6 Novembre 1762
La ville bourdonnait d’activité comme de rumeurs, l’attention de la ville toute entière tournée vers les évènements de Cordont, plus loin au nord. Certains souhaitaient la guerre, le cœur encore transit de rancune, d’autres se voulaient simplement méfiants, et certains aspiraient à d’autres faits que ceux des armes contre un ennemi ne méritant pas même le respect. Pour autant, la ville ne cessait pas de vivre, ses pensées certes tournées vers l’extérieur, mais les bras continuant de marteler le fer d’une cité encore en construction et pour laquelle ses habitants, dans leur majorité, avait un véritable amour. Voilà, en vérité, ce qui différenciait beaucoup les étrangers des citoyens de Délimar, l’amour de cette ville, la fierté de ces imposantes murailles, l’adhésions aux valeurs de la grande citadelle en un esprit et une âme commune, unie contre les dangers. Et des dangers, ce monde en regorgeait : vampires, monstres, chimères… Ils n’avaient certainement pas fini d’en découvrir. Mais au sein de la ville, ils étaient saufs, c’était ainsi qu’ils le voyaient. Là, ils auraient toujours quelqu’un pour garder leur dos. Chacun y trouvait son compte, tout en contribuant à celui des autres. Voilà encore quelque chose que les étrangers ne comprenaient pas. Mais fort heureusement, les citoyens ne demandaient pas vraiment aux étrangers de comprendre : s’ils comprenaient tant mieux, sinon tant pis. Cependant, s’il y avait, entre toutes, une chose que les citoyens valorisaient, c’était bien la quiétude et la sécurité de leur patrie. Aussi, toute contravention à cet état de fait était rapidement reporté et analysé, voire circonvenu.
C’était dans ce procédé habituel, commun, que deux gardes se présentèrent en début de matinée devant celui que l’on nommait le Loup solitaire. Le premier était un Glacernois, imposant avec ses deux mètres quarante, un pur produit du nord avec ses yeux bleus et ses cheveux blonds. Le second, plus petit, était un Almaréen, mat de peau, aux yeux d’encre profonds. Ce fut lui qui demanda, dans un commun parfait, au chef de la Meute de le suivre jusqu’à la citadelle afin de pouvoir prendre connaissance de sa version d’un incident survenu la soirée précédente dans une taverne, et la confronter à celle de son détracteur, de sorte qu’ils puissent vérifier s’il y avait vraiment eu une infraction et si celle-ci, si avérée, relevait ou non des interdictions magiques. Ils étaient tous deux parfaitement détendus, ne semblant voir aucune menace en la personne de l’homme qu’ils venaient interpeler, et leur demande était un ordre tranquille, légitime et sans excès de dureté ou de violence. Une fois qu’ils eurent confirmation de la coopération du paquet, tous deux prirent, avec lui, la direction de la principale caserne des gardes de la ville, encadrant l’étranger avec une coordination parfaite mais sans le presser pour autant. Ils n’étaient pas pris par l’urgence et tant que l’autre ne faisait pas sa mauvaise tête, ils ne comptaient pas le rudoyer. Les petites habitudes Séléniennes n’avaient pas cours ici. La discipline nordique était de fer, les récalcitrants sévèrement punis. Manquer à l’honneur d’un seul, c’était manqué à la patrie, et on ne déshonorait pas la patrie.
Une fois au sein de la garde, ils firent attendre le guerrier dans une loge sécurisée et surveillée. Lorsque la porte s’ouvrit de nouveau, ce fut pour laisser passer un garde différent, porteur d’une armure de la citadelle plutôt qu’une armure de la garde des rues. Elle vint étudier un instant l’individu avant de l’inviter à la suivre jusqu’à un bureau donnant sur la vision du port, au loin, où plusieurs navires de la flotte d’acier étaient encore amarrés. S’installant à côté d’un de ses homologues masculins elle fit signe au Loup solitaire de s’installer sur la dernière chaise de libre, à côté de l’un des hommes ayant participé de l’incident de la veille, un des ‘’gardes’’ qui avait observé l’intervention de l’étranger pour récupérer une banale danseuse de bouge. De nouveau, la femme prit un instant pour jauger les deux partis, puis se décida enfin à parler, d’une voix calme, et empreinte de l’accent caractéristique des fils du nord.
« Comme on vous l’a signifié, un incident est venu jusqu’à nous, ayant eu lieu hier soir près du port, à la taverne ‘La colline joyeuse’. Vous avez été, messire, désigné comme étant le principal acteur de cet indicent. On vous accuse, nommément, de : trouble à l’ordre public, menaces aggravées, usage de magie et insulte envers la garde de la ville. Plusieurs de ces accusations sont particulièrement significatives, nous aimerions donc entendre votre version des faits, avant de décider de quoi que ce soit. Qu’avez-vous à répondre aux mises en cause de cet homme ? »
Ses yeux clairs et francs vinrent se poser dans ceux du guerrier scindé, expectatifs, alors qu’il était évident dans son attitude qu’elle lui laissait toute parole pour leur expliquer sa version des faits. Tryghild était d’ailleurs assez curieuse de l’entendre, considérant la réputation de la Meute et les bienfaits qu’elle apportait aux petites gens en dehors des murs des grandes cités Calastines. Et comme elle connaissait déjà la Colline joyeuse comme étant un tripot désagréable où les étrangers aimaient à s’entasser, elle savait également devoir être prudente avec les allégations des habitués des lieux. Ces gens se donnaient des airs Délimariens, mais ne l’étaient pas, pour beaucoup. Pour s’enivrer comme un porc, il fallait de toute façon n’avoir aucun respect pour sa propre dignité… mais si ne serait-ce qu’un seul de ses soldats s’encanaillait de pareille façon, il faudrait qu’elle lui touche deux mots.
C’était dans ce procédé habituel, commun, que deux gardes se présentèrent en début de matinée devant celui que l’on nommait le Loup solitaire. Le premier était un Glacernois, imposant avec ses deux mètres quarante, un pur produit du nord avec ses yeux bleus et ses cheveux blonds. Le second, plus petit, était un Almaréen, mat de peau, aux yeux d’encre profonds. Ce fut lui qui demanda, dans un commun parfait, au chef de la Meute de le suivre jusqu’à la citadelle afin de pouvoir prendre connaissance de sa version d’un incident survenu la soirée précédente dans une taverne, et la confronter à celle de son détracteur, de sorte qu’ils puissent vérifier s’il y avait vraiment eu une infraction et si celle-ci, si avérée, relevait ou non des interdictions magiques. Ils étaient tous deux parfaitement détendus, ne semblant voir aucune menace en la personne de l’homme qu’ils venaient interpeler, et leur demande était un ordre tranquille, légitime et sans excès de dureté ou de violence. Une fois qu’ils eurent confirmation de la coopération du paquet, tous deux prirent, avec lui, la direction de la principale caserne des gardes de la ville, encadrant l’étranger avec une coordination parfaite mais sans le presser pour autant. Ils n’étaient pas pris par l’urgence et tant que l’autre ne faisait pas sa mauvaise tête, ils ne comptaient pas le rudoyer. Les petites habitudes Séléniennes n’avaient pas cours ici. La discipline nordique était de fer, les récalcitrants sévèrement punis. Manquer à l’honneur d’un seul, c’était manqué à la patrie, et on ne déshonorait pas la patrie.
Une fois au sein de la garde, ils firent attendre le guerrier dans une loge sécurisée et surveillée. Lorsque la porte s’ouvrit de nouveau, ce fut pour laisser passer un garde différent, porteur d’une armure de la citadelle plutôt qu’une armure de la garde des rues. Elle vint étudier un instant l’individu avant de l’inviter à la suivre jusqu’à un bureau donnant sur la vision du port, au loin, où plusieurs navires de la flotte d’acier étaient encore amarrés. S’installant à côté d’un de ses homologues masculins elle fit signe au Loup solitaire de s’installer sur la dernière chaise de libre, à côté de l’un des hommes ayant participé de l’incident de la veille, un des ‘’gardes’’ qui avait observé l’intervention de l’étranger pour récupérer une banale danseuse de bouge. De nouveau, la femme prit un instant pour jauger les deux partis, puis se décida enfin à parler, d’une voix calme, et empreinte de l’accent caractéristique des fils du nord.
« Comme on vous l’a signifié, un incident est venu jusqu’à nous, ayant eu lieu hier soir près du port, à la taverne ‘La colline joyeuse’. Vous avez été, messire, désigné comme étant le principal acteur de cet indicent. On vous accuse, nommément, de : trouble à l’ordre public, menaces aggravées, usage de magie et insulte envers la garde de la ville. Plusieurs de ces accusations sont particulièrement significatives, nous aimerions donc entendre votre version des faits, avant de décider de quoi que ce soit. Qu’avez-vous à répondre aux mises en cause de cet homme ? »
Ses yeux clairs et francs vinrent se poser dans ceux du guerrier scindé, expectatifs, alors qu’il était évident dans son attitude qu’elle lui laissait toute parole pour leur expliquer sa version des faits. Tryghild était d’ailleurs assez curieuse de l’entendre, considérant la réputation de la Meute et les bienfaits qu’elle apportait aux petites gens en dehors des murs des grandes cités Calastines. Et comme elle connaissait déjà la Colline joyeuse comme étant un tripot désagréable où les étrangers aimaient à s’entasser, elle savait également devoir être prudente avec les allégations des habitués des lieux. Ces gens se donnaient des airs Délimariens, mais ne l’étaient pas, pour beaucoup. Pour s’enivrer comme un porc, il fallait de toute façon n’avoir aucun respect pour sa propre dignité… mais si ne serait-ce qu’un seul de ses soldats s’encanaillait de pareille façon, il faudrait qu’elle lui touche deux mots.