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descriptionChasse d'hiver, rencontre frileuse - Alauwyr EmptyChasse d'hiver, rencontre frileuse - Alauwyr

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17 Janvier 1763


L'année commençait et avec elle une terrible nouvelle : les Chimères étaient là. Elles avaient fini par les rattraper et commençaient déjà à ramper sur l'Archipel comme une horrible gangrène. Le choc avait secoué tous les royaumes, ébranlé la confiance de tous les peuples... Sélénia comprise. L'angoisse ne tarda pas à étreindre les cœurs, puis ce fut au tour de la paranoïa qui gagna les esprits là où la hantise des possessions se rappelait aux souvenirs les plus sombres. Comme une traînée de poudre, l'ombre de la suspicion se jeta sur la Cour Impériale, réveillant de vieilles tensions, alimentant des dissensions politiques déjà bien épineuses en temps de paix. L'ambiance devint étouffante, les couloirs glacés de murmures méfiants et les repas plombés d'un silence morose. Rapidement, la majorité des nobles s'étaient isolés, incapables de prêter la confiance à qui que ce soit et beaucoup s'étaient même retirés de la Capitale pour s'isoler sur leur domaine.

« Que des lâches », pensa la jeune Princesse alors qu'elle vérifiait les sangles de sa selle, à quelques minutes du départ en chasse à court. Sa fine et frêle silhouette était chaudement enroulée dans une épaisse cape de laine bleu clair à l'intérieur doublé d'une soyeuse fourrure de zibeline blanche. Une large capuche couvrait sa tête blonde et se refermait sur sa gorge gracile avec une fibule en or blanc, gravée à la forme d'un épervier. Une robe d'un gentiane nacré soulignait ses formes délicates, encore prises dans l'adolescence et si les manches ou le col s'ornaient d'une fourrure douce de lapin, son bustier et ses bras se voyaient rehaussés par des laçages complexes en cordelettes de soie. Serrée à la taille par une fine ceinture de cuir blanc fermée d'une boucle d'argent, plusieurs lanières tenaient à ses hanches sveltes diverses petites sacoches en toile cirée. La robe tombait jusqu'à ses pieds et s'évasait en une traîne qui lui offrait un certain confort dans sa monte imminente.

« - Princesse, les voici. »

Un palefrenier venait d'arriver à sa hauteur et lui présenta son poing droit couvert d'un épais gant de cuir afin de soutenir la majestueuse silhouette du faucon Gerfaut. Avec son plumage immaculé à peine poudré d'un brun profond, Eliza était une femelle âgée de trois ans en pleine forme. Elle avait un capuchon sur les yeux pour la garder au calme alors que l'une de ses pattes était captive d'une petite lanière de cuir et d'un minuscule grelot de cuivre. Au sol, Lambert remuait de la queue avec enthousiasme et levait sa truffe caramel vers sa maîtresse qu'il était visiblement heureux de retrouver. Son dressage l'empêchait de sauter sur la jeune fille, mais ses halètements et geignements ne trompaient pas : il en mourrait d'envie. Le chien était un golden retriever avec une fourrure terre de sienne brûlée, poils longs et lisses déjà poudrés de neige et de quelques éclaboussures de boue. Indéfectible compagnon de chasse, il alla présenter ses hommages à la jument royale en lui léchant les naseaux, puis renifla les alentours immédiat pour patienter.

« - Merci bien. Un instant... »

Victoria eut l'ombre d'un sourire gracieux pour le palefrenier, puis se détourna pour agripper une poignée de crin sur l'encolure de Roseline et d'un bond souple, elle se hissa sur la selle amazone. Il ne lui fallu que quelques secondes pour venir enrouler ses jambes aux deux fourches ; la gauche en dessous et la droite au-dessus. Elle coinça ensuite la cravache sous son bras droit, qui devait remplacer la jambe manquante sur ce côté de la monture avant de se pencher vers son aide pour récupérer son propre gant de fauconnerie qu'elle enfila sans attendre. Le faucon poussa un sifflement rauque en étant déplacé, mais ne fit rien de plus et s'installa confortablement sur le bras de la Princesse avant de glisser le bec sous une aile. Le chien se rapprocha des jambes de la jument, sentant que le départ approchait. Victoria observa les alentours de sa nouvelle hauteur et remarqua que la vingtaine de nobles présents étaient déjà tous en selle.

Un soupir inaudible échappa à ses lèvres rosées, rendues brillantes par un baume gras parfumé d'essence de rose appliqué afin de les protéger de la cruelle morsure du froid. Ses joues veloutées étaient elles aussi marquées d'une légère carnation dans cette aube frappée de givre et de neige fraîchement tombés durant la nuit. Cette fin de semaine était dédiée à la détente en extérieur du Palais, à plusieurs heures de la Capitale sur les terres d'un Vicomte favori à la Cour. L'homme espérait que cette occasion soit propice à la bonne entente et au renforcement des liens mis à rude épreuve avec l'annonce des Chimères. Il n'y avait que la crème de la noblesse Sélénienne, exception faite des autres membres de la famille Impériale et d'une poignée d'intellectuels employée ailleurs, de façon bien plus urgente.

N'ayant aucune affaire dans les préparatifs du Royaume à l'encontre de la menace approchante, Victoria avait accepté l'invitation à cette chasse en espérant pouvoir, elle aussi, se changer les idées et fuir pendant deux jours l'ambiance plus qu'étouffante du Palais. Elle était donc là, cadette de la troupe du haut de ses quinze printemps et comptait bien s'esquiver du corps principal pour aller effectuer sa propre chasse en Haut Vol avec ses familiers. La barbarie d'une traque de cerf ou de sanglier n'était pas à son goût et la jeune princesse rêvait déjà des plumes blanches de quelques perdrix, voire la fourrure moucheté de fugaces lièvres. Ses yeux au bleu profond s'arrêtèrent sur une haute et massive silhouette qui tranchait sans peine avec les autres cavaliers. Ses sourcils se froncèrent délicatement alors qu'elle essayait de reconnaître cet homme et il lui fallu plusieurs secondes à cogiter pour qu'elle parvienne finalement à mettre un nom sur ce visage impassible : Alauwyr Iskuvar.

Un frisson coula dans son dos et elle serra les pans de sa cape autour d'elle, aussi frileuse qu'inquiétée par la présence d'un être aussi sombre. Elle avait entendue parler de ses derniers exploits ainsi que de son adoubement en tant que Chevalier, sans parler de sa récente promotion comme Général Sélénien. Cette promotion avait été une véritable pierre jetée dans la mare et toute la Cour avait longuement vilipendé la décision de l'Empereur à promouvoir un va-nu-pied au lieu d'un noble déjà établi et soutenu par les puissances qui gravitaient autour du trône depuis bien des générations. Pour la Princesse, il s'agissait d'un acte audacieux mais qui rendait justice aux méritants de l'Empire... même si elle se posait maintenant des questions sur le choix de son frère ! Non, décidément, cet homme était trop sinistre. Effarouchée, Victoria détourna le regard avant d'être surprise à le regarder et se concentra sur le retombé de sa robe qu'elle ajusta de sorte à couvrir ses chevilles et ne pas gêner ses mouvements.

Le son du cor résonna, annonçant le départ. Si Lambert aboya en écho, il resta docilement aux côtés de sa maîtresse qui attendit quelques minutes que la troupe s'avance sur le chemin pour finalement talonner sa jument et suivre à distance, au petit trot. Les rabatteurs s'éparpillèrent dans le sous-bois, frappant les buissons alors que les chiens de chasse, tenus en laisse, aboyaient à tout va pour effrayer le gibier. Les terres du Vicomte étaient principalement couvertes de forêts, entrecoupées par plusieurs rivières alors que de rases collines jalonnaient le paysage enneigé. Victoria accompagna la troupe de chasse pendant presque une demie heure avant qu'elle ne finisse par repérer un vol de perdrix au dessus des arbres dénudés, à sa droite. Son visage s'éclaira aussitôt et elle jeta un rapide coup d’œil vers les nobles attroupés qui discutaient entre eux sans lui prêter la moindre attention. Assurée que son départ ne serait pas sujet à controverse, elle claqua de la langue et tira doucement sur les rennes pour faire quitter à Roseline le chemin.

Sans un regard en arrière pour s'assurer qu'elle ne soit pas suivi, la Princesse s'enfonça dans les bois dense avec une pointe d'impatience candide. Elle mourrait d'envie de libérer Eliza pour observer son envol dans le ciel limpide et la jalouser aussi, égoïstement. Lorsqu'une clairière se profila entre les arbres, la cavalière remit au pas sa monture et s'arrêta finalement au centre de l'aire dégagée. Lambert se précipita pour venir vérifier les buissons alentours, cherchant la moindre piste intéressante tandis que le faucon se voyait libérer de son capuchon et ouvrait les yeux dans un petit claquement de bec.

« - Bien... ce devrait être satisfaisant ici. Eliza tu... Mh ? »

Victoria se tourna de moitié sur sa selle alors qu'un craquement de bois se fit entendre non loin de sa position, dans le couvert des bois en pénombre. Son cœur s'accéléra et elle replia légèrement son bras couvert de cuir pour approcher le faucon en un geste de prudence craintif. Elle fouilla les environs d'un regard inquiet et tendit l'oreille.

« - Il y a quelqu'un ? »

Normalement non, mais cela ne coûtait rien de questionner le vide ! Le groupe était bien plus loin à courir bêtement après un cerf ou un autre gros gibier. Cette forêt était une chasse gardée, alors aucun vassal du Vicomte ne devrait s'y trouver à moins de braconner. Des brigands peut-être ? Non, pas si proche du domaine, enfin elle l'espérait... alors un loup ou tout autre prédateur ? Victoria baissa les yeux sur Lambert qui ne semblait pas plus paniqué bien qu'il se soit mis en position d'arrêt et semblait écouter avec attention les bruits qui faisaient échos autour d'eux. Un mouvement la fit sursauter et elle releva le visage dans cette direction, gorge nouée. Une de ses mains glissa dans les plis de sa cape et se referma à la garde courbe de sa petite dague. Intérieurement, la Princesse passait en revue tout ses sortilèges et tremblait légèrement de peur.

descriptionChasse d'hiver, rencontre frileuse - Alauwyr EmptyRe: Chasse d'hiver, rencontre frileuse - Alauwyr

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Quand on devenait Chevalier au sein de la Cour Impériale, avec l'importante fonction de Général des Armées, il y avait des choses que ces titres et rangs qu'on ne pouvait esquiver. Des droits, Alauwyr en avait acquis quelques uns, mais des devoirs.... il y avait des choses qu'on ne pouvait pas se dispenser, même une partie de chasse organisée. Cela n'était pas du goût de l'Almaréen, qui n'y voyait là qu'une perte de temps, mais pour répondre à un certain ''besoin'' des gens participant à cette activité plus de détente que d'intérêt, l'ancien mercenaire avait dû faire acte de présence. Et il ne s'était donc pas fait prié pour être à l'heure, son cheval prêt pour le départ. Si certains nobles et hauts bourgeois avaient espéré ne pas le voir, pour avoir de quoi caqueter à leurs petites conversations puériles dans leur salon de luxe, et ben.... c'était raté. Le Général Iskuvar était bien présent et portant son armoire sombre et un peu effrayante. En même temps, une chasse ne demandaient pas à porter dans l'extravagant. Alauwyr tenait à le faire comprendre de manière visuelle. Peut être qu'il était chevalier, mais il restait un combattant. Il avait été promu Général, mais il demeurait un homme habitué à se battre à n'importe quel instant. Même si sa promotion et le titre offert par l'Empereur ne faisait pas l'unanimité, il s'en fichait. Il savait ce qu'il valait et Nolan aussi.

Ce fut donc un homme silencieux et l'air sérieux qui arriva, chevauchant une monture simple, à la robe alezane brûlée, possédant des jambes solides pour porter son cavalier. Les quelques regards que les membres du groupe de chasse furent simplement ignorés. Sauf peut être le regard de la jeune princesse Kohan, présente elle aussi pour la chasse et accompagné d'un fidèle canin et d'un faucon de chasse. . Il l'avait fixé que brièvement, avant qu'elle ne détourne rapidement le regard ; sans doute n'avait-elle pas eu le temps de voir qu'il l'avait posé son regard sombre sur elle. Dans son armure sombre, recouvrant l'entièreté de son corps, il avait de quoi être intimidant. A contrario, Victoria affichait presque l'opposé, paraissant plus lumineux avec certains traits qu'elle partageait discrètement avec l'Empereur. Sa longue chevelure dorée était presque un signe distinctif au sein de cette lignée impériale. Sur le physique, elle était comme nombre de femmes de haute noblesse : belles, aux courbes cherchant la perfection.... Victoria aurait de quoi faire tomber bien des hommes en pâmoison si elle le désirait. Mais pas des hommes tels qu'Alauwyr. Puis le cor claironna dans les airs. Il était temps de partir chasser.

Alauwyr serra ses jambes pour faire partir son cheval, qui ne montra aucune réticence à se lancer au petit trot. Au contraire, on sentait dans les rênes qu'il voulait partir au galop. Alauwyr le retenait fermement, mais sans lui imposer de souffrance aux mors. Il ne tenait pas à se retrouver au milieu du petit groupe qui s'était formé et qui commencé à bavasser de tous et de rien ; des sujets inintéressants pour lui, et préférait s'assurer un certain espace au cas où. Une prudence peut être surfaite, mais Alauwyr était un homme d'expérience et ne négligeait jamais rien, surtout quand on savait que les Chimères arrivaient. Mais la chasse était là pour passer outre les angoisses qui arrivaient en même temps que les prémices d'une guerre. A ces informations là, Alauwyr avait serré les dents. Mais tout venait à point qui savait attendre. Il aura à se battre contre les Chimères. Mais pas aujourd'hui. Aujourd'hui, ce sera se battre... contre du gibier !

Cela faisait à peine une demi-heure que les chasseurs d'une journée était en route. Les chiens des rabatteurs aboyaient dans le lointain, à peine audibles. Alauwyr était devenu morose. Il avait l'impression de perdre son temps, mais devait prendre sur lui, car mine de rien, il était en la présence d'une princesse Kohan, qui pourrait très bien décidé de jouer les aventureuses comme Nolan. A croire que c'était un trait propre à cette famille. Et quand, pour se rassurer d'une certaine manière, il tourna la tête pour voir si tout allait bien pour elle, i eut à peine le temps de voir à peine une seconde la couleur de la robe du cheval de la princesse disparaître de sa vue.

*Par le sang, mais ils sont tous voués à me faire tourner en bourrique ! *

Il tourna bride et prit la direction prise par la princesse. Il ne lui fallut guère de temps pour trouver les traces des sabots de la monture de cette dernière, le sol étant pas trop ferme. Il stoppa sa monture et s'assura de la direction prise. Peut être qu'elle se croyait maligne, mais elle n'avait pas du songer un seul moment qu'on pourrait la suivre. Les traces filaient presque en ligne droite, évitant ici et là des buissons trop épais où encore un tronc d'arbres. Il lança son alezan au petit trot pour l'arrêter quelques instants plus tard. Il arrivait à l'orée de ce qui ressemblait à une clairière assez étendue. Il força son cheval à se mettre au pas et à stopper dans l'ombre des arbres. Et un sabot se porta sur une branche morte qui craqua et se cassa. Cela eut le don d'attirer l'attention de la jeune princesse, inconsciente d'être seule au milieu des bois. Alauwyr attendit un peu, observant la fuyarde et de voir ce qu'elle entreprenait de faire. Son chien n'était pas du tout inquiet, reconnaissant sans nul doute l'odeur de l'Almaréen. Mais à voir l’inquiétude grandissante de la jeune Kohan, Alauwyr poussa sa monture à sortir du bois.

Ce fut donc un cavalier sombre et encapuchonné qui sortit du couvert boisé. Aussitôt, la capuche fut rabattu, dévoilant l'identité du venu.

''Ne savez vous pas qu'il est dangereux de partir seule sans prévenir personne, Princesse ? ''

Dernière édition par Alauwyr Iskuvar le Jeu 21 Mar 2019 - 20:11, édité 1 fois

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L'attente et l'incertitude étaient deux choses qu'elle détestait cordialement en temps normal, mais dans une situation aussi stressante, son aversion était encore plus prononcée. Sa bouche devenait sèche, ses doigts légèrement moites au couvert de ses gants et elle sentait son cœur lui remonter dans la gorge en des battements de plus en plus paniqués. Confrontait-elle un animal sauvage, un braconnier ou un brigand ? Les sorts appris depuis son plus jeune âge tourbillonnaient dans sa tête en une valse étourdissante et elle ne parvenait pas à arrêter son choix. Devait-elle user d'une Aura Rassurante s'il s'agissait d'un prédateur ou devait-elle couvrir toutes les possibilités et user directement d'un sort de Foudre pour assommer ? Ses yeux au bleu changeant continuèrent de scruter les alentours immédiats, fouillant les ombres, mais aussi les moindres coins et recoins de la futaie neigeuse.

Après ce qu'il lui sembla une éternité, mais qui se résuma cependant à quelques minutes, ce fut une haute silhouette jusque là fondue dans une haie de buissons dense qui se révéla enfin. L'intrus était un cavalier solitaire, drapé d'une épaisse cape noire dont l'ample capuche avalait son visage d'une ombre impénétrable. A cette vision, le cœur de la jeune Princesse fit un véritable bond dans sa poitrine et d'un geste sec, elle dégagea son arme au clair pour la pointer sur l'inconnu. Par ce geste, elle espérait lui intimer de garder ses distances, car elle était dans l'incapacité de prononcer le moindre mot sans trahir son effroi. Son joli visage se paraît cependant d'un masque impavide alors qu'elle le vrillait un regard vindicatif dans l'attente d'une explication. Et celle ci lui fut donnée non pas avec des mots, mais d'un simple geste qui révéla l'identité de celui qui l'approchait.

« - Ser Iskuvar !? »

L'exclamation lui échappa, sincère dans son incrédulité alors qu'elle portait une main à ses lèvres pour cacher sa bouche laissée entrouverte sur un souffle écourté par la surprise. L'intense soulagement qui la gagna à cette découverte lui fit trembler le corps d'un contrecoup sur ses nerfs qui ne pardonnait pas. Le nez piquant de larmes retenues, elle s'empressa de ranger la dague dans les replis de sa cape alors qu'elle fronçait délicatement les sourcils dans une moue à la fois boudeuse et contrariée. Elle s'en voulait d'avoir été aussi frileuse, comme une hase prise dans les filets d'un rabatteur ! Piquée dans son orgueil, elle détourna la tête le temps de se ressaisir et fit mine de vérifier les sangles qui maintenaient Eliza sur son gant

« - Ne savez-vous pas combien il était de mauvais goût d'effrayer les damoiselles ? A plus forte raison lorsqu'il s'agit de votre princesse. »

S'il voulait lui inculquer une leçon et bien c'était gagné. La frayeur qu'elle venait de se payer à cause du chevalier glaçait encore le creux de son estomac d'un pincement désagréable. Toujours un brin boudeuse, elle caressa le poitrail du faucon et lui coula un regard de biche sous ses longs cils blonds. Ne voulant pas s'attarder sur un souvenir aussi humiliant qu'elle tremblante comme une feuille, elle répondit du à sa remarque avec un brin de sarcasme :

« - Il aurait été encore plus dangereux pour moi et ma santé mentale de rester une minute de plus en compagnie de ces volailles. »

Le mépris dans sa voix transpira du vernis qu'elle s'employait à montrer en tout instant, elle qui désirait garder un visage de candeur et de docilité pour plaire à l'image que l'on attendait de sa part. Victoria rongeait son frein en permanence, étouffant un esprit aussi vif et mordant qu'une couleuvre. Son avis sur la majorité de la noblesse qui peuplait son très cher Empire ne volait pas haut, si l'on désirait rester dans le thème des plumages ! Il s'agissait de bécasses pour ces femmes qui pavanaient avec mauvais goût et qui gloussaient entre elles sur des frivolités ou des banalités de salon. Quant aux hommes, il ne s'agissait que de poules mouillées qui ne se déplaçaient plus qu'en troupeau depuis l'annonce des Chimères et ce, afin de s'apporter un faux sentiment mutuel de sécurité, dédaignant par la même occasion leurs terres et leurs responsabilités sous prétexte que les monstruosités seraient à leurs portes d'un moment à l'autre !

« - Et vous-même ? Votre présence est-elle dû au besoin de fuir une compagnie ennuyante et suis-je l'excuse parfaite que vous ayez trouvé sans perdre crédit à leur regard ou... et bien, votre acte serait-il réellement porté par pure chevalerie et inquiétude à mon égard ? »

Un petit sourire, fugace et taquin, ourla ses lèvres carmines avant qu'elle ne retrouve un faux semblant de sérieux et d'indifférence boudeuse. Elle s'amusait à le titiller, voulant tester les limites qui lui seraient permises avec lui et, pourquoi pas, en apprendre un peu sur l'homme qui dirigeait à présent leur force armée envers et contre tous.

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L'exclamation aurait pu passer pour un couinement apeuré s'il n'avait pas été articulé du nom du venu. Chose certaine était que la donzelle ne s'était pas trouvée dans une position de méfiance vis à vis de son environnement. Comme s'il avait de quoi demeuré confiant et en sécurité dans ce recoin de forêt. et voir qu'elle s'était saisie vivement de sa dague, pour ensuite la ranger dans les pans de sa tenue de chasse était presque.... risible. Bon au moins, elle avait veillé à être armée, mais avoir une dague et ne pas savoir s'en servir était vraiment futile. Mais cela, il ne pouvait pas vraiment le savoir. Cela se trouvait, elle savait parfaitement en faire usage.

Il la laissa donc discourir et vaquer à ses brèves occupations, le temps qu'elle termine de digérer la surprise de sa venue. Quand elle eut fini ses tirades, il ne manqua pas de hausser un léger sourcillement. Décidément, les jeunes femmes de la Cour, ou des familles nobles, croyaient avoir la langue parfaite et acérée pour manipuler leur assemblée. Il prit quelques secondes avant de répondre. Il devait veiller à mâcher ses mots, maintenant qu'il était dans le sillage de la famille royale. Avec Nolan qui l'avait nommé chevalier et Général des Armées Séléniennes, il devait veiller à sa manière de parler, même s'il était uniquement en présence de la jeune princesse Kohan.

"Je me demande surtout ce qui est le plus salvateur : subir le jacassement de vos pairs ou de se retrouver toute seule et loin de tous pour risquer d'y laisser sa vie. ''

Il comprenait aisément qu'elle se soit éloignée pour fuir le bavardage incessant et casse pied des autres membres du groupe de chasse, mais dans ce cas, elle aurait du refuser d'y participer. Mais pour sauver les apparences, il se fallait se forcer à faire certaines activités pour plaire et jouer sur les apparences.

"Ma présence est simplement dû au fait que vous vous êtes éloignée... et seule..... même au sein de ces forêts, vous n'êtes pas à l'abri d'un accident ou d'un guet-apens. Je ne suis que simple chevalier fraîchement nommé par l'Empereur, mais j'ai la tâche indirecte de veiller sur lui et les membres de sa famille. Et bien que vous soyez princesse, vous vous mettez d'une certaine façon en danger. Donc, mon acte a un rôle purement de protection, rien d'autres....'''

Si elle espérait le prendre à la flatterie, elle se méprenait lourdement. Il était vrai qu'elle était une jeune et belle jeune femme, ne dénotant pas de posséder un certain caractère, mais elle demeurait un membre de la famille Kohan.... et puis Alauwyr avait ses préférences sur le choix des femmes. Nous vous passons les détails.

''Permettez moi de vous inviter à rejoindre le groupe de chasse, pour que vous demeuriez en sécurité. Bien que les forêts paraissent sûres, le danger est présent. Et malgré l'impétuosité qui caractérise la lignée des Kohan, je n'ai guère envie de devoir justifier les raisons d'une blessure ou d'un accident à l'Empereur. ''

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Cet homme était ennuyeux. Elle l'aurait cru plus amusant après qu'elle eut survolée son passé grâce à son réseau d'informations, quelques jours après sa splendide promotion. Si elle n'avait pas tous les détails de son existence, elle avait connaissance de ses hauts faits et de quelques autres anecdotes moins courantes, portées parles bruits de couloirs et les rumeurs dans le corps armé du Palais. Elle avait cru, peut-être naïvement, que cet homme ne serait pas du genre à jouer les chaperons rébarbatifs ! A l'entendre lui enjoindre de retrouver le reste de la troupe, Victoria plissa légèrement du nez dans une petite frimousse contrariée et détourna ostensiblement la tête avec un petit « mh » vexé.

Allons bon, elle ne s'était pas donnée toute cette peine pour devoir rentrer aussi tôt. Elle désirait chasser quelques perdrix et lièvres dont la fourrure et le plumage étaient d'un blanc idéal en cette saison. Si elle attendait encore, le brun sale de leurs apparats d'été n'allait pas tarder à souiller l'immaculée robe hivernale ! Et elle ne désirait pas patienter toute une année pour pouvoir remettre la main sur une ressource aussi délicate. Nombre de ses robes et accessoires réclamaient cette touche pure et innocente. Sentant le désappointement de sa maîtresse, Eliza déploya de moitié ses ailes et poussa un cri nerveux, claqua du bec et frotta sa tête contre une patte.

« - Vous êtes beaucoup trop sérieux, Ser Iskuvar. »

Ce qui devait expliquer la couleur de ses cheveux. La princesse continua toutefois sur sa lancée :

« - Cette sortie est supposée être amusante, hors nous sommes tout les deux d'accord pour dire qu'il n'y a rien d'amusant à rester avec notre hôte et ses amis poudrés. Toutefois... »

Elle eut l'ombre d'un petit sourire chafouin qui fit briller ses grands yeux céruléens d'un éclat joueur alors que ses joues se coloraient légèrement à l'excitation qui lui venait soudain. Elle entrevoyait une porte de sortie ! Un moyen de s'éviter le retour ennuyeux au possible auprès du reste des chasseurs et autant dire que l'adolescente était toute prête à jouer la carte du chantage si cela lui permettait de gagner quelques heures supplémentaires loin du poulailler.

« - Si j'ai bien tout compris, vous êtes tenu par l'honneur de votre rang à me suivre et à me protéger tant que je serais dans une possible situation de danger ? »

Victoria ouvrit un peu plus grand ses yeux, adoptant une expression à la fois surprise et attendrit alors qu'elle battait de ses longs cils blonds et posait une main sur ses lèvres délicatement arrondies en un « o » de stupeur, comme si elle venait tout juste de réaliser quelque chose. Sa voix vibra d'un léger trémolo ému alors qu'elle se récriait avec une surprise et une indignation feintes :

« - Mais !? Ne sommes-nous pas sur les terres sécurisées d'un allié au trône et n'êtes vous pas, vous-même, un ancien mercenaire de renom que mon frère adoré, l'Empereur, aura récemment nommé au rang de Général des armées de touuut son Empire ? »

Son joli minois se fendit d'un sourire de connivence alors qu'elle regardait de droite, puis de gauche, comme pour s'assurer qu'ils soient seuls et qu'aucune oreille indiscrète ne vienne écouter ce qu'elle comptait lui souffler sur le ton de la confidence :

« - Allons Ser iskuvar... seriez-vous en train de me jouer la carte de la modestie en prétendant ne pas pouvoir me protéger si nous ne sommes pas tout deux encadrés par les autres chasseurs ? Doutez-vous tellement de vos compétences pour chercher la sécurité du plus grand nombre ? »

Elle s'était légèrement penchée sur l'encolure de sa jument, accentuant l'aspect secret de ses questions purement rhétorique. Ils savaient tout les deux que ce n'était absolument pas vrai, mais si le Général laissait couler de pareilles insinuations et insistait pour retourner auprès des Nobles, Victoria ne comptait pas l'épargner au regard des autres. S'il réfutait ce qu'elle venait d'annoncer, alors il n'aurait aucune raison valable pour lui refuser sa petite chasse privée. Toutefois, il y avait le risque d'une troisième option ; qu'il fasse simplement la sourde oreille et ne reparte sans elle. La Princesse n'avait pas envie de se retrouver seule, surtout pas après la frayeur qu'elle venait de vivre, aussi décida-t-elle d'ajouter avec une tendresse parfaitement dosée dans la voix :

« - Moi j'ai confiance en vous, chevalier. Après tout, Nolan vous accorde la sienne, n'est-ce pas ? Je sais que je n'ai rien à craindre tant que vous veillerez sur moi. »

Elle se redressa et le couva d'un regard tout aussi candide que peint d'une admiration sincère. Cet homme qui n'avait rien, ni noblesse ni réelle réputation dans les plus hautes sphères de l'Empire. Cet homme avait sauvé son frère et gagné suffisamment de sa confiance pour obtenir le plus haut titre militaire envisageable à Sélénia. Connaissant Nolan, jamais il n'aurait nommé un incapable à ce poste, surtout pas avec les tensions continuelles aux frontières de l'Empire et de l'Alliance... pas avec les Pirates et les agitations vampiriques.

« - Allons ! Je souhaite chasser des perdrix, des faisans et des lièvres ! Je n'en aurais aucun si je reste avec la troupe qui vise de biens plus gros gibiers. Accompagnez-moi, Ser iskuvar ! Et si jamais vous éprouvez encore des scrupules, je prendrais la responsabilité s'il m'arrivait quoi que ce soit. Rassuré ? »

Elle haussa un sourcil et lui fit son plus beau sourire alors qu'elle tirait habilement sur les rennes de sa monture pour la faire tourner vers l'intérieur de la forêt, à l'opposé du reste de la troupe bruyante. L'on pouvait entendre les aboiements de la meute s'estomper, témoignant que la battue s'enfonçait plus loin vers les sous-bois et les champs, là où les chevreuils avaient le plus de chance d'être débusqués. Victoria laissa à l'ex-mercenaire quelques secondes de réflexion avant qu'elle ne talonne sa jument et ne reparte au petit trot, convaincue qu'il la suivrait de grès ou de force si ses dires concernant ses responsabilités étaient sincères.

descriptionChasse d'hiver, rencontre frileuse - Alauwyr EmptyRe: Chasse d'hiver, rencontre frileuse - Alauwyr

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Alauwyr avait gardé l'air sérieux en effet, devant le manège de la jeune princesse, le temps qu'elle s'exprime et qu'elle joue de son parfait rôle de femme de haut rang, entre ses mimiques et ses postures. Même s'il y avait bien longtemps qu'il n'était plus dans le sillage de la noblesse -même s'il se trouvait désormais à la Cour Sélénienne-, il n'oubliait pas les petits tours que les damoiselles apprenaient pour se mettre en valeur. Ou qu'elles trouvaient d'elles même pour fournir leurs armes personnelles qui étaient l'éloquence, les flatteries et bien d'autres choses qui pouvaient être aussi dangereux qu'une épée tranchante. A tout cela, au petit jeu donc de Victoria, Alauwyr demeurait impavide, se contentant de la regarder sans mot dire pour le moment. Même à la petite piqûre qui aurait pu être vexante pour son égo, il se contentait de la fixer avec attention. Si elle pensait le faire réagir, c'était raté. La recherche du plus grand nombre était pour les lâches et cela, beaucoup le savait. Sans doute, qu'elle aussi, le savait et qu'elle cherchait à le titiller pour le mener dans la voie qu'elle désirait.

Cette voie était de toute façon tracée depuis le début. Alauwyr avait bien compris que la princesse ne voulait en aucun point rejoindre la troupe, que cela touche ou non à sa sécurité. Elle tenait absolument à chasser des proies précises, plus à sa portée vu qu'elle avait un oiseau de chasse avec elle. Peut-être souhaitait-elle faire part de ses compétences de chasse, à sa manière, que de bêtement suivre une troupe qui laissait tout faire par les chiens et des rabatteurs.

''Il suffisait de le demander, princesse. Cela n'aurait rien coûter de demander à faire une chasse à part. ''

En même temps, avait-on déjà vu une princesse demander quelque chose ? Une princesse digne de ce nom prenait les choses en main, comme elle l'entendait. Et de cela, qu'elle soit Almaréenne ou Sélénienne, c'était la même chose. A croire qu'elle sortait toutes du même moule, ou presque. Car Victoria était de la lignée des Kohan, au caractère téméraire. Si elle était comme Nolan, l'ancien mercenaire n'était pas sorti de l'auberge.

'L'Empereur m'accorde peut être sa confiance, car en plus de lui avoir sauvé la vie, j'ai manqué de le menacer de lui mettre une fessée déculottée s'il refusait de rentrer ? Je ne doute pas un seul instant que vous ferez comme lui, à savoir de restée accrochée à votre objectif''

En tout cas, comme elle était déterminée, après avoir laissé sciemment un léger silence entre elle et lui, elle fit habilement tourner sa monture pour la pousser au petit trot vers l'intérieur de la forêt. Aux aboiements, on entendait que le gros de la troupe de chasse s'éloignait. Le Général ne put s'empêcher de grimacer un bref instant avant de tourner bride à son tour. Fichus nobles qui se préoccupaient plus de répondre à leurs besoins de détente et d'amusement que de s'inquiéter de la princesse. Ils avaient forcément remarquer l'absence de celle-ci et mieux ! Celle du Général ! Outre d'être tranquillisés qu'elle était entre de bonnes mains, ils n'avaient pas à se préoccuper plus que cela de son sort et pourront tout à loisir converser sur les possibles conséquences du duo qui se retrouvait seuls dans les bois, ou dans les fourrées.

Alauwyr rejeta toutes ces pensées qui commençaient plus à l'agacer qu'à l'aider à rester concentré. Il serra les jambes sur les flancs de son alezan, qui se mit au petit galop, rattrapant rapidement la jument. La dépassant un peu, il se pencha juste assez pour attraper la rêne à sa portée pour ralentir l'animal de la princesse, tout en tirant sur les siennes pour stopper son cheval.

''Je vous accompagne pour votre partie de chasse, princesse. Mais que les choses soient claires entre vous et moi. Ce n'est pas une histoire de scrupules ou autre, c'est vous. N'omettez pas que vous êtes une cible de choix. Peut être que les complots et les intrigues qui aboutissent à des morts politiques ne sont plus à l'ordre du jour depuis l'Empereur Fabius, mais ne négligez pas l'importance que vous révélez. Alors, je vous accompagne donc, pour trouver vos gibiers de préférences, mais si j'estime qu'il y a danger en cours de route, vous obtempérez à mes ordres. ''

Où qu'elle n'allait pas être heureuse de voir qu'un homme issu d'une caste bien inférieure à la sienne lui parlait de la sorte. Alauwyr lâcha la rêne de la jument et se préparait à la suivre, quand un animal fusa devant eux, bondissant et galopant comme une biche, mais avec une vélocité plus conséquente. L'Alezan prit peur et se cabra de moitié, repris sévèrement en main par son cavalier qui avait manqué de tomber de sa selle. C'était vraiment pas le moment !

''Par Néant ! ''

Il ravala un autre juron. Ce n'était pas une biche qui venait de fuser devant eux, c'était plus petit -ou plus jeune- qu'une biche et cela avait laissé comme un étrange son, comme une berceuse, à peine audible, vu que la créature était passée en trombe devant eux.

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Demander à faire une chasse à part !? Était-il naïf au point de croire qu’une telle demande fonctionnerait comme chacun l’entendait ? Un vague sourire désabusé lui vint et elle observa le général avec un fond de pitié dans son beau regard. Qu’il était loin des réalités de la Noblesse malgré toutes ses belles paroles et son sens du devoir rutilant à la lumière de son nouveau rang militaire ! Un léger soupir échappa à ses lèvres, créant une buée fugace autour de son visage.

« - Et prendre le risque que certains veuillent m’accompagner ? Oh sottise ! Quel serait l’intérêt dans ce cas ? »

Le ton de sa voix se voulait taquin, mais il grinçait de dérision alors qu’elle levait les yeux au ciel pâle avec un sourire de circonstance. Elle s’impatientait de devoir subir les sermons de cet homme, qui croyait-il être à la fin ? Son chaperon !? Ils n’étaient liés d’aucune façon et sa familiarité commençait à doucement échauffer les nerfs de la jeune princesse. Une colère qui grimpa de plusieurs échelons lorsque le Général fit mention avec si peu de respect à l’égard de son frère, osant même faire l’allusion d’une déculotté !? Ne savait-il pas que lever la main sur la royauté était passible de la peine de mort dans cet Empire ? Ou bien était-il trop bête pour s’en soucier ? L’insolence dont il faisait preuve frisait dorénavant le suicide pur et simple.

Alors que ses yeux s’étrécissaient, une lueur dangereuse brilla dans les orbes céruléens et elle commença à accumuler sa magie. Devait-elle punir elle-même l’insolent ? Non, le pari était bien trop risqué et si vengeance elle devait appliquer, alors elle s’assurerait de la préparer soigneusement pour que jamais cet effronté n’oublie les conséquences de ses paroles irréfléchies. Narines frémissantes et gorge gonflée d’un souffle plus rapide, trahissant la colère et l’indignation qui l’emplissaient, Victoria préféra donc tourner la bride et s’éloigner. Ce mufle s’en mordra bien assez tôt les doigts ! Si elle perdait davantage de temps avec lui, alors elle gâcherait définitivement son humeur et n’aurait plus le goût à la chasse.

Malheureusement pour elle, le Général ne semblait pas en avoir fini et poussa l’irrévérence jusqu’à saisir ses rennes pour arrêter sa monture. La proximité crispa l’adolescente de la tête aux pieds et ce fut un regard aussi farouche qu’outré qu’elle leva sur l’imposante figure de l’almaréen. Pupilles dilatées dans l’ombre qu’il projetait sur elle, la Princesse ne perdit cependant rien de sa dignité et resta droite sur sa selle. Son visage portait le masque régalien du mépris alors qu’elle le vrillait d’un regard à présent sombre et orageux. Le céruléen était remplacé par un gris d’ardoise et alors qu’elle serrait les poings, plusieurs branches d’arbre se brisèrent dans des gerbes d’échardes givrées. Les boucles blondes ondoyèrent autour de ses traits figés d’une expression plus sombre, bien plus mature que les airs ingénus qu’elle se donnait habituellement. La trame répondait et se tordait autour de sa frêle silhouette, mais elle ne fit aucun geste clé pour déferler sa rage. Le silence qui la drapait se parfuma de dédain alors que d’un geste sec, elle récupérait sa bride et relevait légèrement le menton en signe de défi.

Oh combien les mots brûlaient ses lèvres, mais elle les conserva closes. Elle aurait pu lui dire combien elle était consciente de sa valeur, car le poids des chaînes qui pesaient à ses poignets ne la quittait jamais totalement. Elle aurait pu lui dire qu’elle était cruellement aux faits des complots de la Cour, qu’elle avait vu et savouré le poison des entourages de l’Empereur Fabius. Elle aurait pu lui cracher au visage qu’elle avait contemplé la mort plus que de désir lorsque ses gardes furent massacrés sous ses yeux après l’assassinat de Gregorist Kohan ; elle qui n’avait alors que six ans… et qu’elle avait vu la salle du trône brûler et les nobles hurler d’agonie lorsque la rage d’Emerelis Celeas s’abattit sur Fabius à la signature du traité de paix avec les Almaréens, justement ! Oh combien elle aurait aimé lui hurler qu’elle était là lorsque la perle du Néant avait rayé de la carte une aile entière du Palais… qu’elle était au Protectorat lorsque ce dernier fut attaqué par le Tyran et qu’elle avait sentit le corps de sa propre mère tiédir, puis refroidir entre ses petites mains.

Toutefois elle garda le silence.

L’homme qui lui faisait face ne méritait pas qu’elle gaspille son souffle et sa salive. Elle était extrêmement déçu et tout aussi las. Ce grossier personnage n’était qu’une preuve supplémentaire de l’ingérence que son frère adoré, l’Empereur, commettait dernièrement. L’avait-il aveuglément nommé à ce poste de prestige uniquement pour le remercier de lui avoir sauvé la vie ? Quelle déraison. Ils étaient, tout deux, des êtres au dessus du commun et mourir pour permettre à leur lignée de perdurer était une chose normale. Une évidence même. S’il fallait commencer à récompenser tous les sacrifiés et les bonne âmes de l’Empire, ils n’en termineraient pas. Un vague soupir lui échappa et elle détourna finalement la tête avec une grâce toujours empreinte de ce mépris coi. Les raisons qui la poussait à remplacer son adorable frère sur le trône ne faisaient que s’accumuler tandis que l’Empire jadis glorieux s’embourbait toujours plus dans sa déchéance.

Dans la clairière paisible, un peu de neige tomba des hautes branches dans un bruissement poudré. La princesse hésitait à faire demi-tour et rentrer au manoir de son hôte, car l’almaréen lui avait finalement soufflé le désir de chasser. Peut-être prendrait-elle un bain brûlant avant de jouer de la harpe pour se calmer les nerfs et se changer les idées. Toute à son hésitation, elle ne vit pas surgir la créature et n’entendit qu’une étrange mélopée semblable à des carillons et rythmée comme une berceuse. Le juron du Général et les piaillements de sa monture gâchèrent cependant ce son mélodieux et hypnotique, laissant par la même occasion à la bête mystérieuse tout le loisir de s’enfuir depuis l’autre côté de la parcelle dégagée. Un instant désorientée, Victoria émit un sifflement bref qui lança aussitôt Lambert sur sa piste. D’un bond, le chien disparu dans les épais buissons du sous-bois dense.

« - Va, Eliza… Sois mes yeux depuis le ciel. »

Le faucon Gerfaut, au poitrail orné d’une pierre magique, comprenait parfaitement les ordres simples que lui communiquait sa maîtresse. Dans un cri et une envolée majestueuse, elle s’éleva bien vite et bien haut dans l’azure effacé de ce ciel hivernal.

« - Qu’attendons-nous, Général ? Cette créature ne doit pas nous échapper ! Je suis certaine que son trophée fera un cadeau à la hauteur de Nolan ! »

L’excitation perçait dans sa voix harmonieuse et elle talonna sa jument qui alla bondir à son tour dans les fourrés sans s’inquiéter, offrant une confiance aveugle à sa cavalière. La princesse était experte dans la monte et n’avait aucun mal à manœuvrer entre les troncs serrés de cette forêt peu fréquentée. Par instant, elle captait l’éclat caramel d’une fourrure et ajustait sa trajectoire pour rester dans le sillage de son chien. Plus haut, les cris réguliers d’Eliza lui confirmaient qu’elle était sur la bonne voie et que leur mystérieuse créature filait toujours devant eux. Quand le vent changeait, elle croyait entendre le tintement si unique, si enchanteur et n’éprouvait qu’un désir plus grand encore d’attraper cette apparition. Au bout de quelques minutes, Victoria jeta tout de même un coup d’œil par dessus son épaule pour s’assurer que le Général parvenait à suivre la cadence, lui qui n’avait pas semblé très à l’aise sur le dos de son alezan !

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S'il n'y avait pas eu cette étrange et mélodieuse interruption, Alauwyr aurait eu sans doute eu une petite réplique encore bien vexante à l'égard de la jeune princesse. Ou, peut être pas finalement, car au vue de la tête qu'elle avait tiré après sa tirade, nul doute qu'elle n'aurait pas cherché à tenter une victoire orale sur lui... Sans compter que son audace à retirer sa monture poussait vraiment à.... à déclarer un crime de lèse majesté ? Il y aurait tellement à dire sur l'attitude du Général récemment nommée. Mais la jeune femme avait opté pour une autre stratégie : celle du silence. Et aux songes de l'Almaréen, ce n'était peut être pas plus mal. Ces têtes blondes de nobles qui omettaient leur propre sécurité ! Alauwyr aurait pu en grommeler, voir lâcher une injure purement almaréenne. Mais il savait dans quel monde il se trouvait désormais. Et même s'il dépassait ses prérogatives sur le moment, il savait qu'il était un peu... dans son droit. Mais cela, ce n'était que son propre jugement.

Et donc, au vue de comment cela tournait entre ces deux là, qu'une atmosphère lourds de silence et d'échanges de regards se défiant presque l'un et l'autre, une véloce créature passa en trombe devant eux, laissant un sillage sonore et musical, tout en provoquant une panique en la monture équine du Général. Alauwyr manqua de tomber de sa selle, se retenant in extremis à la crinière de son alezan. Il sut ensuite reprendre la main sur sa monture, lui rappelant fermement qu'il était le maître sur son dos. Se voir tomber stupidement de selle aurait de quoi être quelque peu.... humiliant devant une personne telle que Victoria. Et après coup, il y aurait eu des racontars à la Cour. Et l'ancien mercenaire n'avait pas besoin de cela.

Son cheval quelque maîtrisé, il entendit le jappement du chien de la princesse qui s'éloignait. Le canin chasseur n'avait pas perdu de temps pour se mettre à la poursuite d'une belle proie potentielle, réagissant avec intelligence aux ordres sifflés de sa maîtresse bipède. La piste était fraîche du moment à peine passé, laissant la perspective d'une chasse bien plus intéressante que celle espérée et à moitié gâché par l'humeur du général.

La princesse avait poussé son rapace à prendre la voie des airs et puis, elle darda un regard empli d'une nouvelle excitation quand à la course poursuite de la mystérieuse créature. Le plaisir de chasser pétillait plus intensément dans son regard, tentant de lancer un engouement à sa passion à l'homme buté qu'était l'épéiste. Et sans attendre une quelconque réponse de sa part, elle talonna sa jument pour partir en avant, bondissant dans les fourrés.

Alauwyr grommela cette fois et serra les jambes pour lancer son alezan à la poursuite de la princesse. Le hasard se moquait de lui en relançant une course poursuite avec une bête des bois. Sa monture, heureuse de se mettre à galoper à la suite de la jument, partit dans un joyeux galop. Son cavalier, qui n'était pas un doué en équitation, serra les dents, et espéra ne pas tomber, essayant de guider sa monture dans ce bois guère idéal pour une bonne cavalcade. Et dire que la donzelle princière espérait ramener un beau trophée ! Il faudrait d'abord voir ce que s'était et espérer l'attraper !

Il réussit à ne pas tomber et à rattraper la princesse, qui suivait elle-même les aboiements de son chien. La créature s'entendait toujours avec cette étrange mélopée gracieuse qu'elle laissait derrière elle... A croire qu'elle cherchait à les attirer dans un piège. Soudain, il crut entendre un cri de la part du rapace de la jeune femme, pendant qu'ils déboulaient dans une large clairière, coupée en deux par une rivière assez vive dans son courant. Là, il eut l'occasion de voir la créature tenter de sauter le large bras de celle-ci. A voir sa taille, elle ressemblait à un cervidé, assez jeune au vue de sa taille. Mais il avait une telle grâce que même le plus royal des cerfs n'arriverait pas à dépasser sa beauté. Alauwyr tira sur les rênes de son cheval, la regardant sauter.... et atterrir maladroitement de l'autre côté, se dérobant sous son antérieur qui avait dérapé sur un galet du bord de rive. Au cri de douleur et de désespoir, l'étrange créature s'était blessée. Elle tenta de se relever à nouveau et s'écroula. Visiblement, elle avait du s'abîmer l'antérieur qui avait glissé sous elle.

"Qu'est ce-donc ? Princesse, retenez votre chien, je voudrai savoir à quoi nous avons affaire, car visiblement, ce n'est pas un cerf.... ''.

Il observa la créature, qui devait être une juvénile. Certaines caractéristiques pourraient la placer dans les cervidés, mais des détails comme une étrange membrane visible sur ses antérieurs laissaient souligner des caractéristiques de dragons...

'Quelle étrange créature.... Vous parliez d'un trophée, Princesse Kohan.... J'aimerai qu'on le laisse vivant, ce trophée...."

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Le vent vif de cette matinée lui cinglait le corps au même titre que les branches les plus basses des arbres qu’ils croisaient. Sa capuche était rapidement tombée sur ses épaules, déversant le flot de ses boucles blondes qui bondissaient au rythme des foulées nerveuses de la jument althaïenne. La chevauchée les guidait de plus en plus loin dans les bois du domaine privé et les chemins entretenus cédaient progressivement la place à des sentiers sauvages encombrés de ronces. Rassurée de voir le Général suivre sans trop de difficulté, la jeune princesse concentra toute son attention devant elle et mena d’une main de maître sa monture. Elle faisait attention à ne pas lui faire rencontrer des obstacles, ni de crevasses sachant combien les sauts étaient déconseillés pour la belle jument. Malgré sa fougue et son entrain dans cette course, elle était gestante de plusieurs mois et Victoria ne voulait pas l’épuiser outre mesure. Il était même fort probable qu’après cette sortie, Roseline soit mise au pâturage avec d’autres poulinières et ce, jusqu’à sa mise bas.

Heureusement pour la cavalière et sa monture, la poursuite s’interrompit lorsqu’ils déboulèrent dans une vaste clairière qui laissait voir une rivière dont les bras plus fins sillonnaient l’endroit comme un réseau de veines cristallines. Due à l’abondante irrigation, d’épaisses touffes d’herbes grasses émergeaient de la couche neigeuse en épis couverts de givre. Ici et là, sur le lit limoneux, quelques roseaux et buissons à baies jaillissaient en éclats d’un vert sombre, presque gris. Si l’endroit ressemblait à un tableau de maître avec sa brume effilochée sur les arbres et la lueur d’un soleil timide sur l’épais manteau virginal, la véritable œuvre d’art se tenait en bordure de la rivière, un instant acculée par les aboiements du chien et les cercles de plus en plus bas du faucon. Victoria fit ralentir son galop jusqu’à adopter un pas prudent, puis un arrêt totale lorsque la bête vint à bondir avec toute la grâce de la création. Toutefois, son atterrissage sur les galets et la boue verglacés rompit le charme et le cri douloureux qu’elle poussa en s’effondrant tira une grimace de compassion à la Princesse.

A la voir se relever pour s’écrouler encore, il ne lui en fallu pas plus pour comprendre qu’elle s’était blessée et se trouvait incapable de poursuivre sa fuite effrénée dans les bois. Voilà une occasion en or d’observer l’étrange créature et c’est ce que fit la jeune fille qui, légèrement penchée sur l’encolure de sa jument, gardait une bouche entrouverte d’émerveillement. Ses joues étaient rougies par le froid qui l’avait cinglé tout au long de la chevauchée, ses cheveux tombaient librement sur ses épaules et sa menue poitrine. Quelques brindilles s’accrochaient même aux boucles épaisses, ornant d’une couronne morcelée la tête de l’adolescente. Sa mise était légèrement défaite, mais tout cela n’avait pas d’importance. Vraiment qui s’en soucierait quand on était confronté à une telle… particularité ? Décidément, l’Archipel réservait bien des surprises et, contrairement à ce que beaucoup pensaient : pas que des mauvaises. La demande du Général la tira de sa contemplation et elle sursauta même, ayant visiblement oublié la présence de l’almaréen ! Un petit froncement de sourcil chiffonna son minois, mais au lieu de rappeler son chien qui restait de leur côté de la rive, ce fut Eliza que la Princesse siffla.

Le faucon poussa un cri strident, puis sembla hésiter à revenir auprès de sa maîtresse, mais elle finit par engager un vaste cercles descendant jusqu’à se poser sur le poing ganté qui lui était offert à défaut d’un meilleur perchoir. C’était elle qui broyait la nuque des lièvres et perdrix durant les chasses. C’était elle qui possédait assez de puissance dans ses serres pour briser le cou d’un faon ou d’un mouton. De sa main libre, Victoria lui flatta le poitrail et se servit de ses seules cuisses pour diriger le cheval qui approcha d’un pas lent, paisible, de la rive et par conséquent de l’étrange créature. Il n’y avait maintenant que quelques mètres entre eux et la jeune fille pu l’observer avec davantage de précision. Le chien cessa d’aboyer, mais resta alerte alors qu’il faisait des allers et retours sur la berge, glissant lui aussi parfois sur les galets. L’épaisseur de la rivière ainsi que sa profondeur l’empêchaient de plonger sans l’ordre directe de sa maîtresse. Hors cette dernière restait parfaitement silencieuse, ne voulant pas risquer d’affoler davantage encore la « biche » avec des sons qui ne devaient pas lui être familier.

Lorsque la voix grave du Général s’éleva de nouveau, Victoria tourna la tête vers lui et l’observa avec gravité. Sourcils toujours froncés dans une réflexion intense, elle plissa légèrement son nez et courba ses lèvres en une moue de déplaisir évident. Ses iris brillèrent toutefois d’une taquinerie certaine lorsqu’elle lâcha sur le ton de la conversation :

« - Aussi déplaisant me soit-il de l’admettre… je suis du même avis que vous, Général. »

Ses yeux au bleu profond se tournèrent sur la juvénile qui se tortillait avec un souffle paniqué. L’on pouvait voir le blanc de ses grands yeux sombres et veloutés, trahissant la panique qu’elle devait ressentir. Maintenant qu’elle avait un bon point de vu sur elle, l’adolescente n’avait effectivement plus aucun désir d’écourter sa vie ! Il était de ces choses en ce monde qui ne pouvaient être embrassées par Mort depuis la main volontaire d’un autre être vivant… et cette biche hybridée à quelques lézard en était la preuve vivante. Plongée dans un court silence contemplatif, Victoria se tourna légèrement sur sa selle et prit la parole à voix basse quoique parfaitement audible vu la distance qui les séparait tout deux ;

« - Je crois savoir ce qu’elle a. A cet âge, il n’est pas rare que les os se développent plus vite que les cartilages et tout me laisse à croire que ce faon -appelons le ainsi à défaut de définir exactement ses origines- s’est déboîté une articulation sur l’une de ses jambes postérieurs. »

Elle coula un rapide regard vers la-dite créature comme pour confirmer ses soupçons. Elle ne voyait pas de sang, donc cela excluait une fracture ouverte et elle ne voyait aucun angle étrange lorsque la bête tentait de relever son échine donc il n’y avait probablement pas de fracture interne non plus.

« - Je ne suis pas maréchal-ferrant, je ne m’y connais pas plus que cela en chevaux et… cervidés. Toutefois je pourrais lui apporter les premiers soins si vous m’aider à la tenir. Votre selle doit être équipée d’une corde au cas ou vous vainquiez votre propre gibier et comptiez le charger sur l’arrière. Vous pouvez vous en servir pour l’immobiliser le temps que l’on regarde ce qui ne va pas. »

Victoria essayait d’arrondir les angles pour ne pas paraître autoritaire et directive. Elle savait que l’homme en face de lui avait sa propre fierté et orgueil, mais elle avait une idée parfaitement clair de ce qu’il fallait faire et souffrait rarement d’être contredite… mais une fois encore, il s’agissait là du nouveau Général et pas un quelconque valet, même s’il était de naissance et de rang moindre. Ce fut donc après une brève hésitation qu’elle ajouta ;

« - Qu’en pensez-vous ? »

Là, elle faisait des efforts en essayant de ménager la chèvre et le chou !

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Alauwyr avait manqué d'oublier la présence de l'oiseau de proie, qui obéit sans attendre aux ordres sifflés de sa maîtresse. Heureusement, car l'animal, rôdé à la chasse, aurait pu prendre le réflexe ; pour ne pas dire l'initiative de fondre sur l'étrange créature blessée et de planter ses terribles serres dans les cervicales de sa proie. L'Almaréen avait déjà pu observer ce genre de comportement induit chez les rapaces domestiqués, très pratique pour chasser et achever rapidement une grosse proie qu'on avait blessée. Ce fut presque avec un étrange soulagement intérieur qu'il agita au poser du royal animal sur le gant de cuir de la princesse. Puis, un sourcil à peine haussé à la remarque de la jeune femme, il parut un instant pris au dépourvu sur le fait que lui et elle étaient en parfait accord. Comme quoi, tout pouvait arriver, même entre un homme de sa caste et une princesse impériale.

Imitant Victoria le report de son regard sur l'animal blessé, il l'observait et ne pouvait que constater un fait. Cette biche paraissait avoir été hybridé avec des reptiles, donnant un mélange unique, mélangeant majesté et une certaine beauté, qui ne manquaient pas de lui marquer l'esprit. Alauwyr était un militaire de longue date, guère intéressé d'ordinaire à ce qui touchait à la beauté de la nature ou des oeuvres d'art -hormis la beauté de certaines femmes, extérieure comme intérieure. Mais là, il y avait quelque chose qui frôlait son esprit, qui déclenchait une forme d'admiration qu'il ne se connaissait pas. Etait-ce un reliquat de l'éducation qu'il avait reçu au sein de sa famille, dans les domaines autre que martiaux et militaires ? Il en doutait grandement. Et puis, qui disait animal étrange et inconnu soufflait de prendre quelques précautions. Les Ekkinopyres étaient un bel exemple à prendre en comparaison. Et si cet hybride était quelque chose du même genre que ces plantes monstrueuses du gouffre de Cordont...La voix mélodieuse de Victoria le tira de ses réflexions.

Il regarda plus en détail la jambe postérieure droite. Bien que le faon ; quitte à le nommer ainsi, puisque judicieusement suggéré par la princesse, cherchait comment échapper à ces deux bipèdes qui l'observaient du haut des quadrupèdes étranges, le membre avait un angle étrange au niveau de l'articulation.

''J'ai effectivement une corde à la fonte de ma selle. Et je ne peux que louer votre sens de l'observation. ''

Tout comme elle, il n'avait pas vu la moindre trace de sang. Une chance, car réduire la fracture d'un quadrupède était plus que difficile, à moins d'avoir recours à la magie. Du temps des forces d'invasion Almaréenne, les chevaux qui se brisaient sérieusement un membre, et s'ils n'avaient pas de valeur pour assurer la pérennité d'une bonne lignée, étaient abattus pour limiter la souffrance. Et puis, en temps de guerre....on devait consentir à faire certains choix. Mais là, on n'était pas en guerre et il avait un animal sauvage et inconnu qui souffrait.

''Faisons comme vous préconisez. Mais demeurez ici. Je vais aller le chercher de l'autre côté de la rivière. Inutile de l'effrayer plus que de nécessaire. ''

Il descendit donc de cheval, sortit la corde qu'il laissa sur la selle, retira ses gants et n'eut pas la crainte de tremper ses chausses. Par contre, il tenait sa cape enroulée autour du bras, pour ne pas la mouiller. Allez savoir pourquoi.

La rivière traversée, il s'approcha doucement vers l'animal, paraissant murmurer des mots, guère audibles pour les oreilles de Victoria. Le faon avait les yeux écarquillés par la terreur. Alauwyr tendit doucement vers lui le dos de sa main, pour le présenter devant ses narines. Puis, il attendit... Le temps nécessaire que le faon cesse un peu de trembler pour ensuite flairer avec une très grande méfiance le dos de ce bipède venu à lui... Il n'allait pas le tuer ? Alauwyr s'accroupit, toujours en douceur et en gardant sa main à porter de l'animal. Puis, doucement, il lui présenta la cape, tout en parlant en murmures. L'animal huma la chose étrange et parut trembler à nouveau. L'Almaréen usa d'un pan pour entourer la tête de l'animal, pour lui cacher les yeux. Et forcément, le faon chercha à se débattre... se calmant aussitôt, étant plongé dans l'obscurité. Puis, Alauwyr se redressa, prit l'animal dans ses bras. Il était d'une légèreté déconcertante ! Puis, rabattant le reste de sa cape sur le dos de l'animal comme pour lui donner un peu de quoi se réchauffer, Il retraversa la rivière en sens inverse, pour rejoindre la jeune femme.

Il déposa en douceur le faon, qui se débattit un peu en sentant le sol, mais qui se calma rapidement, car toujours plongé dans l'obscurité en raison de la cape nouée sur sa tête.

''Je ne suis pas un guérisseur, mais je sais que pour calmer un cheval, il faut lui bander les yeux. J'ai essayé sur le faon, et on dirait que cela a marché. J'utiliserai la corde qu'en dernier recours. Je le maintiendrai pendant que vous lui apportez les soins. ''

Il aurait pu se proposer, mais remettre une articulation de pseudo biche n'était pas comme remettre l'épaule déboîtée d'un humain. Autant laisser la princesse agir, car ayant sans doute plus de compétence dans ce domaine là que lui et surtout... plus de délicatesse.

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Rester confortablement sur sa selle n’était pas pour lui déplaire, aussi offrit-elle un sourire permissif au Général et hocha brièvement de la tête en signe d’acquiescement. Après tout, rien qu’à l’idée d’aller patauger dans l’eau glacée et boueuse de la rivière, elle en avait des frissons ! Avec une petite moue adorable, l’adolescente remonta frileusement la capuche sur ses boucles blondes et vint enfouir un nez rougi de froid dans le col en fourrure de sa cape. A présent que l’adrénaline de la chevauchée s’estompait, le froid humide et mordant sur la rive lui rentrait jusque dans les os. Sentant le poids d’Eliza commencer à lui peser, elle laissa le rapace s’accrocher à une large boucle de bois et de cuir intégrée au troussequin de sa selle. Le gant de fauconnier fut habilement glissé dans une des sacoches qui composaient ses accessoires de monte avant que la Princesse ne revienne observer l’approche prudente d’Alauwyr. Il était étonnant, vu le personnage, de le voir user de tant de précaution et de douceur à l’égard du juvénile !

Toutefois, à le voir traverser en sens inverse la rivière, elle eut un nouveau frisson et croisa les bras sous sa poitrine alors qu’elle glissait les mains dans les replis soyeux de sa robe et qu’elle rentrait la tête entre ses épaules. Si ce n’était pas pour la curiosité qu’elle portait à cette étrange créature, Victoria aurait déjà tourné la bride pour rentrer au manoir et se serait pelotonnée contre une cheminée avec un rhum chaud agrémenté d’épices et de miel. Malheureusement, elle ne pouvait décemment pas laisser passer une telle occasion, aussi était-elle encore en train de se geler les fesses sur une selle, au beau milieu de nul part avec pour seule compagnie un rustre almaréen. Un soupir lui échappa et créa autour de son visage renfrogné une buée opaque, éphémère, qui mouilla désagréablement sa peau. Agacée, la Princesse mit pied à terre et flatta l’encolure de sa jument avant de faire courir ses doigts le long de la sangle sur ses flancs et son ventre. Roseline ne devait absolument pas être contrainte à cause de sa gestation et l’adolescente fut satisfaite de sentir une marge confortable entre la lanière de cuir doublée de laine et la robe rase de la sublime pur sang althaïenne.

L’utilisation de la cape n’était pas stupide, bien au contraire et elle avait permis de calmer l’animal avant qu’il ne se blesse davantage en se débattant. D’aussi près, Victoria pu constater combien la créature était frêle, toute en délicatesse et en raffinement. D’une main gantée, elle lui caressa l’encolure d’où elle sentait les battements puissants et alarmés du cœur pulser sous son cuir chaud et doux. Malgré le tissu, le faon frémissait par longs spasmes d’angoisse et l’on pouvait entendre son souffle et ses légers râles de douleur traverser les replis de la cape. Il n’était plus temps de contempler, mais bien celui d’agir ! La Princesse invita l’almaréen à allonger l’animal sur le flanc, sur une zone peu neigeuse sous les larges branches d’un sapin. Elle-même mit les genoux au sol et lissa le devant de sa robe avant de venir palper en douceur l’articulation démise. Ce fut avec un petit froncement de nez écœuré qu’elle sentit l’os hors du cartilage et avec un petit pincement aux lèvres, elle se mit en position.

L’air résonna d’un claquement sec, suivit du mugissement tremblotant du faon lorsque l’articulation regagna sa place. Victoria manqua de se prendre un coup de sabot et recula le buste avec un petit hoquet de surprise alarmée tandis qu’elle érigeait instinctivement un souffle télékinétique devant elle pour dévier le membre fougueux de l’animal qui, dans un sursaut d’énergie, remua comme une carpe entre les bras du Général Iskuvar. La voix de l’homme ainsi que le poids de sa cape et l’obscurité vinrent cependant la calmer rapidement et un nouveau silence gagna la clairière. Encore un peu sous le choc, Victoria passa une main sur sa tempe pour en chasser une boucle qu’elle glissa derrière une oreille. A ses côtés, le chien remuait doucement de la queue et fixait la créature avec un mélange de curiosité et de tendresse, voulant vraisemblablement la renifler et la lécher à profusion. Sur la selle, Eliza observait la scène d’un œil aussi acéré qu’excessivement intelligent et elle claqua sobrement du bec avant de fourrer sa tête sous une aile, désintéressée.

« - Il nous faut la ramener au manoir. »

La jeune fille parlait d’une voix aussi douce que basse, ne désirant pas alarmer de nouveau le faon. Elle lui caressait l’encolure en de petits gestes fugaces et tendres, à nouveau penchée au dessus de lui et ses yeux d’un bleu profond brillaient d’une inquiétude sincère pour son bien être.

« - Je vais lui appliquer un sort de soin, mais ce n’est là clairement pas ma spécialité… De plus, il semble séparer de son troupeau. Si nous le relâchons maintenant, rien ne nous assurera qu’il le retrouve avant de se faire braconner ou tuer par un quelconque prédateur en ces bois. »

Il y avait aussi l’idée de le garder pour elle ou d’en faire un cadeau pour l’animalerie du Palais et espérer ravir son frère aîné d’un tel présent. Avec un effort de volonté, Victoria cessa de le caresser et de le couver du regard pour lever ses mires sur le Général qui semblait tout autant sous le charme. Qu’il était étrange de voir un homme si sombre et à la réputation aussi sinistre paraître tant subjugué par une créature frêle et vulnérable. Est-ce que cela éveillait chez lui quelques instincts filiaux longtemps refoulés ?

« - Je sais que vous répugnez à user de la corde, mais il faut contraindre ses mouvements pour son propre bien. Chargez cette créature sur votre cheval et rentrons… Les palefreniers au manoir sauront s’en occuper bien mieux que nous. »

Ce disant, elle joignit ses mains en coupe et se concentra. Les yeux clos, elle passa les paumes à quelques centimètres de la zone gonflée afin de résorber l’inflammation et soulager le pauvre faon. Cela ne réglerait pas le fond du problème, mais au moins pourrait-elle soulager l’animal et contribuer à l’apaiser le temps du trajet.

« - Puisque vous l’avez attrapé, Général, avez-vous une idée pour un nom ? Je suis certaine que les érudits se feront un plaisir de lui trouver un nom imprononçable et la relier à quelques branches d’évolution ou que sais-je… mais je pensais à un nom plus symbolique. »

L’honneur lui revenait, après tout. Il avait vaillamment poursuivit le faon dans les sous-bois malgré son malaise évident à se trouver sur le dos d’un cheval et avait bravé les courants glacés d’une rivière pour la rapporter de leur côté de la berge. Maintenant, il allait devoir la surveiller à l’arrière de sa selle et probablement faire de nombreuses escales pour s’assurer qu’elle ne glisse pas ou ne soit pas mal positionnée. Avec tout cela, le Général pouvait bien être le premier à la nommer. Concentrée sur sa tâche, elle ne leva pas les yeux vers lui, mais avec la tête légèrement penchée en sa direction, elle lui témoignait toute son attention.

descriptionChasse d'hiver, rencontre frileuse - Alauwyr EmptyRe: Chasse d'hiver, rencontre frileuse - Alauwyr

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Alauwyr ne paraissait guère offusqué de voir la jeune princière descendre de sa monture pour venir le rejoindre dès qu'il eut terminé de traverser la froide rivière. Se fichant éperdument d'avoir les bottes trempées, il veilla à ne pas trop secouer l'animal dans ses bras, le temps qu'il sorte du lit peu profond du bras d'eau et remonte sur la pente douce de la berge. Le jeune faon se débattait de temps à autre, malgré le port de la cape et des quelques paroles de l'humain qui le tenait fermement, mais en douceur en même temps dans des bras. C'était un peu normal qu'un animal sauvage se débatte malgré tout, ne sachant pas ce qu'il allait advenir de lui. La première chose qui devait inonder son esprit primaire était d'être pris au piège dans les ''griffes'' d'un prédateur, certes inconnu, mais qui demeurait un prédateur. N'entravait-il pas ses mouvements ? Ne lui entravait-il pas sa liberté et sa fuite, malgré la blessure qui le prenait à un de ses membres ? Son coeur battait la chamade, ne connaissait pas avec certitude ce qu'il allait devenir. Et le sentir se démener malgré son épuisement et sa souffrance démontrait qu'il ne se laissait pas abattre. Il ne se résignait pas. Peut être était-ce cela qui poussait inconsciemment l'Almaréen à vouloir aider cet animal, en plus de son aspect étrange que sublime ; et ce malgré sa jeunesse évidente.

Une fois l'animal allongé sur le sol, Victoria se mit à genoux à ses côtés, commençant à palper en douceur la patte déboîtée. Le guerrier maintenait l'animal, espérant de son côté de pas amoindrir les chances de remise de l'articulation en place. Non pas qu'il doutait des compétences de la princesse sélénienne, mais il redoutait plus un faux mouvement de la jeune créature qui pourrait fausser définitivement ses chances de retrouver l'usage de tous ses membres. Et quand Victoria s'évertua à agir, ce fut prompt et rapide, mais un claquement écoeurant se fit bien entendre. Et forcément, autant par surprise que par douleur, le faon réagit lui aussi par réaction vive, manquant d'offrir un bon coup de sabots à sa bienfaitrice. Mais ce n'était nul par vilenie, juste une réaction normale à la remise en place de l'articulation, qui venait de retrouver sa place originelle. Et à la suite de quoi, l'Almaréen essayait de calmer l'animal, autant par l'obscurité de sa cape toujours en place sur la tête du juvénile qu'en paroles murmurées. L'impériale Sélénienne ne tarda pas à faire pareille, mais en portant une main emplie de compassion et de douceur, sur son encolure. Le temps de rassurer le jeune animal. Puis, elle reprit la parole, coupant un bref instant de ''magie''

''S'il existe un troupeau. Bien que je ne sois pas un chasseur et encore moins un Erudit...''

Pourtant, Alauwyr était loin d'être un homme idiot, cachant sous sa carapace de guerrier une certaine culture, qu'il n'avait pas vraiment entretenu au contraire du maniement des armes.

''... Je ne me rappelle pas avoir entendu parler d'une telle créature vivante sur ce continent. En même temps, nous sommes encore que de frais arrivants et nous ne connaissons pas encore l'intégralité de cette région. S'il existe d'autres de ces siens, il est imprégné de notre odeur... Je ne crois pas qu'il sera accepté à nouveau, si on le compare à un faon normal. ''

La nature se montrait cruelle envers les jeunes animaux qui se faisaient polluer par une autre espèce, telle que l'Homme. L'odeur n'étant plus la même, même si cela ne durait guère longtemps, suffisait à rendre le juvénile comme étranger, souillé...Et qui sait si cela ne se passerait pas avec cette créature là si on venait à le libérer. Et puis, il était encore ''blessé''.

''Si nous le relâcherons maintenant, il n'ira pas bien loin. Sa patte a besoin de repos et vous le dites avec expertise, il faut le soigner. Votre sort, même si vous ne pensez pas être spécialisée dans le domaine du soin, le soulagera. Quand à la corde...''

Clairement que cela le répugnait. Ce n'était pas à ses yeux une proie qu'il envisageait d'achever pour la transformer en nourriture. Et pourtant, pour des hommes, là il rechignait moins. Mais passons ce gente d'état d'âme. Il regarda Victoria se concentrer et faire appel à sa magie pour apporter les soins évoqués à l'animal. Cela fait, il était temps de l'amener au manoir de la princesse, comme elle l'avait suggéré. Et devant l'étrange remarque de Victoria quand à trouver un nom, il en demeura... Etait-elle sérieuse ? Son regard sourcillant trahissait sa perplexité. C'était si spontané.

''Un nom ? ''

Quand on nommait un animal, ou alors une arme, il fallait quelque chose qui lui correspondait réellement.

''Ahkrin...qui veut dire courage en Almaréen. Vu qu'il a cherché à fuir malgré sa souffrance, je pense que cela se prête bien...''

Puis, doucement, il se releva, veillant à bien caler le jeune faon dans ses bras. Il paraissait encore un peu déconcerté de la demande de la jeune femme, auquel il y avait répondu sans guère réfléchir et pourtant, cela semblait bien se prêter à ce qu'était le faon, du moins pour ne pas s'être ''résigné''.

''Je vais veiller à attacher ses membres sans trop serrer. Et je le calerai sur moi, en avant de ma selle... Il faudra juste, ne pas galoper, car ce sera la chute assurée pour lui. ''

Et pour lui aussi, vu qu'il devra veiller et à son équilibre et la posture du jeune faon.

''Je vous suis, Princesse. ''


Spoiler :

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A la confirmation de sa question, ayant l’air de la lui sortir d’un chapeau de magicien vu la tête que devait tirer le Général Sélénien au son de sa voix, la jeune princesse se contenta d’un sobre hochement de tête qui fit glisser sur ses joues quelques mèches blondes. Ses yeux refusèrent toutefois de lâcher le travail délicat de ses mains alors qu’une fine pellicule de sueur couvrait bientôt son front pâle. Ce sort ne lui était pas familier et elle craignait qu’une trop forte dose n’handicape l’animal au lieu de le soigner ; un nerf ou une articulation remis en place alors que l’os n’était pas dans le bon axe risquait de le rendre boiteux. D’un l’autre côté, si elle ne soulageait pas assez l’inflammation, elle était presque certaine que cela pouvait créer une coupure dans la circulation du sang ou bien atrophier le-dit nerf justement… Un véritable travail d’équilibriste qui mettait sa concentration et ses capacités à rude épreuve.

Toutefois, au bout de longues minutes, Victoria s’estima satisfaite et retira ses mains légèrement tremblante pour venir aussitôt refermer les pans de son épaisse cape autour de sa frêle silhouette frigorifiée. Le bas de sa robe était gorgée d’eau, alourdie de neige alors qu’elle ne sentait plus le bout de ses doigts ni celui de son nez. Les yeux humides de larmes à force d’avoir refusé de cligner des paupières, elle se releva elle-aussi et tituba un peu le temps que ses jambes se réchauffent dans une marche hasardeuse jusqu’à sa jument. Une fois à portée, l’adolescente vint se blottir contre l’encolure afin de grappiller un peu de chaleur. Du coin de l’oeil, elle observa Alauwyr charger le faon sur le devant de sa selle avant de grimper à son tour et d’ajuster les sangles pour que le petit animal, tout tremblant de peur et d’incompréhension, ne risque pas une chute.

« - Oui, nous irons au pas. »

Elle-même ne se sentait pas tellement capable d’encaisser une nouvelle galopade dans la forêt. Sifflant Lambert qui s’était mis à suivre quelques pistes de lièvres ici et là, elle contourna sa monture pour se hisser sur la selle amazone et prit quelques minutes pour ajuster sa tenue de sorte à se protéger au mieux du froid et ne plus paraître aussi froissée. D’une pression du talon, elle l’engagea un pas soutenu et s’il leur fallu quelques tours et détours pour retrouver les sentiers entretenus du domaine, ils ne confrontèrent aucun animal sauvage ou de brigands. Quand ils gagnèrent la route principale, Victoria jeta un dernier regard par dessus son épaule, soupirant de ne pas avoir pu chasser comme elle l’avait initialement espérée. Toutefois, la vue du petit faon à plumes et écailles lui arracha un sourire et elle se promit de lui offrir au Palais le meilleur environnement pour qu’il ait une croissance et une vie d’aisance. Son frère allait adorer ce présent.

[Conclusion.]

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