Le fond de l’air était frais, en mer, mais terre était bientôt en vue. Belethar avait pris son bateau pour quelques jours.
Si d’ordinaire son esprit-lié du pingouin lui suffisait à accomplir ses déplacements personnels, le baptistrel ayant le frisson de l’aventure et voulant explorer également chaque recoin des mers prenait de temps en temps son navire que lui avait si gentiment offert son presque-frère. Mais aujourd’hui, l’aventure n’était pas vraiment la raison de pourquoi le Baptistrel se trouvait sur son navire. Enfin, encore que... pensait-il d’ailleurs . Belethar, en sa qualité de gardien de l’ordre baptistral était attendu ce jour-ci à Tiamat, dans le sanctuaire sacré du Baôli.
Une visite officielle donc, qui exigeait des apparences marquées, et un respect strict du protocole. Et pour cause, il ne faisait pas ce voyage sans raison : c’était une visite préparée conjointement avec Ilhan, son compagnon de toujours, et avec Reynagane, la désormais nouvelle Gardienne du Baôli et … grande amie ? Du Baptistrel. Belethar avait hésité. Les souvenirs de la visite de Reynagane au Domaine étaient encore marqué dans son esprit. Pouvait-on vraiment qualifié « d’amitié » les sentiments qu’il avait eu là-bas, ainsi changé en quelqu’un de leur espèce ? Il avait été fondamentalement la même personne, mais ce qu’il avait senti, c’était comme voir quelqu’un sous un tout autre angle, comme si on avait dévoilé un grand bâtiment caché par un drap.
Belethar secoua la tête. Ça n’était pas vraiment ni le lieu, ni le moment de penser à tout cela. Car en l’occurrence ils n’allaient pas franchement en vacances, tous trois. Ce qu’ils avaient vu a Althaïa, et ce qu’on reportait de ce qu’il s’était passé à Nyn-Tiamat, cela les avaient tous trois bouleversés.
Les Couronnes de Cendre étaient encore empli de mystères. Même si tous trois connaissaient maintenant bien le sujet, des non-dits existaient encore, tout autant que de véritables solutions sur comment aborder les conflits à venir. Alors tous trois, ils avaient décidé d’aller au cœur du problème, là où tout avait commencé, et là où des pistes inexplorées restaient encore.
Il avait été question plusieurs fois d’une personne enfermée dans la glace, dans ce sanctuaire qu’était l’île de Tiamat. Belethar, Reynagane et Ilhan voulaient en apprendre plus sur elle. Qui elle était, si une partie de son héritage subsistait et si des informations pouvaient les aider à vaincre Laalach et ses acolytes.
Ainsi donc, Ilhan et Belethar, en tant qu'étranger non-poilus durent écrire une missive aux deux légions encore influentes sur l’archipel, demandant l’autorisation d’accès à l’île. Un protocole nécessaire, mais les légions n’opposèrent pas vraiment de difficulté : ils étaient tous deux proches de Reynagane, la gardienne, et pour ce qui concernait Belethar, son serment de Baptistrel l’obligeait a une certaine attitude non-violente.
Ainsi donc ils avaient eu leur autorisation d’accès, et voici que les trois compagnons allaient s’aventurer dans un lieu hautement chargé d’histoire pour, peut-être, collecter de précieuses informations leur permettant d’y voir encore plus clair.
Mais pour l’heure, Belethar était encore seul, sur son navire. Enfin seul, pas tout à fait, car son bateau prenait plaisir de temps en temps à répéter sa petite chanson :
« Pipe pipe pipe, pipe et jambe de bois ! »
Chaque fois qu’il poussait la chansonnette, Belethar avait un petit sourire songeur. Il ne savait pas s’il devait maudire de tous les noms Valmys d’avoir inscris ce sortilège sur ce bateau en ne prenant exprès qu’un fragment de chanson rentrant en tête et ne partant qu’après plusieurs jours sans côtoyer ce même navire, ou bien le bénir car malgré tout, cela avait le don de détendre au moins un petit peu l’atmosphère. Car la situation avait beau être grave et leur mission de la plus haute importance, il était amusant de voir que ce bateau qui n’avait qu’un ersatz de conscience pour certaines choses seulement ne prenait absolument pas tout le contexte du voyage en ligne de compte.
Après quelques instants à voguer comme cela seul, Belethar sentit finalement une petite torsion de la trame, qui émanait du pont principal. Le baptistrel relâcha alors la maîtrise du bateau, qu’il faisait par la pensée, et fit signe à un autre navigateur compétent qui se trouva non loin de lui de prendre la barre.
Alors qu’il relâcha le contrôle, la torsion se fit plus grande jusqu’à voir un portail sur son navire. Portail duquel sortirent ses attendus et valeureux compagnons, puis ce dernier se dissipa complètement. Miracle de la magie, Ilhan et Reynagane avait rejoint le Baptistrel en un rien de temps, comme convenu.
Il ne fallu pas plus de temps pour que Belethar fasse une grande accolade à Ilhan, à qui il glissa une salutation typique d’Althaïa. L’Espérancieux savait à quel point ce genre de choses étaient importantes pour lui. Il ne savait pas comment il se sentait, alors peut-être qu’un mot sympathique aiderait à le détendre.
Il s’enquit de savoir comment il allait, et si le processus ne l’avait pas trop fatigué, puis une fois ces réponses apportées, il se tourna vers Reynagane, et lui accorda aussi une grande étreinte sincère. À elle, il lui fit dans un murmure :
« Je suis heureux que tu nous laisses entrer dans le berceau de ta civilisation » pour le côté formel de la chose … Puis il lui fit une petite embrassade, avant d’ajouter « Et je suis heureux que tu sois là, avec nous » pour le côté personnel auquel Belethar tenait.
Belethar n’eut cependant pas le loisir d’aller plus loin dans la discussion, car aussitôt eut-il fini de saluer ses deux compagnons, que son bâteau fit dans un petit cri :
« Terre en vue ! J’espère que cette fois-ci, je ne serais pas à côté de vieux rafiots ! »
Le Baptistrel eut un petit sourire, et regarda aux alentours : effectivement, il voyait que non loin, l’île de Tiamat et son grand volcan caractéristique se dressait devant eux. Il donna ensuite une petite explication à Reynagane sur pourquoi son bateau réagissait ainsi – car son presque frère était l’instigateur de cette farce – :
« Mon bateau … Parle, grâce à la magie. Il n’est pas exactement conscient comme nous, mais parfois il communique des informations, il chante … Et il semble faire une fixation sur le fait qu’il est à côté d’autres de ses congénères bateaux la plupart du temps, au port de Caladon. C’est un peu aléatoire. Mais je n’ai généralement pas de mal à repérer s’il ment, ou pas. »
Belethar eut un petit sourire et un haussement d’épaules : la nature d’un baptistrel était ainsi faite, aucun mensonge ne leur échappait, quand bien même cela devait leur faire mal. Sur ces entrefaites, il regarda Tiamat qui se rapprochait de plus en plus au fur et à mesure de leur discussion. Il prit la patte de Reynagane, avant de dire :
« Je te laisse l’honneur et le privilège de descendre en premier de mon navire ? Tu pourrais nous présenter à la garde comme cela. Pas que je sois timide … Mais je pense que ce sera mieux si tu le fais toi. »
Parce que Reynagane était gardienne. Parce que les Graärhs étaient l’alpha et l’omega de cette situation qu’ils connaissaient depuis plusieurs mois maintenant. Parce qu'il fallait aller chercher le mal à la source.
Si d’ordinaire son esprit-lié du pingouin lui suffisait à accomplir ses déplacements personnels, le baptistrel ayant le frisson de l’aventure et voulant explorer également chaque recoin des mers prenait de temps en temps son navire que lui avait si gentiment offert son presque-frère. Mais aujourd’hui, l’aventure n’était pas vraiment la raison de pourquoi le Baptistrel se trouvait sur son navire. Enfin, encore que... pensait-il d’ailleurs . Belethar, en sa qualité de gardien de l’ordre baptistral était attendu ce jour-ci à Tiamat, dans le sanctuaire sacré du Baôli.
Une visite officielle donc, qui exigeait des apparences marquées, et un respect strict du protocole. Et pour cause, il ne faisait pas ce voyage sans raison : c’était une visite préparée conjointement avec Ilhan, son compagnon de toujours, et avec Reynagane, la désormais nouvelle Gardienne du Baôli et … grande amie ? Du Baptistrel. Belethar avait hésité. Les souvenirs de la visite de Reynagane au Domaine étaient encore marqué dans son esprit. Pouvait-on vraiment qualifié « d’amitié » les sentiments qu’il avait eu là-bas, ainsi changé en quelqu’un de leur espèce ? Il avait été fondamentalement la même personne, mais ce qu’il avait senti, c’était comme voir quelqu’un sous un tout autre angle, comme si on avait dévoilé un grand bâtiment caché par un drap.
Belethar secoua la tête. Ça n’était pas vraiment ni le lieu, ni le moment de penser à tout cela. Car en l’occurrence ils n’allaient pas franchement en vacances, tous trois. Ce qu’ils avaient vu a Althaïa, et ce qu’on reportait de ce qu’il s’était passé à Nyn-Tiamat, cela les avaient tous trois bouleversés.
Les Couronnes de Cendre étaient encore empli de mystères. Même si tous trois connaissaient maintenant bien le sujet, des non-dits existaient encore, tout autant que de véritables solutions sur comment aborder les conflits à venir. Alors tous trois, ils avaient décidé d’aller au cœur du problème, là où tout avait commencé, et là où des pistes inexplorées restaient encore.
Il avait été question plusieurs fois d’une personne enfermée dans la glace, dans ce sanctuaire qu’était l’île de Tiamat. Belethar, Reynagane et Ilhan voulaient en apprendre plus sur elle. Qui elle était, si une partie de son héritage subsistait et si des informations pouvaient les aider à vaincre Laalach et ses acolytes.
Ainsi donc, Ilhan et Belethar, en tant qu'étranger non-poilus durent écrire une missive aux deux légions encore influentes sur l’archipel, demandant l’autorisation d’accès à l’île. Un protocole nécessaire, mais les légions n’opposèrent pas vraiment de difficulté : ils étaient tous deux proches de Reynagane, la gardienne, et pour ce qui concernait Belethar, son serment de Baptistrel l’obligeait a une certaine attitude non-violente.
Ainsi donc ils avaient eu leur autorisation d’accès, et voici que les trois compagnons allaient s’aventurer dans un lieu hautement chargé d’histoire pour, peut-être, collecter de précieuses informations leur permettant d’y voir encore plus clair.
Mais pour l’heure, Belethar était encore seul, sur son navire. Enfin seul, pas tout à fait, car son bateau prenait plaisir de temps en temps à répéter sa petite chanson :
« Pipe pipe pipe, pipe et jambe de bois ! »
Chaque fois qu’il poussait la chansonnette, Belethar avait un petit sourire songeur. Il ne savait pas s’il devait maudire de tous les noms Valmys d’avoir inscris ce sortilège sur ce bateau en ne prenant exprès qu’un fragment de chanson rentrant en tête et ne partant qu’après plusieurs jours sans côtoyer ce même navire, ou bien le bénir car malgré tout, cela avait le don de détendre au moins un petit peu l’atmosphère. Car la situation avait beau être grave et leur mission de la plus haute importance, il était amusant de voir que ce bateau qui n’avait qu’un ersatz de conscience pour certaines choses seulement ne prenait absolument pas tout le contexte du voyage en ligne de compte.
Après quelques instants à voguer comme cela seul, Belethar sentit finalement une petite torsion de la trame, qui émanait du pont principal. Le baptistrel relâcha alors la maîtrise du bateau, qu’il faisait par la pensée, et fit signe à un autre navigateur compétent qui se trouva non loin de lui de prendre la barre.
Alors qu’il relâcha le contrôle, la torsion se fit plus grande jusqu’à voir un portail sur son navire. Portail duquel sortirent ses attendus et valeureux compagnons, puis ce dernier se dissipa complètement. Miracle de la magie, Ilhan et Reynagane avait rejoint le Baptistrel en un rien de temps, comme convenu.
Il ne fallu pas plus de temps pour que Belethar fasse une grande accolade à Ilhan, à qui il glissa une salutation typique d’Althaïa. L’Espérancieux savait à quel point ce genre de choses étaient importantes pour lui. Il ne savait pas comment il se sentait, alors peut-être qu’un mot sympathique aiderait à le détendre.
Il s’enquit de savoir comment il allait, et si le processus ne l’avait pas trop fatigué, puis une fois ces réponses apportées, il se tourna vers Reynagane, et lui accorda aussi une grande étreinte sincère. À elle, il lui fit dans un murmure :
« Je suis heureux que tu nous laisses entrer dans le berceau de ta civilisation » pour le côté formel de la chose … Puis il lui fit une petite embrassade, avant d’ajouter « Et je suis heureux que tu sois là, avec nous » pour le côté personnel auquel Belethar tenait.
Belethar n’eut cependant pas le loisir d’aller plus loin dans la discussion, car aussitôt eut-il fini de saluer ses deux compagnons, que son bâteau fit dans un petit cri :
« Terre en vue ! J’espère que cette fois-ci, je ne serais pas à côté de vieux rafiots ! »
Le Baptistrel eut un petit sourire, et regarda aux alentours : effectivement, il voyait que non loin, l’île de Tiamat et son grand volcan caractéristique se dressait devant eux. Il donna ensuite une petite explication à Reynagane sur pourquoi son bateau réagissait ainsi – car son presque frère était l’instigateur de cette farce – :
« Mon bateau … Parle, grâce à la magie. Il n’est pas exactement conscient comme nous, mais parfois il communique des informations, il chante … Et il semble faire une fixation sur le fait qu’il est à côté d’autres de ses congénères bateaux la plupart du temps, au port de Caladon. C’est un peu aléatoire. Mais je n’ai généralement pas de mal à repérer s’il ment, ou pas. »
Belethar eut un petit sourire et un haussement d’épaules : la nature d’un baptistrel était ainsi faite, aucun mensonge ne leur échappait, quand bien même cela devait leur faire mal. Sur ces entrefaites, il regarda Tiamat qui se rapprochait de plus en plus au fur et à mesure de leur discussion. Il prit la patte de Reynagane, avant de dire :
« Je te laisse l’honneur et le privilège de descendre en premier de mon navire ? Tu pourrais nous présenter à la garde comme cela. Pas que je sois timide … Mais je pense que ce sera mieux si tu le fais toi. »
Parce que Reynagane était gardienne. Parce que les Graärhs étaient l’alpha et l’omega de cette situation qu’ils connaissaient depuis plusieurs mois maintenant. Parce qu'il fallait aller chercher le mal à la source.