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1er octobre 1764


Asolraahn se réveilla en sursaut, son esprit toujours empli par les couleurs de son rêve. Il poussa un grognement sourd en se frottant les yeux d’une patte griffue. Dans le wigwam, les braises rougeoyantes d’un feu moribond s’agitaient paresseusement sur les bûches calcinées. Elles sifflaient dans l’air la menace de leur future extinction, menaçant de le plonger dans la pénombre. Le félin se redressa et gagna l’entrebâillement du wigwam. Il leva le rabat sans un bruit.

De petits nuages masquaient le soleil, et la journée était grise et fraîche. La cité de Vat’Aan’Ruda était en effervescence. Le tambour de guerre Est scandait l’air cadencé des dernières heures de la journée. Descendant d’une colline, un groupe de Kisaan se rendait vers le troupeau de bétail. Dans une allée, de jeunes Garal filaient l’aiguille sur une longue tapisserie faite des soies offertes par les Séléniens. Dans une autre, on préparait les ragoûts pour le dîner. Le brouhaha, les odeurs d'épices et d'herbes aromatiques rappelaient à Asolraahn les saveurs de sa propre légion, au sein de laquelle il avait jadis aimé déambuler. Au milieu d’un cercle de combat, couvert en grande partie par les pans des demeures, deux prétendants grondaient férocement et se battaient aux sabres sous le regard dur d’une femelle. Leur joute rivale éleva un rideau de sable qui s’éleva en volutes autour d’eux. Le géant opalin plissa les yeux et ferma le rabat. Il se réinstalla sur son siège en baillant, révélant une impressionnante rangée de crocs effilés.

Devant lui, couché dans un charpoy en jute, reposait un homme au teint hâlé et à la chevelure garnie de mèches rouges comme le sang pour les unes, noires comme les plumes d’un corbeau pour les autres.

Lorsqu’Asolraahn l’avait ramené au camp de la légion, l’homme était plongé dans un sommeil profond et manifestement peu agréable. De temps en temps, il avait tiré de vilaines grimaces, dérangé par les affres de cauchemars et sans doute aussi de ses nombreuses blessures. Mais Asolraahn ne s’était pas prétendu en meilleure forme. De longues plaies avaient tracé d’ignobles marques sur ses bras et son torse, et sa gorge avait conservé les stigmates d’un sortilège qui avait failli l’étrangler jusqu’à la mort. Le combat contre Ther’Zhi avait été d’une rare intensité, et il ne pouvait guère se vanter d’en avoir été le principal belligérant. Ainsi couvert du fardeau de leur infortune, ils étaient entrés au campement de la légion comme deux âmes égarées.

A la vue du géant opalin portant le sans-poil dans ses bras et de leur état à tout deux, les Garal étaient aussitôt intervenus. Ils avaient fait venir les spirites du raton-laveur et de la vache pour s’occuper de leur blessure, puis avaient délesté Asolraahn de l’étranger et l’avait conduit en lieu sûr, non sans avoir quelque méfiance envers lui. Ils s’étaient interrogés sur ses origines. Il semblait évident que ce dernier ne venait pas d’ici. Il ne ressemblait à vrai dire à aucun humain qui ne soit déjà venu en Néthéril : Etait-il un voyageur sélénien s’étant perdu sur le chemin de la légion ? Y avait-il eu une attaque ? Etait-il un baptistrel ? Un pirate ? Avait-il tenté de tuer leur Tribyoon ?

Mais leur curiosité n’avait pas trouvé beaucoup de réponses. Asolraahn était resté de marbre face à leurs interrogations. Il avait arboré un masque imperturbable en laissant son regard traîné sur les fortes têtes ; un de ces regards qui disait qu’il n’avait ni le temps, ni la patience de discuter. Dès lors, et sans dire un mot, il avait pénétré dans le wigwam du guérisseur, avait attendu que le spirite ait terminé son travail puis avait repris le corps inanimé de l’étranger pour l’emmener dans sa propre demeure, sous les regards ébahis de ses frères et sœurs. Il avait ensuite veillé sur l’homme, tâchant de fermer l’œil durant la nuit, puis au lendemain. Mais il n’était pas parvenu à dormir ; ses blessures le lançaient toujours avec une certaine obstination. Et le silence, autour de lui, était devenu assourdissant de soucis.

La discrétion n’avait jamais été son fort et, désormais noyé dans ses réflexions, il regrettait ses gestes abrupts envers les siens. Au lieu de couper court à cet évènement inattendu, il avait encouragé les questions qui brûlaient toutes les moustaches :

Qui, par les Esprits, était cet homme ?

Asolraahn posa un regard sur l’étranger aux cheveux de feu et d’ombre. Celui-ci se reposait désormais paisiblement. Son rictus de douleur s’était changé en une expression fatiguée, quoique sereine. Il ne tarderait pas à se réveiller. Et alors qu’est-ce que le géant opalin ferait ?

Pour le moment, révéler son identité relevait plus de la mauvaise idée que du plan ingénieux. Bien sûr, il ne faudrait pas attendre longtemps avant que les Garal ne se rendent compte de l’absence de leur Protecteur. Le dragon rouge passait si souvent au-dessus de leur wigwam qu’il était devenu une silhouette aussi ordinaire que le duvet d’un nuage. Pas plus tard qu’hier, ils avaient vu le Colérique se poser et avaient été surpris de ne pas le retrouver depuis lors. Et bien que le dragon ait détesté se trouver dans une telle situation, force était de constater que sa protection et l’aura qui l’entourait avait fait de lui une véritable divinité auprès des Garal. Asolraahn n’avait eu de cesse de le prévenir à ce sujet : « Mon peuple croit à ce qu'il a envie de croire. La vérité n'y change rien. Il a besoin de héros, et s'il n'en a pas, il s’en invente. »

Il y avait toutefois une différence entre un dragon absent et un dragon qui n’en était plus un. Le félin n’était pas sûr que son peuple était aujourd’hui prêt à voir Verith sous les traits d’un humain.

Les rabats de la tente s’agitèrent brusquement. Au début, ce ne fut qu’une rumeur discrète, la respiration fugitive d’une île contemplant les dernières heures du jour. Puis le toit commença à trembler également. Du sable fouetta ses pattes. Il remuait avec une obstination rageuse tandis que le coloris de son grain s’éteignait dans la nuit. Une tempête grondait au dehors. Asolraahn s’y attendait. Il n’avait pas eu à envoyer de messagers vers le canyon. Il s’était dit qu’il avait simplement à attendre, à veiller sur Verith. Car sa famille était en chemin et il lui fallait les accueillir, et leur fournir des explications.
Il se releva à nouveau et cette fois, il sortit du wigwam. Le temps avait passé, et les allées étaient désormais vides. La tapisserie quasiment terminée représentait une shikaaree menaçant une meute de smilodons de son katana. Les ragoûts avaient été emportés, et les deux prétendants avaient manifestement réglé leur différend.
Quand le crépuscule approcha, le soleil étincelant s’étiola dans des nuages tels des filets d’ombres. Une grisaille inhabituelle se dissolva au-dessus des étendards de la légion, une traînée de crachins si obscure qu’elle suffit à lui glacer les reins. Le vent attisait un bruissement mordant et se dérobait sur la courbe des demeures Garal.

C’est alors que deux immenses silhouettes assombrirent le ciel. Leurs ailes de chauve-souris vrombirent, firent fuir les quelques rapaces de la région. Asolraahn en frissonna, le pelage chargé d’une crainte respectueuse. Il se pourlécha les babines avec nervosité. Il n’avait jamais rencontré ni la compagne du Colérique, ni sa fille. Il se dirigea vers le cercle des combattants, puis quitta la colline pour s’éloigner des wigwams et trouver un terrain inoccupé par des wigwams. Là, il leva Tarama Tish au-dessus de sa tête tel une oriflamme improvisée. L’arme arborant le rouge carmin de son créateur et une multitude d’écailles pour corps, Asolraahn espérait que ce signe saurait être lu par les deux dragonnes en approche. Que cela fut vrai ou non, les deux silhouettes reptiliennes ne tardèrent pas à tournoyer dans les cieux, prenant sa position comme phare dans la cité. Elles atterrirent en soulevant un nuage de poussière et alors aux yeux d’Asolraahn, il n’y eut plus que deux montagnes d’écailles devant lui qui recouvrirent la totalité de son champ de vision, dissimulant les arbres, les étendues des hautes terres, et la cime décharnée du canyon dans le lointain. Le cœur du géant opalin manqua un battement. Il ressentait un brin d’étrangeté à se retrouver face à deux créatures si éminentes qu’elles pouvaient vous avaler en deux bouchées.

Surtout lorsque leur mâle blessé gisait à l’intérieur de sa demeure.  

Il abaissa son bâton et le planta nonchalamment au sol. Puis il s’inclina sommairement. La lassitude avait gagné sur lui, et il considéra que la gravité de ce qui les amenait outrepassait de loin le besoin des belles manières :

-Je vous salue, Svarg kee raaniyaan. J’aurais aimé que votre visite de la cité se fasse en d’autres circonstances.

Il croisa les pattes, le regard éteint par deux jours accablants :

-Je suppose que vous attendez des explications. Je n’ai pas toutes les réponses à vous fournir. Lui-même en aura certainement d’autres pour vous. Sachez simplement que voilà plusieurs mois, sa liée Dwëmmer s’est mise à manigancer un plan avec mon appui pour libérer le Dragon rouge de la malédiction qui pesait sur lui. Hier, les ultimes étapes de son dessein se sont révélés et un combat terrible a eu lieu entre Svargaadhipati et l’être qui se faisait appeler Ther’Zhi.

Le félin eut soudain bien du mal à tenir le regard des deux dragonnes. Comment, en vérité, pouvait-il leur expliquer ce qui avait eu lieu sous ses yeux ?

-Verith en est ressorti vainqueur. Du moins, je le crois. Mais il fut mortellement blessé au cours de l’affrontement. Pour le sauver, j’ai enfoncé dans ses blessures un cœur d’or : un artefact qu’une alliée de Verith, Sombréclat, a appelé le cœur de Néant. C’est ce cœur qui est la raison de sa survie. Au prix d’un immense sacrifice.

Il tendit une griffe vers son wigwam :

-Il se repose tandis que nous parlons. Il n’a que peu ouvert les yeux depuis la nuit dernière, et ce ne fut pas pour lui déplaire. L’ampleur… de la transformation est telle qu’il n’a rien plus rien de ce qu’il fut autrefois.



Svarg kee raaniyaan : Reines des cieux

descriptionAffaire de famille [PV Verith, Keetech, Nynsith] EmptyRe: Affaire de famille [PV Verith, Keetech, Nynsith]

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Keetech releva le museau. Très rapidement. Trop rapidement. Elle cligna lentement des yeux, incertaine de ce qu'elle venait d'entendre. Puis elle tourna son regard océanique vers sa fille, Nynsith. Et elle comprit qu'elle n'avait pas rêvé. Même Lokapala, qui s'était éloigné de quelques bons, tourna ses grands yeux globuleux vers la mère de l'Orage tant son mouvement avait été brusque. C'était que, la concernant, se mouvoir était comme faire bouger une montagne. Le plus infirme mouvement ne passait pas inaperçu.

« Allons-y. » Intima la dracène en étendant ses ailes de part et d'autre de son immense corps. Elle s'envola d'un unique battement furieux, faisant se soulever des tonnes de poussière au passage.

Son ton n'avait laissé aucune place à la négociation. Ce chant télépathique était un appel clair de Verith. Et, le connaissant, il n'utiliserait jamais un tel pouvoir sans y réfléchir à deux fois. Alors, le cœur de Keetech battait un peu plus rapidement qu'à la normale. L'adrénaline et l'inquiétude lui faisait avaler les kilomètres jusqu'à Vat’Aan’Ruda beaucoup plus rapidement qu'à l'accoutumé.

La légion, au loin, était un amoncellement de wigwam, notamment, mais aussi de quelques baraques de bois et d'enclos à bêtes. Une petite ville agréable, somme toute, qui se préparait tranquillement à la nuit à venir. Jusqu'à ce que l'orage gronde au loin et fasse lever le museau aux bipèdes. La silhouette de Keetech était impossible à manquer. Celle-ci volait bas, sa fille dans son ombre, et ses battements d'ailes furieux laissaient peu de doute sur les émotions qui la traversaient, ou sur sa détermination à retrouver très rapidement son mâle. Un dragon colérique qu'elle ne voyait pas pour l'heure. Son inquiétude augmenta d'un cran, alors qu'elle se remémorait avoir senti la magie subir quelques remous un peu plus tôt.

Qu'avait-elle manqué ?

Qu'avait-il fait ?

Le regard perçant de la dragonne aperçut le pelage blanc d'Asolraahn lorsqu'elle passa au-dessus de la cité. Il tenait entre ses griffes une arme carmin, de l'exacte même teinte que les écailles de Verith. Keetech comprit le message sans avoir jamais rencontré ce Graärh et entreprit de se poser au plus proche de lui. La manœuvre ne fut pas aussi aisée que pour Nynsith tant la Dracène était grande, mais lorsqu'elle se posa, le sol trembla sous ses pattes. Elle creusa de profonds sillons de ses griffes lorsqu'elle se pencha en avant, sa tête frôlant l'herbe humide du soir. Son museau s'arrêta à quelques mètres d'Asolraahn, ce qui était bien suffisant pour que celui-ci ait une parfaite vue sur les crocs océaniques de Quartzécaille. Ou pour sentir son souffle brûlant sur son épaisse crinière.

àEn d'autres circonstances, disait-il, donnant le ton à cette rencontre. Keetech plissa les yeux.

« Je suis Keetech. Et voici Nynsith, ma fille. » Se présenta la dragonne ainsi que sa progéniture. « Nous avons entendu le chant de Verith. Parle à présent. »

Le ton était sans appel, une fois de plus, et la voix probablement peu agréable à entendre. La dragonne se redressa ensuite, alors que le Graärh expliquait la situation. La dracène était au courant des plans de Dwëmmer concernant Ther'Zhi. Keetech y avait même participé en délivrant à l'araignée le cœur dont elle avait besoin pour emprisonner la créature de magie.

« Continue. » Intima-t-elle alors que le Graärh semblait hésitant.

Ainsi apprit-elle que Verith ressortait vainqueur de ce combat. Et pourtant, il n'était pas là pour célébrer cette victoire. Il s'était donc passé quelque chose.

Keetech referme ses paupières lorsque le protégé de Verith évoqua une blessure mortelle. C'était ce que la dragonne craignait. Et elle n'arrivait pas à en être surprise. Mais elle ressentait également de la colère à la simple idée que son mâle ait décidé de livrer bataille sans davantage d'aide que le Graärh, la dénommée Sombréclat et Dwëmmer. Cela lui ressemblait tant. Probablement pour ne pas risquer que sa femelle soit blessée. Tss.

« Le cœur de Néant… » Répéta Keetech, pensive. Elle n'ignorait pas ce que c'était. Sans doute, Nynsith le savait aussi. Cela la fit aussitôt penser au Tyran Blanc, qui avait lui-même possédé cet artefact divin autrefois.

Alors, lorsque le bipède désigna sa tente, la dracène compris. Son sang ne fit qu'un tour et une partie d'elle était révulsée à l'idée de découvrir son mâle ainsi. Mais il le fallait bien.

« Celui qui se faisait appeler Ther'Zhi possédait autrefois le Coeur de Néant. C'était un dieu. » Expliqua rapidement la dragonne. « Si tu me parles de transformation, je crois savoir de ce dont il s'agit. »

Keetech se pencha de nouveau, si près d'Asolraahn qu'il suffisait à ce dernier de tendre la main pour toucher son museau.

« Je suis trop grande pour m'approcher de ton wigwam sans détruire quelque chose d'autre. Mais je veux le voir. Sors-le de là, je te prie. »

À cette demande, Lokapala décida d'agir. La petite boule gélatineuse apparut sur le front de la dracène, puis se laissa glisser sur son museau pour sauter à terre. Ensuite, par petit bond régulier, il se dirigea tranquillement vers la tente du Graärh, bien décidé à aider la dragonne.

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Quelle était cette sensation? Non, ce n’était pas comme pour Aïasil ou Kaalys, elle en était certaine. Mais c’était quelque chose d’important quand même. Et c’était son père. Keetech l’avait également perçu et sans qu’un mot de plus ne soit échangé, les deux Dragonnes s’envolèrent pour Néthéril, là d’où provenait l’appel, ou du moins ce qui se ressentait comme tel. Le corps de sa mère, dix fois plus grand que le sien, fendant l’air avec vigueur, lui permettant de voler dans son sillage sans difficulté. L’Océane profitait même des turbulences causées par sa présence pour aller bien plus vite qu’elle n’irait normalement.

Arrivées à la hauteur de Vat’Aan’Ruda, les deux sauriennes repérèrent sans peine le grand Graärh au pelage blanc qui brandissant un bâton du même rouge que Verith. L’Affamée piqua droit sur sa position, déployant ses ailes au dernier moment pour ralentir et atterrir avec une certaine lourdeur. Autour, curieusement, le Rouge n’était pas là, bien que sa présence se fasse sentir. Que pouvait donc signifier tout cela?

Elle rendit à Asolraahn son salut et écouta ses dires. Étant été plutôt distante avec les siens ces derniers mois, elle n’était pas au courant de tous les détails, mais elle en savait assez pour suivre le fil. Son père avait subit une blessure mortelle. Son père qu’elle voyait comme indestructible aurait pu lui aussi trouver la mort au sein de l’archipel, mais grâce à ce Graärh, il survivait. Et à présent, il était tout autre, à coup sûr. Sa mère était trop grande pour faire quoi que ce soit, tout comme la Dévoreuse, mais cette dernière avait l’avantage de pouvoir changer sa forme. Dépassant rapidement Lokapāla, elle s’arrêta devant l’abri qu’avait désigné le Félin et se liquéfia pour y entrer en partie.

Elle stoppa net en réalisant ce qui lui faisait face. Respirant doucement, un bipède mâle était étendu. Un bipède qui dégageait la même énergie vitale que Verith. À l’extérieur, le chuchu rouspétait de s’être fait ainsi doubler, sortant Nynsith de sa surprise. Délicatement, elle vint soulever Verith d’un coussin d’eau et le hissa dehors pour ensuite le déposer sur le corps mou de Lokapāla. En même temps, Entroxucec se détacha de l’ombre de la Chasseresse pour se glisser dans celle du Dragon métamorphosé, étudiant rapidement son état.

« Et puis? » s’enquit sa fille avec une pointe d’inquiétude tandis qu'elle reprenait sa forme solide.

« Il va bien. Je ne ressens rien d’anormal, mais… ce cœur porte définitivement la marque du Néant. Et sa magie a complètement pris le dessus sur Verith. »

« Que veux-tu dire? »

« C’est comme si… c’était un effet irréversible? Je ne sais pas, je n’ai jamais rien senti de tel. Il est là dans son entièrement, mais a aussi été reconstruit dans son entièreté. Un nouveau corps, ni plus ni moins. »

« Peux-tu le réveiller? »

Sans répondre, l’Ombre poussa doucement l’esprit de Verith vers l’éveil, puis retourna sous l’aile de Nynsith.

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¤ Un coup sur la tête ¤

Dans un dernier souffle, au bord de l’inconscience la plus profonde, l’enfant de l’orage avait appelé les siens. Il ignorait toutefois s’il lui restait suffisamment de force pour être entendu. Était-ce un appel à l’aide ? Oui et non. Verith ne savait pas ce qu’il attendait, mais une chose était certaine : avant de sombrer à son tour, Dwëmmer lui avait transmis la réussite du plan. Ther’Zhi n’était donc plus une menace, du moins une menace directe. Son ombre demeurerait, mais temps qu’il resterait enfermé, personne n’aurait à le craindre. A ce titre, qu’il trépasse en ce jour ou non, quelqu’un devait veiller sur cette prison. Et s’il devait rejoindre son frère, sa sœur et sa mère, alors quelqu’un devrait s’occuper de sa dépouille, la réduire en cendres pour qu’aucun vil bipède ne mette la main dessus. S’il devait mourir en ce jour, alors Keetech devait être mise au courant le plus tôt possible pour emporter leurs enfants jusqu’au continent sauvage et les mettre en sécurité. Verith craignait la mort, mais il craignait encore plus l’avenir des siens sans sa présence pour veiller sur eux.

C’est sans certitude aucun quant à son avenir et celui des siens que l’esprit du dragon rouge s’enfonça dans les limbes les plus profondes. Là-bas, dans les ténèbres absolues, une succession d’affreux cauchemars le frappa. Verith ne trouva pas la mort, mais voilà près d’un jour qu’il demeurait inconscient. Une inconscience qui ne signifiait nullement le repos. L’enfant de l’orage était coupé du monde extérieur et ne ressentait rien de ce qui pouvait se produire. Pour lui, il n’y avait que ces visions cauchemardesques. Cauchemardesque oui, car après avoir vu son corps se changer en bipède, les ténèbres s’étaient dissipées et ses yeux avaient vu la lumière.

Son corps était devenu effroyablement petit, si petit qu’une personne aux traits féminins était en mesure de le porter dans ses mains. Son visage, et celui d’un autre aux traits masculins se penchaient sur lui. L’espace d’un instant, l’enfant de l’orage eut peur de comprendre. Venait-il de se réincarner ? Non, il avait encore accès à ses souvenirs du temps où il était un dragon … pourtant … pourtant ils semblaient devenir plus flous … ils semblaient lui échapper. Avec rage, Verith s’y accrocha pour ne pas les laisser partir tandis que les visions de cette nouvelle vie défilaient devant lui. Le temps se mit à s’écouler différemment à mesure que les visions défilaient, prenant le pas sur toute réalité. Verith s’effaça petit à petit, devenant Zaël. Il lui devenait de plus en plus difficile de résister, son esprit s’engourdissait de plus en plus. Estelen, Skade, Cymbor, Keetech, Nynsith, Nephilith, Sssadjith, Alford, Saemon, Sighild, Kälyna, Fidji, Vraorg, Atalos, Silaraë, Isyndar, Möebius, Ashy, Firindal, Alkhytis, Edwyn, Aldaron, Ilhan, Belethar, Nahui, Kaikathal, Shyven, Sa’hila, Reynagane, Asolraahn et tant d’autres encore, tous ces noms il les oubliait. Zaël ne fut pas épargné alors qu’il s’agissait de son nom à présent. Il semblait le connaitre, il semblait faire écho en lui, mais il ne s’en souvenait pas.

Verith s’effaça, disparaissant sans même qu’il ne s’en rend compte. Il ne resta bientôt plus que Zaël et les courtes années de vie qu’il venait vivre. De nouveaux noms vinrent très vite remplacer ceux des connaissances disparues. Ceux des parents, puis d’une sœur, puis d’une deuxième, puis d’une troisième et lorsque vint la quatrième ce n’est pas un être de chair qu’on lui posa dans les bras. Cette fois-ci ce fut un œuf. Les visions se figèrent alors, comme si quelque chose clochait, comme si quelque chose était faux. Zaël voulut lever l’œuf face à lui, comme pour l’observer, mais une force invisible le lui arracha des mains. L’œuf tomba au sol, se brisant en éclats qui se transformèrent en fumée. Cette même force vint le saisir, voulant le faire reculer alors qu’un être étrange émergeait des éclats de coquilles, venant lui tendre la main. Qu’est-ce que cela ? Pourquoi avait-il la désagréable sensation que cette chose lui était familière … comme s’il s’agissait d’un fragment de lui. L’ombre de Zaël vint s’étendre jusqu’à l’étrange apparition qui s’en saisit, usant celle-ci comme un lien pour le tirer jusqu’à lui et lutter contre cette force qui voulait l’éloigner. Les tempes de Zaël se mirent à vibrer quand son ombre toucha cette créature inconnue … une inconnue qui ne le resta pas bien longtemps. Un rugissement survint du plus profond de lui-même. L’ombre de Zaël commença à changer, prenant la forme d’une gigantesque créature pourvue d’aile. Quelque chose … quelque chose commençait à lui revenir, ébranlant ces convictions. Un mot, un nom : Verith. La sensation d’une étrange familiarité. La sensation d’une puissante volonté.

La force tentant de tracter Zaël se mit à faiblir … ou plutôt, elle n’était pas assez forte pour résister à celle de la créature de fumée combinée à celle de l’ombre. Lentement, Zaël commença à se rapprocher de l’apparition de fumée qui posa une main sur son visage.

« Je ne l’abandonnerais pas. »

« Je ne l’abandonnerais pas. »

« Je ne l’abandonnerais pas. »

Trois voix émanèrent de la créature, trois voix puissantes et différentes. Que signifiait-elle ? Zaël n’en avait aucune idée. Verith, lui, le savait. Il y avait là celle d’Angamar, la chimère ayant pris possession de Nynsith à l’époque et refusant d’abandonner son corps. Il y avait celle de Nynsith, refusant de céder son corps à la chimère. Il y avait celle de Verith, refusant d’abandonner sa fille à la chimère.

« Je ne l’abandonnerais pas. »

Encore une fois les mêmes mots, mais cette fois-ci, il n’y eut qu’une seule voix, différente des trois autres … ou plutôt née des trois autres. Celle d’Entroxucec. En réponse, un hurlement s’échappa de Zaël qui vit sur son torse apparaitre une cicatrice de laquelle émana une puissante lumière aveuglant la scène. Bientôt, il n’y eut plus que du blanc. Verith se tenait là. Sa mémoire lui était revenue, mais à celle-ci s’étaient mélangés les souvenirs des quelques années de vie de Zaël. Ce nom d’ailleurs, il lui revenait aussi en mémoire. Mais ce fut aussi le cas de tous les autres. Et il en sentait quatre tous proches de lui. L’enfant de l’orage leva une patte et celle-ci se posa sur un mur tout aussi blanc que le reste. Il sentait les propriétaires de ces noms de l’autre côté. Fermant le poing, le colérique frappa le mur. Tout l’endroit se mit à trembler. Il recommença encore et encore, jusqu’à ce qu’une fissure apparaisse. Il pouvait les sentir plus nettement à présent. Il sentait leurs inquiétudes. En un mouvement qu’une violence inouïe, Verith défonça le mur en passant une patte à travers de celui pour venir agripper ce qui se trouvait de l’autre côté …

***

Encore plongé dans l’inconscience, Verith venait de bouger un doigt, puis ce fut au tour de la main et enfin du bras. L’enfant de l’orage leva celui-ci en direction du ciel aussi surement que son esprit vint s’enrouler autour de celui des individus en présence. Il s’agrippa à eux avec force une inouïe, avant de commencer à se tracter pour faire émerger sa conscience profondément enfoncée dans les limbes. Lorsque l’esprit du dragon rouge fut libéré de cet état, Verith ouvrit péniblement les yeux. Ses paupières lui semblaient avoir été closes pendant des siècles. Très vite il remarqua que le problème ne venait pas unique de là. Tout son corps était engourdi, à tel point que cela en faussait la perception que son esprit pouvait avoir. Du moins c’est ce qu’il croyait. Son être semblait beaucoup plus léger que l’anormal en dépit de l’engourdissement. Ses sens, eux aussi, étaient moins nets. Sa vision lui semblait floue, son ouïe saturée, son odorat presque inexistant. Le toucher était étrange aussi, il semblait sentir la terre ferme sous une grande partie de son corps, alors que sa tête, elle, semblait se trouver sur une surface molle dans laquelle elle s’enfonçait presque.

Le visage du colérique se crispa lorsqu’au moment de prendre sa respiration, son torse se souleva. Sa peau semblait lui tirer un peu comme s’il y avait une cicatrice pas tout à fait résorber. Il sentit alors le regard de Keetech et de Nynsith peser sur lui.

« J'ai cru que vous n'entendriez pas mon appel. »

L’enfant de l’orage remarqua la main droite dessus de lui. Un petit rictus s’empara de ses lèvres alors qu’instinctivement il leva ce qu’il pensait être sa patte gauche pour venir le chasser. Mais c’est une autre main bipède qui apparut alors, et lorsque les deux s’entrechoquèrent il sentit le choc dans les deux. Sous la surprise, ces deux dernières retombèrent au sol. Il devait avoir pris un sacré coup sur la tête pour avoir des hallucinations de ce genre et avoir une perception aussi mauvaise de son corps.

« J’ai l’impression d’être dans le même état qu’après avoir eu recours à la fureur draconique face à Azelog à l’époque … »

Verith se rappela brièvement ce combat face à ce dragon bien plus vieux que lui et au cours duquel il avait perdu le contrôle. Puis il se souvint des conséquences que cela avait engendrées et du temps que cela avait mis pour se rétablir. Pour autant, le colérique ne se souvenait pas d’avoir perdu le contrôle dernièrement. C’est alors qu’il eut une révélation. Oui ! Ther’Zhi. Il l’avait enfermé … mais il ne se souvenait plus de ce qui s’était passé exactement à ce moment-là. Qu’importe ! Ther’Zhi était enfermé. Où était Dwëmmer ? Il devait s’assurer que tout avait correctement fonctionné.

« Ça me revient ! Ther’Zhi. On l’a enfermé. Où est Dwë … »

Le rouge tenta de se relever, mais son corps ne lui répondit pas comme il le devait. Il n’eut pas de réponse de sa queue et encore moins de ses ailes, si bien qu’il se retrouva bien vite face contre terre.

« Je ne sens plus mes cornes sur ma tête, plus mes ailes dans mon dos, plus ma queue au bout de mon échine. Mon torse me fait souffrir … Dans quel état suis-je ressorti de ma confrontation avec le voleur de cœur ? »

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Asolraahn sentit un énorme poids s’ôter de ses épaules. Le récit des vicissitudes du dragon lui avait rappelé combien son aide avait été moindre dans sa rencontre fatidique avec Ther’Zhi, combien il n’avait été qu’un pion dans un gigantesque échiquier, et comment il avait échappé de peu à la mort. Bien qu’incomplet, ce récit avait aussi été le seul témoignage qui pouvait éclairer deux dragonnes furieuses d’avoir perdu la trace du dragon rouge. Car si c’était l’inquiétude qui avait guidé leurs ailes jusqu’ici, leur attitude farouche avait invité le géant opalin à ne pas traîner en longueur dans son histoire. Il avait donc fait en sorte d’être rapide et concis.
Lorsqu’il eut terminé, la dragonne la plus proche de lui, celle qui se nommait Keetech et qui ne voilait la menace de ses crocs que d’un léger filet de salive, fit quelques commentaires sur le cœur du néant et Ther’Zhi. Asolraahn médita ce renseignement un instant. Ainsi donc, ce que Sombréclat avait déclaré s’avérait, et le cœur qui battait désormais en Verith était bien celui d’une entité divine connue des dragons. Et sans doute des sans-poils également. Il semblait que peu importe ce qu’il ait connu ou crut connaître, la dragonne avait elle-même une autre vue d’ensemble de ce qui venait de se produire.

Toutefois, rien de ce qu’elle avait appris ne calma ses ardeurs furibondes. Au contraire, elle s’avança plus encore et, sous des paupières rusées, elle lui lança un long regard coloré. Elle paraissait vouloir le scruter de l’intérieur, farfouiller dans son esprit pour s’assurer qu’il ne leur cache rien qui ne soit primordial. Elle lui intima l’ordre de sortir le dragon rouge de sa tanière, quand soudain, un curieux évènement se produisit. Le corps déliquescent d’un chuchu surgit d’entre les deux cornes de Keetech pour le toiser sommairement. Puis il s’éclipsa de la cime draconique et fit quelques bonds endiablés jusqu’à son wigwam. Le géant opalin s’esquiva hâtivement sur le côté pour laisser à la petite créature le soin de filer droit. Elle reparut rapidement, sans relever les battants de la demeure mais en les éclaboussant dans un « ploc » retentissant. Elle n’était pas revenue seule. Dans ce qui avait la forme d’un coussin d’eau était étendu la silhouette fiévreuse de Verith.

Asolraahn observa soucieusement la réaction de ses invitées. Il n’y avait en effet pas plus humain que cet être gisant et endormi. Son visage avait heureusement repris des couleurs. Personne ne semblait avoir visiter ses songes : ni esprit ni fantôme, ni présage ni cauchemar. Roulé dans ce lit aquatique, indifférent au tintamarre qui se tramait autour de lui, il dormait du sommeil le plus profond. Ce ne semblait même plus du repos ou une fuite, juste une absence. Comme si une pensée fugitive accaparait toute son attention et que se réveiller signifiait en quitter la réflexion.

Des dernières heures, jamais le roi des cieux n’était sorti de son état apathique. Asolraahn avait d’abord craint pour sa santé, craint que plus jamais il ne parvienne à revenir parmi eux. Il avait espéré ensuite que l’arrivée de sa famille permettrait un miracle. C’est ce qui se passa à première vue.

Mais même lorsque ses yeux s’ouvrirent, le géant opalin devina qu’il n’avait pas encore complètement émergé. Lui-même était apparu dans le même état lorsqu’il avait franchi le seuil de la légion. Ses mouvements étaient cotonneux, et hagard était l’expression de son visage. Tout à coup, au-dessus de lui, s’ouvrait un vertige d’écailles et de pelages ; au fond du saphir intense de la nuit s’alanguissaient les ombres de regards évanescents qui persistaient à le lorgner. Asolraahn sut que c’en était déjà trop pour le dragon rouge, alors même qu’il n’avait pas pris conscience des changements qui s’étaient opérés en lui. Il s’agenouilla près de l’homme et, tandis que celui-ci posait de fâcheuses questions, il prit sa main dans sa patte :

-Regarde-moi, Verith krodh ka. Regarde-moi et tâche d’écouter attentivement.

Il était des choses qu’il était difficile d’annoncer par des mots, d’autant plus lorsque l’être concerné venait de se faire voler son apparence et sa toute puissance. La portée de ces paroles n’en devenait que plus cruelle. Mais il lui sembla juste que ce soit lui et lui seul qui révèle au grand dragon sa condition nouvelle. Ils avaient, après tout, traversé la même tempête et combattu le même ennemi. Il continua ainsi de serrer la main de Verith dans sa patte, à dessein. Le contact anormalement doux de la peau contre son pelage était pour lui la meilleure façon d’entamer délicatement ce pénible aveu :

-Il y a un jour, nous nous sommes retrouvés au canyon Karaptia. T’en souviens-tu ? Dwëmmer avait conçu un plan pour te libérer du fardeau de Ther’Zhi, par le truchement d’une tromperie dont il voulut te préserver la nature afin de ne pas nous trahir. Il y a eu un affrontement, un combat terrible. Il faut que tu saches que tu as failli perdre la vie au terme de son issue.

Asolraahn marqua une pause, le temps de laisser l’esprit du dragon assimiler ces faits ou se les remémorer. Il avait néanmoins fait tombé un silence auquel il ne s’attendait pas. Derrière lui, mêmes les dragonnes n'avaient encore pipé mot. Subitement, le géant opalin était devenu un objet de saisissement, comme si on avait laissé entrer par mégarde un pirate dans la cité des wigwams. Sans doute avaient-elles compris ses intentions et trouvaient plus sages de le laisser faire :

-C’est un tour bien rare qui nous a permis de te garder en vie. A dire vrai, lorsque j’ai enfoncé le cœur de néant dans ta poitrine, je ne pensais pas que tout ceci arriverait. On ne leurre pas impunément les puissances des Esprits et du ciel…

Sa voix se brisa, pleine d’appréhension. Il se rendit compte avec une amère stupéfaction que le propre de cette situation tirait son origine dans ses actes. C’était peut-être lui qui avait fait en sorte que le dragon rouge reste en vie, mais c’était aussi de ce fait lui qui était responsable de cette extraordinaire transformation. Si cette vie et cette existence lui devenait misérable, Verith le tiendrait-il alors pour responsable de son état ? Ou comprendrait-il son geste ? Rien n’était moins sûr. Un Graärh ne l’aurait pas accepté. Dans la légion, l’honneur était plus important que la vie, et l’on jugeait indigne d’être frappé par des infirmités. Un shikaaree préférait mourir en héros que de vivre en paria ou en moins que rien. Asolraahn ne connaissait pas le sentiment des dragons sur cette question. Un affreux doute le saisit et son expression s’aggrava. Mais en vérité, le mal était déjà fait et il était allé trop loin dans ces révélations pour s’arrêter maintenant :

-Hélas, la vie t’a joué son propre tour. Tu es toujours en vie malgré tes blessures mortelles. (Il tendit alors la main de Verith entre eux) Mais tu as changé. Ton corps porte l’empreinte de ces changements. Il n’est plus de cornes sur ta tête, ni d’ailes sur ton dos car tu n’es plus un dragon, mais un homme.

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Doublé par Nynsith, Lokapala se manqua pas de faire part de son mécontentement à grand renfort de petits bruits stridents peu agréables. Ce n'est qu'en réceptionnant le corps inconscient de Verith que la petite créature se calma. Ses grands yeux joyeux se tournèrent alors vers la grande dragonne de l'orage et le chuchu émit plusieurs sons marquant son contentement. Il ramena Verith près de sa famille en glissant simplement sur le sol, laissant derrière lui une trace humide comme l'aurait fait une limace.

Keetech, dont le museau frôlait encore le sol, n'en croyait pas ses yeux. Mais elle devait se rendre à l'évidence ! La magie qu'elle sentait était celle de son mâle, bien sur celle du Néant y était grandement liée désormais.

Qu'il fut beau selon des critères strictement bipède ne changeait rien au profond mal-être que ressentait Quartzécaille en voyant Verith si… diminué. Elle craignait son retour parmi eux et sa réaction. Étant donné le peu d'amour que le grand dragon rouge portait aux mortels, il y avait fort à parier que sa réaction serait… à la hauteur de cette répugnance.

- Cela n'est pas prêt d'arriver, mon mâle, répondit Keetech avec autant de douceur que possible.

Elle ignorait la force de son esprit dans ce corps de bipède. Pouvait-il supporter sa voix comme avant ?

« Je ne sens plus mes cornes sur ma tête, plus mes ailes dans mon dos, plus ma queue au bout de mon échine. Mon torse me fait souffrir … Dans quel état suis-je ressorti de ma confrontation avec le voleur de cœur ? »

Quartzécaille ne savait comment répondre à cela sans trop brusquer le Dragon de l'Ire. Elle se redressa pour mieux masquer son trouble. Fort heureusement, l'honorable Asolraahn vola à son secours et entreprit d'expliquer les événements qui s'étaient déroulés dans le canyon, comblant ainsi les nombreux trous dans ce que Keetech savait de cette affaire.

Continue, encouragea doucement Quartzécaille en effectuant une douce pression sur l'esprit du Géant Opalin.

Elle avait bien conscience de ce qui se tramait dans son esprit. Et elle ne tenait pas le Graärh responsable de l'état de Verith. S'il y avait une chose dont la responsabilité devait revenir à Asolraahn, c'était la survie de son mâle. La reconquête de son apparence véritable n'était qu'une autre quête pour laquelle Verith pouvait compter sur la mère de ses enfants.

- Mais tu as changé. Ton corps porte l’empreinte de ces changements. Il n’est plus de cornes sur ta tête, ni d’ailes sur ton dos car tu n’es plus un dragon, mais un homme.

La sentence était tombée telle un couperet. Keetech tendit alors le cou au-dessus de Verith, masquant la vue du soleil et plongeant les environs dans son ombre. Elle abaissa ensuite son museau jusqu'à ce que son mâle ressente la chaleur de son souffle sur sa peau nue. Il était devenu aussi minuscule que les autres. Un mauvais geste de la part de Quartzécaille et s'en était terminé de son existence.

- Regarde-moi, Verith, commença-t-elle d'un ton grave. Asolraahn dit vrai, confirma ensuite Keetech. Je te promets que nous trouverons un moyen de te rendre ton apparence véritable.

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¤ Crise d’angoisse draconique ¤

Le corps du dragon lui renvoyait d’étranges sensations. Tout son être était engourdi, pour autant, en dépit d’un sentiment de mollesse extrême, il lui donnait l’impression d’être plus léger qu’à l’accoutumer. Certains de ses muscles ne réagissaient pas comme d’habitude ou ne réagissaient plus du tout. On vint lui saisir ce qui pouvait s’apparenter à sa patte avant. Un ressentit des plus bizarres le frappa, comme si quelque chose d’épais, doux et soyeux venait d’enrober sa main. Le chatouillant presque. Asolraahn était face à lui, très proche de lui, anormalement proche tant et si bien que le graärh paraissait au dragon bien plus grand que d’ordinaire. Le regard du colérique se planta dans celui du félin alors que ce dernier commençait à lui parler. L’enfant de l’orage plissa légèrement les yeux, comme pour se concentrer, les mots de l’adversaire des tyrans lui parvenaient avec moins de clartés qu’avant. Verith avait l’impression d’avoir du coton dans les oreilles. Était-ce un contrecoup d’un éventuel choc qui engourdissait son ouïe ? Lentement, à mesure qu’Asolraahn parlait, les derniers évènements lui revenaient en mémoire, chassant au loin le curieux songe dont il avait été victime et les souvenirs parasites qui s’étaient mêlés aux siens, semblant vouloir les remplacer. De manière parcellaire, Verith revoyait la scène. Dwëmmer, Ther’Zhi et lui. Puis Kälyna et Asolraahn. Face à lui il renvoyait Sombréclat et le Géant d’Opale s’opposer au Tyran tandis que l’araignée mécanique tentait de l’absorber. Puis une soudaine douleur le frappa, l’impression de se lacérer la poitrine et de s’arracher un morceau de soi-même. Cela commençait à lui revenir, ce qu’il avait fait, le sacrifice auquel il avait consenti. Malheureusement, après cet instant il n’y avait plus qu’un vide rempli par des souvenirs qui n’étaient pas les siens.

« … Lorsque j’ai enfoncé le cœur de Néant dans ta poitrine … »

Le visage que Verith ignorait encore être bipède afficha un air incrédule aux propos du félin. Mais qu’est-ce qu’il était en train de lui raconter là ? Il lui demandait dans quel état il était sorti de sa confrontation et on lui racontait une histoire avec le cœur de néant. D’ailleurs, comment pouvait-il être au courant de ça ? De son existence ? L’enfant de l’orage commençait à se demander si Asolraahn aussi ne s’était pas pris un violent coup sur la tête. Aux dernières nouvelles, le cœur de Néant était entre les mains de …

Un bref éclair de lucidité traversa l’esprit embrumé du dragon rouge tandis que la prise du félin autour de sa patte se faisait plus ferme. Les paroles du Géant d’Opale continuaient d’affluer à ses oreilles alors que le colérique détacha son regard que celui du félin pour le regarder un peu plus dans son ensemble. Puis il se risqua à détourner le regard pour observer autour de lui, notant véritablement le gigantisme de Keetech et Nynsith à ses côtés. Non, aucun d’entre eux n’avait grandi, c’est lui qui était tout petit. Mais les sensations que lui renvoyait son corps, ce n’étaient pas celles que l’on pouvait attendre de l’enveloppe physique digne d’un dragonnet.

« Ton corps porte l’empreinte de ces changements. Il n’est plus de cornes sur ta tête, ni d’ailes sur ton dos car tu n’es plus un dragon, mais un homme. »

Verith reporta son regard d’Asolraahn, aussi bien l’orage que le brasier de colère qui se déchainaient habituellement dans le fond de ses prunelles s’éteignaient. C’est un océan de peur qui vint bientôt occulter l’éclat présent dans l’œil du dragon.

« Regarde-moi Verith. »

Le rouge leva instinctivement la tête pour observer le museau de sa douce au-dessus de lui.

« Asolraahn dit vrai. Je te promets que nous trouverons un moyen de te rendre ton apparence véritable. »

Le souffle du colérique se fit soudainement plus court et plus rare. Avec appréhension, il décrocha son regard de la silhouette de sa femme, de sa fille, puis du félin, pour venir le poser sur ses mains. Il ne vit nulle griffe d’ébène, nulle écaille grenat. Son œil descendit ensuite jusqu’à l’origine de la douleur qui lui vrillait le poitrail. En lieu et place d’une forteresse, il ne vit qu’un faible rempart de chair balafré d’une large cicatrice pulsante d’une lueur dorée. En son sein il sentait un torrent d’énergies se disputer, l’une cherchant à prendre le pas sur l’autre et inversement à moins de parvenir à un équilibre. Sous l’essoufflement Verith se mit à haleter, cherchant de l’air. Les battements de ce cœur qui n’étaient pas le sien s’affolèrent au point d’être audible en dehors de sa cage thoracique. L’entier être du colérique se mit à trembler.

L’esprit du dragon rouge vint très vite refléter son agitation, sa psyché se projeta hors de lui, venant faire vibrer la trame alentour sous la cacophonie des rugissements psychique émanant du colérique.

« Ce corps n’est pas le mien ! » « Rendez-le-moi ! » « Sortez-moi d’ici ! »

L’esprit de Verith s’enroula telle des vrilles et se planta tel des crocs dans tout ce qui était à sa portée avant de commencer à s’en servir comme point d’appui, tirant dessus avec violent pour chercher à s’échapper de l’enveloppe physique à laquelle il était attaché. L’atmosphère s’alourdit alors que les angoisses et peurs du rouge se déferlaient depuis sa personne dans les environs, venant assaillir la trame et les esprits les plus proches.

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Sans surprise, le réveil de Verith ne fut pas des plus faciles. Ses mouvements auraient été drôles en d’autres circonstances, mais sa chute face contre terre mettait en évidence la dissonance actuelle entre son corps et son esprit. Ne réalisant pas qu’il avait désormais la capacité d’user d’une véritable voix, il s’exprimait télépathiquement, comme si rien ne lui était arrivé.

Ne sachant pas trop comment rassurer son père, Nynsith laissa Asolraahn et Keetech lui annoncer l’horrible nouvelle. Mais justement, comment annoncer à un Dragon bicentenaire qu’il n’était rendu un vulgaire bipède? Le Graärh n’y alla pas par quatre chemin, révélant la vérité sans artifice. Si l’Opalin l’avait sauvé d’une mort certaine, cela avait eu un prix, et le Rouge l’avait payé de son corps. Un corps somme toute robuste, certes, mais un corps qui n’était rien en comparaison avec l’ancien. Un corps qu’elle ou sa mère aurait été en mesure d’éradiquer sans le moindre effort.

La réaction de Verith ne se fit pas attendre. Son esprit encore vacillant après un sommeil forcé s’éveillait tout d’un coup dans son entièrement, mais dans un état d’alerte totale. Venant de l’Ire, c’était à prévoir, mais même pour des Dragons, l’esprit d’un des leurs en perte de contrôle représentait un danger certain. Tandis que son corps tremblait, sa psyché éclatait avec violence, influençant la trame de manière imprévisible. Le cri qui s’échappa de sa gorge était franc et empreint d’une profonde angoisse.

« Asolraahn, éloigne-toi aussi loin que tu peux! »

Mais l’esprit du Félin, plus faible que ceux de Nynsith et Keetech, était déjà assailli par celui du Colérique. Il fallait agir vite et Entroxucec avait déjà une idée.

~ Es-tu capable de retourner en lui? ~

L’Ombre tenta de percer la tempête mentale qui lui faisait face, mais était incapable de s’accrocher à l’ombre de Verith.

~ Chaque porte d’entrée que je vois se referme aussitôt. ~

~ Je vais forcer un canal télépathique. Dès que tu le peux, vas-y. ~


Se concentrant, la Chasseresse interpella le Rouge avec toute la fermeté dont elle était capable.

« Père! Concentre toi sur ma voix. Seulement sur ma voix. »

Mais elle ne sentit rien. Voyant cela, Entroxucec lui apporta une vague d’énergie magique supplémentaire, rendant son esprit encore plus acéré l’espace d’un moment.

« Verith! C’est moi, Nynsith. Oubli ton corps un instant, focus ton attention sur moi! »

Cette fois, le message se rendit, elle en était certaine. Une réponse allait-elle suivre? L’Ombre réussit à s’immiscer de nouveau dans la psyché de Verith malgré le chaos ambiant.

« Je peux probablement le calmer en le forçant à penser à autre chose, mais il faut absolument le retenir. À deux vous serez capable. »

Jetant un regard vers sa mère, la Dévoreuse lança à nouveau son esprit contre celui de son père, cette fois pour en faire un rempart, en espérant que celui du Géant Opalin ne fut pas déjà anéanti.

descriptionAffaire de famille [PV Verith, Keetech, Nynsith] EmptyRe: Affaire de famille [PV Verith, Keetech, Nynsith]

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Docile, le géant opalin accepta avec un aplomb typiquement Graärh la douleur du Colérique. Ses paroles avaient ébranlé le dragon avec une force écrasante. Jadis embrasé et noué de scories guerrières, le regard de son vieil ami bascula dans un abîme de crainte tourmentée. Malgré la sérénité avec laquelle Asolraahn le tenait après de lui, les battements de son cœur s’agglutinaient, se piétinaient dans un rythme inhabituel. Croissant. Mordant. Terrifiant. Très vite, le dragon contempla ses nouveaux membres, découvrit les silhouettes draconiennes de sa compagne et sa fille, et réalisant à peine la terrible affliction qui s’était emparée de son corps, la surprise le confondit dans un élan de panique pur. Tristement misérable et vain, car il n’était rien pour l’heure qui ne pouvait lui redonner ce qui venait de lui être arraché.

Difficile de dire ce qui se passa ensuite dans son esprit, mais Verith brisa bien vite le charme douloureux de son mutisme. Plus que sa terreur, ce fut le timbre de ses cris rageurs qui pétrifia Asolraahn. Cette voix que jamais l’on n’aurait cru frappée par le doute ou la folie, voilà qu’elle lui prit le cœur à le laisser stupidement immobile, coi, bousculé par les bourrasques de sa psyché qui commença à poindre dangereusement à l’horizon du sien. Pire encore : il vit l’ombre des deux dragonnes derrière lui se raidir avec inquiétude, et comme lui, les voici tout à coup qui demeurèrent immobiles, les ailes levées, le museau troublé. Quelque chose ne tournait pas rond.

Il ignorait la menace qui lentement se massait tout autour de lui, dans une inébranlable quiétude. Et justement, l’étrangeté de ce calme finit par le surprendre. L’agitation du dragon fait homme lui revint tout à coup plus sporadique et lointaine. En même temps, ses mouvements parurent flous et ses rugissements se réduisirent à un drôle de murmures lancinants. Même le sable se détachant à contre-jour du corps de Verith se révéla une vase gluante au reflet mordoré. Un liquide coula lentement de sa truffe, descendit jusqu’à ses moustaches. Asolraahn se releva en claudiquant comme un souffreteux. Lâchant le bras du dragon, il porta sa patte griffue à son visage et découvrit que du sang tâchait ses coussinets. Il s’écroula d’un coup tandis qu’une nouvelle vague dans la trame lui déchirait le crâne tels des crocs, liquéfiait sa vigilance dans un courant de douleur. Il sentit à l’intérieur même de sa conscience les appels teintés d’angoisse du dragon. Verith était en train de consumer ses pensées à petit feu !

Le géant opalin chercha un sol tangible où retrouver un semblant d’équilibre. Il espérait rejoindre le dragon qui se trouvait à quelques pas de lui. Mais la vrille psychique qui l’écorchait était tel qu’un simple mouvement lui paraissait comme soulever une montagne. Il aurait voulu parler qu’un râle serait à peine sorti de sa gorge. Outre les murmures éloignés de Verith, il entendit le rugissement des dragonnes. Et plus loin encore, il considéra des rumeurs assourdies tels des cors que l’on aurait volontairement plongés au fin fond de l’océan avant de souffler à l’intérieur. Qu’est-ce qui, par les esprits, pouvaient causer un tintamarre plus grand que le rugissement des dragons ? Asolraahn abandonna son ouïe à la faveur de ses yeux. A défaut de comprendre le vacarme ou plutôt son absence, le spectacle lui serait peut-être plus clair. Ce qu’il vit d’abord ne fut que quelques mouvements erratiques. Mais dans la pénombre vague de sa vision, il aperçut bientôt de fines silhouettes à l’aspect familier qui avançaient maladroitement dans sa direction. Plus elles se rapprochaient, plus Asolraahn prit conscience qu’elles ne se dirigeaient pas vers lui, mais plutôt vers l’évènement qui se produisait autour de lui. Avec stupeur, il réalisa que ces silhouettes lui étaient connues parce qu’elles étaient Graärh et que les cors assourdis étaient des miaulements de souffrance. C’était des Garal ! Son peuple subissait également les ondes malveillantes de leur protecteur.

C’en fut trop pour le géant opalin. Il songea à son petit Shuu’ran qui se trouvait non loin des wigwams. Si son esprit résistait à peine, comment le sien accueillerait-il cette attaque silencieuse ? Le géant opalin n’osait penser au mal que le graahron était en train d’affronter. Il fallait apaiser le dragon à tout prix. Hélas, au milieu de ce paysage silencieux, où nul arme ne le perçait et tout était souffrance, il n’était guère plus maître de son destin.

Que faisaient donc les dragonnes à leur côté ? Ne voyaient-elles pas la souffrance qui était la leur ? Pourquoi ne l’arrêtaient-elles pas ?
Une pensée fugitive et funeste l’assaillit.
Le pouvait-elle seulement ?

Au-dessus du corps torturé de l’homme-dragon, des ailes sombres émergèrent dans un lointain flou et inaccessible. Une silhouette serpentine et massive se mouvait en sinueuses danses maladroites. Dans sa perspective de guingois, l’œil à demi chancelant, Asolraahn faillit en avoir un haut-le-cœur. Aucun son ne ressortait de ce ballet incessant et son absence, cumulée à la peine destructrice de Verith, était effroyablement perturbante pour lui. En détournant son regard de la scène, le géant opalin ferma les yeux, concentré sur son propre combat. Du plus profond de son ouïe jaillit soudain le trémolo inquiet d’une parole grelotée. En dépit de la faiblesse de cet écho, Asolraahn l’entendit très clairement. Ce n’était pas tant un murmure que les mots semblaient une fois encore prononcés trop loin de lui. Pourtant, au milieu de cet ilot de silence, cette voix avait la caresse d’une brise passagère dans le désert aride. Le géant opalin s’appuya dessus et tenta de trouver son origine. Au bout de quelques secondes, il dut se rendre à l’évidence. Le murmure était trop profond dans sa tête pour provenir de l’extérieur. C’était à l’intérieur de son esprit qu’il jaillissait !

Le ton de la voix s’intensifia. Le géant opalin reconnut bientôt cette verve sauvage qu’il avait entendu quelques minutes plus tôt : il s’agissait de la fille de Verith ! Mais elle ne s’adressait pas à lui. C’était son père qu’elle essayait de raisonner. Dans cette psyché entremêlée, Asolraahn entendait tout. Avait-elle une chance de l’arrêter ? Cela semblait possible mais le temps ne jouait pas en leur faveur. Lorsque tout serait terminé, la moitié de la légion pourrait ne pas avoir supportée suffisamment longtemps le mal qui les assaillait.

Le géant opalin ne savait que peu communiquer par la pensée. Il était même possible que ses paroles ne soient jamais entendues et se perdent dans le vide. Néanmoins, il formula dans son esprit endolori de sombres paroles qu’il envoya au dragon avec la brûlure du désespoir :

-Que les esprits emportent ta colère, il suffit ! Cesse donc ce mal, Verith krodh ka, il conduit mes félins à leur perte. Cesse donc par le feu !

Les murmures lointains continuaient plus loin. Asolraahn ne sut pas si son message était parvenu aux oreilles des dragons. Néanmoins, il clama avec une égale témérité :

-Je suis soucieux de ta douleur mais elle ne rend grâce à personne. Elle n’est au contraire qu’anéantissement. Tu as juré de tenir éloigné le malheur et la mort loin de ma légion, et tu as accompli cette tâche avec honneur. Ne laisse pas la peur de ton sort mettre ce serment au vent. Contemple-nous souffrir de ton jugement. Si tu n’es plus un dragon par l’apparence, demeure-le par les actes ! Il suffit !

descriptionAffaire de famille [PV Verith, Keetech, Nynsith] EmptyRe: Affaire de famille [PV Verith, Keetech, Nynsith]

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La situation était en train de déraper. Mais comment pouvait-il en être autrement ? Nul besoin de connaître Verith comme Keetech le connaissait pour deviner la suite des événements. Penchée au-dessus de lui - ou de ce qu'il restait de lui - la dracène voyait la panique envahir le regard bipédique de son mâle. Il était encore plus expressif qu'auparavant, se dit-elle par ailleurs.

Mais en effet. Nulles griffes, nulles écailles. Pas de queue ni d'ailes. Pas de feu dans son poitrail. Il n'était plus une montagne infranchissable, seulement une fourmi en ce monde. Et la réalisation faisait son bout de chemin tandis que Keetech, qui se redressa, se préparait. Elle n'avait jamais connu de crise de panique. Les dragons étaient au-dessus de cela. Mais, par la mémoire des siens, la dragonne reconnut les signes avant coureur chez son malheureux compagnon.

La violence de la réaction de Verith n'était pas physique, comme Quartzécaille s'y était attendue, mais mentale. Son esprit, toujours aussi puissant, cherchait à quitter son enveloppe de chair. Il était comme d'immenses tentacules, griffant et piquants. Des vrilles qui s'élevaient haut et qui, tels des crocs, mordaient tout ce qui était à portée pour trouver un ancrage. Pour éviter l'attaque, Keetech fut contrainte de faire rempart avec son propre esprit. Elle n'était pas en mesure d'aider son mâle et il ne servait à rien qu'elle soit blessée. Mais même son puissant esprit rencontrait de la difficulté face à la panique de Verith, qui décuplait la force de sa frappe involontaire. À travers les interstices de sa protection, Quartzécaille pouvait ressentir les angoisses et les peurs du dragon rouge comme si c'était les siennes.

Cette fois-ci, Nynsith fut plus prompt à réagir. Keetech ne savait pas comment exactement, mais elle pouvait sentir les remous du côté de sa fille. Elle entendit vaguement sa voix, alors qu'elle s'adressait à son père, puis saisit l'importance de son regard. Le museau de la dracène s'inclina brièvement en signe d'acquiescement, puis son esprit s'écrasa contre celui de Verith tout en comblant les espaces qui le séparaient de celui de la Dévoreuse. Quant au Graärh ? Quartzécailles sentait à peine sa douleur et sa détresse. Son attention n'était pas tournée vers lui. Mais elle savait où il se trouvait, quelque part près de sa patte, les coussinets tachés de sang et l'esprit en feu. Survivrait-il ?

Elle fut donc à peine consciente de la souffrance des autres Graärh, dont les habitations étaient si proches. Tout son esprit était contre celui de Verith, tentant d'étouffer les flammes avant qu'elles ne se répandent trop loin. Jusqu'où un esprit comme celui du dragon de l'Ire  rendre ?

Puis la voix d'Asolraahn, qui ne jaillissait pas dans son esprit mais venait de quelque part en bas, alerta la dracène. Les Graärh souffraient et Quartzécailles était bien au fait de l'attachement de son mâle à ce peuple bipède. Elle ne pouvait pas les laisser mourir. Mais elle ne pouvait pas non plus laisser tomber Nynsith.

Elle devait tenter quelque chose.

Ce fut son corps qui vint renforcer la barrière qu'elle mettait en place avec sa fille. Aussi doucement que sa taille le rendait possible, Keetech s'allongea. Sa queue s'enroula autour du Géant Opalin, de sa fille et surtout de son mâle. La terre trembla et se déchira dans le mouvement. Ses ailes cachèrent le soleil et étouffèrent les bruits alentour ainsi que les gémissements des Garals. La nuit semblait être tombée soudainement. Puis, du bout de sa griffe, immense et gauche, la dragonne de l'Orage toucha le corps de son mâle. Sans doute plus fort qu'elle le souhaitait, mais il n'y avait pas de quoi le tuer.

Enfin, sentant que la situation cessait de lui échapper. Quartzécaille étendit son esprit. Elle l'enroula autour de celui de Verith, forçant les vrilles à cesser leurs attaques, et forma une coquille tout autour de lui de tel sorte à faire cesser la souffrance d'Asolraahn et des siens. Les cris se turent à l'extérieur du cocon formé par le corps de Keetech et le silence retomba. Dans la pénombre, la cicatrice de Verith était immanquable, pulsant d'une lueur dorée.

— Verith, tonna la dracène. Concentre-toi sur ma voix, à présent. Cesse de lutter et reviens moi.

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¤ Au milieu de la tempête ¤

L'enfant de l'orage venait de se réveiller de son long sommeil, un sommeil d'une profondeur insondable peuplé de songes et de souvenirs qui n'étaient pas les siens. La présence d'esprits et de voix familières à proximité de son corps endormit réveillèrent petit à petit ses sens, tant et si bien que sa psyché engourdie se mit à refaire surface. Bientôt, ses paupières rendues lourdes par une fatigue anormale s'ouvrirent. Le colérique s'extirpait avec difficulté de son sommeil, prenant lentement conscience de son environnement, des paroles qui lui étaient adressées et surtout de son corps. D'impossibles révélations lui furent bientôt faites, des vérités que l'égo du dragon rouge ne pouvait entendre sans prendre le risque de se briser. Il ne fallut pas longtemps pour que la panique s'empare de Verith quand il réalisa que le corps qu'il habitait était celui d'un bipède. Sa psyché s'affola, venant s'étendre dans la trame environnante pour mieux la dominer de sa puissance. La violence de son esprit se mit à s'abattre dans les environs, corrodant tel le plus agressif des acides les consciences environnantes. L'enfant de l'orage devenait inaccessible, sa lucidité s'étiolant sous une tempête de folie mue par une réalité inacceptable. La psyché du dragon était telle une mer déchainée, entrainant vers les profondeurs les consciences plus faibles que la sienne pour mieux les noyer. Au milieu de cet océan de panique, deux rocs et un naufragé s'évertuaient à atteindre le coeur de la tempête. Leurs voix se mêlaient aux fracas des vagues, aux tonnerres de la foudre et au craquement de la terre.

Au centre des évènements, l'enfant de l'orage semblait se briser, d'avatar de la colère et il basculait à celui de la folie et ce coeur battant dans sa poitrine, qui n'était pas le sien, se faisait écho des tourments du dragon rouge, venant mêler aux maux de Verith ceux de son ancien propriétaire. Bientôt, des souvenirs jaillirent sur la conscience du dragon rouge, la souffrance d'un dieu au coeur trahi et arraché venant l'éroder plus encore. Alors que les vagues de désespoir aggravaient la situation d'un dragon pris de panique, des fragments d'une mémoire ancienne furent emportés par ces flots déchainés. Des échos de souvenirs lointains se firent rocs au milieu de la tempête, tentant d'atteindre l'origine des évènements.

« Verith! C’est moi, Nynsith. Oubli ton corps un instant, focus ton attention sur moi! »

« Mon frère, laisse-nous t'aider. »

« Que les esprits emportent ta colère, il suffit ! Cesse donc ce mal, Verith krodh ka, il conduit mes félins à leur perte. Cesse donc par le feu ! »

« Mon frère, ta souffrance te consume comme elle a consumé Alaya. »

« Verith. Concentre-toi sur ma voix, à présent. Cesse de lutter et reviens-moi. »

« Mon frère, tu mets en péril ce que nous avons construit et juré de protégé. »

Un rugissement psychique émana du dragon qui tenta de repousser les voix qui l'assaillaient. Profitant de l'instant, une ombre se glissa jusqu'au centre de la tempête. L'ombre et la fumée enveloppèrent le brasier de la folie, créant une faille dans ses défenses. Le rugissement du colérique faiblit et les voix l'atteignirent, perçant de rayons d'or un ciel assombri par la folie . Deux images heurtèrent la psyché du dragon rouge, la première était celle de Keetech en compagnie de Nynsith, Nephilith et Ssaadjith. La deuxième était celle de sept silhouettes bipèdes dont il ne reconnaissait pas les visages bien qu'ayant la sensation que ceux-ci lui étaient familiers.

La psyché agressive du colérique s'immobilisa dans la trame, cessant de s'étendre, de s'accrocher aux esprits et de tirer dessus avec violence. Un silence s'installa là où ce qui est invisible était encore en proie au chaos, puis il y eut un bruit blanc, semblable à celui des vagues qui vont et viennent. L'esprit du dragon rouge qui violentait encore la trame il y a quelques secondes se mit à la bercer, venant faire se ballotter les psychés qu'il avait maltraitées. Physiquement, le dragon-bipède était recroquevillé au sol, haletant, les mains sur les tempes et se les massant avec délicatesse.

« Il est des adversaires face auxquels on ne ressort pas indemne après un combat. Mieux que quiconque, je devrais le savoir. »

La voix télépathique de Verith était hésitante, trahissant encore son instabilité face au choc qu'il venait de subir et à la panique qui secouait encore son être.

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Bien qu’elle soit adulte, Nynsith demeurait très jeune et son esprit n’avait certainement pas la force de contenir celui de son père sans autre support. Elle se concentrait donc aussi fort qu’elle le pouvait, perdant l’espace d’un instant contact avec son environnement. Une telle action la rendait on ne peut plus vulnérable, mais elle se savait en sécurité là où elle était, du moins physiquement. Dans cette tempête mentale, le temps se déformait, et chaque seconde qui s’écoulait semblait durer des heures.

Enfin, le calme revint de manière aussi brusque que le chaos était apparu et l’Affamée reprit contact avec la réalité. Ouvrant les yeux, elle constata qu’ils étaient en pleine noirceur. La lutte avait-elle durée si longtemps que la nuit était tombée? Non, c’est sa mère qui avait usé de son propre corps pour assombrir l’endroit, le coupant momentanément du reste de l’archipel. Nynsith baissa son regard vers Verith et vit la cicatrice vibrante de magie qui luisant de manière soutenue, la blessure à l’origine de la perte de contrôle de son père.

~ Entroxucec? Tout va bien? ~

~ J’ai failli disparaître, mais cela a fonctionné. C’est en pensant à vous qu’il a su reprendre les rênes de sa psychée. ~

~ Bien. ~


L’odeur du sang vint alors chatouiller ses narines, lui rappelant que le Géant Opalinétait toujours présent. Présent de corps, mais qu’en était-il de son esprit? Un simple coup d’œil à son égard lui confirma qu’il était toujours présent, mais mal en point.

« Soit fier, Asolraahn. Par tes actions, tu a permis d’éviter le pire. Permets-moi de t’aider en retour, et nous serons quittes. »

Dans la noirceur, Entroxucec quitta Verith pour rejoindre le Graärh, le sustentant de sa propre énergie en se sacrifiant. Sans l’intervention du félin préalablement à leur venue, son père n’aurait eu aucun soin et aurait peut-être complètement perdu la raison. Celui-ci avait d’ailleurs ouvert les yeux, reprenant conscience de manière plus contrôlée. L’Océane peinait à imaginer la désorientation que ce nouveau corps pouvait bien causer chez Verith.

« Il est des adversaires face auxquels on ne ressort pas indemne après un combat. Mieux que quiconque, je devrais le savoir. »

« Père, tu es indemne. Changé, certes, mais indemne. Tout ce que la magie fait peut être défait, mais ce sera en temps et en lieu. Sache simplement que tu es en totale sécurité. Nous sommes là avec toi. Tu peux reposer ton esprit. »

Nynsith se doutait bien que la quête pour retrouver son corps n’allait pas être des plus simples, il aurait besoin de toutes ses forces avant d’envisager quoi que ce soit à cet égard.

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Pour Asolraahn, les minutes qui suivirent ne furent semées ni de réconfort, ni de désespoir, ni de douleur. Il n’y eut au contraire rien d’autre qu’une léthargie lourde, témoin d’un manque. Le chaos qui avait précédé son appel au dragon rouge s’était étouffé, ne devenant qu’un lointain souvenir rappelé uniquement par une pulsation à peine désagréable, distraite. Au fond, c’était peut-être cela atteindre le point de non-retour : retrouver une plénitude qui d’ordinaire ne s’acquérait qu’après avoir laissé la mort s’emparer de l’esprit et du corps. Ce fut l’heure où sa tête n’était plus que vide, le cœur ne battait plus que pour une survie toute relative. Lavé de toute détresse et de toute peine, il n’en voulait à quiconque, ne désirait ni ne croyait rien. Son esprit attendait dans une enveloppe baignée de braise couvante, feutrée d’ombres ouatées et de figures discrètes ; un feu attisé par une folie extérieure à lui. Il savait qu’un mal était en train de le ronger. Cette pulsation vive et distante ne quittait pas le vide dont il était entouré. Ce fut impuissant qu’il accueillit cette forme de paix, y apposa son front poilu contre les braises comme pour s’y trouver un chevet, un repos.

Même lorsque la pulsation s’estompa, son esprit ne recouvrit pas immédiatement sa lucidité. Bien au contraire, sa disparition provoqua d’abord un sursaut d’inquiétude, comme si ce monde fait de rien avait toujours été sien. Il fallut l’arrivée d’un voyageur pour le rappeler au bon souvenir de la réalité. Cette présence vertigineuse et fluide lui transmit une énergie bienvenue, dans une aura de lumière. En un instant, Asolraahn se rappela de tout. Lorsque le voyageur disparut dans le vide, le désordre revint, avec ses cris et ses murmures, avec son concert de souvenirs et de peurs. En même temps, la blessure terrible qui secouait sa conscience s’évapora.
Le géant opalin ouvrit les yeux.

Chu dans le sable, il se redressa avec l’impression affreuse qu’un marteau avait réduit chacun de ses os en bouillie. Face à lui se déroulait un bien sinistre tableau : un homme recroquevillé sur un sable couleur de cendre, cerné par le vent suranné de la savane et les silhouettes reptiliennes de deux dragons se tenant à ses côtés. Mais au loin, les cris des Graärh s’étaient tus, remplacés par des miaulements de surprise et de réconfort. Leurs exclamations lui arrachèrent une grimace adoucie. Leur vie à tout le moins avait été épargné. Ils avaient réussi. La tempête dans la trame avait cessé avant que l’irréparable ne soit commis. L’une des dragonnes, Nynsith, tendit son long cou vers Asolraahn. Ce dernier se releva en prenant appui sur son bâton :

-Je t’ai entendu, même dans ces songes qui n’en étaient pas, même dans ce néant que rien ne pouvait troubler. Je te remercie de m’avoir ramené, (Il vit les Garal se remettre de leurs émotions dans le campement et soupira de soulagement) de nous avoir tous ramené.

Mais le répit demeurait fragile, leur quiétude précaire. La menace dissoute n’en était pas moins un reliquat manifeste des forces terribles auquel un être comme Verith avait recours. La folie perdue, l’homme qui fut dragon avait aussitôt coupé tout lien avec l’esprit des Graärh. Restait que le péril brandissait un torque vengeur pour les vies qu’il n’avait pas prise. Verith n’avait qu’à souffrir d’une autre crise pour les plonger à nouveau dans la tourmente. De son apaisement face à son nouvel état se déciderait le sort de son peuple. Asolraahn accueillit cette évidence avec circonspection. Tout à coup, l’aura protectrice dont le dragon rouge les avait si souvent fait bénéficier avait la saveur rance d’un poison.
Comme pour confirmer cette sombre pensée, Verith émit un sursaut de paroles :

-Il est des adversaires face auxquels on ne ressort pas indemne après un combat. Mieux que quiconque, je devrais le savoir.

Le géant opalin sentit de la détresse dans ces mots et s’en voulut d’avoir porté si vite un jugement détracteur. Parce que le dragon était en mauvaise posture, Asolraahn avait-il le droit de penser si égoïstement ? De réfléchir aux menaces planant sur les siens sans songer à la perte des autres ?
En vérité peut-être… Asolraahn devait penser à son peuple avant tout et à leur bien-être. Qu’un allié devienne soudain la cause d’un nouveau danger, plus insaisissable et mortel que de simples pirates, était une considération à prendre en compte pour lui et le Conseil tribal. Tel était le fardeau de ceux qui avaient la responsabilité d’une légion. Mais ces soucis attendraient. Pour l’heure, il était dans l’intérêt de tous que ce chaos ne se reproduise plus. Pour l’heure, Verith avait grand besoin d’un appui sincère. Il avait toujours été un allié et un ami et le géant opalin ne comptait pas abandonner le dragon au moment où il avait le plus besoin d’aide.
Alors il lui tendit la patte, non de haine d’avoir failli aux Garal, mais d’une indulgence solennelle. C’est néanmoins avec un ton sévère qu’il s’adressa à lui :

-Ta fille a raison, mon ami. Nul ne sert de s’apitoyer sur ses cicatrices, quelles qu’elles soient. C’est un nouveau caprice que les Esprits t’ont imposé. La roue tourne. Elle n’est jamais immuable. Par le temps, on t’a donné bien des noms. Autrefois, Colérique. Ensuite, Protecteur. Te voici désormais Humain. Il te faudra sans doute plus de courage pour porter ce titre et sauvegarder ta fierté. Mais lui-même n’est pas figé. C’est dans l’épreuve bien plus que l’apparence qu’on reconnaîtra ta grandeur si tu demeures fidèle à toi-même. Qu’importe cette métamorphose ! En ce jour, tu t’es conduit en dragon.

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L'horizon s'éclaircit enfin et, de concert, l'emprise sur le cœur de Keetech se fit moins vigoureuse. Il sembla à la dracène que l'air entrait enfin dans ses poumons, si bien qu'elle s'en gava en inspirant longuement. Le silence soudain était reposant pour ses sens trop sensibles et ses paupières recouvertes d'écailles vinrent, pendant une seconde, dissimuler ses prunelles océaniques.

Puis ses mires se posèrent sur Verith, diminué mais bel et bien vivant. Le soulagement se répandit dans la moindre de ses cellules, mais Quartzécaille n'osa pas effleurer l'esprit de son mâle du sien de peur de l'écraser. Il était si… petit. Et elle si grande.

À la place, la conscience de Keetech vint donc caresser celle de Nynsith. Elle se voulait rassurante quant à la suite des événements. Une assurance que Nynsith transmis avec aisance à son père, sans craindre d'écraser sa psyché encore affaiblie. Quant à Asolrahnn, ce dernier transmit la même idée et se voulait rassurant. C'était également un soulagement de le voir indemne après ce qu'il venait de se passer. Son esprit aurait pu être si facilement annihilé.

Toutefois, Keetech était davantage sur la réserve que sa fille ou le Géant Opalin. Ils ignoraient beaucoup du sort qui s'était abattu sur Verith. Ils ne savaient pas comment contrôler cette magie - ou même si l'écarlate serait en mesure de le faire une fois reposée.

Il y avait beaucoup d'inconnus et malgré toute la confiance que Quartzécaille avait en son mâle, elle ne pouvait totalement étouffer ses appréhensions. La roue tourne, en cela elle était d'accord… Encore faudrait-il qu'elle tourne suffisamment vite pour que Verith accepte sa nouvelle… forme avant d'en devenir fou.

— Repose toi, mon mâle. Comme toujours, je serai à tes côtés dans cette nouvelle épreuve. Nous finirons par trouver une solution à ta nouvelle… condition.

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