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descriptionQue m'infligerez-vous ? EmptyQue m'infligerez-vous ?

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[Début juillet]

À l'intérieur, la tempête faisait rage.
Nahui se débrouillait comme elle le pouvait, dans l'espace désormais trop étroit qu'était le sien. Usant pour la première fois de son petit corps, de ses muscles, ses nerfs, elle déchaînait ses forces dans des mouvements bien trop contraints pour avoir l'impact qui leur était possible. Ses cornes frappaient la sorte de nacre qui l'emprisonnait, ses griffes raclaient sa coquille, autant que cela leur était possible. Les gestes étaient hâtifs, énergiques, et impatients.

N'était-ce pas compréhensible ? Quelques heures auparavant, l'esprit de son Lié et le sien s'étaient retrouvés, et unis, achevant leur commune naissance. Nahui avait trouvé en lui ce qui lui manquait. Jadis, sortir de l'oeuf n'aurait eu aucun sens. Désormais, il n'était plus question de perdre une seconde de plus qu'elle aurait pu passer dans ce monde qui l'attendait ! Elle voulait découvrir ce que ces souvenirs qui n'étaient pas les siens lui avaient murmurés, et forger une mémoire qui inspireraient les futurs dragons !
Mais pour cela, il fallait sortir de ce maudit oeuf. Et par le dragon-esprit... Elle n'y avait pas été de patte morte lorsqu'elle avait voulu se protéger. Etait-ce l'épaisseur de sa nouvelle coquille qui l'emprisonnait ? Ou juste sa dureté ?

L'Indestructible avait deux objectifs, lorsqu'elle retrouverait d'autres Dragons : se vanter de sa capacité à se défendre sans même être née, et se vanter de sa capacité à pourfendre d'aussi incroyables défenses. Elle y parviendrait. Elle n'avait le choix. Pas question de débuter sa petite existence par la honte qu'aurait représenté le besoin d'assistance ! Elle avait besoin de se forger dans ses propres flammes, pouvoir encore se lover dans cette image de force qu'elle se faisait d'elle-même. Tous respecteraient Nahui et Aldaron, et dans la nuée des vivants, ils seraient les têtes de file.

C'était certain. C'était écrit. Ce monde devait manquer d'Eux. Alors pourquoi, bon sang, devait-elle perdre du temps pour se défaire de sa prison ? Sa frustration se mêlait à sa hargne, et les coups de cornes ne s'en faisaient que plus violents. Il devait sans doute être pénible pour Aldaron de sentir dans sa tête autant de voracité pour la vie. Elle le confortait en lui rappelant, régulièrement, qu'elle allait y parvenir, qu'elle ne pouvait qu'y parvenir, dusse cela prendre du temps.

De l'extérieur, les impérieuses bourasques de la tempêtes étaient à peine visibles. De temps en temps, l'oeuf paraissait tanguer sur son support, subtilement, selon les gesticulations de son habitante.

Un élément incongru fit marquer une pause à Nahui, son esprit intrigué prenant le temps de comprendre ce qui le captivait. Une présence... Connue. Présence-qui-fait-du-bruit, alors que le bruit sans raison est futile, voire dangereux, pour les plus jeunes. Présence-qui-fait-vibrer-l'oeuf, sans qu'elle en eut jamais compris la raison. Les vibrations ne ressemblaient pas à cells qui avaient jadis menacé sa protection. Ce ne pouvait être cela, à moins que Présence soit très stupide. Ce qu'il parviendrait à éroder en mille framents de temps, la dragonne n'en mettrait qu'un à le reconstituer.
Présence désirait-elle guetter l'instant où elle sortirait de sa coquille ? Espérait-elle qu'un instant de faiblesse lui serait révélé ? Une douleur fantôme vint chauffer le chanfrein de Nahui, au niveau de ses yeux. Présence n'avait pas tord, c'était maintenant, tant qu'elle était jeune, qu'il était possible de la blesser. Mais pourquoi ? Comment ? Devait-elle déjà appeler Aldaron à son secours ? C'était étrange, que Lié laisse venir sur son territoire un ennemi. Assez étrange pour remettre en question le statut de Présence.

Nahui n'avait nullement envie de demander de l'aide, tant par fierté que par crainte que cela soit vain. Il n'était pas question non plus de faciliter la tâche à un potentiel ennemi. Que faire, alors ? Une sorte de voix en elle lui rappela que, le Lien créé, elle pouvait désormais s'adresser à Présence. La manière ressemblait un peu à la façon de s'y prendre avec son Lié. Elle tendit son esprit vers celui de Toryné, avec grande prudence.
Toryné eut tout juste le temps de sentir l'esprit de l'enfant dragon effleurer le sien, curieux et inquiet, avant que cette esprit panique, et s'écarter vivement, alors qu'elle se recroquevillait dans sa coquille. C'était... C'était terrible ! Ce n'était pas Lié ! Il était si différent, si bizarre, si... Incompréhensible. Rien de surprenant à ce qu'il fasse n'importe quoi ! Mentalement, elle appela Aldaron. Qu'au moins il se rapproche ! Pourquoi était-il parti, après tout ce temps passés loin l'un de l'autre ? Pourquoi ne venait-il pas être exceptionnel à ses côtés ?
Et qui était ce danger qui rôdait autour de sa coquille ?

descriptionQue m'infligerez-vous ? EmptyRe: Que m'infligerez-vous ?

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Après l’ultime bataille contre les chimères, Toryné n’avait pas eu le temps de véritablement se reposer, il y avait encore tant à faire. Sa nouvelle position de chef de clan lui donnait encore plus de responsabilités que lorsqu’il était conseiller, la paperasse n’avait pas diminué, bien au contraire et avec cela, il avait d’autres occupations. L’évacuation d’Aerthia en faisait partie, s’il avait été longtemps retissant à abandonner la ville et Nyn-Tiamat, voyant cela comme de la faiblesse face à la Légion Vat’Em Medonis, il avait finalement accepté ce qu’il estimait être un repli temporaire. Les dangers de Licorok et la division en 4 clans du royaume lui ayant forcé la main.

Toryné avait donc organisé l’évacuation en association avec Achroma et le troisième, sa connaissance de la ville et son esprit organisé ayant fortement aidé à une évacuation rapide et efficace, l’androgyne s’était assuré qu’absolument rien d’utile soit laissé derrière afin que les Graarh ne puissent en profiter ! La stupidité d’Irina leur avait déjà permis de construire des navires, Toryné ne ferait pas cette même erreur.

Il était le dernier à partir de la ville, avec quelques vampires composant sa garde et certains membres honorifiques de son clan. Son emprise sur les siens s’était renforcée après la bataille contre l’armada du crépuscule, les récits de ses prouesses guerrières ayant joué grandement en sa faveur. Cependant, l’acquisition d’un œuf de dragon avait également grandement joué sur son prestige, une véritable relique dont le vampire ne se séparait pas. L’œuf était à la fois la promesse de puissance, mais également une source d’inquiétude pour le vampire. De ce qu’il savait, seul les dragons Verith, Keetech et Nynsith était née sans la nécessité d’un lien, il y avait peu de chance que cela soit également le cas de l’œuf qu’il possédait et donc quelque part dans ce monde, un lié était destiné à cette œuf. Ce n’était d’ores et déjà pas lui, Toryné avait passé tout son temps avec l’œuf draconique depuis qu’il l’avait récupéré et il n’avait pas senti quoique ce soit se créer et aucune éclosion ne s’était produit. Le problème était donc de savoir qui serait lié à ce futur dragon ? S’il s’agissait d’un membre de son clan, le risque était que ce dernier tente de contester son pouvoir, sauf si cela tombait sur un véritable loyaliste… En revanche, un tout autre individu serait problématique, perdre un tel pouvoir ne lui plairait guère. Cela expliquait pourquoi Toryné ne quittait pas l’œuf un seul instant, il devait absolument contrôler qui viendrait s’approcher de la coquille sacré !

Ainsi Toryné embarque sur l’atypique navire d’Achroma, œuf dans ses bras comme une mère porterait son nourrisson. Le flamboyant eu le droit à sa propre cabine, suffisamment spacieuse pour un minimum de confort. La matriarche Dalis en sortait très peu, toujours occuper avec de nombreux documents, le vampire androgyne avait en plus de cela guère l’envie de sortir… Le navire de son comparse ne lui plaisait pas vraiment, cette épave animée et son équipage hideux…. Non merci pour un être de sa délicatesse.

Durant la traverser, lors d’une journée semblable à beaucoup d’autre, le céleste s’aventura pourtant en dehors de sa grotte de fortune. La journée était chargée, il avait rendez-vous avec Aldaron, ou plutôt l’être qui était devenu en secret son fils… Toryné n’avait pas encore eu l’occasion de lui parler depuis la bataille et avec Achroma le plus souvent à ses côtés, il avait été difficile d’approcher sa progéniture. Il avait été difficile d’apaiser l’aîné devant l’état de son inséparable, gravement blessé et transformé en vampire, Toryné pouvait comprendre la détresse et la colère qui avait dû l’envahir. Quoiqu’il en soit, aujourd’hui la mère pourrait enfin passer du temps avec son fils et c’était avec enthousiasme que Toryné s’était vêtu de sa parure du Cygne, de loin sa plus belle robe pour le moment !

Cependant…

-Ce n'est pas vrai… soupira-t-il. Devant ses yeux se tenait un document officiel que Toryné avait fait remplir au troisième prince de leur alliance. Ce dernier était hélas… assez réfractaires à la bureaucratie et par corrélation à tous ce qui était paperasse, à la différence de Toryné qui pouvait aisément s’auto-proclamer prince des bureaucrates. « Il n’a pas signé là… Il a signé là au lieu de là… Son écriture est… bon sang de bon cygne… » râla-t-il pour lui-même. Aldaron allait arriver dans quelques instants, mais sûrement avait-il le temps d’aller voir l’antique aux deux mains gauches pour lui faire correctement remplir ce maudit document, cela ne devrait prendre l’affaire que de quelques minutes pensa-t-il.
Sortant donc de ses appartements, Toryné n’emporta pas l’œuf avec lui, cela n’était pas nécessaire, deux gardes solidement armés se tenaient devant la porte après tout.

-Aldaron Elusis devrait arriver d’ici sou peu. Fait-le rentrer dans mes appartements et faites apporter une bouteille de bon sang frais, dit lui que je m’excuse de mon retard, mais qu’un léger contretemps me retient et que je ferais le plus vite possible.

Quel risque cela représentait de laisser Aldaron et son œuf dans la même pièce ? Toryné n’y pensa même pas et se dépêcha d’aller trouver le troisième.

Quelques minutes avait-il pensé ? Bon sang qu’il avait eu tort… Bon sang qu’il était entouré de tête de mule. N’avait-il jamais eu à remplir un document ? Comment une simple signature pouvait demander autant de temps et de contestation ? C’était un Toryné un peu las qui revenait dans sa chambre et des plus déçu lorsqu’il apprit qu’Aldaron était parti. Il venait de rater un moment privilégié avec son enfant…

Toryné s’installa sur son bureau, faisant la moue tel un enfant à qui on avait refusé une sucrerie. Il n’avait plus l’envie de se replonger dans tous ces maudits documents administratifs qui sûrement avait mal été rempli par une tierce personne… Il écarta les montagnes de papier et en sortant d’autres d’un tiroir, sur ces derniers se trouvaient des croquis des nouvelles armures qu’ils comptaient faire fabriquer pour sa garde. Depuis son changement d’esprit-lié, Toryné était passé d’une esthétique sobre à flamboyante, il voulait de la couleur de partout, du grandiose, du flamboyant ! Par conséquent, il fallait que sa garde reflète cette nouvelle facette de sa personnalité. Sifflotant pendant qu’il dessinait en sirotant seule la bouteille de sang qu'il avait fait apporté, posant l’œuf à la propreté impeccable sur ses genoux.

Puis une étrange sensation… Toryné eu du mal à comprendre ce qu’il venait de se produire. Pendant un bref instant, il avait senti… quelque chose ? Une présence, oui. Une présence qui venait de… l’œuf ? Comme si ce dernier avait effleuré son esprit avant de reculer presque aussitôt. L’œuf, avait-il essayé de rentrer en communication avec lui ? Toryné lâcha sa plume et son verre et porta toute son attention sur la solide coquille, posant ses deux mains dessus par réflexe, comme si cela l’aiderait pour communiquer.

-As-tu essayé de me parler, de te manifester ? Murmura-t-il. Toryné ne pensa pas qu’il puisse s’agir du lien, car ce dernier aurait dû alors se manifester plus tôt et surtout, il n’avait pas senti quelque chose de bouleversant en lui, juste une brève sensation. « Toi qui n’es pas encore née fais moi un signe ». N’était-ce pas étrange de parler à un œuf ? Certes, il s’agissait d’un œuf de dragon, mais le vampire se sentait tout de même légèrement ridicule à s’adresser à la coquille saurienne. Cependant peut-être que parler n’était pas utile, peut-être le dragon à l’intérieur ne pouvait pas l’entendre de sa coquille, les dragons étaient télépathes alors… « As-tu essayé de communiquer avec moi très cher ? » Pensa-t-il avec conviction.

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Recroquevillée au fond de sa coquille, Nahui avait déjà le réflexe de ne plus bouger du tout, de crainte d'exciter son prédateur, ou de se faire remarquer. Si elle le voulait assez fort, peut-être que Esprit-bizarre partirait. Un frisson traversa toute son échine, jusqu'à la pointe de sa queue, quand de légères vibrations indiquèrent un contact contre sa coquille. Encore... On allait encore la saisir, et la malmener. Si jadis elle avait résisté aux coups, aux griffes, et au fracas contre le sol, ses multiples tentatives pour fragiliser sa protection la faisaient douter, désormais. Son petit coeur battait de panique et de terreur, et son esprit lui-même n'osait s'orienter vers l'extérieur. Si elle ne bougeait pas, l'Autre ne la verrait pas. Si elle ne bougeait pas...

La réaction de Esprit-bizarre ne fut néanmoins pas celle à laquelle Nahui avait été habituée. De paniquée, elle se fit plus intéressée. Jadis, Présence-qui-fait-vibrer-la-coquille avait fait du bruit, et Nahui avait conçu ce bruit comme les pépiements des oiseaux. Un moyen d'expression brut, à la subtilité toute relative. Pour la première fois, elle comprenait les sons qu'émettaient Présence. Ils étaient comme des touchers d'esprit, en moins précis. Si, instinctivement, Nahui savait qu'elle devait sa compréhension à l'étrange sensation qui avait implosé en elle au contact de Lié, cela ne l'empêchait pas d'être profondément troublée par le phénomène. Comment les sons pouvaient-ils rendre les pensées ? Cela lui échappait, pour le moment. Et c'était profondément déstabilisant.

Sons-qui-se-comprennent voulait communiquer, visiblement. Devait-elle lui répondre ? Montrer qu'elle était là ? Non non non, c'était dangereux, il ne fallait pas. Mais s'ils pouvaient communiquer, peut-être pouvait-elle lui poser la question qui la taraudait, depuis tout ce temps ? Peut-être... Oh, c'était stupide de croire cela, mais peut-être pouvait-elle découvrir quelque raison qu'elle n'aurait su imaginer, quelque élément qui aurait pu la pousser à éclôre tout de même, devant lui, à lui faire confiance. La mémoire de ses ancêtres lui avait jadis murmuré qu'en ce monde, il n'y avait pas que des ennemis. Elle aurait aimé les croire. Mais ils n'avaient pas connu le monde pour ce qu'il était devenu.
Et si, outre le fait que cela la mette en danger ou non, la réponse à sa question lui apportait des éléments pour mieux comprendre ce qui lui arrivait, et mieux se défendre ? Ce fut par cette réflexion qu'elle parvint à s'auto-convaincre. Par cette réflexion, et aussi, beaucoup, par sa propre curiosité de créature juvénile. Elle n'était pas venue en ce monde pour ne jamais le connaître. Alors, comment devait-elle lui parler, désormais ? Utiliser les sons aurait été stupide. Elle ne parlait pas ce langage.Restait celui qu'elle connaissait le mieux.

Son esprit revint contre celui de Présence, qui put sentir un petit être intrigué l'observer par ce biais, visiblement surpris de la forme que prenait leur contact. Timidement, les concepts vinrent vers Non-Lié : le concept de question, l'ignorance, et le souvenir de son oeuf, avec toutes les petites vibrations qu'Esprit-Bizarre lui avait infligées. Elle voulait en connaître la cause. Avec des mots, cela se serait sans doute traduit par "pourquoi as-tu fait cela".
Elle lui laissa le temps d'intégrer cela, de répondre, avant d'ajouter un autre questionnement : lui, sa volonté, le futur. Que voulait-il ? Que voulait-il vis-à-vis d'elle ? De l'inquiétude, transparaissait à travers son contact, mais aussi, comme le souffle lointain du vent, sa capacité à lui faire face, comme une menace, s'il avait le malheur de songer à lui faire du mal.
C'était peut-être ridicule, mais c'était plus fort qu'elle.

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L’androgyne attendit un moment sans recevoir la moindre réponse de l’œuf. Pourtant, il était persuadé de ne pas avoir imaginé cette sensation, elle était bien trop singulière pour que son esprit ait pu le leurrer. Hélas, il ne voyait pas comment répéter le phénomène, il n’avait que très peu d’information sur les œufs de dragon, en même temps jamais il n’avait imaginé qu’un jour, il en tiendrait un entre ses mains.

Personnes ne pouvaient vraiment l’aiguiller, Achroma avait certes été un dragonnier par le passé, mais la mémoire de l’aîné n’était pas encore véritablement fiable selon le vampire et il préférait éviter toute intervention des autres clans sur sa possession. Il y avait sinon Keetech, une dragonne assez âgée et qui avait déjà enfanté. Cependant, si la dragonne de l’orage venait à apprendre qu’il possédait un œuf, il ne ferait aucun doute qu’elle le réclamerait, afin que ce dernier ne se lie jamais et le vampire n’était pas encore en mesure de s’opposer à la volonté de la saurienne de Quartz.

Il était donc seul dans cette expérience nouvelle…

Puis il ressenti quelque chose ! Cette “sensation” revint. Il se sentait comme… observer ? Une présence se dégageait de l’œuf, du moins c’était ainsi qu’il sentait ce qu’il se passait. Cette présence semblait curieuse, mais tout de même prudente. Ce ne fut pas des mots qui lui vinrent en réponse, mais plutôt des idées, des concepts. Tout d’abord quelque chose qui fit penser au vampire à l’inconnue, à l’absence de connaissance et de désir de combler ce vide, puis ce fut quelque chose de moins conceptuelle qui atteint son esprit, une forme, quelque chose de solide, l’oeuf ! Puis par des sensations, mais cela était singulier, les sensations étaient physique, mais quelque chose qui était difficilement compréhensible. Cela ressemblait à une caresse, mais sur quelque chose de dur, en aucun cas sur de la peau. Il n’y avait pas de stimuli positifs ou même négatifs, juste la sensation. Autre élément qu’il notait était lui-même, la sensation lui était intimement lié, sûrement même que cela devait venir de lui. Toryné put facilement comprendre que la présence devait faire allusion au moment où il s’était occupé de l’œuf, l’androgyne n’était certes plus une pie, mais l’attrait de ce qui brillait était toujours ancrée lui. Ainsi, il avait lustré et nettoyé l’œuf avec une certaine ferveur, afin que l’œuf reste un sublime écrin saurien à l’image du clan qui veillait sur lui.

Ainsi, de tout ce qu’il avait reçu dans son esprit, le monarque comprenait ce que lui transmettait le dragon pas encore né. Pourquoi avait-il fait cela ? La question lui parut dans un premier temps étrange, mais très vite, il put la comprendre. La sensation du contact répété qu’il avait pu avoir avec l’œuf était étranger pour le futur né et si, comme il le pensait, l’œuf était venu avec les chimères, alors il était évident que l’être dans la coquille ne devait pas connaître ce qu’était la douceur ou les notions associés.

Pour lui répondre, Toryné adopta le même mode de communication, de crainte que des mots ne puissent être pleinement compris par la saurienne. Le flamboyant pensa à des notions de beauté, d’esthétisme, mais également de soin, d’immaculé et enfin de prestance. Il espérait que son interlocutrice le comprendrait, mais il avait une autre question auquel déjà, il devait également répondre. Ses projets futurs la concernant, ses désirs pour elle. La sensation du contact répété qu’il avait pu avoir avec l’œuf était étranger pour le futur né et si, comme il le pensait, l’œuf était venu avec les chimères, alors il était évident que l’être dans la coquille ne devait pas connaître ce qu’était la douceur ou les notions associés. Que désirait-il ? Bien entendu, il avait des projets potentiels pour ce dragon, mais rien de véritablement concret, car l’avenir était encore bien trop incertain, avec qui allait se lier cet œuf ? Rien que cela pouvait tout changer.

Pour tout de même répondre, Toryné envoya des pensées de gloire et de prestige ainsi que de force. Cependant, il nuança les représentations par celui de liberté et de complétude, qu’elle ne perçoive pas dans ce qu’il lui transmettait le sentiment d’être une arme, mais plutôt celui d’une noble et puissante créature dont une vie grandiose l’attendait en dehors de l’œuf. Après tout cela n’était pas un mensonge a proprement parlé, tout saurien se voyait affublé d’une grande destinée de par leur nature, même si le vampire espérait que cette grande destinée s’accompagne d’intérêt pour lui, mais cela, il n’était pas nécessaire d’en communiquer l’idée avec son interlocutrice.

Les yeux désormais clos, le vampire se concentrait dans la formulation d’une question à son tour. Il espérait bien pouvoir, au travers de cette conversation, gagner en information sur la situation et notamment de pourquoi un contact s’établissait que maintenant. Tout, comme l’avait fait la saurienne avant lui, Toryné lui fit parvenir les concepts de question et d’ignorance, avant de préciser cela par le concept de connexion. Ensuite, il mêla cela avec les notions de temps et du silence qui avait perdurer les jours passés. L’androgyne était encore loin de se douter de ce qu’il s’était passé entre Aldaron et l’œuf avant qu’il ne revienne dans la pièce, il ignorait encore tout du lien qui s’était créé entre les deux êtres.

descriptionQue m'infligerez-vous ? EmptyRe: Que m'infligerez-vous ?

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Contre l'esprit du vampire, celui de la petite dragonne se fit incrédulité, et appréciation. Elle ne s'était pas attendue à ce qu'il fasse l'effort de s'exprimer dans son langage. Pourquoi une telle attention ? Qu'y gagnait-il ? Se pouvait-il qu'au fond, tout au fond, les savoirs anciens qui avaient prétendu les bipèdes comme des serviteurs, fussent vrais ? En Nahui naquit l'ébauche d'une idée : celle que son expérience ait été un coup du sort, de malchance, inhabituel. Elle ne l'avait jamais envisagé, empirique, considérant les coups des chimères comme une vérité inébranlable et absolue, éternelle.
N'avait-ce pas été le cas ? N'avait-ce pas duré une éternité ? N'avait-elle pas ressenti les coups sur sa coquille, encore, et encore, inlassablement, fatalement ?

Le bipède étrange qui était venu contre son oeuf apportait un minuscule, mais nouveau et bien présent, contrepoids à tout cela. Elle ne savait comment réagir à cette âme contre la sienne, cette esprit qui ne voulait pas voir sa coquille se fendre pour en extirper simplement une arme à utiliser ou détruire. Chercher à se protéger davantage aurait été stupide. Elle eut le réflexe de vraiment voiloir être sûre, examiner sous tous les angles la présence près d'elle, comme elle aurait reniflé une nourriture douteuse. Mais non, rien. Elle ne trouvait pas la moindre trace d'une intention qui aurait pu lui porter attente. Face à l'absence de danger, que se devait-elle de faire ? Cela lui avait peut-être été appris. Des coups, de nombreux coups, d'innombrables coups, le lui avaient fait oublier.

Bipède-étrange lui apporta des idées qui lui parurent nouvelles, mais dont elle parvint à tirer quelques concepts qui lui parlaient. L'hygiène, l'attrait, et ces auras qui forçaient parfois le respect et maintenaient les hiérarchie. Oui, tous deux pouvaient se comprendre, sur certains points. Néanmoins, et si sincère qu'elle perçut la réponse, elle restait incomplète à son goût : pourquoi ? Pourquoi vouloir rendre un oeuf attrayant ? Pourquoi vouloir le rendre... Propre ? N'était-ce pas la propreté à l'intérieur qui importait ?
Finalement, Nahui passa outre ces considérations. Après tout, si elle avait un oeuf meilleur que celui de ses congénères, cela lui convenait également tout à fait. Le bipède put ressentir, après les interrogations de la dragonne, comme une once d'approbation.

L'autre réponse lui plut, dans son entièreté. Quelqu'un partageait sa vision de l'avenir ! Une vision où elle n'était pas la victime des chimères ! Cette vision où Lié et Elle avaient la place qui leur revenait, au sein de la Nuée, où ils étaient aussi forts et invincibles que ce qu'ils devaient toujours être ! La surprise laissa vite place à la fierté, et à la satisfaction, qui vinrent gonfler le coeur de la dragonne, le faire battre d'un espoir et d'une vigueur nouvelle. Oui ! Oui ! C'était pour cela qu'elle voulait se battre, c'était pour cela qu'elle voulait naître ! Et puisque bipède-bizarre était de son côté, elle n'avait plus de raison de le craindre. Ah, elle l'aimait bien ! Tous les bipèdes avaient intérêt à être au moins comme lui, ou prendre exemple sur lui, car il remplissait là à merveille le rôle qui revenait à ceux qui n'étaient pas Liés.

Les coups de corne reprirent, puissants, vigoureux, féroces, contre la coquille. Elle finirait par céder ! Le bipède-bizarre avait tout compris : de sa naissance à sa mort, il fallait que les mortels l'admirent, qu'ils lui apportent encore ces émotions qu'elle découvrait, et qu'elle appréciait déjà tant. Elle voulait sentir sur elle l'admiration et la dévotion ! La coquille lui paraissait plus fragile que quand Lié l'avait touchée. Ce n'était qu'une question de temps et de persévérance. Si l'expérience avait reconnu au moins une qualité à Nahui, sans même être née, c'était sa capacité à savoir maintenir les plus longs combats.

À la question qui lui vint, Nahui répondit sans hésitations : la connexion avait commencé quand Lié avait touché sa coquille. Qui était Lié ? Elle lui présenta ce qu'elle pouvait présenter de lui : l'aura qu'il était, le contact d'âme qu'il était, cette âme encore jeune et fougueuse, l'inspiration brusque et surprise qu'il avait eue lorsque leurs esprits s'étaient unis et, enfin, la voix mentale qu'il était désormais, psalmodiant des "non non non" comme si cela pouvait répondre aux questions qu'il se posait. Nahui présenta également à ce bipède qui était désormais son allié la distance qui séparait Lié d'elle, et ce que cela lui inspirait : frustration, incompréhension. Pourquoi n'était-il pas là ? Elle demanda à celui qui avait rendu son oeuf beau d'aller le chercher. La demande n'était ni polie, ni sévère. C'était le rôle des dragons d'être obéis des bipèdes.

Son esprit se détourna ensuite de celui-ci, pour retourner vers son Lié, et le supplier encore : qu'il revienne ! Qu'il arrête d'avoir peur, il avait l'air bête, et son Lié n'était pas bête. Elle alalit briser la coquille, et elle voulait que sa première sensation en ce monde, ce soit sa présence. Il ne pouvait manquer cet instant qui n'appartenait qu'à eux, et elle l'en conjura.

descriptionQue m'infligerez-vous ? EmptyRe: Que m'infligerez-vous ?

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Tout cela était si singulier, si… étrange ? Peu de chose pouvait encore véritablement surprendre le vampire. Bien qu’en comparaison de l’aîné ou d’autres immortels, 300 ans n’étaient pas si âgés. Mais durant ces 3 siècles, il avait vu, entendu et vécue bien des évènements. Et pourtant, il était maintenant tel un enfant découvrant avec curiosité et excitation une nouvelle chose que ce monde avait à lui offrir. Il ne savait même pas comment qualifier ce mode de communication, ce n’était pas vraiment de la télépathie, il n’y avait pas de mot qui était échanger, ni même d’image… Et il arrivait à se comprendre, c’était cela qui était le plus incroyable.

Cependant, derrière l’amusement enfantin, le malicieux demeurait tapis dans l’ombre et lui aussi était satisfait. Il semblait que le vampire eût su répondre ce qu’il fallait à la dragonne, étonnement, orgueil et satisfaction, voilà ce qu’il ressentait en provenance de l’esprit habitant l’œuf. Avait-il réussi ce premier pas dans une bonne relation avec le futur dragon ? Il en avait l’impression même si seul l’avenir pourrait lui confirmer cela.

Puis un choc, une activité anima l’œuf. Des coups ? Oui, cela semblait être des coups, le dragon souhaitait sortir, il souhaitait naître véritablement. Toryné regardait la coquille ce secoué sur ses genoux, des étincelles dans ses ambres, il allait éclore ! Bien que le vampire n’accordait pas autant d’admiration que la plupart des bipèdes envers les dragons, il leur accordait tout de même un statut bien particulier. Parmi les humains, les elfes et les vampires, il y avait de grandes figures parmi une multitude d’individu sans la moindre importance, mais chez les sauriens, il n’y avait pas de basse populace quelconque… Ainsi, assister à la naissance de l’un d’entre eux n’était pas rien, qui plus est, sur ses genoux ! Peu de bipèdes pouvaient se vanter d’un tel prestige, et cela, Toryné en tirerait sans nul doute une certaine fierté. Cependant, il ne savait guère encore s’il allait s’agir d’une fierté qu’il pourrait aisément afficher aux grands jours… En effet, le vampire n’en oubliait pas sa maîtresse de fortune, la dragonne de Quartz. Cette dernière pourrait voir d’un mauvais œil que son « serviteur » est eu en sa possession à un œuf de dragon sans l’avoir averti, surtout qu’il s’agissait d’un dragon lié qui allait naître…

En parlant du lien, le saurien pas encore né lui fit parvenir des informations sur celui qui était son lié, Toryné entendit sa voix et les paroles qu’avait prononcé l’élue. Immédiatement, l’androgyne comprit de qu’il s’agissait et de ce qu’il avait dû se produire… Aldaron en l’attendant avait dû, d’une manière ou d’une autre, toucher l’œuf, sans imaginer une seule seconde qu’il en était le futur dragonnier et sans nul doute qu’avec sa récente transformation, ce dernier n’avait aucune idée de ce qu’il s’était passé.

Le vampire se leva d’un bond, gardant l’œuf dans ses bras. Il se rua vers la porte, l’ouvrant brutalement avant d’exiger à ses gardes d’un ton impérieux de lui ramener Aldaron, « Et ne revenez pas sans lui ! » rajouta-t-il. Il ferma la porte tout aussi brusquement et revint prendre sa place sur le bureau. L’œuf de nouveau sur ses genoux, Toryné rapprocha son visage de ce dernier. Le vampire, ensuite, envoya des pensées, comme il l’avait déjà, auparavant. Envoyant des images du futur dragonnier du Saurien et malgré lui cette fois-ci dans la précipitation, les notions de famille et de fils.

Réalisant ce qu’il venait de faire, son visage recula, comme pour couper la communication, même s’il se doutait que cela ne marchât pas ainsi… Bon sang ce secret était d’importance capitale… Ce genre d’information qui pourrait mettre son existence en péril… Voilà déjà qu’il la faisait fuiter… Il lui faudrait très vite s’assurer que l’information ne voyage plus d’une conscience à l’autre pensa-t-il en se mordant légèrement la lèvre inférieure.

Les coups ne cessaient guère, était-ce normal que cela dure aussi longtemps ? La présence d’Aldaron, était-elle nécessaire pour que l’éclosion se produise ? Il avait souvenir qu’une fois qu’un lié touchait l’œuf qu’il lui était destiné, ce dernier devait éclore, mais pourtant, ce n’était toujours pas le cas. Toryné se voyait mal tenté de percer la coquille de l’œuf avec son épée, non seulement, il n’avait rien de suffisamment solide pour espérer ce ne serait faire une fissure, mais de plus, cela ne semblait pas être une bonne idée pour la sécurité du dragon. Non, il attendrait l’arrivée de son nouveau fils, du lié tant attendu par le futur dragon.

Spoiler :

descriptionQue m'infligerez-vous ? EmptyRe: Que m'infligerez-vous ?

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    Se concentrer. Se focaliser. Réessayer encore. Il n'avait plus que ça. La voix dans sa tête ne l'abandonnait pas, ne voulait pas partir. S'éloigner n'avait pas servi à grand chose, c'était comme si la distance ne comptait pas. Ou bien ne pouvait-il pas s'éloigner assez en restant sur le navire. Il demeurait à sa portée. Il avait songé sauter à l'eau, nager bêtement le plus loin possible ; il était toutefois un être raisonné qui n'avait pu se résoudre à une telle ânerie. Il devait bien y avoir une autre solution ? Peut-être pas. L'Autre était vindicative, elle croyait dur comme fer à ce qu'elle annonçait comme véridique. L'autre moitié de son âme, et puis quoi d'autre ? Il avait déjà une moitié d'âme, lié Inséparable, combien d'autres allaient encore se revendiquer d'être cette moitié de lui : il n'en avait pas une infinité. Il n'en avait qu'une. Et il aurait voulu faire ses propres choix, définir par lui même qui aurait droit de partager son existence et ne pas se le faire imposer par une entité supérieure, aussi divine que régalienne. Il aurait seulement voulu choisir, était-ce trop réclamer ? Aldaron avait décidé pour lui et avant lui d'à qui appartiendrait son cœur, soutenu par ce qui s'appelait 'esprit-lié' et maintenant quoi ? Une sphère épaisse qu'il avait malencontreusement touchée revendiquait ses droits comme le déchu d'un trône qui lui revenait par le sang. Et lui alors ? N'avait-il pas son mot à dire ? Qu'à cela ne tienne, il s'exprimerait.

    Sa dextre tremblante était orienté face à lui, tandis qu'il répétait plusieurs fois un mouvement de main horizontale. On l'agressait, on tentait de percer son intimité, de détruire ses armures psychiques, de s'infiltrer dans sa vie. Il devait se protéger. Il montait des barrières de pulsante énergie, s'en couronnait. Il tissait la trame tout autour de lui, comme un cocon, sous ses pieds, au dessus de sa tête. Une sphère protectrice. S'il avait eu un cœur encore en état de marche, il aurait battu à tout rompre tant la peur l'étrillait, mais dans sa non-vie, même sa respiration n'avait d'existence. Il y avait juste ce silence et cette intense concentration alors qu'il tissait l'énergie de la trame pour lui donner une nature de plus en plus résistante. Cela n'était jamais assez, mais il devait. Le rempart était de plus en plus épais contre le ras de marée télépathique alors qu'il ajoutait des couches de magie travaillée pour l'abriter. La forteresse se faisait de plus imperméable, mais l'Autre passait toujours, elle l'appelait. Elle ne cessait de le héler, et lui scander ce discours d'âme partagée, de destinée. Le silence régnait dans son antre, la magie l'isolait des bruits extérieurs. Et il y avait Nahui, encore et toujours. Elle était dans son œuf-coquille et lui dans son œuf de magie. Comment sortir de là maintenant qu'il savait que ça ne servait à rien ?

    La magie lui venait spontanément, surtout lorsqu'il avait besoin de ce protéger de ce monde encore inconnu, et ce, malgré les fluctuations que la trame subsistaient depuis l'explosion du Baôli. Lui, il était né pendant l'explosion du puits infini. Il n'avait jamais rien connu d'autre que la magie actuelle. Il ne cherchait donc pas à fonctionner comme il avait toujours fonctionné. Il ne se souvenait pas de comment il fallait faire avant pour s'imprégner de la trame. Il la manipulait maintenant parce qu'il se contentait de la ressentir au plus profond de lui même, de l'observer dans ses vagues sinueuses et ses traits rigides, inflexibles. Il avait moins de mal que les autres à reprendre la main sur cet environnement extraordinaire. Pour l'heure toutefois, il se sentait un peu maladroit au milieu de ses flux d'obstruction renforcés. Il avait tant et tant voulu se barricader qu'il se retrouvait  stupidement au milieu de ce laçage ingénieux. Et le pire dans tout ça ? La voix de l'Autre qui lui criait qu'ils étaient faits l'un pour l'autre. Bon sang, mais elle ne pouvait pas se taire cinq minutes qu'il se recentre et qu'il puisse se poser un instant ? Trier ses pensées ? Se retrouver seul avec lui-même ? Il poussa un soupir, prévoyant d'appeler l'Aîné pour qu'il vienne le sortir du pétrin dans lequel il s'était fourré. Peut-être que lui, il aurait une solution.

    C'est alors que la porte de sa petite cabine s'ouvrit avec fracas... Et se referma tout aussitôt, claquée par la barrière énergétique formée par Aldaron, assommant au passage le vampire qui ne serait pas attendu à ce que la porte lui revienne si rapidement au visage. Le nouveau-né se mordit la lèvre, heureux au final que cela ne soit pas arrivé à Achroma, s'il l'avait appelé. La magie était si instable par moment, qu'on avait des surprises inattendues et des accidents. L'antique sortit son épée de son fourreau de cuir et d’ivoire noir pour frapper son propre bouclier de l'intérieur, l’effritant un peu plus à chaque coup, enjoint par la rage que mettait sa Liée à briser sa propre coquille. Il frappait de toutes ses forces, veillant à garder l'équilibre quand le champ de force le repoussait en arrière. Les coups faisaient vibrer son épée et les ondes se propageaient dans sa main et son bras, molestés. Il sentait l'osmose qui le liait à Nahui, cette même envie de se battre et de se sortir de là. De s'évader, sortir de sa prison. Il n'avait pas peur d'être un fugitif, il voulait être libre.

    Il se rendait compte que plus il frappait, et plus il avait envie de frapper pour sentir sa propre force et l'émancipation qui viendrait, inévitablement. Il sentait qu'il y avait autre chose que ces barrières de magie, quelque chose de plus profond, quelque chose de plus puissant dans son combat, quelque chose d'oublié, comme tout le reste. Il refusait sa captivité, il refusait les contraintes, l'asservissement à la couronne d'un autre. Il excrétait les chaînes, les barreaux d'une prison, le joug si régalien de cette figure contre laquelle il s'escrimait et qu'il avait aussi oublié. Il ne s'était pas entendu crier, à chaque coup qu'il donnait, lorsqu'il se débattait, la rage qu'il expulsait dans sa voix. Il n'était l'esclave de personne, le prisonnier de personne, le vassal de personne. Il était l'insoumis sous la cendre, la braise encore chaude à innocence immaculée de la lune. Le dernier coup porté lui offrit la délivrance et l'allégresse l’inonda d'une transe pleine de sens, porteuse de sa vérité, sa raison d'être. Il voulait être libre. La sensation d'étouffement factice s'évapora, le laissant à mi-chemin entre l'incompréhension et la révélation... Pourquoi était-ce en se battant avec cette Autre qu'il avait trouvé le soulagement alors qu'elle voulait lui imposer ses chaînes ?

    Plus doucement, timidement, le second vampire envoyé par Toryné ouvrit la porte, portant sur l'antique un regard plein de questions. Régalien, Aldaron n'y répondit pas et le soldat finit par formuler sa requête. L'épée retourna au fourreau et le nouveau-né obtempéra. Oui, au fond, c'était Toryné qui trimballait cette sphère qui parlait, avec lui. Il serait probablement le mieux placé pour lui expliquer ce que c'était que cette chose. Il ne tarda pas, l’équipage avait du l'entendre crier – ou peut-être pas – il ne voulait pas que cela rameute d'autres vampires. Il entra dan la cabine du cygne blanc et on referma la porte derrière lui. Ne pas avoir l'air affecté : il s'y échinait mais bien vite, la vue des tremblements vindicatifs dont souffrait la sphère  sur les genoux de Toryné ne tarda pas à le replonger dans ses craintes et ses questions. Ses mires verdoyantes se relevaient vers Toryné, les traits tirés dans une expression désolée : « Je vous demande pardon, Seigneur Dalis. Je ne voulais pas la réveiller... » Ses mains se nouaient l'une dans l'autre, perplexe et il baissait les yeux, troublé. « Comment s'y prend on pour l'endormir à nouveau ? » La question était naïve et pleine d'ignorance... Mais aussi grandement intéressée. Plus tôt cet être se tairait à nouveau, et plus tôt il pourrait retrouver son calme.

    Il se sentait fébrile, fragilisé par cette intrusion dont il ne savait pas quoi faire, à la fois curieux, extasié et profondément effrayé. « Qu'est-ce, exactement ? Elle n'arrête pas de me rebattre les oreilles, c'est insupportable. » avoua-t-il, perplexe et mal à l'aise. Il approchait doucement et venait mettre un genou à terre, devant et proche de celle qui était sa mère, les yeux ne quittant pas l’œuf qui remuait. Sa chevelure d'un blond platine rappelait à s'y méprendre celle de Toryné jadis, avant qu'il ne devienne roux. La vampirisation l'avait rendu plus pâle, sans que les cendres ne cessent de moucheter son teint et dans ses yeux d'émeraude, des éclats ambrés  pétillaient à présent d'une hétérochromie révélatrice. Ses doigts fins étaient dotés d'une grâce ferme, héritier Dalis à qui le découvrirait, lorsqu'ils vinrent se refermer en deux poings clos sur la robe immaculée de Toryné, aveu de son trouble et de sa supplique informulée.

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La petite dragonne avait eu un instant de panique en sentant à nouveau son univers s'agiter. Des mémoires fugaces d'un oeuf projeté contre des supports divers lui revenaient. En elle, elle hurla de terreur et de refus. Cela ne pouvait pas recommencer. Pas maintenant, alors qu'elle était prête à être sauvée, et forte. Par chance, tout cessa assez vite pour que son affolement n'aie pas raison de la sienne. Bipède-allié eut la bonne idée de lui transmettre les bonnes pensées, les plus rassurantes. Ainsi il était l'Origine de son Lié ? Oh ! Voilà qui renforçait sa confiance. Timidement, comme de loin, son esprit revint près du sien, se satisfaisant de ce contact, pour lui signifier qu'elle acceptait et reconnaissait le lien qui les unissait désormais : bipède-allié était de sa Nuée. Elle ferait attention à lui.

Ses cornes se remirent ensuite à frapper leur immaculé écrin. Quelque part, au creux de sa poitrine, au creux de son âme, pulsait une fureur viscérale. Une fureur si profonde qu'une seule âme ne suffisait à la contenir. Au fond d'eux vibrait avec force tout leur besoin de protection. Dans leur sang brûlait la soif de libération. Ils n'étaient pas semblables : ils étaient cette entièreté que pouvait représenter une véritable union. Les corps n'étaient que de primitives représentation de la fabuleuse entité qu'ils étaient. Une énergie primordiale guidait leurs coups, traversant leurs corps comme un second feu intérieur. Ils étaient cette violence qu'a la vie en arrachant à l'Univers le droit de se créer, ils étaient ce pouvoir supérieur qui étincelait sur les ailes des dragons quand le sol n'était qu'un vague habitant de leur Domaine. Ils...

Le combat cessa, du côté de Lié. Il avait réussi, seul. De lui émanait une émotion délicieuse, attrayante, inconnue à l'enfant des cieux et de la neige. Pourquoi ? Comment ? Comment avait-il pu réussir, et pas elle ? Ils devaient tout partager, même les victoires ! Nahui n'avait conçu ces dernières que de façon commune. Jamais l'un pour réussir sans l'autre. La situation était inacceptable et inconcevable. Impossible, même. Choquée, s'immobilisant un instant, la petite dragonne chercha à nouveau à faire réagir Lié. Contre le sien, son esprit venait réclamer. Elle voulait comprendre pourquoi elle était seule, et désemparée. Elle voulait qu'il vienne, et pas seulement physiquement. Qu'enfin il ose, lui aussi, faire un pas contre son esprit, l'observer pour ce qu'elle était. La distance qui les séparait échappait à sa compréhension. Etait-ce ceci, l'étrange monde des bipèdes qui lui avait été décrit comme si différent du leur ?

Le début de l'incroyable eut lieu. Lié s'était rapproché, physiquement. Elle le percevait. L'oeuf remua, à nouveau, de fortes vibrations passant dans les doigts de Bipède-Famille. Elle était là ! Juste ici ! Il ne pouvait pas la louper. Lié allait-il enfin l'accepter ? Qu'il soit nécessaire de la voir pour cela était une bizarrerie, mais elle était prête à passer outre cela. A nouveau elle s'élança vers lui, l'incitant à rester proche, lui partageant ses émotions pour lui montrer combien elles se ressemblaient : joie, extase, peur... Elle ne voulait pas qu'il parte. Elle ne voulait plus jamais être seule.

Un frisson la parcourut, du haut de sa nuque jusqu'à la pointe de sa queue, en entendant pour la première fois de sa voix un peu plus qu'un couinement de surprise. Comme une preuve irréfutable de sa présence. En elle, là où quelque chose palpitait, elle savait que ce ne pouvait être que lui, et nul autre. Et... Et il racontait n'importe quoi ! Ohlala ! Les bipèdes étaient-ils tous aussi immatures ? Vexée, outrée, Nahui envoya un grand coup de corne offensé contre sa coquille. Instinctivement, son esprit s'étendit tout autour d'elle, comme un cri à la cantonnade :

Dragon. Elle était un dragon. L'air, le feu, la force, la magie. Elle était la puissante enfant de ceux-là. Elle était de ceux qui ne se complétaient que par un bipède. Elle était forte, imbrisable. Par le passé, les coups l'avaient malmenée, encore, et encore... Et avec ces pensées vinrent une obscure émotion, venue de terres que les esprits craignaient. Les coups l'avaient malmené et, avec fierté, elle pouvait prétendre leur avoir fait face. Elle était la protection, l'invincible. Elle était la Liée de la voix qu'elle présenta, celle d'Aldaron. Celle qui allait le rapprocher des astres, sans qui il était dans l'oeuf, lui aussi. Et surtout, surtout, il n'était pas question qu'elle se rendorme ! Pas après tout ce temps. Elle l'avait attendu, si longuement. Elle présenta les neiges, elle présenta le feu, ces temps infinis où elle l'avait attendu.
Enfin, elle présenta sa seule envie, que nul n'aurait su arrêter : elle voulait naître. Personne ne l'en empêcherait, maintenant que sa raison de naître était à ses côtés. Mais elle voulait qu'il soit là, pour le moment où sa coquille se briserait.
Elle ignorait juste combien de temps cela lui prendrait.

[HRP : désolé du délai ! Toutes les infos du dernier paragraphe vous sont transmises par Nahui sous forme de concepts. Si souci, n'hésitez pas à venir m'agresser <3]

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L’attente lui parut être une éternité. Plusieurs fois, l’androgyne hésita à se lever pour aller chercher Aldaron lui-même, mais il ne voulait pas laisser l’œuf sans surveillance, ou plutôt sans SA surveillance. L’œuf s’agitait, comme un enfant dans le ventre de sa mère qui ne désirait qu’une chose, sortir et exister pleinement. Seulement, sans Aldaron, cela ne serait pas possible, pourquoi ses gardes prenaient ils autant de temps bon sang ?! Puis, comme si le destin désirait calmer son impatience, la porte s’ouvrait, son fils était enfin arrivé.

Toryné remarqua immédiatement le sentiment de détresse qu’éprouvait sa progéniture, le malheureux devait être complètement perdu. Un nouveau-né vampire n’était rien d’autre qu’un enfant dans un corps d’adulte, il devait tout réapprendre… Il imaginait déjà le lien comme quelque chose d’étrange à vivre même pour une personne en pleine possession de ses moyens, alors pour un jeune vampire qui devait déjà vivre nouveauté sur nouveauté depuis son éveil.

Devant les excuses de son enfant, l’androgyne ne put que sourire. Il était attendri par son enfant, comme il l’avait toujours été, surtout dans leur premier instant, l’innocence et la brutalité des nouveau-nés étaient toujours si… adorable. Cependant il y avait un certain sentiment de satisfaction qui se tapissait derrière cela, voir Aldaron à genoux devant lui, s’agrippant à sa robe, ce même Aldaron qui avait osé le mettre à la porte de sa demeure, qui lui avait volé une fille… mais cet Aldaron était mort et il le resterait. D’un geste lent et délicat, il passa sa main dans les cheveux blond platine du jeune vampire, qui lui rappelait avec les plaisirs en parti les siens avant sa transformation durant la grande bataille contre les chimères. Comme si son enfant avait hérité de sa chevelure en renaissant en créature de la nuit. « Tu n’as pas à t’excuser… tôt ou tard, cela aurait dû arriver, c’est moi qui suis désolé que tu ne sois pas encore prêt ». Sa voix était douce et se voulait la plus chaleureuse possible, voulant calmer le cendré pour ce qu’il allait suivre. « On ne peut hélas pas l’éteindre » ou du moins pas sans le tuer lui désormais, mais annoncé cela de manière aussi abrupt n’aurait que pour effet d’apeurer encore plus Aldaron, ce qui n’était pas le but recherché, bien au contraire. « Il s’agit d’un œuf de dragon, te souvient de ce que sont les dragons ? De grands reptiles dotés d’aile et de conscience, intrinsèquement liés à la magie et à la vie. » Il passa sous le silence le fait qu’ils étaient tous égocentrique, cracheur de feu et que la moitié était des nuisances et il évita également d’envoyer quelconque idée semblable à l’œuf, qui ne ferait pas parti de cette catégorie de saurien.

Toryné voulut continuer dans son entreprise de calmer son enfant, mais la dragonne en devenir semblait s’impatienter. Un torrent de pensée vint les assaillir, la dragonne se présentait comme ce qu’elle se percevait, la plus puissante des dragonnes, la liée d’Aldaron, mais également ce qu’elle semblait avoir traversé, la peur, la souffrance… Mais cela l’avait renforcé aussi bien dans sa fierté que dans sa psychée, c’était une saurienne robuste qui allait naître, Toryné pouvait le sentir.

-L’entends-tu ? Ou plutôt, la sens-tu ? Elle s’adresse à nous par la pensée, elle t’appelle de tout son être, mais tu dois comprendre que cela n’est pas quelque chose de mal. Le destin en a voulu ainsi. Elle ne pourra naître sans toi, car elle est née pour être avec toi. Sa deuxième main vint de poser, toujours avec la même douceur sur la joue d’Aldaron. Tu ne l’as connais pas encore et elle non plus ne te connaît pas, cela peut sembler injuste, je le sais, tu n’as pas choisi ce lien si particulier, mais tu dois le sentir en toi, elle est une part de toi. Et cette part de toi doit naître pleinement. Cependant, tu n’as pas à être seul dans cette épreuve, je suis là.

Ses mains quittèrent la chevelure et la joue de l’antique pour revenir sur l’œuf, le rapprochant légèrement d’Aldaron « Tu n’as rien à craindre, veux-tu essayer de retoucher l’œuf ? ». Toryné n’y connaissait pas grand-chose en éclosion de dragon lié, mais peut-être fallait-il un contact prolongé pour que l’éclosion, ou du moins le facilité et avec cela, l’acceptation ?

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    Le nouveau-né ne chercha pas à refuser la main dans ses cheveux. Elle était douce et tendre comme celle d’une mère qu’il n’avait pas eue et dans l’instant de détresse, elle était un réconfort bienvenue. Il ne savait pas vraiment d’où lui était venu sa confiance envers Toryné, elle n’avait pas mis bien longtemps à naître, bourgeonnant par surprise jusqu’à éclore comme une rose en ce moment fatidique. Égaré, il avait besoin d’une ancre bienveillante et ses mires d’émeraude agrippaient à celles de son vis-à-vis, en quête d’une solution miracle à ce qu’il traversait… Ou au moins l’aide et le soutien qu’il réclamait de son regard alarmé. La fatalité tombait comme un couperet que la main du parangon retenait pour qu’elle s’écrase avec une moindre violence. Mais mot après mot, s’il avait encore eu un souffle de vie, il aurait été coupé. Tôt ou tard cela se serait produit ? Était-ce si inéluctable ? Prêt pour quoi ? Il ne comprenait pas.

    Ses lèvres s’ouvraient en tremblant, les questions sur le bout de la langue et pourtant, elle refluaient dans sa gorge pour la nouer. Parole après parole, Toryné lui révélait des faits qu’en son for intérieur, il connaissait. Cela n’avait rien d’une évidence, mais il avait le sentiment que cette vérité était gravée en lui aussi sûr que la nuit était noire. Ce qu’on lui annoncé, il le savait et l’ignorait à la fois, si bien qu’il ne sut, à aucun instant, remettre en cause ce qu’on lui disait, car il était déjà persuadé qu’il s’agissait de mots sincères. C’était vrai : on ne pouvait pas l’éteindre. On en pouvait pas la faire dormir à nouveau. Si c’était un œuf de dragon à poindre, il se souvenait de sa propre naissance, vorace, en quête d’existence et de sensations, d’une brutalité impossible à restreindre, à contrôler. Il avait voulu être de ce monde et il comprenait assez facilement que cette être qu’il avait éveillé par erreur, ne puisse être remise à nouveau en stase.

    Quant aux dragons ? Non, il ne se souvenait pas. Il ne se souvenait de rien avant sa naissance. Et pourtant, tant de personnes lui demandaient s’il se souvenait d’avant. N’était-ce pas illogique ? Comment pouvait-il se souvenir de ce qu'il n'avait vécu ? Il n’avait connu que le navire d’Ivanyr, l’océan profond, ainsi que les capitales de Caladon et de Sélénia. L’une de ces créatures qu’on appelait dragon avait survolé la Capitale de l’Empire. Il avait appris que le Kohan était un dragonnier. Il se souvenait avoir été effrayé par cette créature aussi hideuse qu’immense, pleine de crocs et d’écailles améthystes tranchantes, recouvertes d’une armure métallique destinée rendre encore plus invulnérable, plus puissant. Il avait été épouvanté par cette créature titanesque mais d’aucun, parmi les Séléniens, ne semblait avoir connu le même effroi que lui à son passage. Il en avait conclu que leur apparence prédatrice ne devait pas refléter leur véritable nature.

    Il n’avait néanmoins pas plus approché cette créature, pour mieux la connaître. Il fallait dire qu’il avait déjà assez à gérer avec ses propres repas, que ses sorties avaient été restreintes et le dragon bien trop inaccessible pour un vampire caché sous une cape en train d’explorer anonymement les villes pendant une heure tout au plus, à chaque fois. Les mots de Toryné ne firent heureusement que l’apaiser. Mais plus que ses mots, c’était son ton et l’attitude qu’il avait à son égard qui l’aidaient à accepter l’idée, possible, que ces créatures ne soient pas destructrices. Le parangon cherchait à le calmer, cela n’aurait pas été faire honneur à ses efforts que de paniquer. Alors il s’accrochait à son calme et acquiesçait d’un signe de tête, pour répondre, vif, jusqu’à ce qu’une nouvelle flopée d’émotions le vienne l’assaillir. Il ferma les yeux, serrant les poings et les paupières pour la rejeter. Mais une fois de plus, il en était incapable.

    Il se sentait affreusement faible, piétinant dans sa propre psyché qu’il savait pourtant très solide. Pourquoi ne parvenait-il pas à l'affronter alors qu'il savait si bien le faire contre d'autres ennemis ? L'impulsion sanguine marquait ses yeux, lorsqu'il les ouvrait à nouveau, d'une voracité prédatrice, cruelle et en colère. Il s'apprêtait à cracher son venin lorsque la main de Toryné coula sur sa joue, avec cette infinie tendresse qui lui fit ranger ses crocs saillants immédiatement. Non pas qu'il craigne de le blesser, mais le spirite du Monarque savait le captiver et l’entraîner sur des chemins moins virulents. Ainsi donc il n'était pas le seul à l'entendre. Cela le soulageait. D'un geste instinctif, sa joue venait rechercher le contact glacé de la main maternelle, s'y pressant légèrement, pour se rassurer. Le réconfort était maigre, mais il le prenait. Que n'aurait-il donné pour annuler ce qu'il avait fait ?

    Lorsqu'on approcha l’œuf de lui, son buste recula d'autant, comme s'il cherchait à garder cette distance de sécurité qu'il jugeait nécessaire. Perplexe, ses yeux verdoyants se redressaient vers les prunelles de Toryné, pour se laisser volontairement happer, se noyer dans sa bienveillance. Cet homme à la chevelure flamboyante ne pouvait pas lui vouloir du mal. Il ne pouvait pas lui jouer un mauvais tour. Ivanyr lui ferait payer bien trop chèrement. Et puis, il y avait ce quelque chose d’indéfinissable qui avait gravé un ersatz de confiance sincère en lui, sans qu'il ne sache pourquoi. Ses mires descendaient à nouveau sur l’œuf qu'on lui tendait et son buste revenait lentement à sa position initiale alors que ses mains se levaient et qu'il effleurait du bout des doigts la coquille singulière.

    Son esprit se tournait vers cette chose, puis se tendait, pour une fois, vers elle, comme pour l'accueillir timidement. Elle voulait naître. La coquille avait une fissure fine sur sa surface... « Je vais t'aider... » souffla-t-il du bout des lèvres, sans savoir si la chose pouvait l'entendre dans sa coquille. Il sentit sa peur, à elle... Elle que lui-même craignait tant et il se surprit à ressentir de la compassion, son esprit venant envelopper le sien alors qu'il sortait un poignard finement gravé en langue Tarenth de son fourreau. Il passa la lame sur la maigre fissure et essaya en vain d'y introduire sa lame, tout en berçant l'esprit draconique qui n'aimait pas trop ça. Mais la coquille était très résistante et il abandonna bien vite... D'autant plus que la peur qu'il sentait vibrer en elle de façon empathique ne l'aidait par beaucoup à poursuivre.

    Il abaissa l'arme, cherchant de l'aide, ou au moins du soutien, dans le regard du parangon, avant d'enfiler l'un de ses gants d'archer en peau de dragon et de défaire son épée. Protégé de la coupure par le matériau robuste de ses gants, il étreignait la lame, à même la main et fit lentement pulser la magie dans l’extrémité de la lame. La magie était très fluctuante, parfois inattendue depuis l'explosion du Baôli, il ne voulait pas risquer une mauvaise manœuvre... Mais contrairement à la grande majorité de la population, Aldaron n'avait pas connu cette ancienne magie dont tous parlaient. Il ne faisait pas d'erreur, ne comparait pas, puisqu'il n'avait connu que l'actuelle. Chaque fois qu'il essayait de l'utiliser, elle lui était plus fluide que pour d'autres, plus instinctive, là où les mages de Tiamaranta essayaient de se focaliser sur les sorts qu'ils avaient toujours appris.

    « Tiendriez-vous l’œuf, je vous prie ? » Demanda-t-il à l'âme bienveillante qui l'accompagnait. L'énergie pure pulsa du bout de la lame alors qu'il l'approchait de la coquille pour en racler une bonne épaisseur sur le dessus. « Calme-toi... » souffla-t-il plusieurs fois, de façon à la fois sèche et sincère. Il se voulait pragmatique sans pour autant la rabrouer. Si elle voulait sortir de là, elle allait devoir lui faire confiance... Et si elle arrivait à surmonter cette peur, peut-être tâcherait-il de se montrer ouvert à son tour. Se focaliser sur l'ouvrage l'aidait à ne pas paniquer. Fatigué par la magie, il reposa l'épée au sol et retira son gant pour observer le résultat. La coquille était très épaisse, trop épaisse, mais il avait réussi à percer un trou par lequel une narine pulsait sa respiration. Les fines écailles étaient d'un bleu glacé que le nouveau-né observait avec la curiosité d'un enfant.

    Approchant ses doigts fins et cendrés, il put sentir la respiration hâtive de la saurienne. « Nahui. » C'était son nom. Le nom de la dragonne.« Tu devrais reculer pour que je... Que j’essaie de briser cette... Ce... » Il secoua la tête de gauche à droite. Comment faisaient les dragonnets pour parvenir une coquille si épaisse ? Ils devaient être puissants... A moins qu'ils ne comptent sur une aide extérieure à chaque fois ? Introduisant un doigt dans la fragilité, il usa de sa force vampirique pour éclater un autre morceau, non sans forcer. Il eut à peine un éclat. La dragonne s'agitait à l'intérieur : l'antique ne doutait pas qu'elle y mettait tout son cœur à l'ouvrage, mais que celui-ci n'était pas des moindres.

    Combien de temps cela dura ? Plusieurs minutes c'était certain. Il se focalisait sur ce qu'il faisait pour ne pas partir en courant, l'angoisse grandissant dans sa poitrine, un peu plus à chaque instant. Il ne parvenait qu'à retirer de maigres éclats, mais lorsque son action se combinait à celle de Nahui et de Toryné, les résultats étaient plus probants. Jusqu'à ce qu'enfin, la dragonne puisse sortir une tête et déployer ses puissantes ailes pour broyer le reste de la somptueuse coquille.

    Et il resta à l'observer, à la fois contemplatif et effrayé, tel un enfant qui découvrait cela pour la première fois. Il se sentait intimement liée à elle... Peut-être d'une façon à la fois similaire et différente à ce qu'il avait ressenti avec Ivanyr et même... Toryné dans une moindre mesure. Comme s'il présentait qu'il y avait quelque chose de fort derrière son ignorance et son oubli. Quelque chose d'indéfinissable. Et puis il releva un regard complètement paniqué vers Toryné. Cette fois ça y était, il était terrorisé.

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Peur. Peur. Une peur profonde, aussi ancrée en elle que la magie qui la composait. Peur. Elle le transmit à son Lié, instinctivement, la créature vivante qu'elle était cherchant à se protéger. Peur... Elle lui rappela, brièvement, à lui qui n'avait pas vécu cela : les Horreurs avaient voulu ouvrir son oeuf, elles avaient aussi essayé comme lui le faisait. Ces vibrations dans sa coquille lui rappelaient cet instant, où elle avait dû se protéger. Elle lui présenta la douleur iradiant dans son chanfrein, et la féroce motivation qui l'avait poussée à étendre la magie en elle. Aldaron put reconnaître en elle ce sentiment qui le désignait : Lié. Elle avait tenu pour lui. Elle avait tenu en pensant à lui. Car naître sans lui n'avait pas de sens. Aussi peu de sens que ces Horreurs.

Elle avait peur, mais elle comprenait. Elle voulait juste que lui comprenne aussi. Elle acceptait parce que c'était lui. L'oeuf avait cessé ces soubresauts étranges qui avaient indiqué le combat y faisant rage. Occupée à contenir sa terreur, l'Invincible ne bougeait plus. Quelque part, au fond d'elle, comme le magma dans le volcan, cette magie qui l'avait protégée était prête à jaillir.
La première tentative se solda par une sorte d'échec. Inquiète, l'enfant des neiges se demanda si Lié avait cessé suite à sa peur. Son esprit se blottit un peu plus contre le sien, lui murmurant que lui, il pouvait, comme pour l'encourager. Puis une sorte de fierté la rattrapa, et elle ajouta bien vite qu'il ne devait pas tout faire : c'était un ouvrage qu'ils se devaient de réaliser à deux.

De l'énergie irradia de l'extérieur. Magie ! Elle reconnaissait cela ! C'était... C'était comme elle ! Ça, elle voulait bien. Cela ne pouvait lui faire de mal. Pas comme ces éléments contre-natures qui émanaient des Abominations. Comment allait réagir la magie vis-à-vis de sa coquille ? Ne risquait-elle pas de la renforcer, puisqu'elles étaient semblables ? La peur et l'excitation faisaient de la dragonne l'épicentre d'un tourbillon d'énergie et de pensées primitives. Plusieurs injonctions au calme furent nécessaires à ce qu'elle considère de s'apaiser... Et cela ne donna jamais que l'image d'un chaos contenu.

Toute recroquevillée dans sa coquille qu'elle était, brimée dans sa liberté, elle senti le début de la fragilité. Remuant, elle orienta son petit museau vers ladite fragilité, cherchant à la tâter. Alors, son petit museau découvrit, pour la première fois, l'air extérieur. Elle y prit sa première inspiration, dilatant ses poumons, découvrant le passage d'un flux frais dans son visage, son cou, et son torse. Elle resta ainsi, savourant, profitant de cette toute petite fenere qui lui avait demandée tant d'efforts, comme s'il s'agissait là de l'aboutissement de sa quête. C'est que ses violents coups de corne avaient été épuisants !

Nahui. Elle reconnut le son, et ce fut le premier mot qu'elle associa à un concept draconique. Nahui, c'était son nom, chez les bipèdes. C'était beau ! Comme elle. Elle appréciait cela. Toute à son contentement et sa fatigue, elle n'opposa aucune résistance à la demande de Lié, se contentant de se recroqueviller à nouveau dans son oeuf. Ce faisant, elle réalisa l'épaisseur de la coquille qui l'avait protégée. Oh. Elle n'y avait pas été de patte morte. Peut-être en garderait-elle un morceau, pour épâter les autres dragons. La manipulation de son Lié, si maladroite fut-elle, fut vite comprise par Nahui. Elle voulut l'aider, fragiliser la coquille, en donannt des coups de cornes un peu plus loin, en cherchant à se déployer pour forcer depuis l'intérieur.

Le combat fut long, méthodique, laborieux. Ils oeuvraient ensemble face à un adversaire redoutable, créé par la dragonne elle-même. De temps en temps, elle s'arrêtait, reprenant son souffle et ses forces. Puis vint enfin le moment ; ce moment où, dans un craquement, une fissure plus long que les autres permit à Nahui de s'extirper de sa coquille, en ondulant, en jouant de ses pattes et de ses ailes. Ses muscles se détendirent enfin, et elle put découvrir l'amplitude de ses articulations... Un peu malgré elle. Ses premiers pas sur la terre ferme étaient malhabiles, peu assurés. Elle tremblait, un peu. Sa longue queue trainait mollement derrière elle, agitée de temps en temps par les nerfs et l'émotion. Ses ailes s'étendirent, battirent les airs, se délectant de la fraîcheur qui venait contre leur membrane. Sa petite tête découvrit, autour d'elle, les premières visions de ce monde. À moins qu'elle n'ait besoin d'yeux pour cela ? Elle peinait à concevoir pleinement de quelle sens il s'agissait. Mais la magie lui apparaissait très clairement. Elle la voyait pulser dans celui dont l'aura était celle de Bipède-allié, et dans Lié. C'était merveilleux. Tout était merveilleux. Être libre était merveilleux. Elle alalit pouvoir commencer à découvrir le monde, vivre de folles aventures, apprécier par ses sens ce qu'elle n'avait alors connu que par la mémoire de ses ancêtres !
Mais demain. Là, elle était un peu fatiguée. Une sensation étrange habitait son ventre. Elle la transmit à Lié. Elle avait faim, pour la première fois. Son petit corps réclamait de quoi faire brûler son feu. Sa tête se laissa glisser contre le sol, et sur le pied de Lié, et ses ailes tombèrent mollement contre ses flancs. Elle était Nahui, elle était l'invincible, elle était née avec brio, et elle avait sacrément besoin de repos.

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Toryné tenait l’œuf fermement pendant qu’Aldaron aidait son dragon lié à briser la coquille, une entreprise dès plus ardu, mais qui montrait que le jeune vampire était prêt à faire un grand pas en avant dans ce lien nouveau. La coquille respectait l’image qu’il s’en était fait, une solidité difficilement égalable et celle-ci semblait encore plus résistante. Aldaron prononça ce qui semblait être le nom de la dragonne, « Nahui ». Comment cela fonctionnait-il ? Tous les dragons naissaient-ils avec un nom prédéterminé ? Jamais les parents ne le choisissaient ? Etait-ce le fruit d’une longue réflexion le temps que le dragon sorte de son œuf ou était-ce instinctif ? En y réfléchissant, cela n’était pas si différent de certains bipèdes, sa mère avait toujours nommé ses enfants d’une manière assez instinctive… Toryné avait été la première chose qu’il avait chose entendu en naissant, peut-être était-ce similaire pour les dragons, leur nom était le premier mot qu’il entendait dans leur esprit.

Dans sa réflexion, le temps ne lui parût pas si long pour finalement briser la coquille, il aidait comme il le pouvait son enfant, orientant l’œuf et conseillant sur où et comment « attaquer » la coquille. Finalement, un craquement prometteur vint mettre à terme cela. Comprenant que désormais la dragonne allait pouvoir sortir, Toryné se pencha et sol et posa l’œuf, afin que ce soit sur le sol que la saurienne fasse ses premiers pas et non sur sa robe, malgré la résistance de cette dernière le vampire préférait éviter toute griffe dessus. La créature avait des écailles qui lui faisaient à des plaques d’armures, elle n’était pas très esthétique, mais aucun dragon ne l’était vraiment, ils n’étaient pas là pour ça. La nouvelle née, sembla les regarder, mais… il y avait quelque chose d’étrange dans son regard, une chose dont Toryné n’arrivait pas encore à comprendre, comme si la dragonne ne les regardait pas comme elle le devrait. Et non pas d’une manière symbolique, il avait véritablement cette impression qu’elle s’y prenait mal, mais comment pouvait-on ne pas savoir regarder quelqu’un. Elle fit quelque pas, avant de laisser tomber sa tête sur l’un des pieds d’Aldaron, elle devait être épuisée, mais aussi affamée. Qu’il soit humain, vampire, elfe ou dragon, tous nouveau-nés à faim en naissant. Dans d’autres circonstances, un bateau de vampire n’aurait rien à donner à manger à une créature vivante, les Shedims étant encore trop peu nombreux, cependant Toryné avait ses affaires avec lui et l’androgyne avait une fille adoptive humaine, il avait donc quelque stock de viande dans ses bagages.

Il était au point de se lever pour demander aux gardes de faction à sa porte d’aller lui chercher de quoi nourrir la jeune dragonne, mais le regard tétanisé d’Aldaron l’arrêta. L’éclosion semblait avoir réveillé les peurs et les possibles doutent de l’antique et la dragonne assoupie sur ses pieds ne devait en rien l’aider en cela. La situation était en soit ironique, beaucoup vendrait amies et familles pour avoir la chance de devenir dragonnier, bien que ce statut, aujourd’hui, allait sûrement connaître une évolution suite aux récentes révélations qui avait suivi la défaite des chimères.

Toryné se leva, adressant un sourire chaleureux à sa progéniture, il se pencha pour ramasser la plus grosse partie de l’œuf intacte et mit les plus petits morceaux à l’intérieur. Il se dirigea ensuite une commode dans laquelle il sortit un grand morceau de tissu. Il enveloppa l’œuf dans le tissu et repose le tous dans la commode. « Tu as réussi Aldaron » Bon sang qu’il n’aimait pas ce nom, il lui rappelait trop cet elfe vaniteux et provocateur. « Nahui est née ». L’androgyne revient rapidement vers lui, se rasseyant devant lui et prenant ses deux mains dans les siennes.

-Il n’y a aucune raison d’avoir peur, le plus difficile est passé. Regarde-la, elle n’est pas bien dangereuse assoupie sur ton pied. Il va y avoir un certain temps d’habituation bien entendu… Achroma pourra t’aider, il a été dragonnier lui-même fut un temps. Il était d’ailleurs curieux de voir la réaction de l’aîné, à une distance raisonnable bien sûr. Vous allez apprendre à vous connaître, étape par étape… Mais d’abord nous allons devoir nous occuper d’elle, elle encore jeune et fragile et de par mon expérience avec les nouveau-nés, il va falloir la nourrir. Je vais demander à mes gardes de nous ramener le nécessaire, d’accord ? Ne bouge pas.

Toryné se leva de nouveau, prenant avec lui la jeune dragonne dans ses bras, l’éloigner d’Aldaron, même un brève instant, lui permettrait de souffler un peu. Toryné entrouvrit la porte, faisant en sorte que la dragonne ne soit pas vue par ses subalternes.

-Que l’un d’entre vous aille me chercher dans la cale une caisse avec l’inscription « Pharianth », merci bien mes braves, je me souviendrais de vos loyaux services une fois que nous aurons débarqué soyez en sûr. Le ton plus enjoué de leur maître était plus rassurant que celui employé auparavant et cette fois-ci la tâche était disons… bien moins délicate.

Il referma la porte d’un coup de talon, gardant ses deux bras occupé à légèrement bercer la dragonne, réflexe maternel qu’il avait eu en éduquant une enfant humaine. Il ne s’en rendait presque pas compte. « As-tu faim toi aussi ? La bouteille de sang que j’avais prévue pour ta visite aujourd’hui n’est pas encore vide si tu le souhaites ». Le verre qui lui était destiné était encore sur son bureau, au côté de la bouteille, dont près de la moitié avec déjà été bu. Ce détail l’avait d’ailleurs surpris, en temps normal Toryné était un vampire très gourmand, buvant plus de sang que ses congénères, pourtant cette fois, une demi bouteille, rien de plus, il s’était senti repu bien plus rapidement qu’à l’accoutumer et surtout, pas autant satisfait. Cependant, pour le moment, ses problèmes de fringale n’étaient pas sa priorité, il avait une jeune dragonne et un jeune vampire à s’occuper.

-Puis-je m’approcher avec Nahui, Aldaron ? Demanda-t-il. Il était important de ne pas provoquer plus de stress que de nécessaire, surtout avec un très jeune vampire, dont les instincts sauvages n’étaient pas encore contenus. Sintharia avait été une enfant assez agité, la présence d’une nouveau-née humaine durant son enfance n’ayant pas aidé à cela, une véritable sucrerie pour un vampire affamé. Il avait dû à mainte reprise l’attacher et enfermer pour éviter tout accident regrettable. Cependant, il n’avait pas ce luxe avec Aldaron, non seulement, il ne pourrait pas véritablement l’éduquer selon son bon vouloir, mais en plus aller expliquer à Achroma pourquoi il avait attaché son inséparable ne semblait pas être le meilleur moyen de garder des relations saines entre les différents clans du triumvirat. Aldaron nécessitait donc une approche plus subtil, cette fois-ci l’épreuve ne serait pas une enfant humaine, mais une dragonne.

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    S'il avait eu un cœur encore en état de marche, il aurait battu à tout rompre dans son poitrine. La chose venait de se coucher, la tête sur son pied. S'il le retirait, peut-être que cette dragonne allait lui manger. Il en resta pétrifié et ce fut probablement ce qui l'aida, malgré lui, à rester sur place et ne pas partir en courant. Cela d'autant plus que la blanche créature lui indiquait qu'elle avait faim. Il n'avait vraiment pas envie que son pied passe à l'as. Orienter son regard apeuré vers Toryné était encore la seule chose qui lui restait à faire et fort heureusement le vampire avait le charisme suffisant pour accrocher son attention fermement à lui. Réussi ? Il ne savait pas qui c'était une réussite. La petite était née, mais lui, il avait peur des dragons. Le seul qu'il ait vu survoler Sélénia l'avait figé de peur. Nahui était encore petite, mais elle grandirait, elle lui avait promis et il n'en doutait pas. Il lui laissa ses mains tremblantes, les doigts déchirés par les plaies causes par la coquille épaisse. Ses blessures se refermaient lentement, tant par sa régénération naturelle de vampire que par les enchantements de ses équipements qui s'abreuvaient de sa propre peur pour le soigner. Ivanyr avait été dragonnier ? Voilà un point qu'il avait ignoré jusqu'alors... Et pour être exact, ce ne serait pas le dernier qu'il découvrirait. Ce monde était rempli de tant d'inconnues et d’inconnus que c'était à se demander s'il pourrait vraiment assimiler tout ce qui pouvait exister. Il avait la sensation de tomber des nues à chaque découverte... Le pire étant probablement de croiser le regard de ceux qui avait connu et adulé Aldaron, comme le maître d'une secte qu'on appelait... Marché Noir ? C'était très inquiétant et ce n'était pas le seul soucis dans cet elfe qu'il fut avant de mourir. En vérité, s'il y avait quelque chose qu'il craignait encore plus que Nahui, c'était ce qu'il avait été avant d'être un vampire.

    Toryné s'en allait réclamer de la nourriture pour la jeune dragonne, l'emportant avec lui comme une mère aurait bercé son enfant, sans l'abandonner. L'Ast, lui, était soulagé : « Je ne bois pas de sang... Merci. » souffla-t-il en réponse. Il en buvait, bien sûr, de temps à autre, mais en dernier recours, lorsqu'il n'avait rien d'autres sous la main. Le goût du sang lui évoquait quelque chose de très malaisant qui le déstabilisait sans qu'il ne sache pourquoi. Il n'aimait simplement pas cela et fort heureusement, il pouvait se nourrir de rêves. Que se passerait-il s'il mangeait les rêves de sa dragonne ? Serait-elle en colère ? Est-ce que ça la blesserait ? Il se souvenait d'Artane et de son crane explosé. Il avait été le premier repas du nouveau-né vampirique, et l'excès de sa violence, toujours décuplée au premier repas, avait poussé l'humain à la folie et celui-ci s'était frappé violemment le crane contre un mur, à plusieurs reprises, jusqu'à en mourir. Il avait beau être craintif vis-à-vis de Nahui, il n'avait pas envie de la voir mourir. Cette seule idée lui étreignait le cœur d'une poignante tristesse. Pourquoi ? Il se releva et s'adossa contre un mur, pas certain de tenir longtemps debout dans le cas contraire. Il ferma les yeux pour ce recentrer et retrouver ses esprits. Il essayait de rationaliser ce qui venait de se passer : il était un dragonnier et il ne savait pas s'il devait s'en réjouir ou en pleurer. Il ouvrit les yeux sur Toryné lorsqu'il lui demanda s'il pouvait approcher de nouveau avec la dragonne. L'antique acquiesça d'un bref signe de tête, pas vraiment assuré pour autant mais la présence du parangon le rassurait. « Je ne suis pas Aldaron... » murmura-t-il lorsque le spirite roux fut assez près de lui. A l'approche de Nahui, il leva une main, délicatement, sans savoir s'il devait toucher le crâne écailleux de l'endormie.

    « Vous n'êtes pas le seul à m'appeler ainsi, néanmoins. Je ne vous en veux pas mais je... Il est mort pour que je naisse. Je ne sais pas si j'ai envie d'être sa continuité ou autre chose et dans le doute, je préfère ne pas m'enfermer dans son rôle, vous comprenez... ? » Il posa un index délicat sur le front de l'écailleuse. Elle était si petite, si fragile. Toryné avait raison. « Vous étiez là, lorsqu'il est mort. Ivanyr m'a dit que vous étiez présent pour me protéger pendant la bataille. » Il n'y avait pas de reproche dans sa voix, seul demeurait le fait que Toryné n'avait pas à croire qu'il était Aldaron puisque celui-ci état mort sous ses yeux.Ses doigts remontaient lentement, dans le sens des écailles, jusque dans le dos épineux de la petite chose, parlant pour s'occuper l'esprit : « Vous avez aussi vu l'humaine mettre en pièces mon père. » Cette fois-ci, il y avait des éclats de tristesse et de rancœur dans sa voix. La situation ne lui plaisait pas. Il comprenait tout à fait que la chimère ait du être détruite mais une part de lui aurait voulu avoir ce père à ses côtés. Ivanyr avait été d'un soutien incomparable, lors de sa naissance... mais il n'était ni un père ni une mère. « J'aurais aimé qu'il survive pour être près de moi, comme vous l'êtes aujourd'hui. » Même s'il avait le pré-sentiment qu'Ivanyr l'aurait tué si ça n'avait pas été l'humaine. Il divaguait ? Il devait au moins en avoir l'air aussi se mit-il en tête de corriger cela : « Je vous dis cela parce que... Nahui m'a dit que vous n'avez présenté comme votre fils et je... J'en suis touché. » Même s'il savait que cela ne pouvait pas être vraiment le cas, car, comme il l'avait dit, son père avait été tué. Aussi être le fils de cœur d'un autre lui convenait tout autant. « Je serai heureux de vous appeler Mère, si vous me le permettez. » Il sautait le pas, quitte à se prendre un râteau, et il en faisait de même avec Nahui : il avait posé sa main sans trembler sur elle. Puis il détailla ses écailles en les détourant du bout des doigts.

    Il leva ses mires verdoyantes sur le parangon : « Vous n'êtes pas obligé d'accepter, Nahui a pu mal comprendre vos intentions ou mal interpréter. » Il s'écarta finalement pour s’assoie sur le sofa, ce fut à cet instant que les serviteurs entrèrent pour déposer une caisse dans la pièce avant de repartir : « Qu'est-ce ? » demanda-t-il une fois les sbires dehors.

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Nahui s'était laissée attraper sans souci par Origine-de-Lié. Il l'avait soutenue pendant sa naissance, elle pouvait lui faire confiance. Lié semblait ne pas davantage le considérer comme un danger. Bien. Mais serait-il un bon nid ? La petite laissa ses ailes et sa queue pendre mollement de part de d'autre des bras qui la portaient. Moui, c'était correct. Manquait un peu de gras pour le côté moëlleux. Du bon de l'esprit, mollement, elle proposa à Porteur de manger un peu plus. Elle n'insista pas, occupée à profiter du léger mouvement cyclique qu'il faisait. Un peu surprenant au début, elle avait cru tomber. Au final, cela avait quelque chose de rassurant. Pas mal, pas mal. Un nid relativement correct, mais qui pouvait s'améliorer.
Ce qui faisait vraiment toute sa qualité, c'était sa capacité à comprendre ses envies mieux qu'elle, et à appeler à eux la nourriture. Lorsqu'elle comprit cela, la petite passa un bout de langue avide sur ses babines, et envoya une bribe de reconnaissance à Porteur. Il faisait bien son travail. Elle ne l'oublierait pas, quand elle serait grande, et puissante ! Elle protesta, d'ailleurs, lorsqu'il fut question de sa fragilité. Ils avaient mal prononcé le concept de "invincible". Ahlala, ces bipèdes... Des créatures qui, même âgées, étaient encore si immatures qu'il fallait leur apprendre le plus évident. Elle avait de la chance que ces deux-là soient parmi les meilleurs de leur espèce.

Il fut question du nom de Lié. Cela perdit un peu la petite. Pas Aldaron ? Mais quoi, alors ? Du bout de l'esprit, elle lui envoya cette interrogation, sans se soucier qu'il soit encore en train de parler. Ses interrogations étaient plus importantes. De plus, Aldaron pouvait y répondre rapidement. Leurs esprits, ensemble, n'étaient qu'un. Elle les laissa à leurs histoires de paternité, de bataille, encore trop occupée à se remettre du bris de son imposante coquille pour s'y intéresser sincèrement. Ses côtes se soulevaient et s'affaissaient lentement, ses petites narines remuaient légèrement. La fatigue lui donnait l'air paisible. Elle appréciait pleinement les caresses le long de ses écailles, ce contact doux de son Lié, sa première marque d'affection. Moult marques de satisfaction, incitations à continuer, et petits battements de coeur reptilien, parvinrent à l'esprit d'Aldaron. Elle était contente, et rassurée, qu'il soit enfin près d'elle. Elle l'aimait, et elle le lui fit savoir, son esprit appuyé contre le sien. S'il pouvait juste éviter d'insinuer qu'elle comprenait mal ce que Porteur disait, cela serait parfait. Elle ne se trompait pas. Les dragons ne se trompaient pas quand ils lisaient dans l'esprit des gens. Bientôt, lui, il ne se tromperait plus non plus, s'il laissait sa part sauvage s'exprimer.

Les petites narines s'agitèrent un peu plus, se dilatant, frémissant. Odeur. Nourriture. Son instinct parla pour elle, tandis qu'elle se redressait, ravigorée, et bondissait depuis les bras pourtant hauts de Porteur. Ses pattes subirent un peu le choc, mais elle n'en avait cure. Nourriture. Elle suivit son odorat. La magie qu'elle sentait également devenait de plus en plus puissante. Elle n'en avait cure, ce n'était qu'une information parmi tant d'autres, et ce n'était pas celle qui l'intéressait. Aussi trottina-t-elle jusqu'à la caisse et, surtout, jusqu'à ce que son museau heurte le bois de plein fouet. Meh. Elle vérifia du bout de la langue. Ce n'était pas de la nourriture, ça. L'odeur était par là, pourtant. La petite voulut contourner le bois. Plusieurs fois, son petit museau rencontra ce dernier. Il lui fallut un peu plus d'un tour, avant d'oser tâter du bout du museau la hauteur de la caisse, et comprendre qu'elle correspondait à ce que sa perception de la magie lui disait. Oh, bien. Elle prit un peu son élan, avant de bondir et, dans un bruit bien organique, atterrir au milieu des divers bouts de viande, dans lesquels elle enfonça son museau et ses terribles crocs sans plus de distinction. Dans les esprits de Nid et Lié vint un fort sentiment de délectation et de soulagement, ainsi que la fierté d'avoir passé outre l'obstacle. N'était-elle pas la meilleure, n'était-elle pas la plus forte ?

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Il ne buvait pas de sang ? Il venait bien d’entendre cela d’un nouveau-né vampire ? Il n’y avait aucune légèreté dans cette phrase où d’expression sur le visage de l’antique qui indiquerait que ce qu’il venait d’entendre était une plaisanterie. Comment était-ce seulement possible ? Cependant, en y repensant, il n’avait pas beaucoup d’appétit depuis la bataille… Non, ce n’était pas son appétit qui avait changé, c’était le sang qui ne le satisfaisait plus autant… En revanche, il n’en était pas non plus à ne plus en consommer… Il devait garder un œil sur Aldaron, non seulement, il était de ses crocs, mais il semblait que ce fût un vampire assez atypique qui avait vu la nuit. Il poserait les questions sur ce sujet plus tard, c’était déjà beaucoup de choses aujourd’hui pour le nouveau-né.

Aldaron continua de parler, témoignant de son trouble entre ce qu’il était et ce qu’il avait été. Il n’avait pas connu ça, malgré la haine qu’il éprouvait pour elle, elle lui avait donné une nouvelle identité, une nouvelle vie, un nouveau… nom. Cela avait l’ais insignifiant, mais pourtant, il en prenait davantage conscience en écoutant son nouveau fils. Il n’avait pas changé le nom de Sintharia, il ne lui avait pas donné une nouvelle identité, du moins pas totalement. Elle avait gardé son nom, des liens avec son ancienne vie avec Pharianth… N’était-ce pas pour ça qu’elle s’était toujours montré aussi indocile ? Aussi éprise de liberté… Elle était restée une humaine dans le corps d’un vampire. Or l’humain, ou dans le cas précis, l’elfe, devait mourir pour que le vampire soit un être à part entière. Aldaron n’était qu’un engrais et son nouvel enfant serait une somptueuse fleur. Bien entendu, il y aurait toujours des traces de ce qu’avait été Aldaron, la principale étant Achroma, mais son devoir de mère serait que l’ancien bourgmestre ne « revienne » jamais.

Il fallait un nouveau nom, il fallait qu’Aldaron ne soit qu’un souvenir d’une époque révolue. L’antique semblait en plus enclin à aller vers lui de lui-même. Nahui avait rapporté ce qu’elle avait pu comprendre de leur conversation et de l’erreur qu’il avait fait en désignant son lié comme son enfant. Cependant, ce dernier avait interprété la chose comme il le fallait en y voyant une vision plus symbolique. Était-ce normal que tout se passent aussi facilement ? Il n’avait qu’à tendre les bras pour avoir son enfant et pouvoir être sa mère ouvertement sans risquer le courroux de l’aîné.

Il allait accepter la proposition de son enfant d’être sa mère de cœur lorsque ses serviteurs vinrent apporter une caisse rempli de viande diverse et varié. Bien, de quoi nourrir la saurienne. Cette nourriture était normalement pour sa fille, mais maintenant qu’il allait vivre sur le territoire humain il aurait moins de difficulté à se fournir, le coût d’importation en mois était déjà considérable. En l’observant cependant une chose était sûr, la dragonne était complètement aveugle… Même les sauriens pouvaient donc naître infirme ? Dans d’autres circonstances, Toryné aurait ri devant un tel spectacle, les dragons… cette race si injustement fière, eux aussi pouvaient naître faible comme un Homme ou un Elfe, seuls les vampires naissaient et demeuraient forts. Cependant cette petite créature aveugle était liée à son fils et si elle pourrait sans nul doute passer outre son handicap par la magie et ses autres sens, pour le moment elle était plus une faiblesse qu’un atout, un moyen de l’atteindre. La dragonne ne semblait en revanche ne pas manquer de ressource, elle parvint à se frayer son chemin jusqu’à la nourriture sans aucune aide extérieur.

L’avenir lui dirait que se donnerait cette étrange dualité entre l’antique et la saurienne aveugle, pour le moment, c’était l’avenir d’une mère et de son enfant qui l’intéressait.

-J’étais effectivement là le jour où tu es née. Malheureusement, ton père était possédé par un ennemi que nous avons défait. Il a été tué par une sauvage qui de sa haine à fait une justice aveugle et sanguinaire. Si elle l’avait pu, elle t’aurait tué également… Dans sa médiocrité, d’elle et des siens, elle a perdu Aldaron…Tu m’as dit que tu ne voulais pas t’enfermer dans son rôle et tu as raison. C’est comme tu l’as toi-même dit, il est mort pour que tu naisses, nous n’avons pas à vivre pour ceux qui ont disparus, tu n’as pas à être un elfe dont tu ne sais que les quelques récits qu’on a pu te dire. Tu es un vampire désormais, un fier membre du peuple de la nuit. Il se leva et alla se mettre devant son enfant. J’ai moi-même grandi sans le soutien et l’amour d’une mère, aucun vampire ne devrait être privé de l’amour de son géniteur. Lorsque j’ai vu ton père mourir, j’ai éprouvé une immense tristesse, je me suis senti proche de toi, je serais heureux de t’entendre m’appeler mère, car tu es pour moi un fils spirituel. Tu es née des cendres d’Aldaron devant moi, tu as rejoint le peuple de la nuit en ma présence. Il était… Cendre-Lune.

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    Nahui quitta les bras de Toryné, sous le regard mal assuré du nouveau né. Allait-elle à nouveau l'approcher ? Le chemin se faisait doucement vers l'acceptation, mais pour l'heure, son réflexe se constituait principalement de peur. Néanmoins, en la voyant se ruer vers la caisse, il comprit aisément ce qui avait bien pu la faire sortir de son repos. La cécité lui fit perdre du temps et à chaque mauvais coup, Aldaron se crispait, comme s'il était peiné de cet échec également. Il tentait de lui donner de meilleures indications, en passant par le dessus, par exemple, et pourtant, ses lèvres ne laissaient échapper aucun mot. Elle était curieuse, cette connexion. Elle ne lui était pas des plus intuitives, du moins pour le moment. Peut-être qu'avec le temps, il s'y habituerait. Sa satisfaction, une fois dans le tas de viande, lui arracha un sourire presque paternelle.

    L'Ast reposa son regard sur le parangon lorsque celui-ci reprit la parole. Il lui confirma avoir été présent le jour où il avait été mordu. A dire vrai, il l'interrogerait peut-être d'avantage, sur ce qui s'était passé sur le bateau. Ils avaient du temps avant que la Vagabonde n'arrive à Sélenia, ce qui leur laissait bien assez d'instants de discussion pour ne pas précipiter les choses. Il en apprenait déjà bien assez et il ne put retenir l'éclat de haine qui brilla dans ses yeux, au sujet de cette sauvage qui avait osé tuer son père. Toryné lui en parlait avec des mots si peu flatteurs qu'ils resteraient gravés dans le cœur du nouveau-né comme une rancœur tenace. Sa gorge se serrait... Alors, oui, plus tard, il l'interrogerait. Mais il ne se sentait pas de se lancer plus en avant dans ce sujet douloureux. Il préférait se trouver un parent, avant toute chose, sur lequel déverser son affection et par lequel combler ce vide formé trop injustement.

    Ce fut accepté, au grand soulagement du dragonnier, touché par son désir sincère de l'accompagner dans cette nouvelle existance et de lui donner, ce nom, Cendrelune, qu'il porterait avec fierté. Bien triste étaient l'abandon et la solitude mais la chaleur qui irradiait dans son torse comme un cœur battant les éloignait avec vigueur. Sa naissance n'avait pas été des plus simple, mais il savait qu'il avait véritablement beaucoup de chance. Il était entouré et accompagné. Il avait un époux Inséparable, une Liée draconique et une Mère. Il n'y avait, dans son cœur, plus qu'un vide étrange qu'il chercherait à combler plus tard. Il sentait qu'il avait aussi besoin d'enfants à chérir lui-même. Cette notion de famille vibrait en lui depuis la première fois qu'il en avait compris le sens. C'était pour lui une nécessité à présent.

    La gorge serré d'émotion, il prit les mains de sa Mère pour les embrasser chastement en s'inclinant devant lui, avec tout le respect qu'il lui devait. « Merci... » Lui, si doué avec les mots, si charismatique, il ne trouvait pas mieux à prononcer mais ce seul mot était accompagné d'une émotion vibrante, loyale et dévouée. Toryné avait sa profonde gratitude, c'était certain.

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