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20 Novembre, Cordont.

Est-ce qu'elle allait aussi mal que ce qu'il se murmurait ? Elle avait l'impression que ce gouffre avait aspiré toutes les choses positives de ce lieu qui pourtant anciennement regorgeait de vie, il avait dévoré les habitants de la ville, leurs souvenirs, leurs espoirs, il ne restait plus qu'une poignée de survivants à présent. Il n'en restait qu'un profond sentiment de vide. La catastrophe l'avait déracinée, et chaque jour qui s'écoulait loin des siens devenait une nouvelle aiguille qui se plantait dans sa tête et son cœur. La seule chose qui l'empêchait de sombrer à ce monstre invisible était son nouveau devoir, qu'elle accomplissait malgré son état préoccupant. Elle était trop fière pour s'afficher dans un tel état de faiblesse, physique et moral.

Ses nuits à présent n'étaient plus aussi belles que les jours des communs, des mauvais rêves l'entraînait, elle réfléchissait beaucoup, trop, peut-être même, elle n'avait que ses correspondances pour se réfugier, sans réponses pour le moment. Étaient-elles seulement arrivées à destination ? Ou peut-être que le comte était trop occupé pour lui répondre, il avait fort à faire depuis la catastrophe. Quant à son géniteur, ils étaient en froid depuis des semaines, et elle avait lentement perdu espoir de lui faire retrouver la raison. Et malgré toute la colère qu'elle ressentait à son égard, à présent elle ne ressentait que de la pitié. Quant à sa fille, elle avait hâte de la retrouver.

Elle en venait presque à haïr ces nuits qu'autrefois elle encensait, la journée, tout allait, elle avait fort à faire, mais la nuit.. Ses pensées se tournaient vers l'abîme que lui évoquait un monstre prêt à dévorer l'île entière, l'air s'engouffrait dans les cavités et lui donnait l'impression d'une bête qui respire. Simple fruit de son imagination ou réalité ? La fille de nuit était persuadée que le gouffre continuerait de grandir.

Lorsqu'on la demandait elle se trouvait dans sa tente, en face de son nécessaire pour écrire ses lettres, elle le quittait rapidement, elle était déjà prête, dans sa robe de soie d'un brun foncé aux teintes chaudes, finement couverte de dorures qui mettaient en avant sa silhouette. Elle retouchait son maquillage qui avait quelque peu couler à cause de ses larmes, retouchait sa coiffure - un chignon élaboré qui durcissait un peu ses traits adolescents - ses multiples bijoux en argent pour masquer sa misère et une cape en soie sur ses épaules nues et elle partait, délaissant la chaleur de sa tente pour la froideur du monde extérieur. Elle s'enveloppait d'avantage dans sa cape, jetant un regard froid en direction du ciel où elle crut un instant apercevoir Fafnir, pour lui aussi elle n'avait plus vraiment le temps.

Sintharia prenait à cœur son nouveau rôle, elle était discrète et efficace, elle avait deux identités, l'une pour la nuit et l'autre pour le jour, l'intrigante, qui avait toujours une oreille quelque part, qui correspondait aux quatre coins des îles et qui recevait à la flamme des bougies jusque tard le soir, une présence délicate et féminine qui ne faisait aucun mal au camp, et la gardienne qui n'était qu'une ombre, efficace et qui ne se montrait que peu. Personne n'aurait pu savoir qu'il s'agissait de la même personne, personne n'avait jamais vraiment imaginé que la fille Dalis puisse être autre chose qu'une frêle adolescente séductrice à ses heures perdues et les déguisements n'aidaient pas. Mais il y avait toujours ces écrits, un papier d'une couleur gris de lin des argentures fines dans les marges -, des lettres propres, parfaitement bien écrites, l'écriture italique purement féminine, et un parfum sur le papier, des fragments joliment écrits de vie, de ce qu'elle voyait, qu'elle glissait sans mal là où seul le destinataire saurait les trouver. Une habitude de galante qu'elle avait conserver, le bourgmestre n'en avait pas été indemne, des morceaux de ce qu'elle observait, des conversations qu'elle entendait, des noms dont elle se méfiait. Des propos qui s'ils avaient pu être intercepter pouvait facilement être pris pour de simple racontars d'intrigants, elle utilisait cela pour toutes ses correspondances avec ses gens de cœur. Elle était futée, indiscutablement.

Elle finissait par pousser la toile de la tente pour y pénétrer, avec ce même air craintif que la première fois, mais cette fois-ci plus usé, elle croulait sous ses étoffes et ses propres bijoux, loin de ses habituels protecteurs, elle semblait vulnérable, presque une cible facile, presque comme si on l'avait déposer ici à la manière d'un appât. Néanmoins, elle se tenait droite et ne cillait pas face à la montagne que représentait la Triade. La courtisane savait que lorsqu'elle était appelée ce n'était pas pour parler banalités.

Un œil avisé pouvait voir facilement au travers de la mascarade, elle semblait plus fragile que jamais, les yeux encore brillants de larme de son récent malheur, affichant l'air de ceux qui souffrent d'un mal qui les brûlent de l'intérieur, que tout le maquillage du monde ne suffirait pas à cacher ce fait. Mais la maladie ne saurait pas retirer la beauté du jeune cygne noir, on lui trouvait même une certaine dignité naturelle. Ce tableau ne dura que quelques secondes avant que la transformation de rigueur ne s'opère.

Elle se recentrait, elle était ici pour une raison, alors elle se ressaisissait avec une détermination impressionnante, en quelques secondes son visage se lissait et elle fit une révérence polie, non sans le gratifier d'un sourire qui sonnait comme amical, dans un bruit agréable de soie, l'étoffe suivait ses mouvements accentuant son élégance, et même si ce masque sonnait un peu faux, indiscutablement elle était belle. Même si le moindre geste brusque pourrait tout balayer.

Messire. Elle attendit ensuite qu'il lui précise l'objet de sa présence ici. Que puis-je faire pour vous ? Elle arborait le ton poli et légèrement charmeur de leur rencontre à Caladon, la première fois.

La courtisane se souvenait de leur première rencontre, et de leur seconde, lorsque ses yeux glissèrent sur le sol, ce jour-là, il avait percé son intimité, le voile était tombé, la noblesse et la beauté presque vulgaires des Dalis avait laissés place à la vérité crue. Et ce soir encore, de nombreuses questions lui brûlait les lèvres, mais cela pourrait bien attendre, tous deux semblaient déterminés à conserver jalousement leurs secrets.

Peut-être avait-il eut vent de ses malheurs, ou peut-être qu'il attendait qu'elle choisisse le bon moment pour aborder le sujet - les choses finissaient par se savoir rapidement même si elle avait garder farouchement ce secret -, en peu de temps elle avait échapper à la mort par trois fois, la chute dans le cratère, sa chute de la falaise, et la troisième, elle avait bien faillit mourir noyée. Elle se donnait tant dans son nouveau rôle, qu'elle finissait par s'oublier, dormant à peine une poignée d'heure par jour, levée avant l'aurore. Son inaction vis-à-vis de ses tourments n'étaient pas due à un manque de confiance, elle était juste trop préoccupée par son devoir pour s'arrêter, elle voulait si bien faire, si bien qu'elle était enjouée par ces moments qui l'empêchait de réfléchir.

Sa présence ici avait eu beaucoup de bon, elle avait gagné en efficacité, agrandissant son réseau par la même occasion, même si elle se laissait encore porter par ses états d'âme. Elle s'était dévoilée avec cette liberté toute nouvelle, loin de la pression de son géniteur. Cela n'avait pas été facile d'effacer les peurs que le vampire avait ancré en elle, il était tellement facile d'obtenir l'amour d'une personne que l'on enferme. Elle se rendait compte qu'elle avait été victime de l'égoïsme du conseiller, il ne l'aimait finalement que parce qu'il se sentait supérieur à elle. Finalement ne l'avait-elle pas aimé seulement parce qu'elle ne connaissait personne d'autre ?

Quant à servir la Triade - elle qui pourtant il y a quelques mois s'indignait de servir ou de plier face à qui que ce soit -, elle s'était faite à cette idée, reposant sa confiance, s'acceptant. Elle apprenait, elle qui avait l'habitude de ne compter que sur elle-même et ses propres capacités, un grand effort.

On lui avait aussi découvert une certaine fidélité, car même si elle parvenait à manger à tous les râteliers, elle était fidèle, elle lui avait montré ses capacités à tuer, elle aurait pu jouer la comédie, ils étaient proches et pourtant à aucun moment elle n'avait eu cette idée de trahir la confiance de l'elfe, arracher une vie était quelque chose de facile, mais pas trahir. Et pourtant elle en avait eu l'occasion, encore aujourd'hui, elle était armée, l'arbalète du Souffle toujours attachée à son bras gauche, dissimulé en un simple bijou était une arme qu'elle aurait pu utiliser à tout moment.

Dernière édition par Sintharia Dalis le Dim 28 Oct 2018 - 15:45, édité 1 fois

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    Les mains gantées de l'elfe fermaient un sac dans lequel avait été placé délicatement un cœur de golem. La tension était largement descendue à Cordont, avec le retrait des troupes Séléniennes. Les deux fronts de Calastin ne se regardaient plus en chiens de faïence. Par image de solidité, mensonge politique, il aurait pu avouer avoir trouver cela facile, que Nolan n'était qu'un gamin dont il n'avait fait qu'une bouchée et probablement que sa fermeté charismatique auraient eu raison des dubitatifs. Mais en son for intérieur et par sincérité, il ne pourrait pas manquer d'admettre avoir eu peur que tout dérape ici. Depuis l'instant où il avait annoncé l'annexion de la cité neutre, jusqu'à la ratification de l'accord, il avait craint non seulement pour les siens, mais surtout pour l’entièreté du peuple humain qui s'était retrouvé à deux doigts de sortir à nouveau les armes. La guerre civile était encore trop fraîche, mais Aldaron priait sincèrement qu'elle ne reviendrait plus.

    Même s'il n'était plus lié au Royaume, le peuple des hommes, quelque soit son appartenance, était son peuple, sa famille. Il aurait pleuré autant le sang des seléniens que des alliés. Ici, à Cordont, il portait son deuil pour le peuple des hommes. Les prunelles d'émeraude se redressaient sur le pan de tente qui s'ouvrait pour laisser entrer une immaculée ravissante, un visage familier, tant en surface qu'en profondeur. Il connaissait cet air de fragilité sous le masque lisse de la beauté éclatante. Il avait bien fait de la convoquer, ils avaient beaucoup à parler et surtout... Il ne voulait pas la perdre. Cueillir une fleur sans lui donner d'eau, c'était construire le Marché Noir sans s'y investir : ça n'avait aucun sens. « Bonsoir, Sintharia. » L'elfe aux longs cheveux de lait laissait la nouvelle arrivante approcher jusqu'à s'arrêter et ouvrir un dialogue auquel il ne donna pas immédiatement suite. Les lèvres de cendres étaient mises sous scellées, réservant son jugement à plus tard, le temps d'investiguer plus concrètement.

    A son tour, il avançait vers elle, le visage lisse d'expression si ce n'était un fond d'inquiétude qui se lisait dans l'éclat tranchant de ses mires. Sa démarche était régalienne et assurée, comme s'il n'avait jamais connu l'hésitation de toute sa vie... Et pourtant ? Il doutait à tout les instants. Une main gantée sortait de la cape d'un bleu irisé comme le reflet de la neige, doublée d'une fine fourrure claire au niveau des épaules pour assurer une température convenable à son porteur. L'index et le majeur effleuraient à peine la peau délicate sous le menton de la jeune femme pour orienter son regard droit dans le sien. Il se passa quelques secondes pendant lesquelles il la transperçait et donnait l'impression de lire en elle comme dans un livre ouvert. Le paraître avait toujours eu son importance, parfois, il suffisait juste de cela, de cette aura pour obtenir ce qu'on voulait.

    Sa main retomba pour se poser sur l'épaule de la jeune femme, délicat geste de soutien à ce qu'il saisissait sous ce beau maquillage. « T'asseoir. » répondit-il enfin, alors que sa seconde main désignait un siège où se placer. La réplique pouvait avoir l'air étrange mais il revêtait deux fonctions : la prévenance et la domination. Dans l'état où elle était, il préférait la savoir en position reposante, mais l'invitation n'était pas enjolivée de belles formules. Il ne restait que l'ordre et il attendit de la voir s'installer pour poursuivre. « Me parler de toi... » La demande était bien vaste, alors qu'il passait dans son dos et la relâchait. Derrière elle, sur le meuble, il servait deux verres d'un alcool raffiné : « Et de Bohémond de Batisdonne. » Le ton calme et mesuré contrastait avec le tranchant de ce qu'il énonçait. Il recoupait tout ce qu'elle pouvait bien lui dire à son sujet, la restreignant à sa relation avec le noble sélénien. Car c'était là ce qui l’intéressait.

    Ses prunelles d'émeraude se portaient sur la jeune femme, sur sa nuque, cherchant à discerner la crispation de ses muscles, si elle venait à se manifester. Il lui laissa quelques longues secondes de silence, pour qu'elle se recompose puis revint à nouveau face à elle, lui tendant le verre empli d'une liqueur ambrée. Si elle arrivait à lever les yeux jusqu'au sien et lui faire face, elle n'aurait que ce visage à l'expression et à l'autorité régalienne... Autant que protectrice.

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Ils avaient peu l'occasion de se voir, malheureusement, elle n'en souffrait pas vraiment, ils avaient leurs propres affaires à gérer. Néanmoins, elle se sentait toujours impressionnée par le charisme de cet homme, ce n'était pas n'importe qui, même si elle était sans doute plus captivée par son aura que le reste, après tout, ils ne se connaissaient pas encore vraiment.

Bonsoir, Aldaron. Elle lui rendait ses salutations avec sa retenue habituelle. Les banalités avaient été esquivée, laissant place à une plus grande familiarité.

Ces brefs contacts physiques l'ébranlaient à chaque fois, une décharge, un geste qui pouvait être paternel, amical ou sensuel. Elle glissait un regard brillant bien qu'encore humide dans ceux de l'elfe, soutenant le contact durant quelques secondes qui lui parurent être une éternité, difficilement. Ce geste lui rappelait une nouvelle fois des sentiments contraires qui détonait bien trop avec les gestes brutaux qu'elle avait l'habitude de subir, les mots durs qu'elle avait tant subit, elle découvrait un monde nouveau, de délicatesse et de subtilité et cela l'émouvait.

Sintharia avait l'innocence de ceux qui ne devinaient pas le piège, elle était donc confiante, néanmoins quiconque la connaissait savait qu'en quelques secondes, elle pouvait se muer en bête sauvage ou déguerpir à la moindre menace. Ou du moins elle l'aurait pu, si elle n'était pas dans cet état, maladive depuis la catastrophe, elle tentait vainement de faire bonne figure, mais ça ne pouvait tromper que les badauds aveugles. Un pli soucieux barrait le front de l'immaculée, elle était si jeune, un physique encore adolescent qui avait tant vécu. Mais cette main sur son épaule qui aurait pu la rassurer l'inquiétait encore d'avantage, néanmoins, elle semblait touchée par ce geste.

Elle s'installait presque docilement dans le siège qu'il lui désignait, non sans prendre soin de se débarrasser de sa cape fourrée, dévoilant son dos, marqué de nombreuses cicatrices fines le couvrait, plus claires que sa carnation, se croisaient parfois, vestiges d'une vie de misère et de splendeur. De son ancienne vie et de sa nouvelle, des bribes de mémoires dont elle ne parvenait pas à se souvenir, des souvenirs douloureux, des blessures qui la brûlait dès qu'elle tentait de s'en rapprocher, l'horreur dans la splendeur.

Ce nom, prononcé de cette manière par cette bouche, sonnait presque à ses oreilles comme une peine de mort, elle serrait la soie noire de sa robe de ses mains, au point que les jointures de ses doigts blanchirent sous l'effet de ses émotions, l'adrénaline liée au danger que cette scène lui évoquait grimpait en flèche, durant une seconde l'anneau de son arme s'activait attendant l'ordre silencieux tournant légèrement, silencieusement.. Mais il s'immobilisait presque instantanément, tendit qu'elle reprenait le contrôle. Elle s'était crispée en l'espace de quelques secondes, elle avait toujours eu un tempérament réactif, accentué par l'esprit qui l'avait bénie.

Son visage se refermait rapidement, tel un masque de céramique, mais ses yeux trahissait son ressentiment, l'orage s'était réveillé, dans un mélange de méfiance et d'appréhension, et quelque part de colère, mais contre qui ? Elle-même, certainement. En tout cas la puissance de sa réaction montrait celle de ses sentiments, jamais elle n'aurait bondit de la sorte pour Toryné, jamais elle ne se serait mise dans un tel état. Elle ne se serait pas emportée dans cette fougue typique pour son géniteur, c'était un cri d'appel du cœur.

Une chance qu'elle était assise, elle aurait presque pu s'effondrer, elle retenait un soupir douloureux en refoulant sa nausée qui allait grandissante. Cet élan d'émotions semblait fragiliser un peu plus son état, son cœur avait rater un battement, elle était plus pâle qu'à son entrée dans la tente et elle s'affalait presque sur son siège, se massant la tempe de sa main gauche, accoudée, un malaise la guettait.

Le noble sélénien n'est-ce pas ? Mon mari, se corrigeait-elle dans ses pensées, la voilà dans une position des plus délicate à présent, le ton avait été bas, lourd, presque craintif, mais résigné. Néanmoins, elle faisait l'air de rien, jouant presque comme si elle avait l'espoir qu'il en existe d'autres portant le même nom. Elle finissait par briser le silence insupportable qui s'installait. Elle grondait intérieurement en arrangeant les pans de sa robe d'un mouvement sec, tentant de récupérer un peu de sa dignité qui venait d'être foulée au sol.

Cette question avait un autre intérêt apprendre, elle voulait vivre heureuse alors elle se cachait, et il n'était pas question que l'on vienne troubler son amour, l'elfe avait déjà bouleverser ses sentiments, une fois. Elle en mourrait si on la privait du seul homme qu'elle avait véritablement aimer et qu'il l'aimait d'un amour sincère. Son cœur se serrait douloureusement à l'idée d'être séparée encore d'avantage du renard. Néanmoins, plusieurs questions pouvaient se poser sur cet étonnant choix du cœur. L'avait-elle prise pour défier les chaînes que lui imposait le cygne ? Jusqu'où pouvait aller leur lien ? Était-elle une menace ?

Il lui demandait de parler de ses silences, de ce qu'elle n'avait jamais osé parler à qui que ce soit, des morceaux de son âme qu'elle avait céder, de son intimité. Une chose dont elle rougissait de honte encore aujourd'hui, le cœur des femmes était un mystère insondable, de nombreux orages et drames parcouraient leurs vies. Il lui demandait de lui parler de son premier amour, de leur lien, une union sacrée. Elle ne savait pas vraiment pas quoi commencer.

L'on murmurait qu'ils étaient amants, les correspondances de l'immaculée ne trahissait rien d'autres que quelques mots doux, alors pourquoi lui parlait-il de lui ? Elle réfléchissait à toute vitesse, aidée par le bourdon. Elle ne voyait rien qui lui aurait permis d'en deviner d'avantage et quelque part elle se sentait frustrée. Mais néanmoins n'oubliait pas de remercier poliment l'homme lorsqu'il lui offrit ce verre.

Oubliez tout ce que vous savez ou que vous avez pu apprendre sur notre relation, Aldaron. Tout ce qui se murmurait sur eux n'était que pure affabulation, il s'agissait de rumeurs insignifiantes et insultantes. Il y avait une demande muette derrière cette phrase.. Un droit à l'oubli. L'on ne choisis pas les gens qui rentrent dans notre vie c'est une question de chance c'est tout. Tout, comme j'ai eu de la chance de vous avoir dans mon malheur. L'on devinait facilement le profond respect qui se dégageait de ce fait, elle lui en était reconnaissante, mais elle était bien trop lasse pour lui accorder plus qu'un pâle sourire.

Sintharia n'avait pas d'histoire à proprement parler, sa vie n'était au final que le mélange de ceux qu'elle avait connu, néanmoins son discours semblait annoncer un malheur et pourtant elle semblait parfaitement plongée dans ses souvenirs, agréablement, mais il y avait de la mélancolie.. Beaucoup. Elle ferait tout ce qu'elle pourrait pour protéger son amour, quitte à le vivre caché à l'abri des regards.

Elle avait le regard bas, fixant le liquide ambré de son verre, tout en faisant tourner son alliance autour de son doigt - un tic qu'elle avait développé au long de ses cinq années d'existence -, un argent simple qui évoquait ses yeux, trop simple pour une Dalis, pas assez tape à l'œil. Elle avait failli la perdre, lors de sa chute dans la mer, elle aurait pu en mourir, mais le curieux vampire qu'elle avait rencontré la lui avait retrouvée, et ce fut un véritable soulagement. Sintharia aurait aimé demander au bourgmestre s'il connaissait cet homme, mais elle préférait garder ce souvenir pou elle.

La fille de nuit était ainsi, des murmures et beaucoup de silences, et c'était bien tout ce qu'il fallait, comme elle parlait peu chaque mot avait son importance, comme si elle avait peur de dire quelque chose de mauvais, et même dans cet état ce fait soulignait son élégance et sa beauté, cette retenue, comme si elle mettait des points de suspension partout. Elle aurait pu être n'importe où, au bras de l'homme le plus riche du monde, du chevalier le plus noble, aux meilleures tables..

Autrefois, lorsqu'elle était encore humaine, catin dans les bas-fonds de Gloria, une enfant livrée à elle-même, elle pensait qu'elle était autrefois solitaire, sans espoir et qu'elle aurait pu tomber amoureuse du premier venu qui aurait fait preuve de bonté envers elle et l'aurait protégé. Cet avenir aurait pu convenir à l'ancienne Sintharia, à présent, elle avait aimé son géniteur, puisque c'était la seule personne qu'elle connaissait, il était facile pour une victime d'aimer son bourreau. Elle avait eut besoin de prendre l'air, et c'était ironique de penser à cette expression qui signifiait tout simplement, là où je me trouve, j'asphyxie. Bohémond avait été cet homme-là, qui lui avait ouvert la porte vers ce monde qu'elle désirait tant et mintenant qu'elle avait échapper au pouvoir de l'androgyne elle respirait..

Mais elle était ici, dans ce camp au bord d'un gouffre, maintenant que la guerre avait été évitée, elle pouvait recommencer à respirer. Juste devant le bourgmestre, puis parler d'un nom - non, d'un homme - qui transformait ses pensées silencieuses en vacarmes assourdissants et le cœur serré par l'inquiétude. Elle retenait son souffle, craignant une mauvaise nouvelle.

Le cygne noir avait dans le regard la lueur de ceux qui espèrent et qui attendent une bonne nouvelle, figée, néanmoins, elle restait digne, se tenant à présent droite, aux aguets du moindre son qui saurait sortir des lèvres centenaires de l'elfe.

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    La liqueur ambrée passait doucement le pas de ses lèvres. Une gorgée, une seule, pour brûler sa gorge. Cela faisait longtemps qu'il n'avait plus mal. Le feu avait eu sa peau jusqu'à l'os et l'alcool avait adouci ses nuits obscures où le volcan surgissait du passé pour le faire hurler. Il n'avait plus mal, cela ne faisait que l'apaiser et l'endormir, mettre en sommeil la bête effrayée, le monstre que Morneflamme avait forgé, celui qui craignait qu'on le poignarde dans le dos. Toujours, il se raisonnait et la trahison le mettait en horreur, tout comme il avait eu la certitude de pouvoir pardonner. Alors l'elfe endormait la bête, comme il le faisait soudent, car la bête n'était pas lucide, elle était faite d'instincts... Et il n'était plus à Morneflamme. Alors pourquoi est-ce qu'elle blêmissait ? Avait-elle peur de lui ? Il avait vu les hommes l'admirer et le haïr, mais depuis qu'il dirigeait le Marché Noir, il avait aussi vu des gens le craindre comme on craint la majorité des hommes de pouvoir, quand on ne sait pas jusqu'où ils sont capables d'aller avec de pareils moyens. Lui-même se posait parfois la question. Devenait-il le tyran qu'il croyait combattre ?

    Les prunelles d'Aldaron la miraient longuement, sans qu'il ne vienne prononcer un mot pour briser le silence. Il ne faisait que noter la crispation de ses muscles, les tremblements infimes de sa chair, son cœur qui se perdait et les lueurs qui caressaient ses iris d'argent et qui révélaient toujours plus que ce qu'on voudrait cacher. Lors qu’enfin qu'elle entama une réponse, il acquiesça d'un signe de tête. Il s'agissait bien du noble sélénien, il n'y avait pas de doute à cela. Avait-elle espéré le contraire ? Qu'il soit question de quelqu'un d'autre ? Le mouvement net de sa tête avait balayé cette issue de secours en une fraction de seconde. Alors qu'il la dardait de ses mires, il reprenait une gorgée d'alcool. Il laissa son verre sur la surface plane de bois, derrière lui, sur le bureau, l'abandonnant un instant ainsi par égard pour l'état dans lequel elle se trouvait. Il n'éprouvait guère l'envie de la voir faire un malaise, la réaction était plus vive qu'il ne l'avait escompté. Il se satisfaisait de la voir prendre le verre.

    « Oublier ? » Sa voix grave était enfin venue combler le profond silence. Il aurait pu le faire durer, jusqu'à ce qu'elle finisse par avoir envie de le rassasier d'elle même et de parler. Il faisait cela très bien d'ordinaire et la pire des tortures était le vide des mots que les malhabiles tentaient vainement de satisfaire en se dévoilant plus que de mesure. « Je n'ai jamais oublié Morneflamme, comme beaucoup l'ont fait. Ils ont nié, pour se protéger de la douleur. Je les comprends mais... Ce n'est pas ma façon de fonctionner. » Ni hier, ni aujourd'hui. Mais loin de vouloir lui fermer la porte, il voulait plutôt qu'elle comprenne la décision qu'il prenait, car c'était là le cœur même de ses fonctions dirigeantes : affirmer et fédérer. Donner des ordres, c'était bon pour les rois. Lui, il voulait qu'elle adhère. « Il n'y a rien de pire que le silence et le vide, Sintharia. C'est là que naissent les doutes qui détruiront le lien qui nous unit, toi et moi. » Un lien plein de curiosité, d'attentes et surtout de bienveillance. Il prit la seconde chaise et la plaça d'un geste précis, net et doux devant elle avant de venir s'y asseoir.

    Ici, il avait les yeux plus à la hauteur de ceux de la jeune femme. Cela lui convenait, comme rapport d'égalité. Il n'oubliait pas sa place de Triade et celle de soldat de plomb qu'elle occupait mais... il gardait aussi en mémoire qu'ils étaient des hommes et des femmes, et à cet effet tous deux imparfaits. « Je n'oublierai pas. Mais je peux accepter. » Penchant le buste légèrement en avant pour appuyer ses coudes près de ses genoux, ses yeux verdoyants arrivaient cette fois pleinement à hauteur des perles grises de sa protégée. « Il se dit que vous échangez des correspondances. Je n'ai pas été plus loin. Le reste n'est que les spéculations de ceux qui n'ont pas mis le nez dans vos parchemins. Et s'ils en ont, j'en ai aussi humainement. Comprends que je ne peux pas sacrifier sur l'autel d'erreurs enfantines les milliers de vie que j'ai entre les mains à chacun de mes choix, surtout lorsque je te laisse veiller sur moi jusque pendant mes ébats. » Il lui avait offert sa vie privée sans la restreindre si elle ne le faisait d'elle-même. Il ne l'avait pas obligée à être là, dans ces moments intimes, mais il ne l'avait pas non plus repoussée.

    « Tu m'as demandé mon amitié et je te l'ai donnée. Tu m'as demandé protection et je t'ai couverte. Tu m'as demandé de ne pas... Simplement détruire Toryné, eu égard de ce que tu ressens pour lui, et je t'en ai promis mes efforts. Je veux que tu sois heureuse et que tu retrouves un souffle de vie qui te manquait. Quand je te vois aujourd'hui, je suis... Horriblement inquiet par ton état et je ne veux pas prendre une décision qui viendrait le compromettre plus encore. » Ses prunelles vertes restèrent un instant sur elle avant d'achever : « Mais si tu me laisses avancer dans l'obscurité, c'est ce qui peut se passer. » La menace était sourde et pourtant sincère. Il sentait comme elle pouvait être impliquée sans parvenir à toucher du doigt de quoi il s'agissait. A avancer à l'aveugle, il finirait par marcher sur la queue du chat sans l'avoir voulu... Et il préférait sincèrement qu'elle lui évite cela plutôt qu'il ne le découvre autrement.

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Elle finissait par revenir à elle, s’installant plus confortablement, elle plongeait quelques secondes ses yeux dans le liquide. Ses émotions la perdaient et elle aurait facilement pu perdre connaissance, elle n’était plus que l’ombre de ce que l’homme avait connu d’elle. Là où il y a encore quelques semaines elle se montrait fière et sûre d’elle, à présent elle semblait crouler sous le poids de ses bijoux et sous ses étoffes. Non ce n’était pas lui qu’elle craignait avec autant d’ardeur, mais ses propres peurs, elle avait peur de perdre ceux qu’il lui restait, elle était déracinée, et pratiquement livrée à elle-même. Elle n’avait pas les épaules pour vivre un aussi grand changement dans sa vie seule. Ayant cru qu’elle avait les épaules suffisamment fortes pour y parvenir..

Elle savait que si sa relation avec le comte venait à être connue, ils seraient en danger.. Néanmoins, elle reprenait lentement le contrôle sur ses émotions, bien qu’elle avait encore le regard brillant et fuyant.

Je ne vous demande pas d’oublier, pas de cette manière. Sintharia n’avait jamais vraiment voulu faire taire les rumeurs à son sujet, pendant que les courtisans racontaient leurs histoires, c’était le temps qu’ils ne passaient pas pour lui nuire à elle ou au noble. Il y avait eu beaucoup de douceur dans sa voix, presque une caresse rassurante dans le regard qui devenait une délicate attention de la part de la courtisane. Puisqu’elle n’aurait jamais osé le toucher sans y être invitée, mais elle maîtrisait suffisamment ses regards pour que son geste passe.. L’on murmure beaucoup de choses sur ma relation avec le comte, nous avons quelques fois batifoler ensemble, c’est vrai, mais ce n’est pas le seul, je lui ai même rendu quelques services, comme j’ai rendu service à d’autres. Il n’y a rien d’intéressant dans ces correspondances que des galanteries, bien qu’elles soient codées.

Faux, il y avait des multitudes de choses intéressantes dans ces lettres. Quelques bribes intéressantes, des ratures et beaucoup de blancs. Parce qu’ils vivaient leur amour passionnément, si bien qu’en-dehors de ces moments-là, ils n’avaient pas grand chose à se dire. Leurs lettres n’avaient donc aucun intérêt hormis pour eux.

J’ai rencontré Bohémond de Batisdonne il y a quelques années alors que je m’apprêtais à mettre fin à mes jours. Elle avait annoncé cela, comme si c’était une banalité sans importance, puis elle trempait ses lèvres dans la liqueur, profitant un instant de la sensation de brûlure qui gagnait sa gorge, lui rappelant le breuvage qu’elle avait avalé ce jour-là. Le même geste pour deux souvenirs différents.

La vérité avait été annoncée, sans chercher à l’enjoliver, presque froidement, elle avouait sa faiblesse, se livrant avec une facilité déconcertante, elle avait avoué beaucoup de choses, elle n’avait jamais avoué à qui que ce soit. Elle affichait un sourire délicat et féminin à ce souvenir, elle n’avait pas l’habitude de s’étendre sur un sujet plus que de mesure. Une phrase qui laissait des points de suspension. Néanmoins, il était facile de deviner qu’elle reviendrait dessus tôt ou tard. Mais pour l'heure elle scrutait l'homme qui se tenait assis devant elle.

Je ne comprends pas votre réaction vis-à-vis de cette relation, je la trouve presque disproportionnée, vous en venez à me parler de Morneflamme et de milliers de morts. Elle ne comprenait pas où il voulait en venir, comment de simples lettres, des sentiments couchés sur le papier pouvaient être liés à des horreurs pareilles ? Elle avait l'impression d'avoir déclenché une nouvelle guerre. Avait-elle était si stupide que cela ? Tout s'effondrait une nouvelle fois, elle aurait pu s’écrouler, néanmoins, elle prenait sur elle - vainement -, se crispant sur sa chaise, elle renversait un peu sa tête en arrière, prenant une longue inspiration qui semblait douloureuse, pour chasser le malaise qui la gagnait, elle fut absente durant quelques secondes.

Tout son trouble se percevait dans son regard à l'instant où elle reprenait le contrôle, l’inquiétude et une incompréhension profonde, et si le problème était plus grave, comment aurait-elle pu comprendre l'homme si elle ne se comprenait pas elle-même ? Et pire si elle aimait un ennemi d’Aldaron ? Elle en mourrait, elle serait incapable de choisir. Sintharia semblait particulièrement soucieuse à présent, et elle doutait encore plus sur ses choix, elle ne regrettait rien, mais si elle avait pu faire différemment ? Qu’en aurait-il été ?

L’immaculée tirait un écrin des plis de sa robe soigneusement dissimulé, elle en tirait une bague en argent, qui ressemblait fort à son alliance, si ce n’est qu’une pierre d’opale était incrustée à l’intérieur. Elle lui tendait la fine pièce d'orfèvrerie pour qu’il puisse l’observer plus attentivement, elle n’avait aucun mal à laisser un objet si précieux entre les mains de l’elfe, un ouvrage fin, de qualité, peut-être Glorien, et qui dissimulait la vérité, puisqu’à l’intérieur de ce qui était une alliance, était gravé le nom de l’être aimé, de manière presque invisible et ça n’était pas Toryné.

Il s'agit d'amour. Je n'ai rien volé, rien détourné, je n’ai trahi personne. Un coup de foudre comme il s'en déclare des milliers de par le monde. Je ne crois pas ne pas le mériter. Je n'ai pas à en rougir non plus.

Sintharia dévoilait une nouvelle fois, un tempérament dont on ne pouvait se douter en la voyant, pour la majorité des êtres elle était une simple courtisane qui flagorne et manipule sans cesse. Pour d’autres, elle n’était qu’un assassin sans pitié. On aurait pu difficilement la trouver aimante et romantique.

Nous nous sommes mariés il y a plus de deux ans, sur l’ancien continent, dans le plus grand des secrets. J’avais besoin d’échapper à la folie de mon père. Néanmoins, ce n’est rien d’officiel, pas comme l’aurait dû l’être mon mariage avec Toryné. Vous vous doutez bien que ce n’est pas le sujet que j’aborde même avec mes amis, en fait vous n’êtes que la deuxième personne à le savoir, même mes suivantes l’ignore.

Vivre caché pour vivre heureux, c’était tout ce qu’elle avait trouvé jusque-là, pour amener un peu de bonheur dans son existence. Il n’y avait eu qu’eux deux et la personne qui les avait mariés. Et son cœur devenait mélancolique à cet agréable souvenir.

Une preuve ultime de la confiance qu’elle portait à l’homme. Un secret que tous ignoraient.

Alors j’étais prête à tout, j’ai aimé Toryné, je l’ai aimé comme un enfant battu s’accroche à ses parents parce qu’il n’a qu’eux. Lui m’aimait parce qu’il m’était supérieur, parce que je lui devais tout, parce qu'il m'avait créé. Il avait tellement bien ancré en moi la peur de ce monde extérieur où l'on ne m'aimait pas, où je ne manquais à personne.. J’étais prête à me sacrifier, même si cela revenait à cracher sur tout ce que je désirais. Même si je devais sombrer encore plus, j’ai dû apprendre à me battre et à survivre par mes propres moyens, quitte à me recouvrir de sang.

Il y avait du ressentiment derrière ses mots, elle avait étouffé pendant plusieurs années, elle avait vécu dans la crainte d'un monde qu'elle ne connaissait pas et où il n'y avait rien pour elle. Elle n'avait été qu'un objet entre les mains d'un égocentrique, elle avait utilisé les moyens qu'elle avait à sa disposition.

Je n’ai pas connu Morneflamme Aldaron, mais j’ai dû tout autant faire ce qu’il fallait pour survivre. J’ai appris à abuser des autres, à connaître leurs moindres désirs, à m'immiscer dans leurs vies, et même au-delà. J’ai accepté d’être utilisée.

En réalité, elle n’avait jamais rien connu, elle n’était qu’une ombre passagère, elle vivait toujours les choses avec un détachement surprenant, jusqu’à cette catastrophe, cette dernière lui avait ouvert les yeux, elle avait appris des choses, la peur, la douleur, la misère.. Des choses qu'elle n'avait jamais connu.

Vous m’avez offert ce que personne n’avait jamais osé m’offrir, le bonheur, la vie et la liberté. Elle, adolescente frêle et maladive, d’à peine vingt-trois printemps, qui portait ses années comme autant de fardeaux, elle n'avait pas quitté les yeux de l'homme, mais elle se détournait rapidement, sentant ses larmes revenir. Quand j'ai abattu ces deux hommes, ici même, j'ai renié mon passé. Je n'aurais jamais eu la force de le faire pour quelqu'un d'autres.

Mais cette fois-ci elle ne parvenait pas à les contenir, elle pleurait avec une si grand facilité, qu'elle se demandait si ce n'était pas le résultat d'un dérèglement mental, ou était sa force de caractère dans ce genre de moment ? Elle s'était tendue pour se lever et se cacher, mais elle n'en avait pas la force, alors elle tentait de dissimuler sa faiblesse, malgré qu'il soit devant elle.

Néanmoins, elle ne semblait pas triste, juste reconnaissante envers une des rares personnes de ce monde à lui avoir tendu la main. Elle séchait distraitement ses larmes, avec une dignité naturelle, comme si ce n'était que des gouttes de pluie. Et elle affichait un sourire, un sourire qui aurait pu signifier : merci. Merci de lui avoir fait prendre conscience de la chance qu'elle avait.

Je dois être un garde du corps bien déplorable si je me laisse ainsi aller, n'est-ce pas ? Un trait d'esprit pour tâcher de faire descendre la tension qu'elle accumulait en dépit du calme de la conversation. Et un éclat de rire pour rassurer.

Malgré tout cela, elle ne prenait pas la situation à la légère, elle était sérieuse, mais elle avait besoin de moment de pause, comme ceux-ci, pour s'apaiser, elle parlerait à présent, tout comme elle avait parler, si les silences effrayaient son interlocuteur. La nuit n'était pas encore morte, et ils avaient beaucoup à se dire.

descriptionIl suffit de respirer pour que le temps passe. - Aldaron. EmptyRe: Il suffit de respirer pour que le temps passe. - Aldaron.

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    Les mires d’émeraudes du Bourgmestre s'accrochaient aux perles grises et tourmentées, comme un orage d'été. L'écoute se lisait jusque dans son regard attentif, défait de jugement, si ce n'était la tendresse protectrice qu'il vouait à cette femme. Il exsudait d'elle une impression étrange, une émotion sincère et une détresse à laquelle il tendait une main. Il refusait qu'elle s'enfonce dans les méandres du désespoir : il n'avait pas lieu d'être c'était tout autre chose qu'il avait souhaité lui offrir. Ni une cage, ni un gouffre. Mais cela, elle le savait, à s'en pas douter, par les mots qu'elle employait et qui sonnaient vrais. Elle était reconnaissante, c'était ainsi que fonctionnait le Marché Noir. « Peut-être que pour d'autres tu ferais un piètre garde du corps. » répondit-il à sa dernière question : « Mais pas pour moi. » L'affirmation était nette et le tranchant de ses prunelles ne laissait entrevoir aucune autre interprétation.

    L'elfe se leva et marcha jusqu'à l'entrée de la tente pour en ouvrir un pan. Il murmura quelques mots à l'un de ses gardiens, réclamant l'aide bienveillante du guérisseur graärh qui répondait au nom de Purnendu Chikitsak. Il reprit place face à elle, captant un mouchoir de tissu en chemin qu'il lui tendait pour qu'elle sèche ces larmes. « Beaucoup cherchent, courent après la perfection. C'est vrai qu'elle est attirante, qu'elle rayonne de milles feux dans chacun de nos rêves. Mais là est bien tout son problème : elle n'existe pas. On ne devrait pas être brimé de ne pas avoir su l'atteindre mais au contraire loué d'être humain. D'avoir cette part d'erreur ou d'échec. Je ne recherche pas la perfection, Sintharia. Je cherche la justesse. » Délicatement, il prit l'une des mains de l'immaculée et referma sur ses doigts frêles une emprise tendre.

    « Si le Comte de Batisdonne t'offre du bonheur... » Ses pensées fuyaient vers Ivanyr alors qu'il baissait les yeux un instant. Il acquiesçait de la tête : « Continue de lui écrire. Et... J'ai fait venir un guérisseur pour vérifier ton état. Ta santé m’inquiète, j'aimerais te voir retrouver des forces. » Il resta avec elle, jusqu'à l'arrivée du soigneur, à lui parler et tâcher de la faire sourire. Il savait si bien faire le clown, détourner l'attention et surtout... La réconforter.

descriptionIl suffit de respirer pour que le temps passe. - Aldaron. EmptyRe: Il suffit de respirer pour que le temps passe. - Aldaron.

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