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15 septembre 1764

Sous les frondaisons, s'écoulait une rivière. Doucement, presque imperceptible à l'oreille. Son eau claire charriait de nombreux poissons, surtout des truites, que des petits pêcheurs aimaient taquiner avec un hameçon, un peu plus en amont, près de la route qui cheminait jusqu'à l'Imbrulée. Le chemin qui menait jusqu'à ma demeure serpentait le long de cette rivière. Une simple route marquait sur l'herbe folle par les vas et viens de mes propres pas, des sabots d'Indril ou par la venue de quelques visiteurs. Mais ceux-là étaient plus rares.

Ma maison trônait au sommet d'un des plus grands arbres de cette forêt, ses branches massives soutenant sans difficulté la charpente magiquement créée. Un escalier s'enroulait autour du large tronc et permettait d'accéder au sommet. La petite rivière, elle, s'écoulait quelques mètres sur le côté et offrait une source d'eau fraîche bien accessible.

La journée s'était écoulée dans un calme relatif. J'avais décidé de passer celle-ci loin de l'agitation de la capitale - ou de sa sœur détruite. Une visite imminente avait occupé une grande partie de mon esprit et m'avait gardé occupé toute la matinée ainsi que le début de l'après-midi.

Ce n'était pas tous les jours que je recevais l'Empereur. Je peinais encore à croire que ce denier avait accepté que nous nous rencontrions ici, et non au sein de son somptueux palais. Mais Claudius était avant-tout un soldat, un détail qui avait son importance et expliquait cette envie - ce besoin - d'être proche de ses troupes. La vie du souverain étant très remplie, ce dernier devait arriver avec une petite escorte en début de soirée.

« Je suis prête. »

Je relevais les yeux vers Orfraie, mon journal à la main. J'avais décidé de profiter des dernières heures avant l'arrivée de l'Empereur pour travailler sur un projet personnel. Un sort unique en son genre, à ne pas douter.

« Encore un instant, s'il te plait. » répondis-je en baissant les yeux sur mes notes. Plusieurs pages du petit journal en cuir brun sombre étaient noircie de mes observations au sujet de mon anneau, Curünicorma, ainsi que sur le sort que j'avais mis au point. « Je pense que ça y est. » Lui dis-je en relevant le regard vers elle. « Il n'y a qu'une façon de le savoir. »

Je hochais la tête, refermant le journal gravé du blason de ma famille dans un claquement sec. Je le glissais ensuite dans la poche sans-fond de ma cape, un cadeau de Madame Doubfire. La poche en forme de cœur continuait de me faire lever les yeux au ciel à chaque fois que je l'apercevais, mais je devais avouer qu'elle était fort pratique. Pas comme ce que la vielle dame avait glissé à l'intérieur et que j'avais découvert à mon retour chez moi. J'en rougissais encore rien que d'y penser.

Je me raclais la gorge, prenant une longue inspiration. « Trois, deux, un… Satar. » Murmurais-je, les yeux plissés et une mine inquiète sur le visage. En face de moi, la silhouette éthérée d'Orfraie disparue soudainement. « Non ! » M'écriais-je, inquiète, en faisant quelques pas vers l'endroit où elle se tenait un instant plus tôt. « Orfraie ? » demandais-je, la voix soudainement tremblante. Venais-je de commettre l'irréparable ? Était-elle partie pour toujours ?

Portant une main à mon cœur, que je sentais se serrer douloureusement, je fouillais les alentours du regard à la recherche de cette silhouette fantomatique. Je m'étais habituée à elle, ainsi qu'aux voix, et je ne voulais pas la perdre.

Un petit rire me tira de ma torpeur. Un rire différent. Un rire réel.

Je fis volte-face, ma cape tourbillonnant derrière moi, pour trouver Orfraie nonchalamment appuyée contre le tronc d'un pommier que j'avais moi-même planté. Sa silhouette n'avait plus cette aura éthérée, translucide… Se pouvait-il que… ?

« Ça a fonctionné ? » Murmurais-je en m'approchant à grande enjambée, m'arrêtant à un mètre de la dragonnière. Nous faisions presque la même taille, elle me dépassait de quelques centimètres seulement. Comme d'ordinaire, elle portait une tunique verdoyante. Son manteau des ombres, en revanche, était intact. D'ordinaire, il était abimé dans le bas, déchiré.

« Vois par toi-même. » Me répondis-telle, et j'entendis nettement sa voix au léger accent elfique. Ce n'était pas dans ma tête.
Elle tendit sa main, paume vers le haut, et je tendis la mienne. Ma peau rencontra la sienne, chaude et douce, et je sursautais quasiment à ce contact nouveau. « Ça a fonctionné ! » m'écriais-je en réduisant soudainement l'espace entre nous, attirant la guerrière dans une étreinte spontanée. Je la sentis refermer ses bras dans mon dos et savourer ce premier contact. Un contact tangible, physique. « Bravo. » Murmura-t-elle à mon oreille tandis que je la relâchais, une légère rougeur aux joues. « Il faudra essayer l'autre forme demain. Celle-ci devrait durer quelques heures. » Lui expliquais-je. Elle sourit d'un air entendu, mais je décelais une trace de mélancolie au fond de ses yeux améthyste.

« Viens, je t'offre le thé. »

*
**

« C'était toute une expérience. Merci pour le thé. »
« Avec plaisir. »

Je souriais doucement, accoudée à la rambarde. Les cheveux au vent, j'observais le ciel s'assombrir peu à peu. L'été n'était pas tout à fait fini et le jour allait être présent encore quelques heures. Le fond de l'air était encore chaud et j'avais délaissé ma cape sur le dossier de la chaise la plus proche, près de la petite table sur laquelle nous avions bu notre thé.

Sans doute éprouver par l'exercice du jour, la silhouette éthérée disparue, me laissant seule avec les autres voix. Des voix beaucoup moins claires que la sienne, moins amicales, que je repoussais au fond de mon esprit. C'était un entraînement quotidien et laborieux que d'avoir l'ascendant sur les voix, mais c'était nécessaire pour ne pas devenir folle.

Le silence revint, uniquement troublé par le vent dans les feuilles au-dessus de ma tête, et par la rivière qui s'écoulait juste à côté. Le martèlement des sabots d'Indril était lointain, mais je ne m'en inquiétais pas. Sa longe avait une certaine longueur qui lui offrait la possibilité de trotter tranquillement dans les alentours sans risquer de s'enrouler autour d'un arbre.

*
**

Moins d'une demi-heure s'écoula avant que je n'entende le martèlement des sabots sur le chemin. Cette fois, il s'agissait de l'Empereur. Depuis ma position en hauteur, j'observais donc ce dernier approcher au pas, sa cape rouge se détachant parfaitement dans cet environnement forestier.
Lorsqu'il ne resta qu'une vingtaine de mètres à parcourir, je descendis à sa rencontre, laissant ma main gauche glisser contre le tronc d'arbre, l'escalier en épousant parfaitement la courbe jusqu'en bas. Les mains jointes devant moi, j'attendis que l'homme à la haute stature démonte et s'approche, suivi de sa garde. Une garde moins consistante que celle d'Avara lorsqu'elle était elle-même venue me rendre visite, notais-je.

« Votre Impériale Majesté, je vous souhaite la bienvenue en ma demeure. Avez-vous fait bonne route ? » M'enquis-je en exécutant un salut respectueux, puis en l'invitant à me suivre jusqu'au sommet. Perché à une dizaine de mètres au-dessus du sol, l'exercice pouvait être fatiguant pour une personne manquant de cardio, mais je doutais fortement que ce soit le cas de la part de Claudius ou de ses gardes en armure. « Je suis heureuse que vous ayez accepté mon invitation à vous rendre jusqu'ici, je n'ignore pas que ce n'est pas très protocolaire. »

Au sommet, je l'invitais à prendre place à cette même table où Orfraie et moi avions bu le thé. Ou Avara et moi-même avions dégusté la tarte aux pommes de Sorel, des mois plus tôt. La chaise, tout en bois, était pourvue d'accoudoirs arrondis et d'un moelleux coussin orangé. Le dossier était tressé de fibres naturelles.

« Voulez-vous boire quelque chose ? J'ai une rare bouteille de vin elfique. Et d'autres sans alcool, si vous le souhaitez. Et vous, messieurs ? » Proposais-je en relevant les yeux vers les gardes.

Assise de l'autre côté de la table sur une chaise tout à fait similaire, je lissais les plis de ma tunique de la main droite. Ma cape était abandonnée sur le dossier de la troisième.

« Au début de l'été, votre nièce est venue ici même s'entretenir avec moi au sujet de votre projet d'école. C'est de cela dont je souhaite discuter avec vous. Connaître votre idée plus en détail et vos plans pour sa mise en place, si vous en avez déjà. » Commençais-je. « En vérité, lorsqu'Avara est venue m'en parler, j'avais déjà le désir de créer quelque chose de semblable, quoi que pas d'une telle envergure. Ce n'était pas dans mes capacités, ni dans mes maigres moyens de soldat. » Je pris une gorgée de mon propre verre, marquant une pause. « Pour être parfaitement honnête, j'ai été approchée par Ilhan Avente peu de temps avant. Ce dernier m'a proposé de rejoindre le Conseil des Mages. J'ai accepté tout en spécifiant que c'était au sein de l'Empire que je souhaitais agir pour préserver et enseigner la magie. Et c'est ici que votre projet, et la proposition faite par Avara, tombe à point nommé. »

La maisooooon (à peu près) :

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Après avoir fait le tour du monde, tout ce qu’on veut c’est être à la maison.

Une maxime qu’avait souvent entendu, et dis l’Empereur de Sélénia. Cela ne surprendrait peu de dire que la vie de Claudius avait été essentiellement faite de voyages : en tant que soldat d’abord, puis en tant que haut dignitaire politique, le Havremont avait beaucoup baroudé au-delà du logis familial. Il avait contemplé la joie dans les hameaux, les paysages surprenant de l’ancien monde et du nouveau, mais aussi les horreurs de la guerre où les endroits dévastés par les conflits mieux que quiconque dans sa famille, et peut-être même mieux que de très nombreuses personnes dans l’Empire.

Mais voilà, tout ce que Claudius préférait c’est être chez lui. Ce « chez lui » qui avait pris une géométrie variable en fonction de ses humeurs, mais à présent le « chez lui », c’était l’Empire. Cet Empire pour lequel il avait tant donné, cet Empire qu’il dirigeait à présent, et cet Empire dans lequel il pouvait fouler la terre pendant des heures, et trouverait toujours des petites choses pour l’émerveiller, même dans les endroits qu’il connaissait le plus.

Claudius était en déplacement ces derniers temps, pour rendre visite en particulier à Vex’Hylia Aërendhyl. Bien qu’il n’aimât pas spécialement se servir du protocole en toute situation, il avait annoncé sa venue en bonne et due forme en adressant une missive préalable, se doutant que voir sa personne était quelque chose que l’on préparait. Claudius avait conscience de son rôle, et de ce que cela impliquait pour ses sujets. Claudius savait que sa nièce faisait tout pour mettre en œuvre des projets autour de la magie, et Avara lui avait finalement rapporté que Vex’Hylia serait une sérieuse partie prenante à ce sujet, alors le Havremont avait décidé de lui rendre visite pour ce sujet.

Du moins, était-ce la raison officielle, car si tous déplacements de l’Empereur nécessitaient la mise en forme d’un certain protocole, et donc des raisons à fournir, Claudius n’en avait pas spécialement fait un événement incontournable non plus. L’Homme qu’il était, était de nature assez simple, en vérité. Et autant, cette visite promettait d’aborder un certain nombre de sujets « sérieux », de temps en temps, autant Claudius s’autorisait à être aussi un peu moins formel de temps à autres – bien que l’Empereur avait cultivé cette image très assidue depuis son arrivée au pouvoir pour se différencier des autres empereurs Kohans jugés trop laxistes –, et en se baladant ainsi dans les clairières de l’Empire, le Havremont avait un peu moins envie d’être la personne très droite qu’il s’efforçait d’incarner soir et matin depuis un certain temps.

Seulement, pouvait-il faire suffisamment confiance à Vex’Hylia pour se permettre de se comporter ainsi ? D’autant que certaines rumeurs à son sujet allaient bon train depuis que Claudius et sa délégation étaient revenus de Nyn-Tiamat. Même si évidemment, il y avait ce que les bonnes gens disaient, et les informations véritables. En l’occurrence, si ces rumeurs d’histoire d’amour ou de fiançailles quelles qu’elles soient avec Aldaron lui-même étaient fondés, il aurait tout de même espéré que ce dernier n’en parle à Claudius avant de filer une histoire d’amour avec une de ses lieutenantes. Compte tenu de la situation cela aurait été la moindre des choses.

Cela étant, en l’absence de quelconques nouvelles de ce côté-ci, Claudius se disait qu’il ne valait peut-être mieux pas en parler, ou très peu. Les balivernes et les quolibets étaient nombreux, et il n’aurait pas été surpris de constater que certains vampires auraient encore fait preuve de sournoiseries pour mettre à mal leurs adversaires, ou tout simplement le Prince Noir lui-même. Car même si Aldaron était un puissant personnage au règne probablement très incontesté, Claudius se doutât que comme dans tous les pays, quelqu’un ou quelqu’une avait peut-être des raisons de lui en vouloir, quel qu’en soit la raison.

Mais heureusement la pluie et le beau temps et les rumeurs en tout genre n’était pas exclusivement ce qui amena Claudius à se rendre auprès de sa lieutenante. Bien au contraire, des sujets autrement plus sérieux attendaient sa venue, et il ne perdait pas cela en vue : il s’agissait avant tout de converser de magie, et de son usage dans tout l’Empire.

Quelques kilomètres séparèrent encore l’Empereur ainsi que sa petite escorte de la maison dans les arbres de l’elfe, mais rien qui n’arrivaient à l’épuisement des montures séléniennes, aussi ils purent arriver à bon port – ou devait-on dire, à bon bois – en temps et en heure. Là, ils furent accueillis par l’immaculée qui les gratifia d’un salut bienheureux :

« Votre Impériale Majesté, je vous souhaite la bienvenue en ma demeure. Avez-vous fait bonne route ? Je suis heureuse que vous ayez accepté mon invitation à vous rendre jusqu'ici, je n'ignore pas que ce n'est pas très protocolaire. »

Claudius y répondit par la présente :

« Je vous salue Lieutenante ! La route fut exquise, comme toujours quand les sabots de ma monture foulent ces terres. Ne vous en faites pas pour le protocole, c’est un plaisir de vous rendre visite ici. D’autant, que celui qui décide du protocole est la personne qui se trouve devant vous. »

L’Empereur fit un petit clin d’œil à l’immaculée. Claudius aimait ces expressions sans détours, ce tabou qu’il brisait sans problème. Elle avait fait sa marque de fabrique auprès de ses soldats, autrefois, et c’était quelque chose qu’il n’avait pas vraiment perdu en tant qu’Empereur. Ses propos étaient ce qu’ils étaient et contribuaient à ancrer son caractère dans l’esprit des gens après tout.

Le Havremont suivi la lieutenante au sommet de l’arbre, et y découvrit une maison à l’architecture qui lui rappela effectivement les belles maisons elfiques qu’il avait pu croiser dans sa vie. Vex était immaculée, mais soucieuse de son héritage cependant, songea l’Empereur. Cependant, tradition ne voulait pas dire absence de modernité, et ils aboutirent bientôt à un salon de thé, muni de chaises tout à fait confortables, et surtout d’une grande table où l’on pouvait y manger, ou dérouler des parchemins, ou y faire d’autres choses, à loisir. Claudius visa tout ceci d’un air entendu, et pris place.

Là, Vex’Hylia les interrogèrent :

« Voulez-vous boire quelque chose ? J'ai une rare bouteille de vin elfique. Et d'autres sans alcool, si vous le souhaitez. Et vous, messieurs ? »

Claudius se frotta la barbe un instant, avant de répondre :

« Si cette bouteille est rare, alors gardons là peut-être pour une plus grande occasion, quand il y aura quelque chose à fêter. Il est rare de trouver du bon vin de nos jours … » Dit-il en ayant une émue pensée pour la légendaire bouteille de vin à la banane – dont la production avait tout de suite été arrêtée par mandat impérial, on se demande pourquoi – qu’on lui avait servi à Ilhan et lui. « Bien que ma vie ait été faite de nombreuses péripéties, je ne crois pas avoir goûté de spécialité elfique en matière de breuvage … Alors peut-être que ce genre ci conviendrait ? Quelques choses que vous buvez fréquemment, sans être boisson de cérémonie … Si vous êtes en possession de ceci bien entendu. Mais ne vous mettez pas non plus trop de pression sur les rafraichissements. » Claudius préférait en effet désamorcer toute panique, sachant que son statut pouvait en générer, surtout pour quelqu’un qui recevait directement une personne de son importance chez lui. Le Havremont était un homme simple, et s’il n’y avait pas de rafraichissements convenables, de l’eau suffirait, qu’elle soit de son outre ou servie dans une carafe d’or sertie de diamants, elle aurait le même goût. Ils n’étaient pas vraiment là pour cela.

Le sujet vint cependant de manière assez naturelle sur la table, car c’est son hôte du jour qui commença la conversation :

« Au début de l'été, votre nièce est venue ici même s'entretenir avec moi au sujet de votre projet d'école. C'est de cela dont je souhaite discuter avec vous. Connaître votre idée plus en détail et vos plans pour sa mise en place, si vous en avez déjà. En vérité, lorsqu'Avara est venue m'en parler, j'avais déjà le désir de créer quelque chose de semblable, quoi que pas d'une telle envergure. Ce n'était pas dans mes capacités, ni dans mes maigres moyens de soldat. Pour être parfaitement honnête, j'ai été approchée par Ilhan Avente peu de temps avant. Ce dernier m'a proposé de rejoindre le Conseil des Mages. J'ai accepté tout en spécifiant que c'était au sein de l'Empire que je souhaitais agir pour préserver et enseigner la magie. Et c'est ici que votre projet, et la proposition faite par Avara, tombe à point nommé.»

Claudius eut un petit sourire malin. Il avait fait toute confiance à sa nièce pour choisir des personnes de talent, et force était de constater qu’Avara avait tout de suite compris le sens de la démarche de son oncle : donner les moyens nécessaires à des personnes de son empire voulant changer les choses. Ceux qui avaient la volonté de construire quelque chose, peu importe leurs origines sociales. Cela Claudius le tu, mais le pensa en son for intérieur : il était fier d’Avara. Quant aux questions plus directes de Vex’Hylia, voilà la réponse qu’il y apporta :

« Pour résumer ce projet en quelques mots, l’idée essentielle est de faire de la magie utile et accessible. » Claudius eut un petit sourire, sachant que tout ceci n’était qu’une maxime, et que cela méritait un exposé plus long, ce qu’il s’empressa de faire :

« Vous n’êtes pas sans avoir que nos praticiens de la magie, qu’ils soient dans le milieu guerrier ou dans les affaires civiles ont fait la renommée de notre empire. Cependant, il y a toujours eu une indubitable aura de mysticisme autour des concepts liés à la Trame : moi-même, étant soldat, j’ai reçu des enseignements basiques autour de la magie, mais je n’ai pas poussé mon apprentissage plus loin que cela : manque d’intérêt, de temps … Je pourrais si je me concentrais faire tout juste apparaître une petite flamiche, là où des personnes comme vous seraient tout à fait capable de mettre le feu à cette forêt s’ils le désiraient. Je respecte cela, et nous avons besoin de personnes comme vous. Néanmoins, la magie si elle veut être maniée à la perfection, représente une vie d’apprentissage. C’est une chose moins innée pour les humains dans notre genre, que vous autres elfes, vampires et immaculés. Mais elle facilite tellement de choses qu’on ne pourrait se cantonner à garder ses savoirs pour quelques sachants, ce qui est plus ou moins le cas aujourd’hui. Cela, est une première chose. »

Claudius pris sa respiration et s’accorda un temps de respiration. Si lui et quelques autres côtoyaient des mages dans leurs quotidiens, il pensait là avant tout aux personnes plus nombreuses, qui n’avaient peut-être pas cette chance de pouvoir bénéficier d’un enseignement riche et cultivé. Il développa ensuite un second argument :

« La deuxième chose est plutôt lié au contexte géopolitique, mais n’est pas une proposition purement politicienne pour autant. Je vais cependant me permettre de parler de politique un instant. Puisque vous vous êtes entretenus avec Ilhan Avente, vous avez probablement entendu son discours alarmiste au sujet des ressources de la Trame qui s’étiolent, la fin des temps, ce genre de choses. Pour être tout à fait honnête, je respecte les paroles et les prétendues institutions nouvelles du Conseiller Avente, mais je n’y accorde pas plus de crédit que les paroles d’un ennemi de la nation, qui souhaiterait avoir la mainmise sur un mécanisme central de nos sociétés modernes et pouvoir nous faire plier de cette façon. L’Alliance et l’Empire ne sont pas en bons termes, et jusqu’à présent, Ilhan n’a jamais caché son appartenance à cette dernière. Bien qu’in fine, ses intentions soient louables, j’y consens. »

Claudius émit un petit soupir de fatigue, mais il reconnaissait bien là les procédés douteux des personnes dans le genre d’Ilhan : toujours à exploiter les faiblesses, faire des petits coups dans le dos. La vie de dirigeant était aussi de composer avec les personnes de cet ordre. Et en vérité, il n’était qu’à moitié surpris : Ilhan n’avait pas hésité non plus, du temps de Fabius. Claudius continua :

« Puisque nous nous trouvons à présent devant le fait accompli, je me dois de vous dire que pour l’heure, vous ne représenterez que vous-même dans ce Conseil. Vous pourrez prendre part aux réflexions, ou quoi que vous fassiez dans ce Conseil, mais ne jamais engager l’Empire d’un point de vue stratégique, sur ce qui se décidera là-bas. Ni ne divulguer quoi que ce soit nous concernant. Je compte sur votre plus grande discrétion sur nos pratiques ici. Ce n’est pas contre vous, et il est utile d’avoir des émissaires dans les initiatives de ce genre – si tant est qu’elle ait vraiment un avenir –, mais je reste méfiant pour l’heure. »

Claudius se nota pour lui-même de peut-être revenir sur ces sujets plus tard, en présence d’Ilhan pour lui répondre. Car l’Empereur avait dit non pour l’instant pour la présence de l’Empire au sein d’un conseil global. Et le pour l’instant n’était pas arrivé à son terme, bien que la situation se soit légèrement améliorée qu’à l’époque.

L’Empereur s’étira, et après avoir fait ce rappel nécessaire, continua :

« Pour revenir à nos moutons. Vous n’êtes pas sans savoir que Ipsë Rosea et Délimar ont rejoint le giron de l’Empire il y a peu. Une décision que je salue à bien des égards, et qui va venir diversifier notre population. Il y a notamment dans cette population des ingénieurs almaréens très compétents qui font des miracles de technologies avec des objets sans aucune magie particulière, et encore plus de mages de renoms. Je voudrais très sincèrement que ces deux mondes se rencontrent et collaborent. Car si nous ne pourrons jamais rendre l’étude de la magie très accessible car nous nous heurterons fatalement à un moment ou à un autre à des murs de complexité, nous pouvons peut-être créer des systèmes, ou des objets pouvant nous servir, pour contourner ses problèmes. »
L’Empereur eut un petit sourire, avant d’illustrer ses propos : « Je suis un guerrier, donc le premier exemple qui me vient est militaire, mais imaginez un feutonnerre suffisamment grand pour tirer automatiquement de gigantesques boules de feu. Plus besoin de dragons : nous les fabriquerions nous-même ! Mais l’on peut imaginer d’autres choses aussi. Imaginez par exemple, des montures qui pourraient se déplacer toutes seules via un système mécanique complexe incluant l’utilisation du flux de déplacement, par exemple ! L’on pourrait organiser par exemple du transport de marchandises de cette façon ! »


Claudius eut un petit rire, en profitant pour marquer une petite pause avant de reprendre :

« Vous allez me prendre pour un fou. Et probablement que cela prendra une éternité à être développer correctement, si cela est possible. Mais à la différence de ma personne, l’Empire est éternel. J’entendais le changer en profondeur, alors voilà une mesure qui irait dans cette philosophie : faire qu’ici, la pratique de la magie ne soit plus méconnue, mystique, réservé à un cercle restreint de personnes qui prononcerait des formules ou ferait des gestes clés pour actionner des choses … Mais qui irait peut-être plus vers l’avenir, qui soit vraiment considéré comme une science, au même titre que d’autres disciplines comme l’architecture par exemple. »

Claudius souffla et marqua une nouvelle pause, avant d’à nouveau prendre la parole :

« Je suis désolé, je me suis beaucoup étendu sur ces explications. Mais comme je l’ai dit à Avara, j’ai l’idée de ce projet probablement un peu fou. Tout ce qu’il me reste à avoir, ce sont des personnes sachantes, motivées pour le construire, me dire ce qui est possible ou pas, et le mettre en œuvre. »

Il adressa un clin d’œil à Vex’Hylia avant de dire :

« Et je suis heureux de vous compter parmi ces personnes. »

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Le bon vin fut donc mis de côté et je servais, à la place, une rafraîchissante boisson aux goûts légèrement sucrés. La carafe en verre qui contenait le liquide légèrement rosé était finement ciselé de motifs floraux, avec un bec prononcé pour ne pas gaspiller le précieux liquide à l’usage ainsi qu’une hanse qui n’était pas sans rappeler une racine noueuse. Le verre de l’empereur était également transparent, les quatre côtés sensiblement biseautés offraient une agréable prise en main.

« Ma mère avait l’habitude de me servir cette boisson lorsque j’étais enfant. Elle a la particularité d’être plus désaltérante que de l’eau et je pense que vous saurez en apprécier la fraîcheur. »

J’offrais un léger sourire à Claudius. Sa simplicité, si l’on pouvait appeler ça ainsi, était fort agréable. Très différente de tout ce que j’avais connu auparavant, même s’il était le premier souverain auprès de qui je gravitais de si près. Je n’avais jamais aimé, après tout, la politique. Trop de faux-semblants et de coups de poignards. Trop de mensonge, ce que je détestais tant. Mais l’homme assit en face de moi, en plus d’être quelqu’un de simple, me donnait l’impression d’être une personne droite qui répugnait le mensonge autant que moi.

Je ne passais donc pas par quatre chemins pour m’exprimer, exposant les faits le plus simplement et clairement possible.

C’était alors à mon tour d’écouter. Je nouais mes doigts sur la table, légèrement penchée en avant, et laissais l’empereur expliquer plus en détail son projet et la mission confiée à sa nièce. Le premier argument de Claudius tombait, pour moi, sous le sens. Sans m’en rendre compte, je hochais la tête à ses propos, et le laissais d’ailleurs continuer sans le couper. Je savais que mon intérêt pour ses paroles se lisait probablement sur mon visage, que je ne parvenais pas à garder neutre.

Son second argumentaire et la mention d’Ilhan me fit légèrement froncer les sourcils, mais mon faciès se dérida sitôt les explications de l’empereur entendu. Je comprenais son point de vue, c’était une chose à laquelle je n’avais moi-même pas pensée. J’étais, après tout, une guérisseuse. Même si je n’avais pas prêté serment de venir en aide à tout le monde comme c’était le cas des Baptistrels, je n’avais pas prêté attention plus que cela à la géopolitique de Carassin lorsque j’avais accepté d’aider le conseiller Avente. J’avais donc bien fait de clairement lui spécifier que je comptais enseigner dans l’Empire et qu’il n’aurait pas de contrôle sur ma façon de faire.

Quant à ne représenter que moi-même, pour le moment, auprès du Conseil des Mages, cela me convenait. Je n’avais pas eu la prétention, au départ, de parler au nom de l’Empire et je ne l’avais toujours pas. « Je ne voyais pas les choses différemment, n’ayez crainte. » me sentis-je donc obligé de préciser. Je n’étais, après tout, qu’un simple soldat de cette nation.

J’étais légèrement crispée désormais. Je comprenais qu'Ilhan avait fait fi de ce que l’empereur lui avait dit en venant directement me trouver. Je pensais toute à l’heure à quel point je n’appréciais pas la politique, et ceci était le parfait exemple de pourquoi je n’aimais pas ce monde.

À la mention suivante de Ipsë Rose et Délimar, j’acquiesçais. Il s’agissait là d’informations impossibles à manquer, d’autant plus lorsqu’une bonne partie des Almaréens se retrouvaient désormais dans le giron de l’Empire. Pour ma part, même si j’étais très curieuse des techniques de ce peuple, une part de moi, traumatisée, restait sur ses gardes lorsqu’il s’agissait d’eux. C’était, toutefois, un sujet sur lequel je ne comptais pas m’étendre avec Claudius, ou qui que ce soit d’autres d’ailleurs.

En revanche, l’enthousiasme de l’Empereur vis-à-vis des applications possibles de la magie mélangé au savoir faire Almaréen était communicatif. Je me surpris à sourire et imaginer diverses applications, notamment en matière de soin. J’avais, en effet, souvenir des talents de ce peuple lorsqu’il s’agissait de recoudre une victime ou de soigner une blessure sans magie. Coupler leurs techniques aux flux de guérison pourrait sans doute accélérer bien des processus de soin ou même rendre possibles des choses que même la magie ne pouvait faire…

« J’aime votre vision des choses, c'est un si beau projet... Et je suis honorée d'en faire partie. » commençais-je. Le contraire aurait été étonnant étant donné que j’avais déjà accepté d’aider Avara mais aussi adhéré au projet d’Ilhan. « Je vais cependant être un peu plus terre-à-terre. Lorsque j’ai commencé à y songer, je me suis souvenues des strates sociales de la société Sélénienne et à quel point il peut être compliqué d’obtenir quelque chose lorsqu’on n'a pas l’or ou le talent. Donc, que pensez-vous d’un enseignement gratuit ? Et si l’on sort du cadre de la magie, il est très intéressant de voir le niveau d’éducation d’une population augmenter. »

J’offrais un sourire à l’empereur, l’air clairement amusée par ce que je m’apprêtais à dire.

« Comme je suis un peu folle, mon rêve va au-delà de la magie. J’imagine une école immense, qui accepte tout le monde, et où toutes sortes de cours sont dispensés. Des enseignements les plus élémentaires comme la lecture et l'écriture, mais aussi l'Histoire, l'alchimie, les soins, la magie… ou même l'ingénierie, si le peuple Almaréen accepte de partager son savoir aussi librement. »

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Vex’Hylia se contenta d’obtempérer quant Claudius formula l’avertissement au sujet d’Ilhan. Bien. Il comprenait que la politique ne mette pas vraiment à l’aise Vex’Hylia (mais après tout, qui l’était vraiment ?), et passa rapidement à autre chose. Il précisa cependant une dernière chose à son égard :

« Je ne voue pas une haine personnelle au Conseiller Avente. Méfiance est cependant de mise tant que nous n’avons pas mis au point un certain nombre de choses avec nos voisins. Je ne manquerai cependant pas de me prononcer sur certaines choses par la suite. »

Ce qui ne devrait pas tarder à arriver : quoiqu’on en dise, les tractations étaient nombreuses entre Alliance et Empire – ne serait-ce que pour les échanges commerciaux vitaux pour une partie comme pour l’autre –, Claudius était donc en dialogue constant avec les instances dirigeantes de Caladon. En l’occurrence, l’Empereur et ses conseillers travaillaient à l’organisation d’une réunion diplomatique d’importance pour parlementer sur certaines choses. Il y avait longtemps que l’une et l’autre parties ne s’étaient pas vu, et bien que cela ne réjouissait pas spécialement Claudius, il est vrai qu’ils devaient se revoir ne serait-ce que pour faire plus ample connaissance. Prendre la température de ce que serait le futur sur Calastin ces prochains mois.

Mais tout ceci n’intéressait pas à ce stade Vex’Hylia, il choisit donc volontairement de la préserver de cela, pour plutôt revenir au sujet de conversation initial, et dérouler ses idées quant à son projet d’éducation.

Un projet, où il eut le plaisir de constater que les idées derrière celui-ci plaisaient à son interlocutrice. L’Empereur ne cacha pas son sourire quant elle renouvela ses vœux d’appartenance à celui-ci. Cela lui faisait plaisir de voir des personnes engagées au sein de celui-ci.

Il fronça cependant les sourcils quant il fut question d’une affaire essentielle : les gros sous. Sujet ô combien sensible depuis que Claudius avait remis les mains sur les comptes de l’Empire et avait travaillé, avec Dame de Briselame, à les assainir. À la suite de la remarque de Vex’Hylia concernant la gratuité de l’enseignement, et à quel point ce projet pourrait aller au-delà de la magie, Claudius se retroussa les lèvres, se frotta sa barbe fournie, et finit par formuler une réponse :

« Ce modèle de société est mort avec les Kohan qui ont abandonné ces terres, et avec le quartier noble qui a brûlé en son entièreté. » Le Havremont garda le silence pour quelques instants, ayant une pensée pour ses proches qui se trouvaient là au moment de la bataille des cendres, avant de continuer : « Je ne me cache pas cependant de vouloir une société méritante. Les travaux pour ce projet nous demanderont du temps, et de l’argent. Nous ne sommes pas une corporation privée, il n’est donc pas question que nous discutions d’un modèle de rentabilité … Cependant, il est important de comprendre qu’il s’agira d’un enseignement nouveau, de qualité, et qui aura effectivement son prix … J’adorerais que l’on puisse remplir les gamelles des futurs professeurs avec la Gloire de servir l’Empire, mais j’ai bien peur que je ne puisse demander à nombre de personnes de travailler gratuitement. »

Claudius marqua une pause, et en profita pour poser ses lèvres sur le breuvage que lui avait servi Vex’Hylia : une excellente boisson au demeurant, qui satisfait les papilles de l’Empereur en grand manque de chose pour les désaltérer. Il put poursuivre son discours par la suite :

« J’adorerai proposer un enseignement gratuit de bout en bout, mais l’Empire n’a pas les épaules financières pour cela. Pas pour le moment. Nous sortons d’une crise économique majeure, il faudra nous donner beaucoup de temps j’en ai peur, avant que nous retrouvions un état de richesse suffisant pour nous permettre ce genre d’initiatives ».

Ne voulant pas trop bassiner non plus Vex’Hyllia avec des problématiques de finances publiques, sur lesquels l’Empereur lui-même n’était pas des plus incollables dans le moindre détail – laissant tous lesdits détails à sa vaillante et très compétente Dominus du Trésor – , Claudius fit un petit mouvement de balai avec sa main, comme pour chasser ses pensées et ses paroles, avant de poursuivre :

« Là où vous marquez cependant un point, c’est que tout le peuple impérial, sans distinguo, a un cruel besoin de connaissances les plus élémentaires. L’Histoire, l’écriture, la lecture, quelques notions de mathématiques simples, la pratique de notre langue commune … Dans ma vie, j’ai rencontré tous types de personnes, et je n’ai jamais senti un fossé aussi grand quand je me rendais dans les quartiers populaires de nos villes. Et des révoltes populaires de notre pays auraient pu être empêché si nous avions concentré nos efforts sur les sujets centraux d’éducation. »

Claudius s’arrêta un instant, et eut temporairement son regard qui partait dans le vide, repensant à la révolte qui avait précédé la mort de Cynoë « Les déesses sont avec nouuuus … ». Claudius fronça les sourcils, et se secoua la tête. Ses images, tout comme celles de toutes les pauvres gens qui n’avaient rien à se mettre sous la dent, ne quittaient jamais vraiment son esprit, et lui rappelait chaque jour pourquoi il avait décidé de reprendre les rennes de ce pays. Pour le remettre dans le droit chemin, et en faire une nation forte.

« Voilà ce que je vous propose. – Reprit l’Empereur – Disons donc que nous pourrions établir un programme commun pour tous, où l’enseignement serait effectivement dispensé à tous gratuitement, et de façon obligatoire. L’histoire, l’écriture, la lecture, les mathématiques, les notions basiques de l’étude de la magie … Une école où tous pourraient avoir les bases pour s’en sortir dans notre monde moderne. Ces choses sont effectivement très importantes, et justifie que l’État fournisse un effort pour le financer. Quoi qu’il en coûte. »

Claudius sentit qu’il allait regretter ses paroles quand il allait en parler avec sa Dominus du Trésor, mais c’était un élément phare de son programme. Il n’était donc pas question de laisser cette opportunité passer. Il reprit :

« Cependant, l’étude poussée des soins, la magie, l’herboristerie, l’ingénierie et toutes ces choses-là, feront le sujet de frais d’inscription à hauteur pour garantir l’autonomie du projet. Nous attribuerons des bourses pour les élèves les plus méritants, bien sûr. Pour le moment. » Claudius insista bien sur ces trois derniers mots, avant de développer une idée importante pour lui :

« La clé de ce projet est le temps. Nous engageons une transformation profonde de notre société. Je m’engage à pleinement la soutenir, mais il est fort à parier que l’enseignement de certaines spécialités spécifiques n’attire pas grand monde tout de suite, car nombre de personnes restent encore occuper à des entreprises ne demandant pas vraiment des connaissances très spécifiques. Si vous voulez, le forgeron a simplement besoin de savoir comment forger, et le paysan a simplement besoin de savoir comment récolter son champ, ou s’occuper de son troupeau. Tout notre rôle est d’expliquer à ces personnes comment le faire mieux, ou plus vite, mais il est bon d’envisager ces cas-là de personne réfractaire au changement aussi. »

Claudius marqua une pause à la fin de sa phrase, se gardant un temps pour s’assurer que tout ce qu’il avait dit était bien compris par Vex’Hylia. C’était sa vision des choses, qui pouvait être soumise à des contre-arguments. En tant que dirigeant cependant, il voyait les choses de cette façon. Il haussa par la suite les épaules, avant de dire :

« Si vous le voulez le fond de ma pensée, je reste persuadé de toute façon que l’éducation est indispensable si nous voulons bâtir une grande nation, et si nous voulons que celle-ci vive avec son temps. Mais je doute que tout le peuple pense comme moi, comme nous. Et c’est tant mieux : il faut de tout. Mais je voudrais tout de même élever le niveau de ce « tout ». Et une fois que tous auront pris conscience de l’importance de ce projet, nous pourrons rendre les connaissances plus spécifiques gratuites, ou du moins faciliter les conditions d’obtention des bourses. »

L’Empereur garda le silence un instant. Cela était pour le volet des frais de scolarité, et des choses que l’on pourrait enseigner au sein de cette, ou ces académies. Il restait un point important à aborder dans les choses qu’avait évoqué Vex’Hylia, la question d’accepter « tout le monde. » Claudius s’y pencha donc :

« Concernant le fait d’accepter « tout le monde » … Pour moi, j’entends la chose comme : « tous les citoyens de l’Empire ». Il n’est pas question de faire œuvre de charité sur nos connaissances pour que des personnes malintentionnées espionnent notre modèle d’éducation, nommément les ennemis de notre nation. Je suis pour la préférence nationale, peu importe la race tant qu’il soit citoyen de l’Empire. Je n’exclue évidemment pas des programmes de partenariat avec nos alliés directs, mais pour les autres … D’autres modèles existent. L’Ordre Baptistrale notamment, accueille presque tout le monde, toute l’année. Leur travail est de garder et de diffuser la connaissance. Ils n’ont pas le monopole de celle-ci, mais je n’entends pas me fâcher avec eux en les parasitant. Ils sont des personnes précieuses pour notre monde. »

Claudius marqua une petite pause, avant d’ajouter une remarque :

« Nous devrions peut-être nous entretenir avec eux d’ailleurs. Que pensez-vous de tout cela ? »

L’Empereur se tu, passant cette fois en phase d’écoute de son interlocutrice. Il pris une nouvelle gorgée de la boisson, en regardant avec un sourire Vex’Hylia. Il appréciait parler avec elle. Ils avaient une approche différente des choses, mais ainsi le dialogue était nourri, et les délimitations du projet pouvaient être clairement posées, tout en ayant un échange de point de vue en bonne et due forme.

Définitivement, même si Vex’Hylia se qualifiait comme « simple soldate », Claudius sentit qu’il y avait quelque chose de bien plus fort qui dormait en elle. Peut-être qu’en discutant de cette façon avec elle, il allait pouvoir aussi en apprendre un peu plus sur elle, et déceler clairement ce potentiel qu’il estimait dormant…

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Mon rêve était fou, mais pas irréalisable. Cela prendrait du temps et de l'investissement, que ce soit pécuniaire ou personnel. Mais c'était la première fois, depuis mon arrivée au sein de cet archipel, que je ressentais de l'excitation vis-à-vis d'un projet. Ici, nous ne parlions pas de guerre. Je ne mettrais pas mes talents au service du combat, mais bien de l'éducation et de l'apprentissage. C'était une position que me correspondait davantage et m'assurait une certaine tranquillité d'esprit. Tout ceci, sans l'ombre d'un doute, pouvait se sentir dans le ton que j'employais ou même dans ma posture, clairement en avant et à l'écoute, attentive.

Quant à la gratuité de l'éducation, je ne me voilais pas la face. Proposer une telle chose au jour 1 d'une telle école était impossible, pas avec la crise de laquelle l'Empire sortait à peine. Je ne fus donc guère déçu lorsque Claudius évoqua ce point et revint, comme je venais de le faire, sur la crise économique qui avait fait tant de mal. Je hochais la tête, compréhensive, tout en portant mon verre à mes lèvres afin d'en boire une gorgée salvatrice, sous cette chaleur de septembre encore bien lourde. Au moins, nous étions à l'ombre.

Travailler gratuitement, pour ma part, ne me posait pas de problème. Au moins au début, songeais-je. Ma magie m'avait apporté un toit sur ma tête, mais également beaucoup d'autres choses pour mon quotidien. Je doutais que le soldat moyen de l'Empire ait une maison comme la mienne. Pour le reste, je saurais me débrouiller si nécessaire. Je l'avais déjà fait par le passé, je saurais le refaire. Mais c'était là une extrémité où il ne serait sans doute pas utile de nous rendre.

« C'est une excellente idée. » Répondis-je lorsque Claudius eut fait sa proposition. C'était une façon de couper la pomme en deux et de s'assurer d'un niveau minimal d'éducation pour l'ensemble de la population. Je ne demandais pas mieux. Les autres arts, eux, seraient ainsi réservés à des gens pourvus d'une réelle envie d'apprendre dans ces domaines. Cela éviterait les pertes de temps et réduirait les effectifs d'une classe, permettant alors de se focaliser sur des personnes vraiment intéressées.

La notion de temps me fit lever un sourcil et je réalisais, en portant mon verre à mes lèvres, qu'il y avait des chances que Claudius n'en voit pas la grande finalité. Il pouvait lancer le projet, mais d'ici à ce que tout se mette en place et se suffise à lui-même, peut-être serait-il entré dans la roue de la réincarnation. Après tout, il n'était plus un humain de première jeunesse et le gris dans sa barbe en était un bon rappel, de même que les rides au coin de ses yeux.

« J'en conviens, tout cela sera un long processus à intégrer dans la dynamique de l'Empire. Ce peuple n'a jamais rien connu de tel… »

Je ne me voilais pas la face, tout ceci allait être compliqué. Mais c'était un beau défi.

Vint ensuite le sujet épineux. J'avais eu conscience, sitôt les mots sortis de ma bouche, qu'ils n'étaient sans doute pas assez spécifiques.

« Nous ne vivons malheureusement pas dans un monde où il est possible, aujourd'hui, de partager ainsi nos connaissances. Les mots que j'ai utilisés n'étaient pas assez précis, mais c'est à cela que je pensais. L'Empire et ses alliés, sous certaines conditions, éventuellement. » Je me laissais aller en arrière, contre le dossier de ma chaise. Du bout des ongles, je pianotais un instant sur le bois de l'accoudoir, réfléchissant à la dernière question de l'Empereur.

« J'ai étudié et vécu avec les Baptistrels presque toute ma vie. » Révélais-je pour la première fois à l'Empereur. C'était un pan de mon passé pour lequel je ne ressentais aucune gêne à l'idée de le partager. « Cela peut valoir la peine de leur parler d'un tel projet. Je me souviens avoir voyagé dans de nombreuses villes, sur notre terre natale, pour partager l'enseignement de l'Ordre. Nous pourrions les inviter à venir le faire entre les murs de cette école, ils auront sans doute à nous apprendre en matière de pédagogie et de transmission du savoir. »

Cela me semblait si loin. Pourtant, du haut de mes quatre-cents ans, j'étais encore jeune. Tout ceci, c'était hier. Mais ce n'était pas la sensation que j'avais. Il s'était passé tant de choses ces dix dernières années, assez d'aventures et de catastrophes pour une vie entière… Malheureusement pour moi, les choses n'allaient pas tout à fait en s'arrangeant. Mais ce n'était pas le sujet…

« Lorsque j'ai parlé avec Avara. - commençais-je avec familiarité en évoquant la jeune femme que je connaissais depuis qu'elle était enfant - elle avait une vague idée sur la marche à suivre pour mettre un tel projet en place. Mais je constate que, vous, vous avez longuement réfléchi à la question. Et nous tombons d'accord sur tous les points, ce qui est un vrai ravissement. »

Je repris une gorgée de mon breuvage, appréciant ses notes florale.

« Cela tombe sous le sens, mais cette école devrait voir ses murs s'élever, si ce n'est au sein même de l'Imbrûlée, puisque les plans de la ville sont déjà définis, au moins à côté de celle-ci. L'idée de s'excentrer pour offrir un cadre paisible est alléchante, mais si nous voulons que les plus réfractaires aux changements acceptent celui-ci, ne pas sortir trop loin des murs de la ville est sans doute préférable. Peut-être un entre-deux, comme un lieu qui fait la jointure entre la cité et la campagne. Ce sont deux mondes si différents… »

Un peu comme Claudius et moi. Nous n'étions pas du même monde, littéralement. J'étais autrefois une Elfe. J'étais aujourd'hui autre chose. Lui était un Humain. Et pourtant, nous étions capables, malgré nos différences, de nous entendre et de tomber d'accord sur tous les points évoqués, là où mes semblables étaient plus réputés pour leur haute opinion d'eux-mêmes et faire peu de cas de celle des autres. J'avais toujours eu quelques difficultés à m'intégrer dans Sélénia, à mon arrivée. J'en avais encore. Mais l'homme assis en face de moi me m'était, étonnamment, très à l'aise. Pourtant, tout Empereur qu'il était, la logique aurait voulu l'inverse.

« J'apprécie beaucoup cette discussion. » dis-je soudainement, sortant un peu de nulle part et surtout de ma zone de confort. Mais j'avais besoin d'exprimer cette sincérité et il fallait bien y mettre des mots. « Cela me sort de ce quotidien qui ne me correspond pas toujours, ainsi que de mes pensées. » Je n'avais pas songé à chagrin depuis l'arrivée de Claudius, ni ressenti la peine qui étreignait d'habitude mon être. « Et j'aime d'autant plus que vous laissiez sa chance à quelqu'un que vous connaissez à peine, même si j'ai un lien d'amitié fort avec votre nièce. » Je penchais légèrement la tête, un léger sourire flottant sur mes lèvres. « J'ai conscience que tout ceci sort de nulle part et est soudain, mais je tenais à ce que vous le sachiez. Alors… merci. »

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La discussion était plutôt correcte pour l’essentielle, et constructive pour les prochaines semaines. En échangeant ainsi de dirigeant à sujet, Claudius constatait que l’on pouvait facilement faire avancer des sujets, sans pour autant avoir des points de vue véritablement ambivalents.

Point qu’il n’en doutait vraiment, mais avec le recul, Claudius avait toujours regardé avec bizarrerie les dirigeants Kohans qui s’étaient succédé, et qui avaient pour lui tous essentiellement le même défaut : tous enfermé dans leur tour d’argent de noblesse, ils finissaient par ne plus entendre les véritables préoccupations des gens. Un manque d’empathie ou une construction sociale faisant que tout finissait par partir à vau l’eau ? Claudius avait toujours hésité sur l’un ou l’autre. Probablement était-ce un peu des deux.

Toujours est-il que lui trouvait cela si simple. Cela lui avait certes pris un peu d’effort, il avait dû ménager son agenda pour faire en sorte de prendre ce temps pour aller visiter une lieutenante impliquée, mais comparativement au temps qu’il allait gagné après avoir échangé de la sorte, sans parler du capital sympathie qu’il allait potentiellement se constituer. Claudius n’était pas un homme de calcul politique, mais là en l’occurrence, il était persuadé que pour la jeune immaculée, il passait pour un dirigeant à l’écoute, sans pour autant trop concéder de ses convictions.

C’était si simple, alors pourquoi d’autres ne l’avaient pas fait avant lui ? Mystère et boule de gommes. Cela faisait partie des grands mystères de la vie auxquels Claudius n’obtiendrait probablement jamais de réponses.

Toujours est-il que présentement, Vex’Hylia et lui trouvèrent des lieux communs assez rapidement : ils proposèrent, et amendèrent au fur et à mesure de la discussion, pour construire quelque chose de cohérent. Claudius ne put s’empêcher de sourire : il aimait quand les choses allaient comme prévu. Les dernières années de vie de l’Empereur s’étaient essentiellement constituées en gérant des imprévus, alors parfois, quand tout allait bien, c’était un moment à savourer aussi. Un moment dont il se délectait aisément, en savourant la boisson servie par Vex’Hylia. C’était un moment très agréable.

Claudius se permis d’ajouter quelque chose quand Vex’Hylia aborda la question des baptistrels :

« Si vous connaissez l’Ordre, alors vous semblez effectivement être la personne toute désignée pour leur en parler. » Fit-il, avec un petit clin d’œil. « Lorsque le moment sera venu pour vous, si vous avez besoin d’une escorte officielle, n’hésitez pas à parler à nos frères et sœurs d’armes de la marine. Il y a pour sûr quelques loups de mer trainant dans nos ports qui seront ravis de vous emmener jusqu’à Néthéril. Dites que vous venez de ma part. Cela fait toujours son petit effet. »

Claudius eut un petit sourire taquin. « Petit effet » d’abord, parce qu’il était évidemment le dirigeant de ce pays, mais aussi parce qu’avec son long passif de soldat, Claudius s’était fait de nombreux amis, notamment dans la marine où il avait placé à la tête de celle-ci nombre de ses connaissances d’antan quand il avait atteint le titre suprême. En conséquence, le Havremont jouissait d’une petite réputation. Si cela pouvait bénéficier à ses proches, il était ravi d’en faire profiter. Spécialement car prendre un bateau battant Pavillon Impérial n’était pas de tout repos, compte tenu de la guerre que l’Empire menait avec la Confrérie Pirate.

Il fut par la suite question des plans de cette académie, et comment allait-elle concrètement se dessiner : Si Vex’Hylia semblait avoir réfléchi à la chose, là encore, Claudius pris – figurativement – son chapeau « d’expert en architecture des bâtiments publiques », et apporta quelques propos de complétude pour que l’immaculée se fasse une idée concrète de tout ce que cela représentait :

« Pour parler un instant de projet d’urbanisation, l’idée d’entre-deux me plaît bien. Je pense qu’il est important de toute façon que cette académie soit construite à un point central de notre Empire, puisque ce sera une des réformes majeures de mon début de mandat impérial. Et l’Imbrûlée sera un point central de notre Empire, alors l’avoir non loin des murs de la capitale me va très bien. » Claudius acquiesça passivement, en songeant au fait qu’au pire, il serait toujours temps de construire des antennes un peu partout, notamment pour la diffusion de l’enseignement fondamental. Il ajouta à sa réflexion la chose suivante : « Cependant, vous n’êtes pas sans savoir que pour construire, il nous faut de la matière première. Nous en fabriquons, mais pas suffisamment. Nous sommes aussi tributaires de nos relations commerciales pour les projets d’une plus grande envergure … » Claudius soupira, avant d’ajouter d’une voix un peu morne à sa démonstration : « Le marché noir ayant fait plus de dégâts dans nos caisses qu’un énorme dragon lâché dans un magasin d’argenterie … Nos finances sont au plus bas, et même si la Dominus du Trésor et moi-même travaillons d’arrache-pied à assainir nos dettes, cela nous paralysie beaucoup dans nos projets d’expansion… » Claudius termina donc sa petite démonstration : « En bref, tout cela pour dire que dans les premiers instants, vous n’aurez peut-être pas tout ce qu’il vous faut, ou que tout ne rendra peut-être pas comme nous l’imaginons en cet instant présent. Nous n’allons peut-être pas faire cours dehors … Mais cela prendra du temps. » Claudius eut un petit sourire taquin, avant de ponctuer sa phrase avec une pointe d’humour : « Être dirigeant, cela vous apprend la patience. »

Claudius était un homme de fougue, agissant très souvent sur l’instant, et attendant des résultats immédiats. Il était dans l’action et n’aimait pas attendre. Mais depuis qu’il était Empereur, il avait du revoir ses ambitions à la baisse, ou apprendre à planifier : « L’Empire ne s’est pas construit en un jour ! » comme lui répétait sa famille si souvent. Mais l’idée que ses ennemis se reconstruisaient pendant que lui stagnait l’insupportait. Mais c’était ainsi et il ne pouvait en être autrement … Du moins jusqu’à la preuve du contraire. Alors il prenait son mal en patience pour l’heure.

Claudius eut un petit sourire, et sentit une pointe de rouge sur son visage quand Vex’Hylia remercia l’Empereur soudainement, et lui fit quelques confidences quant à son quotidien et sur ce qu’elle resentait présentement. Un compliment, voilà qui touchait sincèrement le Havremont. Lui qui était dans une posture de travail depuis le début de cette conversation ne s’attendait pas vraiment à cela. Mais cela faisait plaisir à entendre. Il tenta de répondre à tout cela par la présente réplique :

« C’est tout naturel Dame Aërendhyl. Vous n’êtes pas ici depuis longtemps, et pourtant vous faites déjà bien plus que nombre des sujets de cet Empire. C’est avant tout pour cela que je suis venu vous rencontrer personnellement à nouveau, bien que j’aie beaucoup d’amour pour ma nièce. Vous êtes en vérité une formidable ambassadrice de ce que j’essaie d’insuffler dans cette nation. » Claudius pris une gorgée de boisson, avant de préciser une chose : « Mais au-delà du symbole, vous êtes une personne dont j’apprécie la compagnie. Vous respectez mon statut d’Empereur, mais vous savez aussi dire les choses qui vous tiennent à cœur. Ses convictions là, sont résolument importantes, dans un monde où l’on veut parfois vous aliéner au profit de puissants. Depuis que je suis haut placé dans cette société, j’ai connu des gens qui étaient prêts à tout pour un poste. Vous, vous n’oubliez pas que je suis dirigeant, mais vous n’oubliez pas qui vous êtes pour autant. Ce sont des esprits comme vous que j’aime. Car même si je vous connais peu par rapport à d’autres de mes amis, vos paroles sont sages et je sais que je pourrais compter pour vous en de nombreuses autres situations que celle que j’évoque avec vous présentement. »

Claudius eut un petit sourire, avant de faire un petit clin d’œil à l’immaculée :

« Enfin, le pourrais-je, Dame Aërendhyl ? »

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J’avais doucement approuvé du chef lorsque l’Empereur évoqua le manque de matériaux et d’argent. C’était une problématique dont j’étais parfaitement au courant puisque j’avais également participé à la construction de l’Imbrûlée. Le flux de Construction nous avait évité bien des tracas, mais bâtir une école en utilisant uniquement la magie me semblait mal, même si cela était possible. Après tout, faire appel aux bâtisseurs de l’Empire pour ce projet d’envergure assurait d’offrir un travail à de nombreux sujets. Et qui disait travail, disait argent. Et qui disait argent, disait « nourriture dans l’assiette. »

Comme Claudius le soulignait avec une pointe d’humour, je devais m’armer de patience. Nous le devions tous.

Mais en attendant, j’avais à faire. J’ignorais quand exactement, mais je devais planifier un voyage vers Néthéril pour rencontrer les Baptistrels. J’allais devoir trouver un moment permis mes prérogatives de soldat. Ou demander à ma hiérarchie la permission de partir en voyage pour l’Empereur. Une raison suffisante pour qu’on me laisse le champ libre.

Et ce n’était pas sans amusement que j’imaginais la tête de mes supérieurs lorsque j’allais leur en parler.

Mais revenant au présent, je distinguais une pointe de rouge sur le visage de l’Empereur. Un léger sourire naquit sur mes lèvres, touché par la réaction de l’homme assis en face de moi. Tout chef qu’il était, il restait humain. Et il était toujours agréable de recevoir des compliments vis à vis de son travail ou de soi-même.

Lorsqu’il prit la parole pour répondre, ce fut à mon tour de rougir légèrement. Le compliment était agréable, je ne le cachais pas, et je l’acceptais avec plaisir. Je n’avais jamais vraiment cherché à me faire bien voir en me dévouant à la tâche. C’était simplement ce qui, à mes yeux, était à faire.

Sa dernière question, accompagnée de ce clin d’œil que je n’attendais pas, me tirèrent un léger rire. Je penchais la tête sur le côté tout en saisissant mon verre, le portant à mes lèvres.

« Vous le pouvez. Vous n’avez qu’à demander. » Lui répondis-je en premier lieu avant de boire une gorgée rafraîchissante. « Vos mots me touchent. La sincérité est une qualité que je recherche dans toutes mes relations. » Je haussais les épaules, le regard un peu lointain, avant de ramener mes prunelles volcaniques sur Claudius afin de rebondir sur ses propos vis à vis de ces gens à la recherche d’un poste prestigieux. « Je suis née noble, j’ai grandi comme telle et j’ai vécu des siècles de façon privilégié. Un titre de noblesse n’apporte pas le bonheur. C’est même souvent l’inverse. Alors, sans doute, suis-je même plus fiable que d’autres parce que je ne cherche pas une position prestigieuse. »

Une des raisons qui m’avait poussé à vivre simplement, loin de la ville. Cette maison ne manquait de rien, mais elle faisait pâle figure à côté de l’endroit où j’avais grandi, avant de rejoindre le domaine. Et outre mon rôle de soldat, je n’avais pas d’obligations inutiles.

« Quant à rester entière… j’imagine que l’âge joue là-dedans. J’ai connu mon lot de dirigeants à travers les siècles. Je me suis forgé une expérience… et je préfère, de loin, rester moi-même. C’est sans doute un peu naïf, mais je trouve cela plus payant. Et je peux continuer à me regarder dans un miroir. »

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« Formidable, moi de même. » fit l’Empereur en entendant la réponse de sa lieutenante sur sa disponibilité, et sur la sincérité. Voilà qui le rassurait pour l’avenir : avoir des personnes de confiance dans son entourage était une bonne chose.

Si d’ordinaire l’Empereur avait toujours été quelqu’un de très autocratique, fuyant comme la peste les nobles lui faisant des courbettes pour avoir de l’attention quelconque, sa position avait évolué sur la question depuis qu’il était devenu dirigeant : être commandant d’une armée, et diriger un pays, bien qu’il y eût des similarités était une tâche entièrement différente. Aussi, il avait rapidement admis dans son cercle social quelques personnes compétentes et – surtout – de confiance pouvant l’aider à administrer ce pays.

De confiance car les personnes qui l’aidaient savaient qu’il avait nommé savaient que quoi qu’il arrivât, Le Havremont aurait le dernier mot car ainsi étaient rédigées les lois de ce pays. Il ne fallait donc pas quelqu’un de contestataire, ou encore moins quelqu’un qui avait un quelconque lien avec ses ennemis. Pour l’instant tout s’était déroulé comme prévu de ce côté-ci. Claudius se frotta la barbe : si Vex’Hylia venait à être une de ses conseillères, il se demanderait quel serait sa place, compte tenu de la composition de son Conseil actuel, et des enjeux actuels de l’Empire …

Il eut un regard vers le plafond de la maison, avant de pousser un petit soupir : peut-être repenserait-il à tout cela plus tard. Il venait de passer un long moment à discuter travail, et de toute façon rien ne pressait : l’immaculée devait encore faire ses preuves. Cela, Claudius y veillerait. Elle avait su faire ses preuves en temps de guerre, s’il devait la prendre auprès de lui, elle devait aussi prouver sa valeur en temps de « paix », ou du moins sans menace d’attaque directe. Il avait encore quelques réserves sur la question. Mais il aurait tôt fait de trouver quelque chose à lui faire faire pour la défier discrètement.

Mais plutôt que d’errer dans ses pensées, Claudius essaya de reprendre le fil de sa conversation avec la personne en face de lui :

« Je suis née noble, j’ai grandi comme telle et j’ai vécu des siècles de façon privilégié. Un titre de noblesse n’apporte pas le bonheur. C’est même souvent l’inverse. Alors, sans doute, suis-je même plus fiable que d’autres parce que je ne cherche pas une position prestigieuse. Quant à rester entière… j’imagine que l’âge joue là-dedans. J’ai connu mon lot de dirigeants à travers les siècles. Je me suis forgé une expérience… et je préfère, de loin, rester moi-même. C’est sans doute un peu naïf, mais je trouve cela plus payant. Et je peux continuer à me regarder dans un miroir. »

Le Havremont se frotta la barbe, avant de répondre :

« Vous touchez le bon point, quand vous dites que vous avez vécu des siècles. Nous autres humains, ne vivons pas des siècles, voir nous nous battons pour survivre. Ceux qui cherchent une position ont une ivresse du pouvoir, ou parfois un héritage à assurer, car ils savent justement que leur vie n’est pas éternelle. » Claudius haussa les épaules, avant d’ajouter : « Reste à savoir comment la roue de réincarnation les traite par la suite pour avoir vécu une vie de telle sorte. Mais cela, aucun moyen de savoir avant d’y être, et même si mon âge se fait grand pour un être humain, j’ai encore à faire avant de me poser ce genre de questions. » Claudius soupira : pourtant, ce n’était pas faute d’avoir provoqué Mort plusieurs fois en s’opposant à des dragons, et des vampires dix fois plus forts que lui, parce que beaucoup plus âgés. Mais après tout, s’il était encore là aujourd’hui pour en parler c’est qu’il devait avoir fait les bons choix.

Le Havremont n’était pas un homme des plus pieux, en ce sens où il ne passait pas sa vie à jurer sur les Huit ou à les prier, mais il aimait croire à des forces divines, et au Destin. Pour lui, rien ne se faisait par hasard. Tout comme cette présente rencontre : Vex’Hylia était arrivé par un bâteau d’une île égarée, l’équipage avait trouvé terre dans l’Empire, et y étaient restés, même après les tumultes divers et variés, alors qu’ils auraient très bien pu fuir vers d’autres endroits plus cléments en Calastin, ou ailleurs. C’était forcément un signe du destin, ou alors synonyme du fait qu’ils aimaient beaucoup Claudius et ses terres.

Le Havremont eut un petit rire intérieur : il ne pensait pas qu’à première vue les gens restaient parce qu’il l’aimait bien. Il était trop sérieux. En tout cas c’est souvent ce que sa femme lui disait : bien qu’il soit un homme gentil, parfois boute-en-train quand il était de bonne humeur, et réponde présent quand il le fallait pour sa famille … Il avait cet air austère et surtout des préoccupations politiques constantes. Mais ainsi était la vie.

« Pouvoir se regarder dans un miroir, voilà quelque chose de très important. Je ne suis pas toujours tendre, et j’ai pris des décisions et fait des choses qui font que de nombreuses personnes veulent me voir mort ou aux cachots jusqu’à la fin de mes jours aujourd’hui. Mais je ne regrette rien. Ma vie n’est pas aussi grande comme la vôtre, mais mon pays survivra, qu’il pleut, qu’il vente où qu’il neige. Je suis un Empereur certes, mais avant tout un Homme et un Père. Mes enfants et mes petits-enfants grandiront dans ce pays. Je veux leur laisser le meilleur possible, et cela je pense que tout un chacun peut le comprendre. » Fit Claudius, un brin philosophique. Son amour de sa patrie, sa volonté de la protéger coûte que coûte, lui avait fait faire des choses impensables. Mais ainsi était son Destin à lui : Vivre ou mourir par la lame, au service de son pays.

Claudius regarda dehors et constata que le soleil commençait lentement et sûrement à décliner. Peut-être n’allaient-ils pas trop tarder, lui et son escorte. L’hospitalité de Vex’Hylia avait été tout à fait exemplaire, aussi, l’Empereur ne voulait pas en abuser ce soir.

« En tous les cas, je vous remercie pour votre confiance que vous m’accordez, et la discussion que nous avons eue. » fit le Havremont, se levant de sa chaise, et invitant ses suivants à faire de même. Claudius ajouta une dernière chose avant de tourner les talons :

« Je pense que nous sommes sur la bonne voie, ensemble. Prenez soin de vous, et n’hésitez pas à me trouver en cas de besoin. Bien que le cadre soit moins bucolique qu’ici, le Palais vous est ouvert si jamais vous vous sentez seule. Vous viendrez en amie, j’aurai plaisir à vous présenter. »

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