Connexion
Le deal à ne pas rater :
SSD interne Crucial BX500 2,5″ SATA – 500 Go à 29,99€
29.99 €
Voir le deal

descriptionInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie] EmptyInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie]

more_horiz

Près de Cordont - 30 mars 1763



Les jours s’étiraient dans une douceur printanière salvatrice et pourtant les rayons du soleil ne parvenaient à réchauffer leur coeur en ces temps de tension. L’appréhension les rongeait. La guerre reprenait ses droits. Les cors allaient de nouveau rugir leur clameur sauvage, les lames allaient réclamer leur rétribution de sang et tous leurs beaux rêves de reconstruction faisaient naufrage…

Ces pensées sombres ne le hantaient pas pour la première fois. Pour être honnête, elles ne l’avaient jamais vraiment quitté, même à leur arrivée sur l’archipel. Mais depuis l’accord des pirates en mi-janvier qui avait balayé tous leurs espoirs de voir l’accalmie perdurer un peu, et plus encore depuis sa dernière rencontre avec les chimères qui avaient bien failli prendre possession de la jeune conseillère de Caladon puis de lui-même, ces pensées noires tourbillonnaient sans cesse en lui. Il se demandait parfois si tout cela en valait encore la peine. Il avait parfois envie de baisser les bras, de tout laisser là, en plan, et de profiter de leurs derniers instants. Tout simplement. À quoi bon se battre quand tout était perdu ?

Car oui pour lui, tout était perdu. Tout. Rien ne pourrait être sauvé. Cette bataille serait leur dernière et serait un immense charnier. Le charnier de l’humanité. Cueillie en plein coeur, alors qu’elle avait enfin de sérieux espoirs de connaître toute sa grandeur.

Mais alors, au plus fort de son désespoir, il se tournait vers ceux qui l’accompagnaient, vers ces fiers délimariens, ces féroces guerriers, ces braves épées, il songeait alors à Sigvald leur Général, et surtout à Tryghild Sa Reine… Et alors oui, alors, un regain de courage l’enveloppait et enserrait sa volonté dans un étau de fer. Il ne pouvait céder à la désespérance quand tous se préparaient au combat avec tant d’ardeur fière. Il devait combattre lui-même, et ses cauchemars, et ces chimères. Il devait lui aussi lever son épée, ses propres armes s’il le pouvait, et faire face comme tout Délimar. Et comme sa Reine.

Il était là de ces songes, à quelques kilomètres de Cordont, à une demi-heure de chevauchée environ, à observer les dégâts causés par les Ekinoppyres. Les troupes chargées de la sécurité de Cordont avaient dû en effet faire face à ce nouveau fléau. Chaque nuit, des abattages massifs étaient effectués, mais chaque jour, l’expansion reprenait. Une troupe avait été envoyée pour mesurer la nouvelle étendue d’expansion, à distance sécuritaire toutefois, et pour rapatrier un petit groupe d’habitants installés non loin. Habitants maintenant avec eux, alors qu’ils observaient, sur des hauteurs, les Ekinoppyres ronger le terrain de leur petit hameau.

Il pouvait être étonnant de voir le petit diplomate althaïen au sein de la troupe de sauvetage. Pour tout dire, s’il avait écouté ses appréhensions, il serait resté en sécurité en Délimar. Mais… Mais le Conseil à Cordont avait besoin d’un avis, de conseils, et de faire un point sur certaines questions. D’ordinaire Sigvald s’en chargeait et faisait régulièrement les allées venues entre Cordont et Délimar, pour coordonner les troupes, que ce soit de défense de Cordont ou de battues contre les plantes agressives. Mais, l’échéance de la guerre avançant à grands pas, d’autres urgences appelaient le Général. Ilhan s’était donc proposé, dans un élan de folie, pour y aller à sa place. Il était, de tous les Conseillers de Délimar, le mieux placé pour l’affaire Cordont, s’étant occupé de la question pendant un bon moment après la catastrophe. Et leur Intendante avait plus urgent aussi à régler. Dire que Tryghild n’avait pas aimé cette idée serait un doux euphémisme… et elle lui avait alors imposé des conditions drastiques. Une garde doublée. Des mesures de sortie draconiennes. Il avait, autant que faire se peut, suivi toutes les conditions à la lettre. Mais il avait tenu à venir au rapatriement des habitants. Ne serait-ce que parce que l’un d’eux était althaïen. Un des derniers… C’était alors de son devoir, lui dernier seigneur vivant d’Althaïa, de venir chercher l’un des siens.

Heureusement les troupes étaient arrivées à temps, et tous étaient maintenant en sécurité sur des hauteurs rocailleuses, bien loin des plantes dangereuses. Ilhan observait la petite troupe, un sourire triste sur les lèvres, quand son regard sombre accrocha soudain une haute silhouette tout de noir vêtue semblant observer la ville se reconstruire de loin, depuis une autre hauteur. Il entrapercevait une longue chevelure de feu voler au vent, au même rythme que les battements d'un long manteau noir.

Où est-ce ? demanda-t-il à un garde en pointant la silhouette du doigt.

Le garde tourna la tête et observa à son tour.

Juste à la frontière. Ces hauteurs font partie du territoire neutre. Pas sur les terres de l'Alliance.

Bien, observa pour lui-même Ilhan. Au moins l’intrus, ou peut-être l’intruse, ne s’était pas engagé en territoire allié sans autorisation. Il n’en était pas moins tout près. Peut-être un peu trop près. Un espion ? Vigilance, lui soufflaient ses vieilles habitudes.

Nous devrions aller voir, suggéra Ilhan.

Le garde lui lança un regard étonné et circonspect.

Nous ? Je peux envoyer des gardes.

J’y vais aussi. Cette silhouette n’a pas l’air hostile. Mais je veux m’assurer de ses intentions et de la raison de sa présence si près de la frontière. Et ce… sans hostilité de notre part.

À ces derniers mots, Ilhan tourna un regard acéré et un fin sourire taquin vers le garde. Ingmar le connaissait maintenant suffisamment pour décrypter ses petites piques moqueuses et ne s’en offusquait pas.

Je vois. Laissez-moi prendre les mesures.

Ilhan hocha la tête. Et attendit qu’Ingmar organise ses troupes. Tryghild avait été assez féroce : pas de sortie sans troupes et sans gardes en grand nombre, et pas de mouvement inconsidéré. Selon lui, ce mouvement ne l’était pas. Il l’espérait. La silhouette avait l’air pacifique, en simple observateur lointain. Il ne la quitta pour autant pas du regard. Mourant d’envie de pouvoir lancer son sort unique de si loin, de pouvoir lire dans les pensées de ce visiteur inconnu, de savoir, là, maintenant… et se fustigeant de son manque de maitrise magique et de son manque de puissance. Il rongea son frein en silence, faisant appel à tous ses mantras pour apaiser son impatience.

Enfin, après de longues minutes, tout fut prêt et la troupe se mit en marche, grimpant vers les hauteurs, heureusement non encore touchées par le fléau ékinoppyrien. Ilhan avait pris soin de demander à l’un des gardes de mettre un drapeau blanc à sa hampe, à côté du drapeau délimarien. Que l’inconnue ne prenne pas peur et ne croie pas à une attaque de leur part, en voyant tous ces guerriers arriver sur lui.

Ou sur elle, rectifia-t-il en approchant alors que la silhouette se dessinait peu à peu. Une jeune femme. Ou plutôt jeune elfe. Du moins en avait-elle tous les traits. Il n'en voyait pas encore le visage distinctement mais... déjà la silhouette lui évoquait quelqu'un. Une silhouette grande. Très grande. Plus grande que lui en tout cas. Il allait encore être le nain de tout ce petit attroupement.

Bonjour, nous venons en paix. Et nous souhaitons que le soleil illumine vos pas, fit-il en langue commune, dès que sa voix fut à portée, la main sur le coeur avant de la tendre paume vers le haut en direction de la silhouette, puis de l’abaisser, tel le salut althaïen.

Un salut althaïen qui lui avait échappé. Sans doute la nostalgie, la tristesse, en parlant avec son ancien compatriote. Les siens lui manquaient. Terriblement. Sa ville natale lui manquait. Et de plus en plus il songeait à en reconstruire, si ce n’est la cité, au moins le coeur. Un coeur qui pulserait au même rythme, au même son, que celui d’autres exilés en une cité multiethnique, en Déimar. Si cela était seulement possible et si on le lui permettait. Mais là n’était pas la question.

Ce terrain est neutre et nous n’avons nulle mauvaise intention. Nous vous avons aperçue de loin et vous avez attisé notre curiosité. Nous voulions aussi vous prévenir que les environs sont dangereux, les Ekinoppyres continuent leur redoutable avancée.

Ce visage… lui disait quelque chose. Plus que quelque chose. La liée de feu. Liée à Luna Kohan aussi. Ici. en ces terres. Que venait donc faire un personnage si célèbre si loin de l’île de son peuple ? Si loin de Sélénia aussi ? Ici, en Calastin si proche des frontières, en territoire si frileux de tout incident diplomatique ?

Je me nomme Ilhan Avente, Conseiller de Délimar, ajouta-t-il enfin tout en la saluant cette fois d’un signe de tête, tel un noble à un autre, en arrêtant son cheval et en mettant pied à terre.

Même si elle devait savoir qui il était, pour tout avouer. Pure formalité de politesse.

descriptionInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie] EmptyRe: Inconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie]

more_horiz
Orfraie resserra autour d'elle les pans de son manteau des ombres pour se protéger de la brise matinale. Ses cheveux de feu flottaient doucement au vent, tel une unique flamme. Dans ce qu'il restait d'ombre, la Liée se camouflait sous le tissu magique. Mais, peu à peu, alors que l'aube pointait au-delà de l'horizon, la magie de son par-dessus cessa de faire effet.
Les premiers rayons du soleil caressèrent son visage marqué par la guerre. Les paupières closes, elle savoura cet instant si court, jusqu'à ce que le soleil soit totalement apparu à l'horizon. Le ciel, encore nimbé de rose et d'orange, était magnifique et la dragonnière de jade se perdit dans sa contemplation. Comme beaucoup de bipèdes, elle trouvait les couleurs de l'aube magnifiques.

Elle se trouvait au sommet d'une colline herbeuse, sur la frontière qui séparait l'Empire Sélénien des Cités Libres. On ne pouvait lui reprocher sa présence sur cette bande de terre que personne n'avait le droit de revendiquer. De ce perchoir, elle observait se reconstruire - au loin - la ville de Cordont. Orfraie n'y était pas retournée depuis novembre. Peut être profiterait-t-elle de son passage pour s'y rendre et proposer son aide avant de repartir avec Firindal.

Ce dernier, d'ailleurs, s'était envolé au loin depuis quelques temps. Il l'avait déposé ici à sa demande, puis avait disparu dans les nuages. Les Liés, contrairement à ce que le commun des mortels pensait, n'étaient pas toujours ensemble. Le jeune dragon de Jade pouvait aller où il le voulait, quand il le voulait. Orfraie également. Cette dernière, pensive, saisi délicatement l'écaille de jade qui pendait au creux de sa gorge. Retenue par une chaîne d'argent, l'aura argentée, le présent de Firindal était sa façon de veiller sur elle quand il n'était pas là. Avec la distance qui les séparait, la magie du Don du dragon pulsait fortement entre les doigts de la dragonnière, synchronisé avec les battements de son propre coeur. Sa puissance venait gonfler les capacités magiques de la dragonnière.

Puis soudain, du coin de l'oeil, elle aperçut une troupe se diriger vers elle. Battant au vent, Orfraie reconnu le loup Délimarien. Puis, juste en dessous, un drapeau blanc. Cette vision lui tira un sourire sans joie et, l'espace d'une seconde, le poids de ses sept cent ans creusa des rides sur son visage. Les tensions et les guerres, encore et toujours. Mais, le désir de paix de cette petite troupe était également un baume au coeur. Ne se s'entend pas menacer, Orfraie se tourna vers les soldats montés. Les pans de son manteau des ombres révélèrent une tunique de facture elfique, sans l'ombre d'un doute, dont la qualité laissait place à peu de questions quant au statut noble de la dragonnière. Mais surtout, le fourreau d'une épée pendait à son flanc, accroché à la ceinture qui maintenant le manteau fermé au niveau de la taille. D'ébène, il était décoré d'argent sculpté d'une finesse incomparable. L'épée était unique, tout comme son écrin protecteur. Laurelin, la lame chanteuse. Un cadeau d'Elrond Amarië, des années plus tôt.

La troupe s'approchait de plus en plus. Méfiante, Orfraie lança son esprit vers eux. La télépathe caressa leur conscience de la sienne, furtivement, et glissa de l'un à l'autre avec agilité. Eux aussi étaient méfiants, mais nulles intentions belliqueuses les animaient. L'un d'eux attira son attention plus que les autres. Son esprit était plus difficile à lire, c'était à peine si elle pouvait en apercevoir la surface. Un mage avec des Délimariens ? Étrange, songea Orfraie, jusqu'à l'homme soit assez proche pour qu'elle soit en mesure de le reconnaître.

Parmis la petite troupe, il était un nain. Le pied à terre, il arrivait à peine à l'épaule de la guerrière tandis que les soldats, juchés sur leurs destriers, les dominaient tous les deux et projetaient des ombres menaçantes.

La main gauche ouvert, la droite la soutenant, Orfraie s'inclina sans quitter son interlocuteur des yeux, ses mires améthystes, troublantes, plongées dans les siennes.

« Elen síla lumenn' omentielvo. Je vous remercie pour la mise en garde, Conseiller Avente. Mon Lié et moi-même nous en sommes rendu compte en survolant la région. »

Son Lié qui, quelque part, au loin, au dessus des premiers nuages, rugit. Orfraie savait reconnaître un éclat de joie, mais pour le commun des mortels, cela avait tout l'air d'être la promesse d'une triste fin. Gardant le contrôle sur ses muscles, la dragonnière se retint donc de sourire en sentant le plaisir de sa moitié d'âme au travers du Lien.

« Je me nomme Orfraie Ataliel, Princesse et Générale des Rôdeurs Elfiques. » se présenta Orfraie, bien que cela soit inutile. « Mon Lié, Firindal, vous salue également. » transmis-t-elle. C'était également le gage d'une fin atroce s'il lui arrivait quelque chose, car le dragon de jade veillait sur l'épouse de Luna Kohan.

Orfraie désigna, d'un ample geste, les plaines alentours ainsi que la ville de Cordont.

« En tant que dragonnière, je souhaite venir en aide à tout ce qui en ont besoin. Les Ekinoppyres ne sont pas la raison de ma venue sur cette île, mais puis-je, d'une façon ou d'une autre, vous aider ? » s'enquit-t-elle.

Elle offrit un léger sourire - les extrémités de ses crocs visibles - à son vis à vis.

descriptionInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie] EmptyRe: Inconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie]

more_horiz
Le salut elfique. En forme et en paroles. Ilhan le reconnut instantanément. Il ne l’avait plus vu ni reçu depuis quelque temps, et eut l’impression soudain de se retrouver projeté plus de dix ans en arrière. Un élan nostalgique enserra son coeur même s’il n’en montra rien. Il n’aurait pas été inconvenant de ne pas rendre le même type de salut, d’autant plus qu’il avait offert en premier lieu une salutation humaine, althaïenne, à mi-chemin entre le monde des hommes et la poésie des elfes. Mais, il lui aurait semblé insultant pour l’illustre personnage en face de lui qu’il ne réponde pas dignement en elfique, lui qui connaissait leurs mœurs et leur langage.

Il aurait pu alors se contenter de rendre le même salut. Mais il avait en face de lui une princesse, épouse d’une autre princesse, et une dragonnière. Un être d’exception qui méritait respect et honneur, autant que faire se pourrait. Et quand on parlait dragon…

Un rugissement au loin se fit entendre. Certainement le lié de la princesse en question. Ilhan ne parlait pas dragon et ne sut dire s’il s’agissait d’une mise en garde ou d’une salutation. Peut-être un peu des deux. Ou peut-être pire encore. Et ce n’était pas parce qu’elle leur signifiait que son dragon les saluait de ce cri sinistre qu’il devait absolument la croire. Depuis sa rencontre avec Nynsith, il avait compris une chose : les dragons avaient une pensée, un esprit, bien à eux, et il était inutile pour un esprit humain de tenter de réellement les comprendre. À son grand désarroi. Lui qui adorait comprendre, surtout en ce qui concernait le fonctionnement de l’esprit, de quelque race qu’il soit… Tout danger n’était donc pas à écarter.

Et de voir ensuite les crocs dépasser de ce sourire ne fit rien pour apaiser son sentiment de potentiel danger. Il connaissait l’histoire, dans les grandes lignes, de cette elfe, devenue vampire puis immaculée. Une longue histoire de plusieurs siècles… Mais entre connaître par récits interposés et rencontrer de visu… Il réprima un frisson en faisant appel à toute sa maitrise, et parvint à garder un visage lisse de toute expression et son demi-sourire poli. Seuls ses yeux sombres ne purent réprimer un éclat brillant de vive lucidité quant à la menace possible en face de lui. Même si… Même si le fait seul qu’une elfe ait donné son nom rendait une attaque de sa part peu probable. Les elfes n’attaquaient pas ceux à qui ils se présentaient...

Il choisit alors de lui offrir un salut elfique digne de son rang de princesse. De souligner son origine d’elfe, et leurs mœurs pacifiques d’antan. Il croisa les deux mains sur sa poitrine et s’inclina profondément, retenant une grimace aux protestations de son dos. Il n’attendit pas toutefois que son interlocutrice lui permette de se relever. Il n’aurait tout simplement pas pu tenir la pause trop longtemps. Pas après tant de chevauchées. Il espérait qu’elle ne lui en tiendrait pas trop rigueur.

Im veren le gevedi. Anar kaluva tielyanna*, répondit-il alors en elfique à son tour.

Les mots lui revenaient lentement, mais il fut rassuré de n’entendre aucune altération de son accent.

Toute aide qui se présente est la bienvenue, ajouta-t-il en reprenant le langage commun.

Il aurait pu, même si avec lenteur, continuer en langage elfique. Mais par respect pour les hommes qui l’accompagnaient, il préférait reprendre la langue commune, que tous puissent comprendre et que personne ne se sente exclu.

Nous serions honorés que vous nous accordiez votre précieuse expérience pour une tâche aussi ingrate et fastidieuse qu’est le combat contre ce nouveau fléau. Le Général Sigvald Elusis a lancé un appel, il y a quelque temps maintenant, à tout érudit, spécialiste alchimiste ou herboriste, pour venir nous aider à trouver une solution contre ces Ekipnoppyres. Dans le respect, autant que faire se peut, de la nature et de l’environnement. Quelques-uns ont déjà répondu. Il y a peu, je dois l’avouer. Et nous commençons à créer un bureau d’études.

Sa méfiance coutumière lui faisait peser chaque mot. Après tout elle était liée aux Kohan, à Sélénia, même si de façon indirecte. Il ne pouvait s’empêcher de tâter l’idée d’un espion. Même si… envoyer un espion aussi visible, aussi voyant, serait une étrange façon de procéder. Et elle était liée à Luna, or cela ne ressemblait guère aux moyens de procéder de Luna Kohan. Non, vraiment… Cela était fort peu probable, il devait bien l’avouer.

Et quand bien même... En cet instant, il ne révélait là aucun élément compromettant. Rien qui ne soit connu dans toute l’Alliance et dans tout royaume. Le Général avait fait passer une annonce dans tout Calastin. Et même au-delà.

Si vous possédez vous-même quelque savoir en ce domaine, vous y seriez la bienvenue. Ou si vous aviez quelques maîtres en la matière à contacter et nous faire rencontrer…Le Général Elusis se fera un plaisir de vous rencontrer.

Ce serait déjà un grand pas. Que tous les savants mettent leurs connaissances en commun, travaillent de concert à ce sujet, et avancent main dans la main.



* Traduction : Je suis heureux de vous rencontrer. Le soleil brillera sur votre route.

descriptionInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie] EmptyRe: Inconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie]

more_horiz
L’apparence d’Orfraie avait de quoi déstabiliser plus d’une personne. Après tout, elle possédait la beauté surnaturelle des Sainnûr, une beauté qui dépassait même celle des Elfes ! Et, en plus de ce don, elle incarnait également la froide prédation des Vampires. Le belle princesse n’avait jamais perdu ce côté sombre ni cette lueur prédatrice qui se nichait au fond de ses prunelles améthystes. Et à raison, car ces crocs qui faisaient tant frissonner le Conseiller servaient encore à mordre. Cela, toutefois, était son secret. Un secret si bien gardé que même sa femme, pour l’heure, l’ignorait.

Pourtant, Orfraie n’était pas maléfique, ni même méchante. L’inverse était même dans sa nature profonde. Seulement, parfois, il arrivait que ses sombres penchants resurgissent… comme avec ce malheureux pirate, en décembre. Non sans prendre plaisir à le faire souffrir - il avait quand même menacé la vie de Luna ! - Orfraie était allé jusqu’à le mordre. Elle avait alors découvert que sa nature de Sainnûr lui permettait d’aspirer la magie pour s’en nourrir, et pas seulement grâce à ses crocs.

Face à la princesse, le Conseiller s’inclina. Son salut elfique était parfait, bien que son dos protesta. L’ouïe du Lièvre permit à Orfraie d’entendre les os de l’humain craquer. Les signes de l’âge, sans doute. L’espérance de vie humaine n’était pas si étendue que cela et le conseiller était plus proche de la fin que du début, après tout.

Orfraie lui offrit un sourire, compatissante mais également agréablement surprise par son accent elfique. L’homme parlait très bien sa langue, ce qui n’était pas donné à tout le monde. Raison pour laquelle cette conversation ne pouvait continuer autrement qu’en langue commune, d’ailleurs.

« Oui, la rumeur est parvenue jusqu’à mes oreilles. » répondit-elle en faisant allusion au fameux bureau d’étude dont parlait le conseiller. Orfraie n’était pas certaine de posséder les compétences adéquates pour une telle mission, et ce malgré ce qu’elle avait été autrefois.« Je ne suis pas certaine d’être en mesure de vous aider moi-même, pas en matière de d’herboristerie en tout cas. Cependant, j’ai des connaissances, des amis et des collègues, plus à même de vous prêter main forte. Je m’emploierai à les contacter. » promit-elle avec sincérité.

S’il y avait une chose qu’on ne pouvait retirer à Orfraie, c’était son sens de l’honneur. Elle venait de promettre une chose à Ilhan et elle comptait bien tenir cette parole. Contacter quelques personnes n’était, de toute façon, pas la chose la plus compliqué qui soit.

« J’en parlerai également à mon Lié. J’ai remarqué que la nature s’épanouit plus vite au contact d’un dragon. Si ce phénomène peut être inversé, cela pourrai endiguer la propagation du mal. Je ne promets pas que cela fonctionnera et il faudra procéder à des tests au préalable… mais c’est une possibilité à ne pas occulter. »

L’Ataliel détourna le regard vers la gauche. Là-bas, au loin, se trouvait Cordont. Le fléau qui ravageait les collines environnantes venait de là-bas. Combien y avait-il eu de victime à cause des Ekipnoppyres ? Cette ville avait tant souffert. L’effondrement, la maladie et maintenant la nature elle-même se retournait contre eux… Orfraie ne partageait pas leur souffrance car elle ne vivait pas ici, mais elle la ressentait tout de même. Elle parvenait à comprendre, surtout lorsque son esprit s’élançait dans la brise et caressait les consciences mortelles.

« Quelle est la situation à Cordont ? Comment vont les habitants ? » Sa voix grave aux accents elfiques ne laissait entendre que la compassion et l’envie d’aider, si cela était possible. Orfraie et Firindal avaient été là, après tout, pour aider après la catastrophe.

descriptionInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie] EmptyRe: Inconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie]

more_horiz
« Je ne suis pas certaine d’être en mesure de vous aider moi-même, pas en matière d’herboristerie en tout cas. Cependant, j’ai des connaissances, des amis et des collègues, plus à même de vous prêter main-forte. Je m’emploierai à les contacter. »

Ce serait déjà d'une grande aide. Si une sommité telle que vous fait appel à eux et leur demande de joindre leurs forces et leurs compétences aux nôtres, nul doute qu’ils se feraient une joie d’exaucer vos vœux.

À défaut d’exaucer les nôtres, ajouta-t-il pour lui-même. Mais ses orbes sombres, empreintes d’une gravité désabusée, ne détrompaient personne sur ses pensées. Il déplorait que ces connaissances n’aient pas daigné donner signe de vie, tendre une main, d’elles-mêmes, pour sauver, non pas seulement l’Alliance, mais toute une île et tout un peuple. Il tut toutefois ses sombres pensées et les amères récriminations qui lui prenaient les tripes. A la place, il s’empara en pensées de ces cyniques émotions, les attrapa dans une poigne ferme, dont seul son mental était vraiment doté, à défaut de son physique, regarda en face ces songes malvenus, puis les relâcha, et les laissa partir loin de son esprit. Il ne pouvait laisser ce dernier se pourrir d’amertume et de rancoeur, de désillusions désespérées ou de colère effrénée.

Ce petit rituel mental, si durement enseigné par les elfes, qu’il remercia une fois encore en son for intérieur, lui permit de retrouver un calme stoïque en son moi conscient. Et de s’ancrer de nouveau dans l’ici et maintenant. Quand bien même il n’avait émis aucun signe extérieur de ce petit combat, il se demanda un court instant si la Sainnûr en face de lui avait pu sentir ce fugace conflit interne. Il avait pu ressentir, vaguement, les prémisses des sensations elfiques lorsqu’il avait usé de son sort et échangé si intensément avec Aldaron. Mais qu’en était-il des Sainnûr ? Jusqu’où allaient leurs perceptions ?

Soudain agacé de se perdre encore en mille questionnements inopinés, il chassa ces pensées parasites et ancra ses orbes de jais dans les perles améthyste de la princesse. Une couleur étonnante, déroutante. Fascinante. Ilhan avait toujours été sensible à la beauté, il devait bien l’avouer. Et il en avait une parfaite représentation devant lui. Mais plus que tout, il était fasciné par les yeux, et tout ce qu’ils pouvaient émettre, trahir, transmettre. Et ces yeux-là étaient… envoûtants. Il dut faire un effort surhumain pour sortir de sa contemplation, faisant appel à toute sa maitrise, toute sa volonté, pour reprendre la conversation.

Même si ses élucubrations internes avaient dû laisser un étrange silence flotter entre eux, réalisa-t-il abruptement. Loin de s’en mortifier ou de se décontenancer, il reprit, comme si de rien n’était.

Quant au lien des dragons avec la nature… en effet, ce serait une piste intéressante à explorer également. Tout indice, même infime, serait bon à étudier dans notre situation à tous.

Et il insista sur le " tous ". Ce fléau des Ekinoppyres, s’il touchait principalement l’Alliance et le peuple humain, les concernait pour autant eux tous. Toute l’île d’une part, car si la propagation ne s’enrayait pas, Sélénia serait tout autant en danger, et donc la famille Kohan aussi… Mais cela concernait également tous les peuples, dans le fragile équilibre qui tentait de s'instaurer. D’autant plus avec le combat contre les chimères qui approchait. Les Hommes, malgré leurs apparentes faiblesses et leurs lacunes physiques par rapport à tous les autres peuples, étaient une force de frappe non négligeable, par leur nombre, leur adaptabilité et leur ingéniosité sans commune mesure. Et ils l’avaient assez bien prouvé par le passé, lors des différentes guerres qui les avaient tous ravagés... mais aussi lors de leur dramatique exil. Sans l’ingéniosité et le savoir-faire de leurs propres navigateurs lysséens, il n’était pas bien sûr que la traversée ait pu se réaliser pour un si grand nombre…

« Quelle est la situation à Cordont ? Comment vont les habitants ? »

La première réponse qui lui vint à l’esprit fut " mal ". Comment pouvaient-ils aller bien alors que, à peine les reconstructions prenaient-elles forme, des plantes carnivores menaçaient toute chance de repartir sur les sentiers de la vie et de retrouver une paix relative. Comment pouvaient-ils faire leur deuil et se reconstruire une vie, si sans cesse un nouveau danger les guettait ?

Il retint un soupir, força son corps à rester stoïque, son visage de marbre, et se força à relâcher la tension qu’il éprouvait.

La cité tente de se reconstruire, autant que faire se peut. Nous avons su cloisonner le gouffre et le sécuriser de toute intrusion. Les habitants tentent de retrouver un semblant de normalité.

Si tant est que ce fût possible. Et cette fois, il ne sut pourquoi, il laissa jaillir cette pensée cynique avec force et virulence. Sans un mot, sans paroles, juste une pensée, qu’il projeta fort, au loin. Parce qu’il avait besoin de l’exprimer. Et si la décence lui interdisait de la dire tout haut, alors il pouvait la penser tout bas…

Mais... Et si les Sainnûrs pouvaient entendre les pensées, songea-t-il brusquement ? Aussitôt, il referma donc son esprit, l’enfouissant dans un gouffre sans fond aux multiples cavités, ne laissant plus volter en surface que de futiles pensées. On n’était, après tout, jamais trop prudent.

Le deuil est difficile et occupe encore tous les esprits. Tant que le gouffre restera sous leurs yeux béant, je doute qu’ils parviennent vraiment à tourner la page. Mais de nombreuses aides sont venues renforcer les efforts de reconstruction. Malgré toutes les tensions qui marquent notre peuple, les Hommes ont su mettre de côté leur… méfiance…

Il avait bien d’autres mots en tête, mais celui-là lui parut le plus neutre, le moins péjoratif.

de côté, pour l’intérêt de Cordont et l’intérêt de tout notre peuple.

Egalement pour des intérêts politiques, mais c'était là une vérité à taire. Il offrit une courte révérence avant d’ajouter :

Je vous offrirai bien de visiter Cordont pour observer de vous-même l’avancée de cette reconstruction, mais je ne suis guère persuadé que cela serait le plus sage.

Ou alors, cela ne pourrait se faire, que sous bonne escorte et sous condition. Seuls les artisans de l’Empire étaient acceptés, et seulement depuis peu, au sein du chantier. Les forces armées impériales étaient toujours malvenues, et les visites à caractère officiel n’étaient pas encore à l’ordre du jour. Il existait un traité comportant un calendrier précis. Orfraie Ataliel étant affiliée, par mariage, à Luna Kohan, princesse de Sélénia, sa présence au sein même de la cité pourrait être prise pour de l’ingérence et susciter des tensions. À moins d’organiser une rencontre officielle avec leur Général, sous couvert d’apporter son aide au Bureau d’Études justement.

Il n’osa toutefois émettre cette idée, et se contenta d’offrir un sourire poli et un regard perçant à la dragonnière.

descriptionInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie] EmptyRe: Inconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie]

more_horiz
Telle une flèche, les pensées de la princesse s’envolaient vers le dragon de jade. Aussitôt dites, l’idée était transmise tandis que, d’une main de fer, Orfraie empêchait ses songes de vagabonder vers les possibilités qui s’offraient à elle pour combattre les Ekinoppyres.

D’un vague signe de tête, l’Ataliel acquiesça aux paroles du conseiller délimarien. Pour elle, il n’y avait aucun doute. Peu lui importait le camp de l’un ou de l’autre. Son seul but était de venir en aide, si elle en était capable, à tous les êtres qui peuplaient Calastin.

En effleurant son esprit de son vis-à-vis, Orfraie était en mesure de ressentir le tumulte des questions qui tourbillonnaient dans la conscience d’Ilhan. Elle sentait - mais peut être percevait-elle mal - que pour l’humain, elle était d’ores et déjà rangée dans une petite case affublée du nom Kohan. Cela lui donnait autant envie de rire que de pleurer. Peut-être devrais-je simplement me présenter comme dragonnier, à l’avenir, et insister sur ce point. Plutôt que de renchérir sur ce sujet, l’Ataliel préféra une question plus générique. La santé de Cordont lui importait, après tout. Firindal et elle avaient aidé les habitants, peu après la catastrophe. Et elle avait versé des larmes dont seule le vent fut témoin, debout au bord du gouffre.

Et la réponse du conseiller était fort simple. Orfraie n’avait pas besoin de ses pouvoirs pour comprendre l’ampleur de la situation. L’infestation Ekinoppyres était comme un dernier coup de poignard pour les habitants de la petit ville qui tentaient de reconstruire un semblant de vie, de normalité. Là où Ilhan demeura stoïque, l’Ataliel préféra laisser l’humanité se peindre sur ses traits de porcelaine. Son regard se voila de tristesse, d’impuissance, avant de doucement se tourner vers l’horizon. Dans un coin de sa tête, elle entendit vaguement les pensées du conseiller avant que ce dernier les cache sous un voile de songes futiles. La prudence personnifiée songea-t-elle avec un imperceptible tressaillement de la lèvre.

Dans l’herbe fraîche, Orfraie fit quelques pas silencieux. Sa démarche était presque surnaturelle tant elle se déplaçait sans le moindre bruit. C’était comme si les brins d’herbes se tassaient sous ses pieds. Ilhan soulevait un point important, mais celui-ci ne manqua pas de faire soupirer la princesse. Le vent se prit doucement dans ses mèches enflammées tandis qu’elle observait la ville au loin. Sa vision d’immortelle et l’ouïe du lièvre lui permettait de voir et d’entendre bien des choses, y compris là-bas, vers Cordont.

« Savez-vous ce qu’est la première chose que j’ai dite à Nolan Kohan, peu après mes fiançailles ? »

D’un ton las, elle prononçait cette question rhétorique. À moins que l’homme fut si bien informé que ses oreilles se rendaient même jusqu’au jardin du palais Sélénien, là où même les gardes royaux n’avaient pas eu leur place lors de cette rencontre.

« Je lui ai dis que j’épousais sa soeur par amour. »

Les mœurs humains rendaient cette union taboue, chez eux, mais Nolan avait été heureux pour sa soeur de coeur, ainsi que pour Orfraie.

« Et que je conservais ma liberté. Je suis peut-être mariée à une Kohan, mais cela ne fait pas de moi l’une des leurs. »


Elle n’aimait pas ce sentiment, cette cage ou ce collier. Orfraie se remémorait parfaitement cette soirée où elle avait froidement mis en garde le jeune empereur. Elle lui avait également conté la raison d’un tel désir d’indépendance. Pour Ilhan, elle imaginait bien que ces mots ne changeraient rien. Mais, au moins, savait-il désormais pouvoir compter sur l'aide d'Orfraie sans craindre l'ombre des Kohan.

« Plus les mois s’écoulent, plus mon esprit et celui de Firindal s’entremêlent. Les noms n’ont pas court chez les Dragons tandis que la liberté est chérie. »

Même son propre nom de famille, pourtant synonyme de royauté et de richesse, perdait du sens au fil des mois. Être simplement 'Orfraie' lui convenait très bien... Sur cette pensée, elle chassa doucement l’air de ses poumons. Son souffle se perdit dans la brise tandis qu’elle se tournait, de biais, vers Ilhan et sa troupe.

« Je ne veux pas vous placer en fâcheuse posture en vous demandant la permission de me rendre à Cordont. » même si elle n’avait pas besoin de leur permission pour cela. « Mais je veux que vous sachiez que mon allégeance va au peuple. Si un roi, quel qu’il soit, menace le peuple, alors il me trouvera en travers de sa route. »

Telles étaient les paroles tenues envers Nolan Kohan. Tels étaient les mots que, bientôt, elle prononcerait devant Aegnor. Des mots qui, elle n’en doutait pas, finiraient pas arriver aux oreilles de l’Alliance sans qu’elle ait besoin de les prononcer elle-même.

« Je suis venue sur cette bande de terre neutre pour réfléchir. » révéla enfin Orfraie. Accompagnée d’un dragon, n’importe quel voyage devenait possible, y comprit venir précisément sur la frontière entre l’Alliance et l’Empire Sélénien. « Je souhaite former un groupe, sur les cendres de la Castes et avec mon héritage Baptistrel, pour venir en aide au peuple. Cette possibilité, que vous fait-elle ressentir ? »

C’était là une question qu’elle leur posait à tous tandis qu’elle s’attardait quelques instants sur chacun des visages lui faisant face.

descriptionInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie] EmptyRe: Inconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie]

more_horiz
Ilhan aperçut soudain les traits altiers de la dragonnière se draper d’une sombre tristesse et d’une affliction indéfinissable. Il observa ces changements, comme fasciné, et un brin étonné que la princesse laisse ainsi ses sentiments filtrer devant lui. Lui, politique délimarien. C’était là une possible marque de faiblesse, selon certains, et pour autant elle les laissait transparaitre. Comme faisant fi de ces considérations superficielles, qui, il devait l’avouer, n’étaient que parades et duperies tout en faux semblant dont la Cour raffolait tant. Comme si… Oui, comme si, en un certain sens, elle lui donnait une part de confiance pour lui laisser voir en elle.

Ou peut-être n’était-ce là qu’un jeu pour qu’il se croie en confiance et se laisser aller lui aussi ? Pour qu’il se délivre de son masque à lui ?

Soudain agacé par le cours de ses songes, teintés de ces relents de paranoïa, cette si vieille compagne qui ne l’avait jamais quitté depuis Gloria, Ilhan tenta de les chasser d’un revers de pensée. Et préféra apprécier le geste de la dragonnière de montrer ainsi ses sentiments pour ce qu’ils étaient, tout simplement : des sentiments. Il l’observa alors, sans un mot, faire quelques pas, de cette façon aérienne si caractéristique des elfes. Auprès d’eux, Ilhan avait appris à marcher sans faire de bruit, à ne pas faire craquer les branches sous ses pas. Mais jamais, ô grand jamais, il n’avait réussi à imiter cette démarche-là. C’était un des points qui, enfant, lui avait fait rêver de devenir elfe. Avant qu’il ne réalise toute la chance et la richesse d’être un simple humain, un simple mortel.

Mais à l’observer ainsi, il prenait conscience, comme souvent auprès des elfes et de tous ces autres immortels vampires ou immaculés, combien il était éphémère, combien il n’était qu’un enfant à la si frêle expérience, à la sagesse si limitée, à la connaissance si étriquée, combien il savait si peu et ne saurait jamais autant qu’eux. Il était parmi ses paires considéré comme un sage et un érudit, il détenait des connaissances oui, plus que la moyenne des hommes. Mais plus il en détenait et plus il comprenait ne rien savoir en fait, ne rien détenir. Et face à eux, immortels centenaires, il n’était toujours qu’un enfant, qui avait tout à apprendre, et dont l'étendue de son ignorance se révélait en un gouffre immense.

Il l’écouta donc avec sa patience légendaire, sans bouger d’un iota. Sans un geste, sans un bruit, statut figée qui semblait presque ne plus respirer, tant il contrôlait tous ses mouvements, suspendus à ce qu’elle lui répondrait. Maitrise et contrôle, presque déshumanisé, focalisé sur un seul objectif : son rôle vis-à-vis de son peuple. Et écouter cette dragonnière pour mieux la cerner, la comprendre. Comprendre, voilà un mot qui l’avait suivi toute sa vie. Voilà ce qui l’avait toujours motivé, guidé. Même en cet instant.

« Savez-vous ce qu’est la première chose que j’ai dite à Nolan Kohan, peu après mes fiançailles ? »

" Non ", eut-il envie de répondre. Mais il subodorait qu’il s’agissait là d’une question rhétorique. Quoiqu’elle souleva une autre question en lui, un brin alarmante : savait-elle pour lui, pour le tisseur ? Savait-elle qui il était et donc qu’il avait des yeux et des oreilles en Sélénia et en de nombreux autres endroits ? Fort possible. Le nom de Tisseur se susurrait de plus en plus en Calastin et devenait bien trop célèbre à son goût. Quand bien même on ne le reliait pas forcément, pas encore, à son propre nom. Mais après tout, ayant conseillé Luna du temps de la régence, même s’il ne lui avait jamais révélé son rôle de tisseur et la toile qui l’aidait dans son œuvre, il y avait de fortes chances que Luna, et donc son épouse, ait commencé à faire le lien et ait compris, en partie du moins, comment il avait su avoir tant d’informations en des temps si troublés.

« Je lui ai dit que j’épousais sa soeur par amour. »

Ilhan se retint de faire la moue. Selon lui, ce mariage avait peut-être été une erreur politique. Certes, Luna n’était pas de ceux à écouter les mœurs bien sagement et, n’étant pas une princesse de sang, elle pouvait se sentir plus libre de suivre les aspirations de son coeur. Lui-même n’irait pas le lui reprocher, honnêtement. La vie était trop courte finalement pour les considérations politiques si étriquées. Mais il était certain qu’un jour, cela lui serait reproché. Quand bien même l’Empereur actuel avait soutenu ces épousailles.

« Et que je conservais ma liberté. Je suis peut-être mariée à une Kohan, mais cela ne fait pas de moi l’une des leurs. »

Ilhan hocha simplement la tête, indiquant ainsi avoir entendu ces mots. Des mots qu’il n’était pas près d’oublier et qu’il s’empresserait de consigner ensuite de retour à sa tente. C’était là un aveu précieux, même s’il n’en avait pour l’heure aucun usage. Mais il savait d’expérience que ce genre de mots pouvaient un jour servir et révéler leur vrai pouvoir.

Et qu’importe qu’en cet instant il plussoyât intérieurement ce qu’elle disait. Il partageait ce point de vue personnellement. Un nom ne faisait pas la personne et ne donnait en rien sa véritable allégeance. Fabius en avait été le parfait exemple. Il était le mieux placé pour en témoigner. Toutefois…

Toutefois, elle portait le nom Kohan, qu’elle le veuille ou non. Et pour certains, rien d’autre n’importait. Certains n’iraient pas chercher plus loin. Si lui-même savait faire la part des choses et ne la cataloguait pas en Kohan, il n’en serait pas de même d’une bonne partie de Cordont, de Délimar ou même de Caladon, si une Kohan, quelle qu’elle soit, s’avisait d’arriver au sein de la Chue sans prévenir. Pouvait-il seulement lui faire comprendre ?

Il s’apprêtait à tenter la chose, quand elle reprit la parole, lui coupant l’herbe sous le pied. Il referma la bouche et écouta avidement. Et il hocha la tête quand elle lui assura vouloir protéger le peuple. Il prenait note. Oui, là aussi, ces mots précieux seraient consignés en son esprit.

Mais la révélation et la question qui suivirent le laissèrent soudain pantois. On lui demandait… son avis ? Ces terres étaient neutres, pourquoi voulait-elle son ressenti ? Son aval ?

Ilhan resta un instant immobile, silencieux, et observa les gardes autour, réalisant qu’elle avait posé la question à tous. Aucun ne bougea, aucun ne répondit et beaucoup se tournèrent vers lui. Char-mant. Merci, vraiment. Comment lui refiler la patate chaude, comme lui avait dit une fois un garde. Ilhan sourit en observant chacun d’eux puis secoua la tête, d’un air las, avant de reporter son attention sur la dragonnière.

Mais au lieu de lui répondre de suite, il s’avança à son tour vers elle. Il sentit quelques gardes se tendre alors qu’il s’approchait dangereusement du bord le plus escarpé de la colline. Il suffisait de peu de choses pour qu’il tombe. Si l’on voulait sa chute. Il jeta un regard vers le vallon creux et observa le sol, loin en bas. Puis il releva son regard sombre sur l’horizon et observa Calastin dans toute sa splendeur et dans toute sa destruction. Il songea un court instant que cette terre était à l’image parfaite du peuple des hommes : magnifique, mais destructrice. Capable du pire, comme du meilleur.

Mais il n’était guère temps de se laisser aller à ses rêveries, se morigéna-t-il. On attendait qu’il réponde et il avait laissé le silence durer bien trop longtemps déjà.

Avant de répondre, je tenais à…

Il se tourna vers elle, des pierres roulant plus bas à son mouvement.

éclaircir un point qui soudain me titille. Je n’ai pas fait mention du fait que votre nom de Kohan posait problème. Je l’ai certes suggéré…

À demi-mots. Mais pas explicitement. Il l’avait juste… Pensé. Ce qui lui faisait soupçonner… qu’elle lisait peut-être en lui. Aussitôt il renforça ses défenses mentales en lançant à l’avant des pensées plus futiles. Le vent courant dans ses cheveux de flammes, ses yeux d’améthystes magnifiques, les senteurs du printemps tentant de percer malgré le paysage dévasté…

Et pourtant vos réponses… étaient vivement centrées sur ce point-là en particulier. Liriez-vous dans mes pensées, Princesse ?

Un fin sourire étira ses traits. Entre amusement et crispation. Il avait affaire là à une adversaire redoutable, si adversaire elle était. Il le savait. Mais si en plus elle s’avérait télépathe… Autant dire qu’il ne faisait guère le poids face à elle. Du moins il en doutait fortement. Mais il pouvait toujours tenter. Foi d’Avente, on ne baissait pas les bras face à l’adversité. Il pouvait toujours lui compliquer la tâche. Et ces pensées-là voletèrent ouvertement devant les pensées futiles.

Seriez-vous… télépathe ? J’avoue que ces arts-là, les arts de l’esprit, quels qu’ils soient, m’ont toujours passionné. Je ne serais jamais un grand mage, encore moins un télépathe, mais j’ai étudié toute ma vie les arts fascinants de l’esprit. Sous toutes leurs formes.

" Et ai créé quelques sorts liés aussi ", pensa-t-il fortement, comme tentant de lui projeter cette pensée en la regardant bien droit dans les yeux. Telle une promesse. Plus qu’une réelle menace. La promesse que si elle souhaitait violer son esprit, il résisterait. Oui, il avait de quoi résister, même s’il ne ferait guère long feu si elle y mettait toute sa puissance et sa volonté. Car, s’il y avait bien une chose qu’il détestait, c’est qu’on viole son intimité. Et cette pensée-là aussi fut violemment projetée. Même s’il ignorait si elle pouvait réellement percevoir cela.

Quoiqu’il en soit, je tiens à corriger une possible méprise. Le nom de Kohan ne me suffit pas à catégoriser une personne. La princesse Luna pourra en témoigner me concernant. Les étiquettes ne sont que ce qu’elles sont, des étiquettes, mais ne définissent en rien l’intégrité de quelqu’un. Toutefois… Tous ne pensent pas comme moi. Où que ce soit, entre autres à Cordont. Et le nom de Kohan suffit en certains endroits à enflammer certains esprits. Que vous le vouliez ou non, par le simple fait que vous portiez le nom de Kohan, les esprits peuvent s’égarer sur les sentiers de la colère et de la rancoeur. Et c’est là tout ce que je souhaite éviter.

Il tenta de réfréner les battements de son coeur qui s’accéléraient sous l’effort de se concentrer pour parler tout en protégeant son esprit sous des pensées futiles.

Si vous le désirez toutefois, et si vous souhaitez tout de même venir en Cordont, je peux envoyer un messager au Général qui décidera si cela est possible et sous quelles modalités. Nous avons un traité avec l'Empire de Sélénia, et s’il pourrait être fait exception vous concernant, par votre statut particulier, ou l’aide que vous voulez apporter, nous devons prendre nos précautions.

Il la darda d’un long regard, hésitant quant à répondre à la dernière question qu’elle avait posée. Puis finalement se décida, et reprit en laissant filtrer ses accents althaïens, signe qu’il parlait d’un point de vue plus personnel et non plus sous le masque formel du diplomate.

Quant à la possibilité du groupe que vous évoquez… je ne sais qu’en penser sans en savoir plus. Je ne peux que soutenir toute œuvre altruiste souhaitant aider le peuple. Et me sentirais honoré qu’un tel groupe souhaite s’installer sur notre île qui plus est, une île au sort possiblement bien funeste si nous ne trouvons pas une solution aux nombreux problèmes qui la frappent. Mais… cette possibilité m’inspire aussi beaucoup de questions pour tout avouer. Les baptistrels ne prônent-ils pas déjà ce rôle-là ? Vous parlez de votre héritage baptistrel… pourquoi souhaitez-vous vous en écarter ? Pourquoi souhaitez-vous former un autre groupe ? Quel serait ce groupe exactement ? Un mixte entre dragonniers et baptistrels ? Des mages ? Comment souhaiteriez-vous venir en aide au peuple ? Pourquoi choisir Calastin ?

Il s’arrêta devant son flot de questions et offrit un sourire contrit en guise d’excuses silencieuses à la dragonnière.

Je vous prie de m’excuser. Mais sans plus d’informations…

On reconnaissait là le maitre-espion, siffla une petite voix mesquine en lui.

Les questions priment sur le ressenti, qui hésite alors entre inquiétude, vif intérêt et… petit espoir. Quand bien même, si vous voulez vous installer en terres neutres, ni l’Alliance ni l’Empire n’auraient rien à en dire.

descriptionInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie] EmptyRe: Inconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie]

more_horiz
Sans un mot, Orfraie accueillie le Conseiller auprès d’elle. Son parfum lui chatouillait les narines et elle devinait, très nettement, les battements de son palpitant. Plus petit par la taille, Ilhan avait toutefois une prestance certaine et, toujours sans un mot, l’Ataliel l’écoutait. La brise jouait avec ses cheveux dont la coloration si peu commune lui avait valus le surnom de « Liée de Feu ».

Elle fit appelle à ses talents de politicienne pour garder un masque impassible. Ilhan mettait le doigt sur la vérité, bien entendu, mais Orfraie souhaitait garder ce précieux atout dans sa manche. À l’avenir, peut-être devrait-elle choisir ses mots avec plus de soin.

« Seuls les Dragons ont se pouvoir. » répondit-elle. Son visage de porcelaine s’anima et un léger sourire, avenant, étira ses lèvres.

C’était un mensonge, bien sûr, ainsi que des mots choisi avec soin. Pouvait-on s’attendre à cela de la part d’une ancienne Cawr? Après tout, ce n’était pas par le mensonge qu’Orfraie avait perdu ses pouvoirs. Mais le Conseiller de Délimar le savait-il ?

« Mais mon coeur se réjouit à l’entente de vos mots. Nos peuples auraient à y gagner, s’ils pensaient comme vous. »

Et ces mots-ci n’étaient que sincérité. Peut être que la différence se voyait un peu, dans ses prunelles améthystes, vis à vis de son précédent mensonge. Orfraie possédait un certain sens de l’honneur et n’était, d’ordinaire, guère une femme à entretenir la tromperie.

« Bien sûr. »

C’était à prévoir. Lancer une telle idée, sans préambule, presque dans le vent, avait de quoi soulever maintes questions. Sans quitter l’homme du regard - tandis qu’elle en sentait de nombreux autres dans son dos - la dragonnière écoutait le conseiller parler, expliquer son ressentit et poser ses questions. Elle faisait abstraction de ceux qui les observaient, la main probablement sur la poignée de l’épée, pour se concentrer uniquement sur Ilhan et lui répondre, point par point. Elle se moquait d’alimenter son moulin.

« Les Baptistrels sont liés par un serment. Celui-ci fait d’eux des êtres à part, en qui il est aisé de placer sa confiance, mais cet engagement les empêches parfois d’agir. »

Elle se souvenait parfaitement de ce jour, où elle avait choisi de briser son serment. C’était une belle journée et elle se trouvait sur une grande route du territoire Humain. Orfraie venait à peine de laisser la Capitale derrière elle lorsque son chemin avait, de nouveau, croisé celui d’une Lame Noire. Elle s’en était faite, auparavant, un précieux ami et, au détour d’une colline, le découvrit en fâcheuse posture. Sa puissante magie n’avait pas suffi à venir en aide à l’homme innocent dont la vie était menacée. Alors, Orfraie avait tué et payé le prix pour son geste.

De retour sur la colline de Calastin, Orfraie se surprit à serrer les poings. Son Lien avait Firindal avait comblé la déchirure de son âme, depuis, mais le souvenir était vivace. Et, parfois, la douleur également.

« Œuvrer pour le bien commun est un but louable et un objectif que je partage. Mais parfois, il faut s’écarter des grandes routes pour emprunter les sentiers les plus dangereux. »

C’était cette maxime qui l’avait poussé, autrefois, à embrasser la voie des armes. De Maître Baptistrelle, elle était devenue archère de légende, épéiste aguerrit. À défaut de protéger tous les peuples, Orfraie avait veillé sur le sien en tant que Générale des Rôdeurs... Avant que son devoir la pousse, la première, à mener ses guerriers au combat et prêter main forte aux Hommes qui subissaient les assauts des Vampires. La suite était une histoire commune à tous et à laquelle elle s’était totalement donnée.

« Au départ, je songeais à reformer la Caste. Mais plus j’y pense, plus je me dis que c’est une mauvaise idée. La Caste, de facto, exclue la quasi totalité des peuples pour ne garder qu’une poignée d’élus. Un groupe dans lequel chacun peut s’investir à la hauteur de ses capacités me semble être une meilleure idée. »

Mages, guerriers, artisans ? Une question à laquelle Orfraie n’avait pas encore de réponse. Peut être un peu de tout cela ? L’avenir, certainement, permettrait à la Liée de Feu d’orienter son choix.

« Quant à Calastin, il s’agit de pragmatisme. Cette île est la plus hospitalière de toutes à bien des égards. »

descriptionInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie] EmptyRe: Inconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie]

more_horiz
« Seuls les Dragons ont ce pouvoir. »

À ces mots, Ilhan tourna alors la tête vers elle et lui offrit un simple haussement de sourcil. Oh vraiment ? fit-il comprendre silencieusement par ce seul signe. Pouvait-il la croire ? Il avait cru comprendre que les dragonniers partageaient un don de télépathie avec leur lié. N’était-ce donc qu’avec leur lié ? N’y avait-il donc pas davantage ? Il lui faudrait trouver un autre dragonnier auprès de qui se renseigner, songea-t-il. Un dragonnier qui accepte de leur révéler l’étendue de leurs possibilités. Il n’y avait jamais prêté plus grande attention jusque-là. Mais cette question lui semblait de plus en plus importante. Toutefois, un dragonnier accepterait-il de révéler ce genre de secret ? Ou peut-être pourrait-il demander à un dragon, si un jour lui était offert l’honneur d’une telle rencontre à nouveau. Et si le dragon acceptait de répondre à sa curiosité sans le manger avant... Bref, il était peu évident d'obtenir réellement des réponses au final.

« Mais mon coeur se réjouit à l’entente de vos mots. Nos peuples auraient à y gagner, s’ils pensaient comme vous. »

Ilhan pencha la tête, un moment sceptique devant le léger, très léger, changement qu’il avait cru noter. Ou l’avait-il simplement rêvé ? Il avait la nette impression, insidieuse, qu’elle ne lui disait pas tout. Il ne pouvait l’affirmer, tout comme il ne pouvait vraiment parler de mensonge, ce n’était là qu’une impression diffuse. Et dérangeante. Ou peut-être une simple vue de son esprit paranoïaque. Il se forcer alors à passer outre cette impression. Il inspira discrètement, puis hocha simplement la tête, poussant ses pensées de côté. En tentant de les cacher au plus profond de son esprit. Savait-on jamais.

Il lui fut en tout cas reconnaissant quand elle lui offrit des réponses. Il devait avouer que ce qu’elle lui révélait alors sur son projet titillait sa curiosité légendaire. Chaque réponse lui inspirait cent autres questions, qu’il se garda de poser toutefois. Il écouta, attentif. Il aperçut la légère crispation de son poing, mais n’en ressentit nulle peur. La dragonnière semblait soudain partie dans ses songes. Était-elle en proie à quelques réminiscences douloureuses ? Mais bien vite elle se reprit et continua.

Une organisation, proche du concept des baptistrels, mais se voulant plus actif, plus partie prenante des événements de l’archipel ? Une organisation à but altruiste et d’entre-aide ? D’enseignement et de partage du savoir ? Qui accepterait toute race, et tout individu partageant ces principes, qu’il soit lié ou non à un dragon ? Voilà qui était intéressant. Ilhan était plus que curieux soudain. Ce vœu louable d’un tel groupe lui inspirait à la fois espoir et… méfiance… Ils avaient déjà connu maints groupes prônant de tels vœux et qui pourtant s’étaient révélés impuissants ou incapables de suivre leur ligne de conduite. Ce groupe-ci y parviendrait-il ? Dans ce climat de tension où la moindre étincelle pouvait déclencher les feutonneres ?

C’est un projet prometteur, répondit-il enfin, en dardant son regard sombre sur elle.

Un regard où brillait une vive lueur d’intérêt. Il mourrait d’envie d’en savoir plus. Mais la décence le retenait de poser plus de questions et de l’assaillir éhontément pour assouvir son besoin de comprendre, de savoir, son besoin viscéral d’avoir plus d’informations, toujours plus, et encore plus. D’autant plus que la Liée de feu ne semblait en avoir encore qu’une vague idée. Mais voilà en tout cas un projet qu’il garderait à l’oeil. Peut-être verrait-il si des araignées étaient intéressées pour s’y intégrer. Et s’y poster en veilleur par la même occasion. Il aviserait…

Très prometteur, répéta-t-il de ses accents trainants.

Puis, reportant son regard au loin, il hocha la tête, pensivement. Enfin, après avoir laissé planer un léger silence, il reprit, en lui accordant de nouveau toute son attention.

Pourra-t-on espérer avoir l’honneur de connaître les avancées de votre projet ? Au-delà d’un intérêt purement professionnel, vous avez su attiser ma propre curiosité. Et j’ose caresser le doux rêve que vos souhaits se réalisent et que votre groupe voit le jour pour apporter à cet archipel un peu d’unité et de paix pour une cause commune. Pour notre survie à tous, une avancée vers un futur, main dans la main, ou du moins dans une chaine vertueuse et non plus guerroyeuse.

descriptionInconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie] EmptyRe: Inconnue en terre inconnue, que veux-tu ? [PV Orfraie]

more_horiz
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
<<