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Le 28 septembre de l’an 7

Le pâle soleil automnal s’élevait lentement dans le firmament encore entaché des lueurs bleutées de l’aurore. Ilyanth marchait lentement, l’esprit hanté par les terribles événements de la veille, le cœur endeuillé par la disparition d’un ami cher…
Tout s’était déroulé comme un rêve ou plutôt un cauchemar et ce dernier éprouvait des difficultés à réaliser qu’il s’agissait de la réalité. L’horrible, l’odieuse réalité. Les chimères avaient attaqué le domaine Baptistrel, cette terre sacrée où seule devaient régner les idéaux Rhapsodiens, afin d’y semer le chaos et la destruction, la souillant irrémédiablement. Tant d’années s’étaient écoulées pour reconstruire un semblant de paix et d’harmonie, et une nuit tragique avait suffi à tout détruire, à balayer les vaines illusions d’un bonheur et d’une sécurité durables.

Mais, surtout, Ascheriit s’était sacrifié pour sauver la vie du chantefeu, et cette perte lui semblait insurmontable. Pourquoi fallait-il que certains meurent et que d’autres vivent? Pourquoi son ami était-il disparu plutôt que lui ? Avait-il envie de hurler à la face du monde, implorant une réponse salvatrice qui ne viendrait jamais. Après tout, l’existence du Nordique avait autant de valeur que la sienne et à cet instant, Neolenn songea que s’il le pouvait il l’échangerait, sans l’ombre d’une hésitation, pour ramener son ami. Hélas, les êtres sont impuissants face à la cruauté et l’inéluctabilité de certains événements et peu importe l’intensité de son chagrin, celui-ci devrait en supporter le fardeau.

Autour de lui, tout n’était qu’inquiétude et la désolation se lisait sur les visages des Baptistrels. Le domaine soignait ses plaies et nul ne savait ce que l’avenir réservait, mais ce dernier paraissait bien sombre et incertain. C'était la fin d'une époque et le continent semblait sur le point d'écrire un nouveau chapitre noir de son histoire.

Pourtant, tôt ou tard, le jeune elfe savait qu’il leur faudrait reprendre la lutte contre les forces obscures qui les assaillaient, et laisser l’espoir renaître dans leurs cœurs éplorés. Mais pour l’heure, son âme blessée était en proie à une indicible mélancolique et les flammes ardentes qui l’animaient paraissaient ensevelies sous un océan de cendres. La fatigue et la souffrance se lisaient sur son visage aux traits délicats et ses rares instants de somnolence avaient été troublés par des visions horrifiantes.

La pluie se mit à tomber, faisant résonner son doux clapotis et rendant l’atmosphère de cette triste journée encore plus lugubre. Le Cawr se dirigea lentement en direction des appartements d’Amaury, désireux d’apporter son soutien et de prendre des nouvelles de son ami, durement éprouvé durant l’attaque des chimères. Des perles de pluie glacées dégoulinaient le long de sa chevelure et de son visage, ressemblant aux larmes du firmament. Aujourd’hui, Armanda tout entière paraissait porter le deuil et pleurer les blessés et les disparus.

Une fois parvenu devant la porte d’Amaury, Neolenn frappa doucement à la porte, espérant que son ami serait suffisamment remis pour l’accueillir. L’elfe se remémora le cri de douleur de son ami dont l’écho résonnait encore en lui et espérait pouvoir apporter ne serait-ce que l’ombre d’une consolation.

Amaury a écrit:
C'était le chant des oiseaux qui rappelait au Chantebrise que le jour était en train de se lever, alors que pour ses yeux vides l'obscurité resterait toujours en constante maîtresse. Ainsi c'était déjà le matin ? Son sommeil n'avait été que trop court et la nuit bien agitée. Hier à peine, le chaos s'était abattu sur le domaine et il ressentait encore au fond de lui une terrible angoisse. Il leur avait fallu du temps pour rétablir les barrières, pour purifier leur lieu de paix qui avait été tant souillé et puis il avait dû soigner ses blessures.
Son corps allait mieux maintenant, grâce à la magie et à un peu de repos, il n'avait plus autant mal, mais tout cela n'était pas suffisant pour panser les maux de son âme. Des questions tournaient encore et encore dans sa tête sans qu'il ne puisse y trouver de réponses satisfaisantes. Ses réflexions avaient plutôt tendance à amener davantage d'interrogations et il semblait sombrer dans un tourbillon sans fin. Il savait bien que le monde n'était pas tout à fait en paix, mais il fallait juste leur laisser un peu de temps, les choses ne se faisaient pas en un jour, ni même en quelques si courtes années et les conflits ne pouvaient s'atténuer si vite. Les guerres et les batailles avaient été en grande partie évitées, c'était déjà un bon progrès, et pourtant...

L'elfe secoua la tête. Il fallait qu'il s'occupe, qu'il se change les idées. Pour le moment, ça ne servait pas à grand-chose, si ce n'était pour du broyer du noir. Il savait bien qu'il était encore profondément affecté par les événements de la veille et il n'était pas vraiment capable de penser avec lucidité. Les scènes qu'ils avaient vécues continuaient à défiler dans sa tête et il en connaissait désormais le moindre détail par cœur. Pourtant, tout s'étiolait ou se déformait. Qu'aurait-il dû faire ? Qu'aurait-il pu faire d'autre ?

Il soupira. Comme à bien d'autres moments dans sa vie, tout ça allait finir par le rendre fou ou tout du moins l'obséder sans que ce ne soit vraiment bénéfique, bien au contraire. Il fallait qu'il arrête.
Doucement, il se dirigea donc jusqu'à la grande harpe qu'il possédait et qu'il laissait toujours au Domaine, dans ses appartements. Il ne savait pas vraiment quoi faire de plus pour les siens et son tempérament le poussait davantage à la solitude. Il espérait simplement qu'un peu de musique pourrait lui permettre de s'échapper un peu. Amaury avait plus que tout besoin d'alléger son cœur pour le moment.
Délicatement, ses doigts effleurèrent chacune des cordes de l'instrument et il commença à l'accorder. Son ouïe avait toujours été fine, notamment en terme de musique, et depuis qu'il était aveugle, elle s'était encore améliorée. Immédiatement, il ressentit une sorte de bien être. C'était une chose qui lui avait toujours permis de s'évader, vers laquelle il se réfugiait automatiquement lorsque ça n'allait pas. Il aurait peut-être aimé s'enfuir jusqu'au milieu du désert pour en retrouver la sérénité, autant dans sa dureté que dans son silence, mais il ne pouvait se résoudre à laisser les siens si vite, quand bien même il aurait pu le faire, la lisière étant levée.

Quelqu'un toqua à la porte, le tirant de ses lourdes pensées.

« Entrez. » Répondit-il simplement, d'une voix douce.

Le visiteur entra et Amaury le reconnut immédiatement grâce aux vibrations. Toujours assis auprès de sa harpe, il tourna la tête dans sa direction et l'accueillit d'un sourire chaleureux.

« Bonjour mon frère, comment vas-tu ? »

Bien évidemment, il n'avait pas vraiment besoin de lui poser la question pour avoir une réponse, il le sentait, tout comme lui, tourmenté et triste. La perte d'Ascheriit semblait l'avoir profondément marqué et il ne pouvait que le comprendre. Tout s'était passé si vite, ils n'avaient rien pu faire face à son sacrifice et Amaury s'en voulait de ne pas avoir pu deviner ses pensées.
D'un geste, il l'invita à venir jusqu'à lui. Ilyanth devait savoir qu'il était prêt à écouter et à aider son ami du mieux qu'il le pouvait.


Après qu’Ilyanth ait frappé à la porte, la voix douce d’Amaury retentit de l’autre côté et lui enjoignit d’entrer. Le visage du chantebrise arborait des traces de fatigue et ses yeux d’un blanc laiteux se tournèrent en direction de son frère Baptistrel. Neolenn n’ignorait pas que celui-ci souffrait d’une cécité l’empêchant de discerner ses traits ; néanmoins, Amaury percevait sa présence grâce à ses vibrations et bien qu’aveugle, il pouvait identifier sa position en se fiant à ses autres sens ainsi qu’à son incroyable intuition.

Après que l’elfe à la chevelure couleur des neiges éternelles ait demandé à son ami comment ce dernier allait. Ilyanth demeura un bref instant silencieux, avant de trouver la force de murmurer dans un demi-souffle :

- Pas très bien mon frère…les dernières heures ont été particulièrement pénibles pour moi…

Le chantefeu s’arrêta, sentant ses grands yeux clairs s’embuer de larmes et sa gorge se nouer. Lentement, il s’approcha du maître-barde et s’installa à ses côtés tout en lui prenant la main avec délicatesse. Ensuite, le jeune Cawr tenta d’arborer un sourire et dit d’un ton doux et empli d’empathie, mais où transparaissait une immense tristesse, malgré ses efforts pour la contenir.

- Comment te sens-tu ? est-ce que tes blessures te font encore souffrir ?
Grâce aux soins et à la magie d’Aléria Blanchécume, Amaury était à présent hors de danger ; néanmoins, Neolenn se montrait plein de compassion et de sollicitude envers cet elfe qu’il considérait comme son ami et sur lequel il veillait jalousement.

- Si tu as encore mal ou s’il y a la moindre chose que je puisse faire pour soulager quelque peu ta douleur n’hésite pas à me demander, dit-il d’un ton plein de bienveillance. Après tout, le Rhapsodien pouvait également user de sa magie et de ses chants pour aider au rétablissement de son frère Baptistrel.

Soudain, le souvenir du cri de désespoir d’Amaury revint à sa mémoire et le chantefeu se sentit désespérément triste à cette pensée. Tout comme lui, le chantebrise avait perdu un ami, un frère et nul ne savait ce qu’il était advenu de ce dernier.

Était-il seulement encore en vie ? Si tel était le cas, l’espoir semblait bien maigre et les récents événements invitaient davantage au pessimisme. Pourtant, le Cawr ne pouvait se résoudre à abandonner toute espérance, au fond de son âme, une lueur brillait toujours, telle une braise sous la cendre. Un rien suffirait à la ranimer et à faire rejaillir le feu d’optimisme qui habitait son cœur de passionné.

Hélas, pour l’instant, seul demeurait le vide incommensurable de l’incertitude et la froideur de la perte…
Ce matin, en passant près de la chambre d’Ascheriit, le chantefeu avait mesuré toute l’étendue de sa disparition. Son lit vide n’avait pas été défait et ses affaires se trouvaient rangées chacune à leur place ; hier encore, le nordique était là, riant, plaisantant, bavardant gaiement et à présent, il avait disparu, laissant place à l’absence, l’insupportable absence…

Ilyanth songea que les existences se révélaient aussi fragiles que les fils de soie d’une toile d’araignée, un simple geste malencontreux pouvait les briser à jamais…
En laissant son regard vagabonder à travers la pièce, le jeune Elfe aperçut un bouquet de fleurs oublié sur une table et que nul n’avait pris soin de disposer dans un vase. D’un geste gracieux, ce dernier s’empressa de se lever et d’arranger les fleurs, des roses rouges d’une éclatante beauté et d’où émanait un parfum suave.
En proie à la nervosité, le Cawr se blessa légèrement un doigt en se piquant avec l’une des épines et laissa échapper un petit cri de douleur. Puis, il plaça le bouquet dans un vase et le disposa sur une commode non loin du Chantebrise pour que celui-ci puisse profiter de leurs effluves parfumées :

- Je trouve que ces fleurs sont très belles et que cela aurait été dommage de les laisser faner sans que tu puisses profiter de leur merveilleuse senteur, dit-il, tentant de distraire son frère de son chagrin.

Amaury a écrit:
Son frère s'avança dans la chambre pour venir jusqu'à lui et il avait répondu à sa question d'une petite voix, ne dissimulant en rien la tristesse et la douleur qui l'habitaient. Bien évidemment, Amaury ne s'était pas attendu à autre chose, mais il n'avait pas voulu laisser passer tout cela sous silence et il sentait bien qu'il leur était nécessaire d'aborder le sujet, ne serait-ce qu'un peu, ne serait-ce que pour avancer. Vivre parmi les autres baptistrels pouvait s'avérer difficile quand chacun des maîtres de la Rhapsodie pouvait ressentir avec force les émotions, autant positives que négatives des autres. Ainsi, ils se communiquaient chacun leur douleur, la souffrance de tout ce qui était arrivé la veille et cela créait une mauvaise résonance, une dissonance dans le reste de leurs harmonieuses vibrations.
Lorsque son frère prit sa main, il serra doucement la sienne, désireux de lui apporter son réconfort dans ce simple geste.

« Je comprends, mon frère, je... j'aurais aimé pouvoir faire quelque chose. » Avoua-t-il, la gorge nouée.

Tout s'était passé tellement vite... Est-ce que s'il avait accepté de soigner ses yeux, il aurait pu réagir autrement, le sauver, l'empêcher de franchir ce portail qui l'avait emporté, les privant peut-être pour toujours de sa présence ? Ce qui lui était le plus insupportable, c'était de savoir qu'Ascheriit avait fait ça en tout conscience, volontairement. Pour son frère Ilyanth, cette pensée devait être plus terrible encore.

« Ne t'en fais pas pour moi, la plupart de mes blessures ont été guéries et je n'ai besoin maintenant que d'un peu de temps et de repos. Je vais mieux. »

Il voulait le rassurer à ce sujet. Bien sûr, il ne cachait pas qu'il en avait fait un peu trop la veille, soucieux d'aider à rétablir l'ordre autant qu'il le pouvait et de restituer les barrières sur tout le domaine. C'était un peu pour cette raison qu'il n'avait pas encore quitté sa chambre, mais aussi parce qu'il redoutait ce qu'il pourrait retrouver en dehors de ce cocon qui le protégeait du monde extérieur.
Doucement, il lui avait adressé un nouveau sourire. Il tenait à le rassurer, à chasser de son esprit ces souvenirs où il avait crié de douleur, où le chaos avait régné en maître dans l'observatoire et où tout avait basculé si vite...
Amaury ne voulait pas être la cause des souffrances de son frère Chantefeu. Mais plus que tout, il sentait ce vide qui pesait au fond de son cœur, que lui-même ne connaissait que trop bien et qu'il ressentait toujours un peu chaque jour, parce qu'on avait arraché une partie de son âme, il y avait bien longtemps.

« Ilyanth... Je suis désolé... » Murmura-t-il.

Il avait l'habitude de réconforter, de consoler, mais dans cet instant où la douleur était encore si vive, où aucun mot ne pourrait compenser la disparition de leur ami et frère, il ne savait plus tout à fait quoi dire.
Son frère s'était éloigné de lui, il s'était mis en tête de s'occuper des fleurs qu'on lui avait apportées hier, pour son rétablissement. Il n'avait pas eu le cœur à s'en occuper finalement et il les avait laissée là. Une douleur arriva jusque dans son esprit. Il s'était coupé, le maladroit ! Immédiatement, Amaury se leva, quittant sans harpe pour le rejoindre. Ici il pouvait se déplacer rapidement, chaque chose était toujours à sa place et il visualisait parfaitement les lieux.

« Donne-moi ta main. » Dit-il simplement.

Le Chantebrise n'attendit pas plus longtemps, certain qu'il n'allait pas le brusquer, il prit sa main dans la sienne et commença à entamer doucement un chant elfique, d'une voix basse à peine audible. La plaie se referma bien vite, elle n'avait rien de grave, mais il ne voulait pas que son frère reste ainsi blessé. Leurs cœurs ne saignaient-ils déjà pas suffisamment ?
Sans qu'il ne s'en soit rendu compte jusqu'à maintenant, les larmes avaient commencé à couler le long de ses joues, abondantes, intarissables. Délicatement, il prit Ilyanth entre ses bras. Finalement, il avait craqué le premier alors qu'il désirait lui accorder du réconfort, se faire pardonner, car il se sentait coupable de n'avoir rien pu faire pour empêcher tout cela. Est-ce que pleurer aller leur permettre de vider un peu leurs cœurs de cette atroce souffrance ?

« Je... suis désolé... Je... Je ne connais pas les mots qui pourraient nous consoler. »


Dehors le clapotis de la pluie résonnait et quelques gouttelettes s’écoulaient sur les vitres des fenêtres. L’univers semblait aussi pleurer la disparition d’Ascheriit et la tristesse du chantefeu et du chantebrise se mélangeaient, tissant un voile de mélancolie. La douce et paisible harmonie des vibrations du monde était détruite par cette perte inestimable.

Ilyanth posa son regard clair sur le visage délicat du Chantebrise dont les yeux laiteux exprimaient un indicible chagrin, si semblable au sien. Quand le jeune elfe prit la main de son ami, dans un geste affectueux, ce dernier la serra longuement. Tout comme lui, le Baptistrel à la chevelure des neiges était dévasté par la disparition de leur frère.
Après que Neolenn se soit enquis de l’état de santé du Chantebrise ; celui-ci le rassura en lui disant de ne pas s’inquiéter à son sujet, outre mesure, et que la plupart de ses blessures étaient guéries. Désormais, son rétablissement ne nécessitait qu’un peu de repos.

Le Chantefeu le regarda avec bienveillance et ses lèvres rosées esquissèrent un sourire triste.
- Je suis heureux de savoir que tu vas beaucoup mieux. J’ai eu très peur pour toi tu sais lorsque tu as été blessé durant cette terrible attaque…Je suis vraiment soulagé qu’il ne te soit rien arrivé de plus fâcheux.

La voix d’Ilyanth se mit à trembler et il chuchota dans un souffle :

- Je crois qu’il aurait été insupportable pour moi de perdre un autre être cher…

La veille, ils avaient dû mobiliser leurs forces afin de rétablir les barrières de protection du domaine assiégé et durant ces heures cruciales, l’esprit du chantefeu était mobilisé par la bataille qu’ils menaient. A présent, qu’une accalmie était revenue, celui-ci avait le sentiment de subir de plein fouet le contrecoup de ces funestes événements. Le calme du matin faisait resurgir de manière presque insupportable la souffrance de la disparition d’Ascheriit. Et il lui semblait que nulle parole d’apaisement ne pouvait soulager le brasier de douleur qui embrasait son cœur.

Pourtant, Neolenn sentait la chaleur et la douceur qui émanait d’Amaury. Aussi dévasté soit-il par la cruelle épreuve qu’ils affrontaient, ce dernier était présent et prêt à l’affronter à ses côtés. Le chantebrise murmura qu’il était désolé :

- Je sais mon frère…Tu as fait ce que tu as pu pour empêcher ce qui est arrivé…Mais c’était si imprévisible et rapide. Si j’avais deviné ce qu’il avait en tête, j’aurais tout fait pour l’arrêter…, répondit le chantefeu d’une voix rendue rauque par les émotions.

Puis apercevant un bouquet abandonné sur l’une des tables et désirant s’activer pour échapper aux émotions qui lui déchiraient l’âme, le Cawr se leva et tenta de l’arranger. Mais ses gestes étaient maladroits en raison de sa nervosité et il se blessa un doigt sur l’épine d’une rose.

Aussitôt son frère se précipita afin de soigner sa plaie, en entamant un chant Baptistrel, si doucement que les sons étaient presque inaudibles. Le chantefeu ferma les yeux écoutant la magnifique voix de son ami, qui semblait résonner jusque dans les tréfonds de son âme, y apportant une lumière bienfaisante.

Ému et touché, il le remercia chaleureusement de ses soins et lui adressa un sourire amical. Soudain, les larmes se mirent à ruisseler sur les joues du Rhapsodien, faisant saigner le cœur de Neolenn à cette vue. Amaury se mit à bredouiller qu’il était désolé et qu’il ne connaissait pas de mots capables de les consoler.

Le chantefeu songea que les grandes souffrances étaient ineffables et que les mots étaient impuissants à les résumer. Mais plus que tout au monde, ce dernier désirait consoler son ami et calmer l’affliction qui l’habitait. Il s’approcha de lui et le serra dans ses bras avant de débuter de sa voix mélodieuse une berceuse Elfique que lui chantait souvent sa mère après un cauchemar.

Ilyanth espérait que ses vibrations emplies de chaleur et d’espoir pourraient apaiser ne serait-ce qu’un peu la peine qui déchiraient leurs âmes. De même, son totem oiseau du paradis avait le pouvoir de créer une aura apaisante autour de lui. L’elfe laissa son ami pleurer tout son soul et lui murmura à l’oreille.

- Je suis là mon frère, si pleure te fais du bien et soulage ta peine fais-le sans crainte.

Puis le chantefeu le regarda et dit d’une voix grave et songeuse.

- Je n’arrive pas à croire qu’Ascheriit soit mort….Une part de moi ne peut s’y résoudre. Je ne peux pas l’accepter, il doit y avoir une possibilité qu’il soit toujours vivant quelque part...

Berceuse chantée par Ilyanth: https://www.youtube.com/watch?v=Q3_08BOhk74


Amaury a écrit:
La sensation de contact, la chaleur de son corps étaient devenus comme un appui dont il avait besoin ne serait-ce qu'un instant. Leur trouble commun ne faisait qu'agiter les vibrations malgré leur désir de les apaiser et de se réconforter l'un l'autre. Amaury ferma doucement les yeux, cela ne changeait rien à son obscurité, mais il avait un peu plus l'impression de se laisser porter. La voix de son ami ne tarda pas à se faire entendre tandis qu'il entonnait une douce berceuse elfique. Petit à petit, ses larmes cessèrent de couler pour laisser place à une impression de vide.
La musique était une passion qu'ils partageaient tous ici et qui avait cette riche capacité d'exprimer tous les sentiments, de passionner, de rassurer, de consoler. C'était une forme de communication qu'il trouvait bien plus puissante que de simples mots, car on y ajoutait davantage de tons, de nuances, de couleurs aussi.

Reconnaissant ces paroles qu'il avait déjà entendues petit, il mêla sa voix à la sienne, chantonnant très doucement. Il n'y mettait pas la ferveur qu'il avait dans ses chants d'ordinaire, mais il s'y abandonnait un peu, se laissant porter par la mélodie qui guidait sa voix encore un peu tremblante.
Grâce à tout ce que son ami faisait, il se sentait un peu plus apaisé que tout à l'heure, n'ayant pas vraiment réussi à résister aux émotions fortes qui avaient brusquement traversé son esprit. Respirant un peu plus calmement, il s'éloigna d'Ilyanth et tenta de lui offrir un joli sourire. Il allait bien, cette journée allait être assez difficile, les suivantes aussi, mais il s'en sortirait. Après tout, il avait vécu une perte bien plus intolérable et même s'il ne pourrait jamais s'habituer à ce genre de chose, il se sentait un peu plus fort pour les affronter.

Son ami lui fit part de ses sentiments, de ses impressions. Il était persuadé qu'Ascheriit n'était pas mort. En d'autres circonstances, Amaury aurait pu mettre ça sur les effets de la perte brutale, du deuil, on passait toujours par cette étape de refus, préférant une autre vérité, mais pour cette fois-ci, il savait qu'il partageait cette pensée.

« Je suis d'accord avec toi. Il a été emporté par ce portail, mais... nous ne savons pas ce qui se trouve de l'autre côté... peut-être que tout ce qui le traverse s'éteint, mais... je suis certain que non. Les Chimères semblent venir sur notre monde par ce biais-là et d'après ce qu'elles disaient, elles souhaitaient emmener avec elles un baptistrel, pas le tuer ! » Commença-t-il, faisant preuve de bien plus de vivacité, tentant de reléguer son chagrin au fin fond de son esprit.

Le Chantebrise se souvenait très bien des mots de la Chimère que les avait attaqués dans l'Observatoire et elle avait bel et bien refusé de l'emporter à cause de ses blessures. De plus, s'ils avaient simplement voulu les tuer, ils l'auraient fait sans hésiter. Cependant, Amaury pensait qu'ils étaient partis à la recherche d'un maître et non d'un apprenti. Attaquer le Domaine leur permettait sans doute d'en trouver un plus facilement. Ascheriit n'était encore qu'un Enwr... qu'était-il advenu de lui une fois qu'il avait franchi le portail ? Tant de questions se chamboulaient dans son esprit. Il priait pour qu'ils n'aient pas décidé de le tuer, pour qu'il soit encore là, vivant, quelque part.

« Je... nous ne devons pas laisser tomber, pas tant que nous ne serons pas certains. Nous devrions partir à sa recherche seulement... je ne sais pas vraiment par où commencer. » Avoua-t-il, chagriné.

Comment créer un portail de ce genre ? Comment faire pour qu'il puisse les mener jusqu'à Ascheriit ? Entre les doutes, l'ignorance et la tristesse, Amaury se sentait en proie à une grande confusion. Il avait besoin de réfléchir calmement et en discuter avec le Chantefeu l'aiderait peut-être à trouver une solution.


Ilyanth sentait le corps de son frère Amaury tout contre lui, à la fois empli de douceur et d’une émouvante fragilité. A cet instant, leurs deux souffrances mêlées, paraissaient n’en former qu’une seule et leurs cœurs pleuraient le même être. Pendant qu’il entonnait cette berceuse, les paupières de l’elfe se fermèrent, voilant ses yeux embués de larmes. Enveloppé dans cet écrin mélodieux, il se remémora les moments où sa mère la lui fredonnait à l’oreille, en usant comme d’un talisman capable de dissiper les cauchemars et d’éloigner les frayeurs de la nuit.

Cette tendre berceuse parviendrait-elle encore à conjurer le mal ? En tout cas, il souhaitait ardemment qu’elle soulage leurs âmes déchirées et que les funestes événements de la veille ne soient qu’un mauvais rêve. L’elfe aurait tout donné pour se réveiller et voir Ascheriit apparaît à ses côtés, le sourire aux lèvres et les yeux pétillants de bonheur. Il se concentra sur cette image mentale, incarnant l’unique lueur d’espoir au milieu des ténèbres et pria intérieurement pour qu’elle devienne réalité. Après tout, peut-être que les vœux pouvaient se réaliser, à condition d’y croire très fort.

Submergé par le chagrin, le Baptistrel se raccrochait à cette conviction. Une possibilité, même infime, de retrouver Ascheriit en vie et de le ramener devait exister. Il ne pouvait pas en être autrement…

Sa voix cristalline s’élevait, vibrante d’émotions, laissant transparaître l’exaltation de l’espoir et la souffrance du manque. Les paroles de la berceuse étaient empreintes de la candeur de l’enfance et portait en elle la puissance des grandes espérances. La force des rêves.

La beauté des notes le subjuguait, faisant sourdre en lui un sentiment d’apaisement. La musique pouvait tout naître, même ce que les mots étaient incapables d’exprimer. Ce langage était celui du cœur et possédait la couleur des sentiments. Amaury se joignit à lui et leurs deux chants s’élevèrent à l’unisson, pansant mutuellement leurs blessures et atténuant leurs tourments.

Lorsque Ilyanth confia à son ami son intuition concernant leur frère disparu ; le chantebrise se rangea à son avis. Malgré la douleur qui les accablait, leur esprit conservait une certaine lucidité quant aux faits qui s’étaient produits.

- Cette histoire est vraiment mystérieuse…Je me demande pourquoi les chimères désiraient enlever un maître Baptistrel ? Quel peut bien être leur but ? Ascheriit n’était encore qu’un Enwr et il souffrait d’une malédiction qui le rendait impuissant magiquement….Son enlèvement est un accident. La véritable cible de ce singe géant…c’était…moi. C’est moi….qui…qui devrais… être à sa place…La voix de l’elfe parut se briser sous le coup de l'émotion et ce dernier fondit en larmes.

De même que la tristesse, une intense culpabilité l’habitait et celui-ci s’en voulait terriblement d’avoir entraîné la perte de son ami. Si seulement Ascheriit ne s’était pas interposé…Pourquoi le destin se révélait-il cruel au point d’exiger le sacrifice d’un être cher ?

Reprenant peu à peu son calme, Neolenn poursuivit, le regard ternit par une ombre de tristesse :

- J’ai vraiment eu l’impression que notre pouvoir les intéressait ou…leur faisait peur. Mais j’en ignore la raison. Peut-être qu’il s’agit d’un indice important pour comprendre leurs motivations…

Puis, il tressaillit et murmura :

- Je n’ose imaginer ce qui se passerait s’ils trouvaient le moyen de s’emparer de notre magie…ou de l’utiliser à des fins maléfiques…

Le Rhapsodien contempla le visage du chantebrise, dont les traits délicats arboraient des marques de fatigue, de l’inquiétude et du désarroi. Ilyanth sentit son cœur se serrer à cette vue et songea que son ami récupérait à peine de sérieuses blessures. Dès lors, mieux valait lui épargner de nouvelles sources d’inquiétudes. Le chantefeu se devait de trouver une solution afin de retrouver Ascheriit, peu importe le lieu où les chimères le retenait prisonnier.

- Je n’abandonnerai jamais Acheriit, je partirais à sa recherche, même si pour cela je dois traverser tout le continent d’Armanda. Je ne peux l’abandonner à son triste sort…Il est vrai que nous ne savons pas où ce portail mène, mais peut-être que ces créatures ont laissé l’un ou l’autre indice derrières elles. Je crois que je vais enquêter de mon côté…Mais pour l’heure, je souhaite surtout te savoir davantage tranquilliser à ce sujet, dit-il en prenant les mains du chantebrise dans les siennes.

Amaury a écrit:
L'idée qu'Ascheriit pouvait être vivant, le fait même qu'on pouvait encore le sauver semblait comme ôter un terrible poids dans le cœur du Chantebrise. Ce n'était pas vraiment quelque chose dont il pouvait totalement se réjouir, car si c'était la vérité, il devait aussi courir un grave danger, mais c'était toujours un brin d'espoir auquel ils pouvaient se raccrocher. Tant que le doute subsistait, ils ne pouvaient pas le laisser tomber, pas prendre le risque de l'abandonner alors qu'ils n'avaient pas pu l'aider hier, ni pour sa malédiction, ni pour le reste de son existence.
Ce qui était certain, c'était que toute cette affaire les plongeait dans une grande incertitude et qu'elle leur donnait de nombreuses raisons de s'inquiéter pour un tas de choses. Attaquer le domaine avait été une chose grave, mais cela leur avait aussi démontré leur impuissance, leur naïveté peut-être. Même si les baptistrels refusaient de se battre et qu'ils n'allaient pas dresser des armes contre ceux qui s'en prenaient à eux, ce n'était pas une raison pour qu'ils soient des victimes aisées. La défense du domaine serait à revoir pour qu'il n'y ait pas un incident de plus et surtout, pour qu'on ne puisse pas encore une fois souiller leur terre, briser leurs cœurs.

Amaury était bien conscient que les pouvoirs des maîtres baptistrels pouvaient attiser de nombreuses convoitises. Ils étaient dotés de facultés que les autres ne possédaient pas et même si on ne pouvait pas en faire usage n'importe comment, cela n'empêchait pas toutes les mauvaises intentions du monde. Pour toutes ces choses-là, ils n'avaient jamais cessé de lutter, à leur manière. En entendant sa voix se briser, en écoutant chacune de ses paroles, ses hésitations, ses doutes et ses résolutions, le Chantebrise chercha à le réconforter d'un sourire chaleureux.

« Tu ne dois pas te sentir coupable, Ilyanth... je sais que c'est difficile, mais c'était son choix de prendre sa place et pour cela, on ne peut en vouloir à personne. Je suis certain que que nous aurions fait la même chose si nous avions pu sauver l'un des nôtres de cette manière... »

Ce n'était pas vraiment une consolation, seulement il se devait d'accepter la réalité et d'avancer avec celle-ci. Bien sûr, cela ne pouvait pas se faire aussi vite et il lui faudrait sans doute plus de temps qu'une journée pour ça, mais Amaury ne voulait pas le laisser plonger dans le désespoir comme il avait pu le faire lui-même par le passé.

« Je ne connais pas la réponse à propos de ce que voulaient les Chimères en nous attaquant, mais nous ne nous laisserons pas faire, elles n'obtiendront pas ce qu'elles veulent si facilement. »

Réfléchir à ce qui concernait le monde entier et non à lui-même, discuter tout simplement, semblait lui avoir fait un peu de bien et il avait laissé de côté son chagrin pour se concentrer sur d'autres choses. Plus que tout, il voulait aider les siens et ne pas voir son frère Chantefeu dans la souffrance.

« Je n'abandonnerai pas non plus Ascheriit et si tu as besoin d'aide pour le retrouver, je serai là. » Affirma-t-il sans hésitation.

Il était peut-être encore blessé, mais il fallait plus que ça pour l'empêcher d'aller au secours d'un ami.

« Je pense que nous devrions enquêter un peu plus sur les Chimères et sur les portails de ce genre, je suis certain que des ouvrages parlent de toutes ces choses et cela devrait nous fournir quelques pistes. Qu'en dis-tu ? »

Qu'y avait-il de mieux pour eux que de passer à l'action pour effacer un peu leur peine ? Amaury voulait croire qu'ils n'étaient pas démunis face à cette menace et que tout ce qu'ils trouveraient pourrait être d'une précieuse aide.


Plein de sollicitude et de douceur, Amaury tenta de consoler son frère et d’apaiser la culpabilité qui dévorait son cœur grâce à ses paroles bienveillantes. Ilyanth acquiesça de la tête :

- Tu as raison mon frère, j’aurais fait pareil ! tout comme lui, j’aurais lutté pour venir à l’aide de l’un des nôtres si celui-ci courait un grave danger, voire même je me serais sacrifié si cela permettait de sauver une vie ou notre cher domaine. Tes paroles sont sages et sont comme un baume sur les cicatrices de mon âme. Du reste, puisqu'il m’est impossible de remonter le temps et de retourner à ce moment funeste où Ascheriit a disparu, emportée par la chimère, je désire au moins faire tout mon possible pour le retrouver et le ramener ici, sain et sauf.

La tâche allait se révéler ardue et le chantefeu en avait parfaitement conscience ; pourtant, ce dernier se refusait à abandonner son ami disparu à son triste sort. Celui-ci n’avait pas hésité l’ombre d’une seconde avant de voler à son secours et à se sacrifier afin de l’empêcher de tomber entre les griffes des chimères.

- Tu as raison c’était son choix et cela lui ressemble tellement…Ascheriit et moi sommes de très bons amis et j’ai toujours admiré sa noblesse de cœur, son courage et sa persévérance…

En prononçant ces mots, la tristesse transparaissait dans la voix du Baptistrel et ses yeux s’embuèrent de larmes, dévoilant le profond attachement qu’il vouait à leur frère.

- Pourtant, il n’a pas toujours connu des jours heureux, sa jeunesse était au contraire plutôt malheureuse et pleine de solitude…Son père désirait faire de lui un guerrier, comme tous les membres de sa famille, mais il détestait se battre, en raison de sa douceur de caractère et de son pacifisme. Comme tu l’imagine notre frère souffrait terriblement de cette situation et en venant ici, il espérait enfin connaitre une existence faite de paix et d’harmonie, mais une autre épreuve l’attendait…Son impuissance à la magie. Hélas, comme tu le sais Ascheriit était incapable d’utiliser la magie, en raison d’une malédiction lancée par un dragon et touchant tous ceux de sa lignée. Toutefois, loin de se laisser abattre par cette fatalité, il a au contraire redoublé d’efforts en travaillant encore plus dur que les autres pour contrer ce handicap…Souvent le soir avant de quitter la bibliothèque pour regagner ma chambre, je le voyais penché sur les pages jaunies d’un ouvrage ou occupé à déchiffrer l’un ou l’autre parchemin et parfois le matin il y était encore, semblant n’avoir pas bougé. En raison de son abnégation et de toutes ses qualités humaines, la Rhapsodie désirait faire de lui un maitre Baptistrel, mais avant cela il fallait briser la malédiction. Notre frère était si plein d’espoir à ce sujet et la suite hélas tu la connais…

A cet instant, le lié du feu ressentit une douleur aiguë lui broyer le cœur en songeant au vide immense que laissait cet apprenti qui était également son confident et son ami.

La suite des paroles d’Amaury fit sourdre en lui une certaine inquiétude. Le chantebrise disait vrai en mentionnant le fait que les chimères convoitaient la magie Baptistral et c’était probablement la raison pour laquelle ces dernières cherchaient à s’emparer d’un maitre barde, mais le nordique n’était encore qu’un Enwr…Par ailleurs, celui-ci n’avait aucune possibilité de faire appel à la magie en raison de son impuissance. Dès lors, est-ce que cela ne risquait pas de changer la donne ? Jusqu’à présent, leurs suppositions et leurs espoirs se basaient sur le fait que les chimères désiraient utiliser le pouvoir d’un Baptistrel, mais le cas de leur frère était très atypique….Privé de toute aptitude à la magie, quelle utilité pourrait-il conserver à leurs yeux ?

Néanmoins, Neolenn préféra garder ses doutes pour lui, craignant d’inquiéter à tort l’elfe aux cheveux blancs, qui se remettait doucement de ses blessures. De plus, le chantefeu désirait garder intact l’espoir de revoir le nordique en vie et ne voulait laisser nulle pensée négative assombrir son optimisme.

- Je suis d’accord avec toi, je pense aussi que nous devrions enquêter sur les chimères et mettre en commun les indices dont nous disposons. Pour l’heure, nous savons qu’elles sont capables de créer des portails qui ressemblent à des vortex et que ceux-ci leur servent à « voyager » dans notre monde. Et aussi qu’elles emploient une puissante énergie capable d’annihiler toute magie, y compris celles des totems, ce qui suppose une force phénomène. Cela me rappelle la puissance de Néant mais cette dernière est morte, donc comment un tel prodige est-il possible ?

L’elfe à la chevelure châtain cendré réfléchit avant de poursuivre :

- Je crois également que bien qu’elles convoitent notre magie, celle-ci parait également les effrayer….Les chimères se sont enfuies lorsque Aléria Blanchécume a utilisé le pouvoir du chant des étoiles…

Le cawr sourit lorsqu’Amaury proposa de rechercher des indices dans l’un des ouvrages de la bibliothèque. Le domaine abritait tant de savoir et des milliers de livres, les réponses à leurs questions se trouvaient certainement dans l’un d’entre eux.

- Reste ici et repose toi, je me charge d’aller à la bibliothèque et de rapporter quelques livres qui nous aideront peut-être dans notre quête d’indices. Je t'informerai également si je récolte d'autres informations concernant ces créatures.

Le maitre barde se leva et quitta la pièce, avant de revenir une heure plus tard, les bras chargés d’une pile d’ouvrages rares qu’il déposa sur la table de la chambre.

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Cela faisait suffisamment longtemps que le Chantebrise côtoyait des baptistrels, qu'ils soient aspirants, apprentis ou maîtres, pour que l'histoire d'Ascheriit ne l'étonne guère. Trop souvent sur les routes, il n'en connaissait pas autant sur lui que son ami et ses propos lui apportaient ainsi quelques détails supplémentaires. Qui ici pouvait se vanter d'avoir eu une vie heureuse, de n'avoir rien connu d'atroce ou d'effroyable ? Ils suivaient là une voie difficile, si restrictive qu'elle les poussait presque systématiquement devant d'horribles dilemmes.  Le respect qu'on avait à leur égard ne suffisait pas à rendre les gens plus compatissants et le monde semblait ne pas être fait pour qu'ils s'y sentent véritablement bien. Ce n'était pas que les vibrations étaient toujours négatives ni qu'il se montrait un peu trop pessimiste, car tout finissait par se mélanger, par faire naître une étrange neutralité, comme si les choses se rééquilibraient d'elles-mêmes. Non... c'était simplement un constat qu'il faisait parfois et qui le poussait souvent à lutter encore plus fort pour que cette sensation change et se transforme enfin en bonheur.

« La voie d'un baptistrel est loin d'être de tout repos et c'est bien pour cela que ce doit être une véritable vocation. Il faut sans doute être né avec celle-ci pour pouvoir aller jusqu'au bout du chemin. Il ne faut pas baisser les bras, jamais, se rappeler que nous avons cette force en nous pour nous guider, pour nous permettre d'avancer, encore et toujours, quelles que soient les difficultés. » Répondit-il simplement.

Ces qualités, cette persévérance, Ascheriit en avait à revendre et c'était bien pour cela qu'ils l'avaient choisi, même si cette histoire de malédiction formaient pour eux une redoutable barrière. Il connaissait bien la suite malheureusement, il l'avait vécu, tous deux en avaient été témoin...
Mais Amaury ne voulait pas continuer à se lamenter, il voulait avancer comme il l'avait toujours fait. Pleurer pouvait peut-être un peu soulager leurs cœurs, mais ça ne ramènerait pas l'Enwr, en revanche, s'ils pouvaient trouver des indices, même des plus maigres, ce serait certainement une bonne chose, un peu d'espoir pour eux et pour lui.

« Les grands pouvoirs font naître autant l'admiration que la crainte. Peut-être que les nôtres peuvent les aider, mais aussi anéantir leurs plans. Il faut que l'on réfléchisse attentivement à cela, pour essayer d'anticiper ou peut-être même de les arrêter. » Ajouta-t-il d'un air un peu songeur.

Est-ce que cette capacité qui leur permettait d'imposer une trêve, de faire cesser le choc des armes et l'agressivité était assez puissante pour qu'elle puisse s'interposer face à de tels êtres ? Les maîtres baptistrels étaient bien peu nombreux, mais s'il le fallait, ils agiraient de toutes leurs forces. Une fois de plus, quelque chose de grave semblait planer sur leur monde, mais ils n'étaient pas dos au mur, loin de là !

Suivant sa proposition, Ilyanth s'enquit d'aller à la bibliothèque pour débuter leur enquête mais, tout en hochant la tête et en souriant pour le rassurer sur son état, il accepta de rester dans sa chambre et de l'attendre. Il n'était pas du genre à vouloir se reposer et ses blessures ne l'handicapaient pas plus que cela, mais il ne voulait pas être une source d'inquiétude pour son ami. De plus, tout aveugle qu'il était, il savait bien qu'il ne pourrait pas lui être très utile pour déceler les bons ouvrages.
En attendant, il ouvrit la fenêtre de sa chambre et resta un instant à profiter de la brise qui arrivait jusqu'à lui. Puis il sortit sa flûte et commença à jouer quelques morceaux qu'il connaissait sur le bout des doigts. La musique tout autant que la pratique l'aidait à réfléchir en lui permettait d'apaiser son cœur, de calmer son esprit, d'aiguiser sa concentration.
Il cherchait dans leur magie, dans les multiples notes du ton baptistral celles qui seraient les plus à même de les aider. Ainsi, plongé dans ses propres pensées, le temps passa très vite. Amaury s'interrompit seulement lorsqu'il l'entendit arriver et, se précipitant dans sa direction, il l'aida à se délester de tous ses parchemins.

« Tes recherches ont-elles été fructueuses ? Je vois en tout cas que tu as ramené beaucoup de lecture. Même si je ne peux pas vraiment t'aider à avancer plus vite, pourrais-tu me lire ce qui te semble intéressant ? À deux, je suis certain que nous réfléchirons mieux. Dans tous nos savoirs, il doit bien y avoir une solution ou ne serait-ce que le moindre indice. »

D'un geste de la main, il l'invita et à s'asseoir et il fit de même, attendant d'une oreille attentive les premières informations.

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Le Chantefeu acquiesça aux paroles d’Amaury concernant l’âpreté de la voie du Baptistrel et la nécessité de faire preuve de persévérance afin de ne pas s’égarer sur ses chemins escarpés. Ilyanth mesurait l’immensité du chemin que lui-même avait parcouru avant de parvenir au rang de Cawr. Et cette ascension au rang de lié du feu avait éveillé sa conscience de l’importance des connaissances qu’il lui restait à maîtriser. 

-          Oui, c’est la leçon d’Ascheriit m’a rappelé grâce à son sacrifice et qui m’aide à garder l’espoir. Si lui est si persévérant et ne baissait jamais les bras, je me dois d’en faire autant et de me battre corps et âme pour venir à son aide. 
 

Les paroles suivantes du chantebrise firent naitre une expression songeuse sur le visage de Neolenn. En effet, les Baptistrels possédaient une grande puissance, mais celle-ci était limitée par leur serment. Un maitre-barde ne pouvait jamais briser son serment ou utiliser la magie Baptistral à des fins maléfiques sans perdre ses pouvoirs. Mais dans ce cas-là comment les chimères comptaient-elles s’en emparer ? Plus, Neolenn y réfléchissait et plus le problème lui semblait insoluble. 

-          Certes mon frère, notre magie est puissante et peut de grandes choses mais nous sommes contraints par notre serment. Si les chimères m’avait enlevé afin de me contraindre à commettre les pires ignominies, mon serment m’interdit de mentir, de tuer ou de commettre un acte nuisant à autrui…Et pour pouvoir user de nos pouvoirs, il faut obligatoirement être un Baptistrel. Selon moi, elles connaissent cette limitation de notre Art. Dès lors, je peine à comprendre leur stratégie…


La manière de procéder des chimères semblait si opaque et l’elfe du soleil espérait que cette discussion avec son ami l’aiderait à décanter les choses. Après cela, il disparut à la hâte et se rendit dans l’une des bibliothèques du domaine, avant de revenir quelques temps plus tard les bras chargés de livres. 

A son entrée dans la chambre, Amaury vint à sa rencontre et l’aide à se délester des ouvrages et des parchemins qui l’encombraient. Le chantebrise lui suggéra de lui faire la lecture, en raison de sa cécité, des passages les plus intéressants afin qu’ils puissent réfléchir ensemble. 

-          Très bien mon frère, je fais cela tout de suite. Le mieux pour débuter serait que nous recherchions certaines informations à propos de la magie Baptistrels, cela pourrait peut-être nous aider à mieux cerner les intentions des chimères. 
Ilyanth prit un gros ouvrage qui traitait de la magie des Baptistrels et en tourna les pages jaunies, puis il lut à haute voix le passage qui traitait du chant des étoiles. 

-          Le chant des étoiles nécessite un niveau grand maitre pour être employé. C'est un chant de paix absolue et de bien, une salutation aux étoiles et aux astres chantée par tous les maitres au lever et au coucher du soleil, un chant destiné à repousser le mal et à donner le regain et la vie.  Il transforme temporairement un endroit en sanctuaire contre le mal, car celui-ci ne peut supporter de l'entendre et il accélère les soins et les guérisons, il possède toutes les vertus curatives et apaisantes mais il nécessite une Odhr complète et un calme parfait. Il contient le nom de toutes les étoiles et de tous les astres visibles et invisibles, le nom du bien et du temps, et il est le pendant du chant de la terre à la seule différence que lorsque son nom est prononcé durant le chant, les étoiles apparaitront temporairement même en plein jour et il sera impossible de lever une arme contre qui que se soit. Cependant il est interdit de l'utiliser en dehors des sonates de l'aube et du crépuscule et hors d'un endroit déjà sacré ou consacré au soin. 


Le jeune Cawr réfléchit un bref instant avant de répondre :

-          Je pense comprendre pourquoi il a été efficace contre les chimères, il repousse le mal. Mais apparemment, ce chant ne peut être utilisé hors d’un endroit déjà sacré ou consacré au soin et uniquement à des moments précis, ce qui semble limiter sa portée…

Tout d’un coup, le chanteur tomba sur une page qui parlait du chant de la confiance et ses yeux s’agrandirent de curiosité en lisant sa description :

-          Il s'agit du premier chant Baptistral dont les maitres actuels ne possèdent que des bribes, le chant complet est une hymne en l'honneur des mystérieux « trois », capable de régénérer le monde. Bien qu'il s'agisse d'une allégorie, le chant est si puissant que celui qui le reformerait dans sa totalité deviendrait le plus grand maitre Baptistrel au monde… encore faut-il savoir de combien de parties il se compose. 


-          Le plus grand maitre Baptistrel au monde ? Je me demande si un tel pouvoir permettrait d’éloigner la menace des chimères et d’aider notre frère disparu…

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Chacun installé confortablement, ils pouvaient entamer sereinement les recherches dans l'espoir de trouver des réponses à leurs questions et surtout un moyen de sauver Ascheriit, si cela était encore possible. L'arracher aux griffes des Chimères était peut-être un espoir fou, mais ils souhaitaient tous les deux s'y accrocher, horrifiés à l'idée de l'abandonner ou même de se résigner.

Amaury ferma les yeux, comme si cela l'aidait à mieux se concentrer. Il entendait le bruit familier des ouvrages que l'on feuilletait, silencieux et immobile. La voix de son frère ne se fit pas attendre pour autant et il commença à lui lire un texte qui parlait du chant des étoiles. Lors des attaques, c'était celui-ci qui les avait sauvé et qui avait mis en déroute ces étranges créatures. Naturellement, compte-tenu de leurs intentions clairement maléfiques, elles ne pouvaient pas faire le poids contre un chant baptistral destiné à rendre un lieu totalement pacifique. Sans des sorts d’une telle ampleur, cela ferait longtemps que leur Ordre aurait été réduit à néant puisqu’il existait bien des êtres et des organisations avec des intentions néfastes, même vis à vis d’eux qui ne demandaient rien d’autre que la paix et l’harmonie.
C’était certainement une façon pour le monde et les dieux de les aider à porter leur message et leur aide, afin que tout ne soit pas que sang et douleur. Rien qu’à cette pensée, il avait envie de frissonner. Tant de guerres avaient eu lieu, tant allaient encore se produire. Malgré l’espoir et la persévérance des siens, il savait bien que ça ne suffisait pas. Ce n’était pas une raison pour baisser les bras, heureusement.

« Nous avons beaucoup de chance de posséder un tel chant. Il est l’une des dernières barrières pour protéger notre Domaine ou tout autre lieu sacré. Même si son utilisation est limitée, il existe peut-être d’autres chants, moins puissants, que nous pourrions user pour calmer ces créatures visiblement emplies de sentiments bien négatifs… J’aime le chant d’apaisement, mais j’ignore s’il produirait un effet suffisant. Peut-être qu’un des chants élémentaires comme celui du feu ou de l’eau... »

Amaury réfléchissait à voix haute, sans pour autant vraiment hausser le ton, laissant à son frère la possibilité de lire sans trop le déranger. Cela lui permettait aussi de réagir si jamais l’une de ses idées en l’air pouvaient les amener vers une quelconque piste.
Soudain, Ilyanth tomba sur un nouveau passage qui lui semblait intéressant. Il s’agissait d’un chant encore incomplet ou du moins dont on avait perdu des parties au fil du temps. C’était vraiment regrettable, mais pouvaient-ils faire beaucoup de choses pour éviter cela ? Rien que la destruction de la forêt elfique et le changement d’emplacement du Domaine avait entraîné des pertes irrémédiables…

« Oh, je m’en souviens pour en avoir entendu parler il y a longtemps… Il s’agit du chant de confiance dont on connaît seulement quelques parties. Est-ce qu’elles ont été retranscrites dans ce livre ? J’ignore cependant s’il pourrait nous venir véritablement en aide pour ce que nous cherchons… La puissance des Baptistrels n’est pas vraiment destinée pour lutter contre des opposants, seulement s’il permet d’amener ne serait-ce qu’un peu de paix, il pourrait en effet nous servir. Il faudrait que l’on trouve plus d’informations à ce sujet, y a-t-il des pistes que l’on pourrait suivre ? »

Le Chantebrise se tut, attendant simplement que son frère puisse lui donner davantage d’informations qui auraient été notées dans le livre ou, au contraire, qu’il lui dise qu’il n’y avait rien de plus. Peut-être pourraient-ils en discuter avec les autres maîtres pour en savoir plus puisque pour le moment, il ne savait pas réellement où ils pourraient bien trouver de nouveaux éléments.

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Ilyanth était absorbé par sa lecture, scrutant les lignes d’encre luminescentes des pages, dans l’espoir que celles-ci finiraient par lui révéler leurs ultimes secrets. A ses côtés, le Chantebrise réfléchissait à haute-voix et les mots qui s’échappaient de ses lèvres avaient la légèreté d’un vent de printemps. Ceux-ci informaient le lié du feu des pensées de son ami, sans perturber sa concentration et l’intensité de ses réflexions. L’elfe solaire acquiesça aux paroles d’Amaury :

- Oui, nous avons beaucoup de chance de posséder un chant si puissant, doté de la capacité d’éloigner le mal et de créer un sanctuaire sacré pour les âmes pures. Mais je suis inquiet de l’usage que ces créatures sont capables de faire de l’énergie du Néant…J’ignore par quel moyen elles ont fait renaître cette incroyable énergie. Depuis la disparition de Néant et des esprits, je croyais cette force perdue à jamais et pourtant…Je crois que c’est peut-être là que réside leur point faible en même temps que leur force…

Les prunelles céruléennes du cœur flamboyant se perdirent dans le lointain et une expression soucieuse se peignit sur son visage doré.

- Le pouvoir de Néant est incommensurable et lorsque cette énergie s’est répandue sur le domaine Baptistral, j’ai ressenti une impression épouvantable, celle d’être coupé de la magie qui coule dans mes veines depuis l’enfance, d’être privé du lien avec mon totem l’oiseau du paradis et de plus percevoir les vibrations du monde et le chant de l’univers. C’est une sensation ineffable et terrifiante pour un Baptistrel…Et…
Il marqua une courte pause avant de poursuivre :

- Et je sais que ce jour-là toi aussi tu l’as ressenti, tout comme maintenant la douleur d’avoir perdu un être cher nous unis.

La tristesse transparaissait dans les trémolos de la voix du musicien, révélant ses blessures intérieures mieux que ne l’auraient fait une longue introspection. Du reste, Amaury était un maître-barde et pouvait lire le cœur du chantefeu comme à l’intérieur d’un livre ouvert, en dépit de sa cécité. Celle-ci, semblait au contraire lui procurer une incroyable acuité sur les êtres, tel un don céleste lui permettant de voir ce qui ne pouvait être vu autrement que par le biais du regard de l’âme. Un grand sage avait d’ailleurs coutume de dire que l’essentiel est invisible pour les yeux.

Ilyanth referma le livre et répondit calmement à la dernière question de son compagnon :

- Amaury, mon intuition me dit que la vérité se trouve ailleurs qu’à l’intérieur des pages jaunies d’un vieux grimoire. Je ne sais pas encore où mais fais-moi confiance, je la trouverais même si pour cela je dois quitter la sécurité du domaine et parcourir la terre entière…Je vais partir à sa recherche...
A présent, malgré la douceur de son intonation, une franche détermination transparaissait en lui, comme si l’ardeur du brasier venait de renaître dans son cœur éploré.

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Les paroles de son frère semblaient ramener à la vie d'intenses et affreux souvenirs. Les combats qu'avaient provoqué Néant et l'arrivée de son armée tout autant que l'apparition récente des Chimères faisaient toujours saigner le cœur du Chantebrise. Seule sa volonté l'empêchait parfois de se sentir totalement impuissant face à ce genre de créature. Humains, elfes ou vampires ne semblaient pas tant faire le poids, si ce n'était par le nombre ou une astuce qui leur permettait parfois de triompher. Les choses iraient-elles toujours ainsi ? Les peuples avaient avant tout besoin de se reconstruire, de respirer, de rire et de sourire. Seulement le destin ne leur laissait que trop rarement ce genre de répit. Voilà qu'un nouvel adversaire avait surgi et que des combats apparaissaient déjà comme inévitables.

« C'était presque comme mourir, comme abandonner une part vitale de soi… » Amaury soupira doucement, comme si cela lui permettait d'évacuer l'angoisse qui s'était mise à peser au fond de son ventre. « Lorsque j'ai renoncé à la vue, j'ai abandonné une part de moi, de ma perception, mais… c'était bien différent. Il m'a fallu m'y habituer, vivre autrement, seulement c'était mon choix, un pas que j'avais besoin de faire. La vue m'était apparue depuis un moment comme une chose dont je ne voulais plus. »

Dans ces années de ténèbres, le monde lui avait paru si laid, si dénué de couleurs… Ses iris n'avaient plus été capable de cerner la moindre beauté et les images apportées par son esprit, qui se superposaient par-dessus avaient certainement contribué à le pousser sur cette voie. L'obscurité n'était pas vraiment apparue comme un moyen, plutôt comme un cri de désespoir, comme un renoncement. Aussi difficile qu'avait été cette période, elle avait été une étape nécessaire dans sa reconstruction, dans sa nouvelle vision du monde.

« Lors de l'attaque, ce vide que j'ai ressenti n'avait rien à voir. Si la magie venait à disparaître, même si nous pouvions physiquement y survivre, je ne crois pas que j'y parviendrais… Ce plus petit aperçu d'un monde sans vibrations m'a terrifié. Rien que d'y penser, cela me glace encore. » Avoua-t-il.

C'était l'une des principales raisons pour lesquelles rien n'aurait pu pousser Amaury à briser son serment. Ses convictions depuis toujours étaient sans doute encore plus fortes.

« Ce qui me fait le plus peur, c'est… notre propre impuissance. En tant que Cawr, nous disposons de grands pouvoirs qui nous aident à ramener le monde à la paix, mais… dès lors que nous en sommes privés, nous n'avons plus que nos corps, nos voix et dans des instants comme celui que nous avons vécu, nous étions si faibles… Je n'ai aucune idée de la manière dont nous pourrons régler le problème avec les Chimères, j'aimerais simplement que ça ne se fasse pas dans le désespoir et dans le sang. »

Les paroles de son frère au sujet d'Ascheriit n'avaient fait que révéler à voix haute une chose qu'il craignait. Bien sûr qu'Ilyanth n'allait pas abandonner et qu'il n'allait pas laisser leur frère, son ami à un tel sort sans rien faire. Cela risquait d'être dangereux, très dangereux même… Pourtant, il ne voulait pas l'en empêcher.

« Je sais. Ascheriit a besoin de toi. Seulement… il faut que tu me promettes d'être prudent, vraiment très prudent, Ilyanth. J'aimerais t'accompagner, mais j'ai déjà pris la décision de rester au domaine. Il faut… il faut que nous trouvions un moyen pour contrer l'énergie de Néant, pour que les Chimères ne fassent pas comme bon leur semble en détruisant tout sur leur passage… Je vais mettre tous mes efforts dans cela, nous ne devons pas perdre espoir, même après tout ce que nous avons traversé. »

Doucement, Amaury vint prendre ses mains et les serra, lui communiquant un peu de sa chaleur et de sa bienveillance.

« Mon frère, si jamais tu as besoin de moi, n'hésite pas, je viendrai toujours t'aider. Et si je trouve la moindre information, sois assuré que je te la transmettrai au plus vite. »

Le Chantebrise sourit légèrement. Il voulait lui transmettre de la joie et non de la tristesse, même s'il savait que leurs chemins allaient s'éloigner pour un moment, même s'il était certain qu'ils allaient tous deux traverser de terribles épreuves. Quoi qu'il arrive, il fallait qu'ils en sortent plus forts, qu'ils restent forts.

« Prends soin de toi, mon ami, puissent les vibrations t'apporter courage et réconfort. »

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Ilyanth ne desserrait pas les pétales de ses lèvres, absorbé par les paroles de son ami et les trouvait criantes de vérité. Ainsi tous deux partageaient un point de vue similaire sur la question et leur extrême sensibilité les rapprochait. Ensemble, ils avaient affronté le danger, manquant de succomber aux assauts de ces créatures malfaisantes et, en dépit de la disparition momentanée de la magie, aucun d’entre eux ne s’était avoué vaincu.

Maintenant encore, les maîtres-bardes se soutenaient dans l’adversité, pansant mutuellement leurs plaies et cherchant un moyen de délivrer leur ami enlevé. Les mires d’émeraude et de givre du chanteur à la voix ardente couvèrent son ami avec une infinie douceur, malgré que ce dernier, en raison de sa cécité, soit incapable de percevoir son regard et d’y lire son affection empreinte de compassion. Amaury incarnait un être meurtri par la vie, dont la fragilité dissimilait une grande force intérieure et la capacité de résilience ne cessait d’étonner le lié du feu.

Avec gravité, le Chantefeu prit de nouveau la parole :

- Je partage entièrement ton point de vue mon frère, j’ai vécu ce sinistre événement comme une amputation de la part la plus intime de mon être et pour rien au monde je ne souhaiterais revivre une telle expérience. Désormais que nous connaissons, au moins partiellement, le pouvoir des chimères nous pouvons nous organiser pour tenter de leur résister et afin qu’une telle tragédie ne se reproduise plus à l’avenir.

Ilyanth poussa un profond et les miroirs céruléens de ses yeux se couvrir d’un voile d’obscurité :

- Tant de familles sont endeuillées après l’attaque des chimères sur notre domaine ainsi que sur Estelin, la capitale du Royaume Elfique. Cependant, nous terrer au sein d’un abri ne nous protégera pas de ces créatures et le fait qu’elles soient parvenues à pénétrer au cœur de notre retraite tend à prouver que la meilleure solution serait de les affronter plutôt que de fuir, et cela malgré la peur qui assaille nos cœurs…J’ignore de quelle manière nous pourrons leur résister, mais comme toi je ne souhaite que la paix et je refuse de voir ce monde sombrer de nouveau dans un abime de sang et de souffrance.

Le spectre de la guerre planait de nouveau sur les Ambarhùnééns, violent, cruel et en apparence si inéluctable. Étaient-condamnés à lutter à jamais contre d’innombrables menaces, impuissants face à la fatalité et prisonniers de leur destinée ? Le chanteur ne pouvait se résoudre à cette idée et conservait une foi inébranlable en l’Utopie promise par les Dieux : celle d’un monde pacifique où les êtres connaîtraient la sagesse et l’harmonie. Mais pour l’heure, cet Idéal semblait à mille lieues de la réalité…

L’elfe solaire se remémora la vive frayeur qu’il avait éprouvé à la vue des chimères et la douleur se raviva au souvenir de la capture de ses Enwrs par des loups vampiriques et de la disparition d’Ascheriit. Hélas, pleurer sur ce qui n’était plus ne ramènerait pas les disparus et le passé demeurerait à jamais inchangé, seul l’avenir abritait une lueur de folle espérance.

Comme s’il sentait les émotions qui agitaient son frère Baptistrel, Amaury lui saisit les mains et les étreignit dans les siennes. Le Chantefeu se sentit rasséréné par ce geste de tendresse et la chaleur des vibrations qui émanaient de son ami.

- Merci Amaury, je n’en attendais pas moins de toi. Je sais que tu m’apporteras ton soutien indéfectible et quoiqu’il arrive nous serons unis dans le même idéal de paix, mais aussi dans la souffrance et l’adversité. J’espère revenir au plus vite au domaine, avec Ascheriit à mes côtés.

Le chanteur à la voix ardente se tut un bref instant, avant de reprendre d’un ton ému :

- A présent, il me faut te quitter, mais grâce au réconfort que me procurerons tes vibrations, je me sentirais plus fort, même si la distance nous sépare….

Après cela, Ilyanth qui sentait ses prunelles claires s’embuées de larmes, serra très fort le Chantebrise contre son cœur. Peut-être s’agissait-il de leur dernière étreinte et l’elfe désirait en profiter, savourer la plus infime parcelle de cet instant ; de même, ce dernier contempla le visage angélique de son ami, désireux de graver à jamais à l’intérieur de sa mémoire ses traits gracieux. Puis, sans prononcer un mot de plus, le Chantefeu se leva d’un geste gracieux et quitta la pièce, laissant Amaury seul à seul avec lui-même.


HRP: voilà c'était ma conclusion, si tu n'as rien à ajouter je peux me chercher de l'xp et de le mettre dans la chrono. Very Happy

description"Un seul être vous manque et tout est dépeuplé" (PV Amaury) EmptyRe: "Un seul être vous manque et tout est dépeuplé" (PV Amaury)

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