de s’y attacher. Ce qui le préoccupait sur l’heure c’était ce sort. Que la magie lui résiste, ce n’était vraiment pas commun ! Pendant qu’il y réfléchissait, elle s’approcha, s’attirant une œillade curieuse de la part d’un vampire redevenu muet entre temps. L’approche le fit sourire, et la suite plus encore. « J’en dis que ça ne devrait pas être un problème de détruire ces barreaux. Vous êtes certaines que ça ne va pas vous coûter ? Je n’ai pas envie de vous mettre en danger maintenant… » Oui, ça ne signifiait pas qu’il allait éternellement la garder bien au chaud et confortable pour le restant de leur collaboration, mais ça, elle était assez grande pour le comprendre elle-même sans son aide, ou pour assumer le moment venu, elle n’avait pas l’air d’être prête à se défiler. « Dans tous les cas, vous devriez quitter la salle si véritablement je dois m’évader, par mesure de sécurité. Ou alors... » Il la regarda de bas en haut, alors qu’un léger sourire commençait à fleurir sur ses lèvres, dangereux. Il avait une petite idée en tête qui pourrait être excessivement drôle, si elle avait besoin d’une bonne raison pour en référer à son supérieur. Et lui, obligeant qu’il était, il avait une excellente façon d’allier utile et agréable. Un clignement d’œil plus tard, il était dehors, et trois battements d’œil ensuite, une brume compacte emplissait le poste de gardes de l’embarcadère. Il se glissa par une porte de service, la jeune femme figée dans ses bras, et disparu hors de portée des gardes qui s’interpellaient dans son dos.

Ricanant, le vampire s’enfonça dans le dédale des entrepôts portuaires jusqu’à un coin ombragé silencieux et relativement isolé. Là seulement, il la reposa et la libéra du sort d’immobilisation, les yeux étincelants de bonne humeur. « Pas trop secouée ? J’ai essayé de faire ça bien… » Il lui remit une mèche en place du bout des doigts « Vous êtes très légère… »

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Ce vampire aimait donc les joutes verbales? Il fallait avouer qu’Autone appréciait ce sens de la répartie et la discussion qui ne prenait pas fin dès qu’une réponse était donnée. En revanche elle se contenta de sourire en coin, le laissant philosopher et questionner sa réponse. C’était plutôt l’individualité que l’unicité qu’elle valorisait à grand prix.  « À vrai dire je ne crois pas qu’il y ait une unicité, mais des unicités. Et qu’il y en a autant qu’il y a de ressemblances à la norme, en un être. Mais vous m’avez demandé si j’avais peur d’être différente et je vous réponds que de chercher à ne pas l’être, c’est perdre son individualité. »

Mais ils auraient bien le temps d’avoir ce genre de longues conversations plus tard, une fois qu’il serait hors des barreaux. Et elle n’alimenta pas d’avantage le débat. Il comprendrait ce qui la poussait à parler ainsi d’individualité, lorsqu’elle lui expliquerait par où elle avait passé, plus tard. Il n’y avait pas sentence toute faite, que des réflexions et du temps pour les écrire.

La suite se fit plus étonnante. Intéressante? Peut-être, mais sur le coup, ce n’était pas de l’intérêt qui fit réagir la petite veuve. Elle secoua la tête sans avoir le temps de répondre lorsqu’il lui proposa de sortir. Cela serait trop évident, sortir juste avant sa fuite. Ils sauraient immédiatement qu’elle était complice et qu’elle savait, surtout si c’était elle qui le rattrapait. Autant lui écrire « Complice » à l’encre sur le front.

Elle haussa un sourcil en voyant le sourire d’Achroma, alors que ses yeux remontaient sa silhouette. Ce sourire là ne pouvait rien avoir de bon, surtout qu’il ne semblait pas avoir l’intention de la prévenir de son plan. Et avec raison, si elle avait su d’avance ce qu’il allait faire elle l’aurait traité de malade. Autone écarquilla les yeux alors qu’elle n’arrivait plus à bouger et plus rapidement qu’elle ne puis réagir, elle était à l’extérieur. La lumière du soleil sur ses yeux qu’elle ne pouvait fermer dans la paralysie larmoyèrent. Son visage devint rouge de colère, lorsqu’elle fut relâchée du sort et du vampire, sa bouche s’entre ouvra avec l’intention de lui crier dessus quand elle se retint en posant une main devant sa bouche. Son corps se relâcha de la tension qui la retenait précédemment.  « Mais vous êtes fou! » Murmura-t-elle, complètement dépassée. C’était un de ces chuchotements de maman qui semblait être crié, même si la voix n’y était pas. C’est quand il prononça sa question qu’elle figea à nouveau, comme dans l’incompréhension de paroles aussi absurdes. Secouée? Il lui demandait si elle était secouée? Non, non elle avait vu bien pire que ça. Maintenant elle ne pourrait plus prendre son côté et tenter de le défendre, qui plus est-, il venait de complètement foutre en l’air sa crédibilité. Elle qui avait assuré pouvoir se défendre. Mais ce désir de « Faire bien » c’était tellement enfantin, elle n’en croyait pas ses oreilles. Son instinct maternel la déchirait entre l’envie de le gronder et de le féliciter pour son idée. Et elle n’arrivait pas à lui en vouloir d’avantage. La veuve des rivières se contenta de secouer la tête dans un court soupir, qui se transformait progressivement en gloussement puis en rire silencieux. Elle posa la main sur son front dans son découragement.

Rire, cela faisait longtemps…

« C’est à cause de mon totem… »


Elle releva la tête vers lui et prit sa main, restant accroupie, elle s’enfonça silencieusement dans la ruelle. Visiblement, elle se fichait de sa robe, ou de ses cheveux qui s’étaient emmêlés dans la course. Elle les laissait las, justement pour ne pas avoir à soigner des coiffes complexes. C’était bien pensé tout ça, mais s’il se faisait arrêter maintenant, elle n’aurait pas le temps de penser à un plan pour régler la situation sur le tas. C’est vers des caisses, un peu plus loin, qu’elle le dirigeait.  « Si je peux le faire, tu peux probablement aussi faire ce sort. Il suffit d’y toucher pour se transformer, regarde. » Et elle toucha la caisse, apportant aussi la main d’Achroma sur le même objet, afin qu’il l’imite. Heureusement, elle avait été entraînée à être furtive. Ses murmures et ses gestes étaient donc restés silencieux jusqu’à maintenant.

Lorsque les gardes furent passés devant la ruelle sans les voir, elle reprit sa forme humaine et soupira à nouveau. Autone attendit que le vampire rompe aussi le sort. « La prochaine fois que vous avez une idée aussi saugrenue, prévenez moi AVANT. » Elle murmurait toujours, comme on crie un chuchotement.  « Qu’est ce qu’on fait maintenant? On attend que les gardes alertent eux même le Bourgmestre? Il ne va jamais me laisser vous défendre dans ces circonstances. Il saura tout de suite que… » Son propre sourire l’interrompit, elle cacha son visage dans ses mains et éclata de rire en tentant de garder ses ricanements inaudibles. Elle ne pouvait pas s’empêcher de rire de l’absurdité de la situation. Autone prit le temps de souffler et reprit.  « On peut toujours attendre de se faire retrouver. Ça augmentera un peu…l’urgence. À ce moment je ferai semblant de fuir et j’utiliserai quelques sorts pour faire comme si je me battais aussi. Et si ça vous convient je pourrai vous immobiliser à ce moment. »

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La généreuse donation de l’étiquette ‘fou’ ne fit qu’accentuer le sourire plein de crocs du vampire dont les yeux céladon pétillaient de bonne humeur et d’une attente innocente en l’observant. Il était, certes, très loin d’un féroce prédateur sur le point de croquer une biche innocente. Silencieux pourtant, il attendait réellement, focalisé sur ses expressions et la tension de son corps. Aussi, en la sentant finalement se détendre, puis en l’entendant glousser, en la voyant rire sous cap, il se mit à rayonner, fier à l’extrême et très content, son regard fixe ne cessant jamais de dévorer sa mine. Ivanyr éprouvait l’impression d’une réussite fabuleuse à la voir rire ainsi, même si elle restait aussi coite qu’une image sculptée, et manqua presque de trépigner fort peu dignement tant il était heureux. « Oh ? » Ouvrant de grands yeux surpris, le vampire pencha la tête de côté. « Totem ? Qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce que ça fait ? » Mais il n’eut pas ses réponses immédiatement. Serrant doucement sa main, il se laissa conduire sans méfiance apparente, bien qu’il ait un instant hésité. Après tout, que pouvait-elle bien faire pour lui nuire physiquement ? Son pouvoir était celui d’une conseillère non ? Pas celui d’une combattante. Advenu au fond de la ruelle, contre les caisses, le vampire fronça légèrement le nez avant de cesser de l’utiliser pour s’épargner l’odeur tenace du poisson qui marinait à la chaleur. Curieux, il laissa l’humaine lui poser la main sur la surface de bois et laissa la magie affluer en lui. Un instant plus tard, il sentait la différence sans la voir, et resta silencieux, se faisant passer pour plus caisse qu’il n’était. Les gardes n’y virent que du feu et il se jura de garder ce sort dans un coin de son esprit pour le réutiliser dans le futur. Ça servirait forcément.

Lorsqu’ils furent à nouveau seul, il vit du coin de l’œil l’une des caisses se mettre à bouger puis disparaître pour laisser place à la conseillère et avec un sourire, il fit de même. « Eh bien voilà une perspective d’avenir que je n’aurais pas imaginé, être une caisse… » fit-il d’une voix à la fois douce et pensive. Mais l’humaine n’avait pas les mêmes idées en tête semblait-il. Avec un petit sourire enfantin mais mesquin, il susurra en guise de réponse un suave un : « ça ne serait pas aussi drôle ou authentique non ? on envoi rarement un faire-part de kidnapping, mais j’y penserais, ça pourrait être ma petite marque de fabrique… » Il haussait petit à petit les sourcils en une expression amusée et expectative. Et puis elle éclata de nouveau de rire. « Oui, ça me convient parfaitement. Quand les gardes arriveront, vous serez en pleine bataille contre moi » Cette fois, il la laisserait faire selon leur plan et se laisserait capturer. Il avait eu tout ce qu’il voulait avec cette fantaisie : elle souriait, lui était dehors loin de sa cage, et il avait gagné un peu de temps en sa compagnie. Lui-même ricana un peu à cette pensée puis vint s’installer sur l’une des caisses, perché comme un oiseau incongru. Pour plus de sûreté, il ramena sa cape autours de lui mais ne rabattit pas son capuchon, de sorte qu’elle puisse encore le voir et lui parler. Après tout, ils avaient un peu de temps devant eux qu’ils pouvaient utiliser comme bon leur semblait, avant que la garde ne les retrouve et qu’il ne soit contraint de subir encore un enfermement, même temporaire. La demoiselle ne saurait sans doute jamais à quel point il se sentait mal dans un bâtiment et donc combien il se sacrifiait volontairement en acceptant qu’elle le fasse reconduire dans l’une de ces cages.

« Avant que les gardes ne passent, vous avez parlé de votre totem… de quoi s’agit-il ? Comment cela se fait-il qu’il vous rende plus légère ? » Il la mira des pieds à la tête « C’est vrai que vous êtes frêle, mais tout de même… vous avez l’air en bonne santé, au moins physiquement » Un léger sourire lui courut un instant aux lèvres « Si l’on met de côté que l’on vous dirait sortie d’un buisson. Mais ça c’est à moi que vous le devez… » Il lissa les pans azurés d’une main distraite « Est-ce que cela ressemble aux esprits-liés des Graarhs ? Ils sont très importants, pour ce peuple, un peu comme nous avec les déesses ? C’est une des singularités culturelles de ce peuple qui m’a le plus fasciné… » Se redressant légèrement, il continua plus avant encore, réellement ferré par le sujet « Et votre… totem, c’est ça ? Est-ce qu’il a d’autres capacités ? Votre discrétion par exemple ? Vous aimez la magie ? » Après tout, elle en était venue à l’utiliser aisément. Purnendu, lui, n’était pas très doué avec ces choses-là, sans doute parce que son peuple y était moins attaché, un peu comme les dragons ? « Le contact que vous vouliez voir est donc le Bourgmestre, correcte ? Est-ce bien sage de le mêler à tout cela ? » Après tout, c’était lui qui autorisait l’esclavage dans cette ville non ?

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Autone se demanda un instant quel âge avait ce vampire, qui, peu importe la réponse à cette question, était définitivement un enfant. Elle ne savait pas si cela la décourageait ou l’attendrissait. Dans tous les cas, cela la faisait rire, alors ça devait relever du positif quelque part. Puis, à sa question, un large sourire se dessina sur ses lèvres et toute satisfaite de pouvoir prononcer cette phrase hors de tout contexte, elle murmura :

« Je marche sur l’eau. »  

Elle se retint de rire de sa propre bêtise, puis peigna ses cheveux un peu, avec ses doigts pour seul outil. Puis elle s’arrêta au milieu de sa tâche. Non, si les gardes devaient la retrouver, elle devait avoir l’air de s’être débattue. Ce n’était pas comme si elle s’était déjà souciée de l’ordre dans ses cheveux.

« Les totems, c’est un synonyme pour les esprits liés. Le mien est un gerridae, une araignée toute petite, si légère qu’elle sait marcher sur l’eau. Avant, je ne pouvais que marcher sur les eaux tranquilles, maintenant que j’ai eu des enfants, je peux marcher sur les eaux agitées. Mais cela ne m’as pas beaucoup servi. Je peux aussi faire une dizaine de pas dans le vide. »  


Sa santé, Autone regarda ses bras lorsqu’elle fut qualifiée de frêle. On lui avait déjà dit des choses comme ça. Elle avait toujours été faible, Morneflame n’avait pas aidé cela.  « Et mes cheveux ébouriffés n’ont rien à voir avec ma santé! »  Fit-elle, faussement offensée, un sourire au coin de ses lèvres.  « Je ne savais pas en revanche que les esprits liés avaient autant d’importance pour les Graärh. Mais vous savez, tous ont un esprit lié. Peut-être avez-vous oublié le vôtre…Ce serait peut-être possible de faire un rituel pour le retrouver…Je ne suis pas une experte. »  

La veuve des rivières s’assied au pied de la caisse, directement sur la pierre. Les saletés et la poussière, les marques sur sa robe, elle s’en souciait peu. Elle avait l’impression de revenir loin en arrière, quand elle vivait encore entre une auberge et un campement, quand elle voyageait. Elle, qui avait grandi sur une ferme, se fichait bien de ce qui était convenable. Mais devant des inconnus et devant ceux qui étaient ses électeurs, elle restait digne, si ce n’était que pour garder la tête haute en tout temps. Il n’y avait pas de place à la faiblesse ou à la sensibilité.

« À vrai dire, ce n’est pas une bonne idée de le mêler à ça. » Elle soupira avant de reprendre.  « Mais j’ai dit que je ferais un caprice. Je n’ai rien à perdre. Que mon image soit salie je m’en fiche, même si le peuple refusait de me remettre au pouvoir aux prochaines élections. Je ne suis pas devenue conseillère pour être en politique toute une vie. J’ai encore beaucoup de temps avant la prochaine élection. Et jusqu’à ce moment, je pourrai user de mon influence pour me battre pour…ce à quoi je crois. Et pour l’instant, ma priorité, est la liberté … Pas seulement de Caladon, de tous. »  

Elle sourit et releva la tête, regardant Achroma dans les yeux.  « Et je crois avoir besoin de vous. Alors je vais faire le caprice de risquer beaucoup pour commencer cette…quête? Et puis, je n’ai pas besoin de ce poste pour vivre. Peu importe ce qui arrivera, je me débrouillerai. »
Son visage s’éclaira soudainement comme si elle venait de penser à quelque chose. « Oh! Et, ce qui est une mauvaise idée, ce sont les kidnappings. N’en faites pas une habitude! » Elle souriait de toutes ses dents, amusée.

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A l’instant où elle révélait les capacités de son esprit-lié, les yeux du vampire s’arrondirent de surpris et s’emplirent, dans un même mouvement, de petites étoiles d’admiration, et de plaisir. Puis une lueur joueuse vint à se glisser dans les prunelles aquatiques. Il avait envie de la voir faire maintenant. Il venait d’enlever une conseillère, était-ce vraiment plusieurs crans au-dessus de vouloir la balancer dans la baie pour voir ce qui arriverait ? Voilà qui pourrait être intéressant. Définitivement, il devait essayer. « … Dans le vide ? » Il n’allait peut-être même pas besoin d’aller jusqu’à la baie en fait. Il suffisait de prendre un toit quelconque et hop, il aurait son expérience. Est-ce qu’elle lui en voudrait ? Oui, probablement que oui, elle lui en voudrait. La suite le rendit l’état pensif latent qu’il traînait derrière lui. Un esprit-lié, lui ? Il n’en avait pas l’impression. Avec un léger sourire torve mais de bonne composition, il répondit donc : « Peut-être, ou pas. Je n’ai jamais rien eu d’exceptionnel comme vous » Et il ne savait absolument pas comment on pouvait bien se retrouver lié à un esprit lorsqu’on était vampire. Est-ce que cela fonctionnait comme avec les Graarh ou différemment ? Si c’était la même chose, alors il était certain de ne pas avoir d’esprit ! Il ne s’était rien passé d’étranger autours de lui, à aucun moment. Du moins, de plus étrange encore…

« Bien parlé » Il sourit de nouveau, aimant à voir sa détermination. Plus encore sa résolution. Immédiatement, son intention de la jeter du haut d’un bâtiment s’étiola. Ce n’était bien de lui faire ça maintenant, il verrait plus tard. Quand les enjeux seraient moindres. « Ah vraiment ? » Il prit un air d’innocence immaculée « Mais enfin, je n’ai rien fait de mal Madame ! Qui vous a donc dit que j’avais kidnappé quelqu’un ? » L’air était crédible, le reste beaucoup moins, mais il s’en fichait un peu, ce n’était pas vraiment ce qu’il attendait. « Au moins, vous avez une bonne raison de faire venir votre allié maintenant… » La punition, certaine, ne le perturbait pas plus que cela. S’il avait ce qu’il voulait ensuite, après cela, alors ça lui allait parfaitement bien. Parfois, payer était nécessaire pour avancer, c’était, en tout pragmatisme, quelque chose de naturel, et auquel il se pliait. Jamais il ne regretterait ses gestes, c’était certain. Il voulait tant être capable d’infuser cette affirmation de la toute puissance d’une volonté qui ne faiblirait pas. Mais c’était sans compter, il le savait, sur la versatilité de l’esprit mortel. Avant d’être un vampire, il avait été un humain. Les humains changeaient souvent d’avis. Il ne voulait pas être humain, surtout en étant vampire.

« Et une fois que je serais libéré comment comptez-vous procéder ? Comment voulez-vous faire porter votre voix ? » Il était peut-être un peu tôt pour cela mais après tout… pourquoi ne pas essayer ?

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Elle posa les yeux sur les longs cheveux blancs qui devaient avoir pris bien du temps à pousser jusqu'à cette envergure. Avait-il déjà les cheveux blancs quand il avait été vampirisé? Ou les vampires pouvaient-ils avoir certains signes de vieillesse, tout en gardant leur peau juvénile? Si seulement cela avait pu lui donner des indices sur son âge, elle aurait voulu savoir. À cette affirmation tout à fait fausse elle sourit et lui répondit doucement :  « Tu n’en sais rien encore. »  

Oui, encore, car elle avait espoir qu’il recouvrerait sa mémoire. Après tout, s’il était vampire, il avait l’éternité pour guérir ses souvenirs disparus.
Elle pensa un moment aux cheveux argentés d’Aldaron. La douleur et l’aigreur pouvait-elle faire vieillir?

« Il faudra travailler un peu votre comédie. Je veux bien vous défendre devant les autorités mais il ne faudrait pas que je perde toute crédibilité non plus. Je vous parlerai de mes contacts lorsque vous serez sortis d’affaires. Pour l’instant, il faudrait montrer vos talents théâtraux. Vous êtes prêts? »  
Elle se redressa légèrement pour être accroupie sur ses pieds. « Je vais…  ‘’Tenter de m’enfuir.’’ Faites semblant de ‘’Tenter de me rattraper’’ D’accord?»

Autone s’ébouriffa un peu les cheveux pour ajouter un peu de crédibilité. Elle attendit son accord avant s’avancer dans la ruelle puis se mit à courir lorsque le moment se fit opportun. Elle se retourna dans sa course et élança sa main devant elle, tendant sa paume ouverte devant lui et s’excusa en pensées avant de plier son pouce. La lumière surgit entre eux et attira l’attention des passants. Les cris s’élancèrent et elle passa sa main de gauche à droite, ce qui fit glisser le vampire au sol, avant de pointer le sol avec son index et son majeur. Elle se sentait plutôt mal, mais ça n’aurait vraiment pas été crédible si elle n’en avait pas mis un peu plus. Dans la terre battue, le vampire était coincé, puis les gardes, alertés par les citoyens, vinrent arrêter I ’amnésique. Elle le regarda en feignant d’être essoufflée, ce qui n’était pas entièrement simulé puisqu’elle avait couru, et se recoiffa alors qu’on lui demandait si elle allait bien.

« Il y a des cellules anti magiques au poste de garde central, n'est ce pas? »


Son regard se posa sur le capitaine. Elle avait perdu de la crédibilité en l’assurant qu’elle était en sécurité mais elle s’en était ‘’sortie toute seule’’ après tout. Ça ne se serait peut-être pas passé comme ça si le vampire n’était pas dans le coup.

sorts utilisés :

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Il ne dit rien pour l'infirmer, se contentant d'un haussement d'épaules d'abandon, n'ayant pas l'envie de batailler ni d'alimenter la controverse. Objectivement, il n'en savait rien, non, mais cela ne le dérangeait pas vraiment, de ne pas savoir. Cela viendrait, ou non, et il ne savait pas non plus ce qu'il préférait. Il appréciait néanmoins sa douceur, se laissant amadouer, cette fois, lentement. « Oui  » Il était aussi prêt que possible. Se forcer n'apportait rien de positif selon lui, alors il ferait avec ce qui venait. Son sourire revint, joueur. « D'accord… allez, courrez  » Il lui laissa un peu d'avance, puis la suivi en pressant le pas. Elle avait de la chance, il n'était pas du tout un bon coureur, et se presser n'était pas vraiment dans ses habitudes, ce qui lui laissait réellement de l'avance et un peu d'initiative. Il la vit se tourner, sentit le flux de magie, mais ne fit rien pour l'éviter et ferma simplement les yeux lorsque sa rétine fut agressée violemment, s'arrêtant net dans sa course. La douleur n'avait rien d'irréel, contrairement à son jeu, et il grinça des dents pour contenir un grondement avant de sentir ses pieds se dérober sous lui. Dans la pénombre de la prison de terre, il ouvrit difficilement les yeux et cilla plusieurs fois, voyant des étoiles blanches dans son champ de vision, et ressentant avec une acuité mortelle ses nerfs optiques mit au supplice. Par les déesses ! Elle avait intérêt à vraiment bien jouer son jeu après ça, parce que là, lui il ne jouait plus du tout. Fort heureusement, les gardes mirent un moment à arriver, lui permettant de ne plus risquer l'aveuglement complet. Relevé, il se laissa faire docilement désormais, se demandant encore si les étoiles immaculées et clignotantes étaient définitivement gravées dans ses cornées ou s'il avait une petite chance de voir à nouveau correctement après ça. En tout état de cause, l'humaine irait bien faire un plongeons dans la baie à un moment ou un autre, au moins en rétribution d'avoir choisit un sort aussi insupportable. La question sur la cellule anti magie ne l'alarma qu'un instant, tout comme la réponse affirmative. Il serait dehors très bientôt dans tous les cas, par l'aide de l'humaine ou celle de sa famille. Il fut donc conduit jusqu'au poste de garde central, puis enfermé dans une cellule spécialement conçue pour les mages et il ne chercha pas à en tester les limites, s'installant simplement pour continuer de se masser les globes oculaires. Il sentit le cœur de la conseillère qui s'éloignait et fut bientôt seul dans la pièce. Avec une grimace, il se souffla à lui-même:« J'espère que Purnendu s'en sort mieux que moi…  »
[RP TERMINE]

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