Connexion
-35%
Le deal à ne pas rater :
-35% sur la machine à café Expresso Delonghi La Specialista Arte
359.99 € 549.99 €
Voir le deal

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyA bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Les lettres tressautaient sur le parchemin. Littéralement. La jeune femme jura. Une tâche venait de se former alors que sa plume s'écrasait sous l'effet d'un nouveau tremblement. Agacée elle la laissa tomber sur son écritoire de voyage non sans faire la moue. Dans la carriole le valet et le diplomate qui l'accompagnaient s'échangeaient des regards discrets. Ils n'avaient pas eu besoin de mots pour s'accorder sur ce fait: l'acharnement de la Bourgmestre était délicat à commenter. L'un et l'autre semblait se demander qui aurait le courage d'élever la voix en premier. Le valet, droit comme un piquet n'osait faire un geste. Le diplomate qui était lui aussi attelé à son atelier d'écriture portable n'avait plus le courage de tremper sa plume dans l'encre à nouveau. Ils pesaient les risques, les pour, les contres dans une attente interminable. Après tout il faudrait bien que quelqu'un prenne l'initiative d'aborder le sujet, n'est ce pas? Mais les réprimandes auxquelles le conseiller Aaron avait fait face après une réflexion de ce type avaient fait le tour de tout le palais. Tous connaissaient le caractère de feu de la demoiselle. Alors lui rappeler sa faiblesse la plus apparente paraissait extrêmement risqué en ce moment même.


Mais voici que cette dernière soupirait en désignant son écritoire. "Auriez vous l’obligeance de me débarrasser de ceci?" Soulagé que ce soit sa maîtresse qui brise enfin la tension, l'homme à tout faire précipita ses mains gantées vers le matériel d'écriture. Le diplomate ne pipa mot et fit mine de regarder le paysage défiler de façon distraite. La prise de risque très peu pour lui. "Après tout il a toujours été particulièrement ardu de rendre quoique ce soit de propre dans ce moyen de transport..." Une goutte de sueur perla dans son cou.  "N'ai-je pas raison, monsieur?" Il tourna la tête avec un sourire crispé. Qu'est ce qu'il avait bien pu faire pour mériter ça? Il avait été le parfait caladonnien. Fils de pêcheurs il avait traverse l'océan  les larmes dans les yeux des mois durant. Que fut son soulagement devoir ses terre promises a l'horizon... Il adopta le mode de vie caladonnien, travailla d'arrache pied pour arriver be serait ce qu'à la cheville de cette jeunette et pour quoi ? Finir sur une histoire de bras ? Ce voyage était censé projeter sa carrière pas y mettre fin aussi subitement...Il jeta un bref coup d'oeil au parchemin brouillon maculé d'une écriture tremblante, indécise, digne d'un enfant en bas age. Était-ce de la mauvaise foi ou s'amusait-elle à le déstabiliser intentionnellement? Pendant un instant l'idée que ce voyage était institué dans le but de le mettre à l'épreuve émergea dans son esprit. Il aurait bien échafaudé d'autre théorie du complots à son égard mais devant l'insistance du regard de sa supérieur il n'avait pas d'autres choix que de répondre"Bien...j'évite toujours, personnellement, de rédiger des missives trop importantes lorsque je ne suis pas sur un véritable bureau..." Il s'était bien rattrapé, il pouvait souffler. Pourtant s'il savait...

Eleonnora détestait ce regard qu'on lui portait. En dehors des discours et des grandes occasions, sa blessure, son statut d'estropiée n'avait plus rien d'un trophée. Si ce n'était pas de l'ignorance feinte, c'était la pitié. Et il n'y avait pas plus intolérable. Ce crétin d'Aaron qui avait voulu lui assigner un scribe pour ses missives et notes personnelles. Pour réussir, il fallait s’entraîner, travailler! Cela partait d'un bon sentiment? Elle lui en donnerait des bons sentiments! On ne traite pas sa supérieure d'handicapée et encore moins la Bourgmestre de Caladon! S'il n'était pas aussi proche des affaires de son père adoptif, la demoiselle aurait abusé de son autorité pour lui dévoiler un aperçu de sa vie d'estropiée.
Il avait été le premier, et surement le dernier avant longtemps, à aborder ouvertement le sujet face à la Bourgmestre en personne. Même si sa bravoure n'avait pas été récompensée à sa juste valeur, sa réflexion avait eu le mérite de piquer l’Intérêt l'impétueuse dirigeante. Depuis cet incident elle ne cessait de se demander ce que son entourage pensait de son incapacité. Évidemment ils évitaient tous le sujet avec une habilité qu'elle n'aurait cru possible chez certains. Et pour autant elle préférait faire de légères allusions pour ne pas non plus insinuer qu'elle serait possiblement faible ou incapable.


"Allons, ne soyez pas modeste, votre écriture est certes quelque peu tremblante mais parfaitement lisible. Vous vous adaptez très bien à toute situation. Je ne choisirai pas des incapables pour m'accompagner enfin..." Devait-il être heureux? La Bourgmestre s'autorisait peu de compliment envers ses subordonnés...Il ne put empêcher le rouge d'affluer à ses joues.  "Mais en toute objectivité...que pensez vous de mon écriture?" Il déglutit. Toute couleur disparu sur son visage. Elle était diabolique. Il ouvrit la bouche mais fut arrêté par des hennissements. Il remercia toutes les déesses, esprits et dieux de ce monde.

Eleonnora, agacée qu'on l'interrompre e à ce moment critique écarta légèrement les rideaux de son côté de la fenêtre. Le cortège semblait s'être arrêté. Que faisaient ces crétins? Quelque chose bouchait donc le chemin? Ou était-ce des voyageurs? des bandits? Peu importe, elle n'aimait pas attendre. Avant d'ouvrir la porte elle vérifia une dernière fois son insigne bien épinglé sur sa cape. Sans la faire s'impatienter davantage le valet lui porta assistance pour la faire descendre et lui emboîta le pas vers la tête du convoit.

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
"- Ne me reconnaissez-vous pas ? Valmys Leweïnra !
- Si si...
- Alors où est le problème ?"

Le Cawr aux veinules de cuivre était bien perplexe, et ses vis-à-vis bien embarassés, sans qu'il ne puisse saisir la raison d'une telle gêne. Puisqu'il était le frère d'Eleonnora, où était le souci ? Ils avaient l'assurance qu'il ne lui ferait aucun mal ! La bourgmestre avait-elle expressément demandé à ne pas être dérangée ? Ou à tenir un certain rythme ? Dans ce cas, ils pouvaient le signaler, et il ne retiendrait sa soeur trop longtemps. Que craignaient-ils ? Se faire fouetter pour avoir permis des retrouvailles familiales ? Allons, ç'aurait été ridicule, et loin d'être dans les moeurs d'Eleonnora !

Enfin, il la vit. S'approchant d'eux, d'une allure royale, d'un port altier, une aura de richesse et de confiance semblable à nulle autre. Reconnaissable entre toutes, c'était elle, c'était sa petite soeur, le coeur tendre qui se pâmait devant une belle moustache, ou une chevelure d'or. C'était avec ce souvenir attendri que Valmys parvint à voir, par-delà l'insigne, la grande enfant qui était celle que la famille lui liait. Ouvrant les bras, il vint à elle, l'étreindre brièvement, se souvenant un peu tard que la partie la plus instinctive en lui n'appréciait toujours pas le contact.

"- Eleonnora ! Enfin je te revois ! Tu as l'air rayonnante... Je me suis inquiété, tu sais ? Je n'ai eu que des échos lointains de ce qu'il t'est arrivé..."

Ni sa joie ni son soulagement n'étaient feints. Son regard vira délicatement sur le bras raccourci de la nouvelle bourgmestre. Bien que son Ordre sut ramener aux êtres ce genre de pertes, il savait également la violence que représentait ce genre d'événements. Quand le corps était perçu comme un ensemble miroir de l'âme, inatteignable et sacré, le douloureux rappel de sa nature de fragment des Huit était un choc. Aussi n'osa-t-il la taquiner sur ce point. Pourtant, il n'aurait menti s'il avait énoncé que ses inquiétudes avaient été renforcées lorsqu'il avait imaginé les difficultés qu'elle pouvait avoir à tenir la barre de ses nouvelles fonctions dans ces conditions.
Mais il était son grand frère. Il était là pour la soutenir, dans les moments difficiles !

"- Tu vas vers Delimar, toi aussi ? Peut-être que je peux vous accompagner, et essayer de faire quelque chose, pour ton bras !"

Valmys avait toujours eu un bon rythme de marche, il pourrait sans souci suivre le convoi. Deya, elle, s'était rapidement faite à ce rythme. Car oui, elle suivait fidèlement son protégé sur ce dangereux voyage, presque accrochée à ses talons. Son regard fixait Eleonnora, inquisitrice, mis ses oreilles étaient attentives à tout leur environnement... Bien que son Protégé se montra étonnamment plus alertes, ces derniers temps.

"- Comment te sens-tu ?"

Une question innocente, aux apparences usuelles, mais dont pouvaient découler pas mal de réponses inattendues. Une question de soigneur, somme toute. Tout à son engouement et son zèle, Valmys n'avait pas même songé qu'Eleonnora puisse avoir quelque difficulté à y répondre en public.

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
"Qu'est-ce que vous attendez? Je n'ai pas que ça à...Valmys?" La bouche de la Bourgmestre se tordit dans une grimasse à la vue de son frère. Il ne manquait plus que lui...Elle n'eut pas le temps de dire quoique ce soit qu'elle se retrouvait éprise dans une embrassade chaleureuse. Autour d'eux les gardes avaient du mal à savoir comment réagir. Ils s'étaient concertés avec frayeur mais n'avaient pu faire face à l'enthousiasme du petit elfe. La moindre erreur pourrait pourtant leur coûter leur poste. Alors l'expression de désagrément qu'affichait l'éminente employeuse leur filait évidemment des sueurs froides. En même temps qui aurait bien pu oser s'approcher autant de la Bourgmestre? Cela relevait presque de l'attentat. Mais il semblait que ce garçon n'en faisait toujours qu'à sa tête. La jeune femme se dégagea de l'étreinte comme on repoussait un enfant trop envahissant. Les joues rosies par l'embarras, elle tentait de garder la tête haute devant sa garde. Elle se racla la gorge pour indiquer aux curieux que le spectacle n'était pas de mise. Ces derniers tournèrent les talons d'un air coupable.

"Je me porte...bien..."  Elle ne savait pas vraiment comment répondre, prise de court par cette rencontre totalement inattendue. Elle affichait une mine chiffonnée. Après tout elle n'avait jamais apprécié que l'imprévu vienne chambouler ses plans. Et il semblait que l'imprévu était le propre de son frère. Elle ne pouvait pas dire qu'elle le portait dans son coeur pour ça. Depuis qu'ils avaient réellement fait connaissance, ce dernier paraissait prendre un malin plaisir à la tourmenter de cette manière. A ce titre, elle se souviendra toujours de leur rencontre. Aussi, elle s'était toujours montrée prudente lorsqu'il apparaissait au travers de son chemin. A vrai dire, c'était le tempérament digne des roturiers qu'elle avait aimé fréquenter à une certaine époque. Cela lui ferait mal de l'avouer mais elle admirait cette bravoure. Ou juste cette insouciance à toute épreuve. A la connaissance de sa malice elle s'attendait à une petite raillerie, une idiotie qui dise un peu la vérité. Pourtant lui non plus n'avait prononcé ses pensées à voix haute. Car elle l'avait bien remarqué ce bref coup d’œil vers son bras diminué. Elle n'attendait que cela, qu'il le dise vraiment! Qu'elle était diminuée, estropiée et incapable. Ces propos lui auraient valu une baffe magistrale mais au moins elle l'aurait entendu. Mais aucune blague à ce sujet. Pire, il lui transmettait son inquiétude? Etait-ce de la pitié dissimulée? Où était le piège? Elle plissa les yeux, son bras unique sur la hanche. De toute façon que l'on dise quelque chose ou pas, la Bourgmestre était désormais trop complexée par sa faiblesse pour penser qu'aucune idée de la sorte puisse traverser l'esprit de ses interlocuteurs.

Faire quelque chose pour mon bras? Mais je ne t'ai rien proposé mon frère! Les mots tranchants qu'elle se formulait mentalement s'échouaient sur ses lèvres. En dépit de tout cela, la demoiselle n'était pas d'humeur à le chasser froidement. Elle n'aurait pas le coeur à le décevoir. Il serait capable de faire ces yeux là...enfin ce regard qui vous fend le coeur...vous voyez. Elle avait encore l'impression d'avoir perdu un combat. Comment pouvait-elle d'administrer une cité comme Caladon si elle n'était même pas capable d'enseigner à son propre frère le respect de sa fonction? "Sache que ce n'est pas que Eleonnora, ta sœur qui se rend à Délimar. Prend conscience que tu viens d'arrêter un convoi diplomatique d'une importance capitale pour le lien qui uni l'alliance des cités libres! "  Elle soupira, abandonnant la bataille mentale qu'elle menait. Elle avait presque l'air d'être forcée sous la menace. " Mais puisque nous en sommes là...monte donc. Continuons cette conversation en privé si tu le veux bien."  Elle ne voulait pas s'encombrer davantage de l'embarras que lui procurait cette rencontre inopinée. Puis en y réfléchissant, peut-être serait-il plus divertissant que cet assommant collègue qui partageait sa voiture. Elle l'invita à la suivre d'un bref mouvement de la tête.

"Vous devez descendre mon cher."  En voyant la Bourgmestre reprendre place avec ces paroles insensées à la bouche le diplomate battit des cils dans un silence d'incompréhension.
"Vous savez monter à cheval, n'est ce pas?"  
"Je...oui...enfin, voyez me pardonner mais je ne saisi pas bien..."
"Vous m'avez bien comprise"
Le regard du pauvre bougre suivit le geste de sa supérieure. L'autre porte de la calèche s'était ouverte pour dévoiler une monture harnachée rien que pour lui. Un soldat lui tendait fermement les rennes. Ébahit par la situation il ouvrit la bouche mais le regard de plomb de la Bourgmestre la dissuada d'insister. Il l'aura bien mérité sa prime...

Eleonnora n'eu pas à en dire plus pour que le convoi reprenne son allure. Elle pouvait souffler. Elle avait aussi renvoyé son valet à l'avant pour pouvoir demeurer en la seule compagnie de son frère...et de la bête qui le suivait partout. Elle ne l'avait pas remarquée mais elle espérait que les voyages de transport ne lui poserait pas de problème. "Tu pourrais m'être reconnaissant de ne pas t'avoir laisser sur le bord de la route...ainsi tu arriveras aussi vite que nous. Tu comprendras qu'il n'était pas très prudent de rester en plein milieux du chemin...puis je n'ai pas réellement envie de faire attendre les Délimariens vois-tu..."  Elle leva un sourcil moqueur. "J'aurai peur qu'ils élèvent la taxe à notre entrée."  Cela leur coûtait déjà beaucoup. Mais elle comprenait la vigilance qui devait les toucher ces derniers temps. Le malaise était quotidien dans ville aussi magique de Caladon. La trame en mouvement depuis la défaite des chimères était si incertaine que même le conseil restait sur ses gardes à ce propos. Ce n'était pour autant pas une raison de leur faire payer des milles et des cents pour leur nature propre. Mais bon, elle n'allait pas s'emballer sur la politique de ses voisins ici. Elle en aurait bien le temps à son arrivée. Parce que, si l'on mettait de côté les nombreux reproches qu'elle aimerait lui faire, une foules de questions lui taraudaient l'esprit. Ils ne s'étaient pas revus depuis si longtemps et de l'eau avait coulé sous les ponts. Autant qu'il avait entendu parler de ses gloires et douleurs, la demoiselle n'était pas le seul membre de leur famille à avoir succombé aux coups de la bataille. "Si tu veux savoir comment je me porte...constate par toi même."  Elle désigna l'extérieur avec une fierté apparente. "Je ne sais pas ce qu'il en est de toi...ni de notre père..."  Elle n'avait pas déserré les dents à son évocation. L'amère pensée d'être restée sans nouvelles persistait. "...mais en ce qui me concerne...non, je ne suis pas à plaindre vois-tu..." Elle se prit d'un soudain intérêt pour la manucure parfaite de sa main unique. "Il est vrai qu'il me reste quelques problèmes minimes à régler...tu parlais d'une solution quand à mon...bras."

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Valmys observa le jeu de sa soeur avec un sourire en coin, et un regard attendri. Elle avait l'air de bien s'amuser, dans ses nouvelles fonctions ! C'était adorable. Elle se faisait passer pour plus dure et froide que ce qu'elle était vraiment, et cela avait l'air de fonctionner. Une façon pour elle, sans doute, de se protéger, et protéger son statut. Peut-être craignait-elle que ses émotions, la petite faille ouverte en aide par son bras en moins, soit un risque pour elle de se voir retirer ce qu'elle avait tant désiré. Ah, que ceux qui étaient proches à son coeur devaient être chôyés, en ce moment, eux qui seuls pouvaient voir de l'autre côté du miroir ! Tout en émettant un "ooooh" entre la surprise et le faussement désolé à l'évocation de l'importance de ce convoi, il s'imaginait sa soeur aller se blottir dans les bras dorés d'Aurore, en quête de quelque coeur pur pour croire en elle à sa place, après une longue journée. Que c'était romantique !

Aussi la laissa-t-il continuer lorsqu'elle vit de la place à l'intérieur du convoi. Lui avait plutôt prévu de ne pas les arrêter longtemps, marcher à leurs côtés, ou les retrouver plus loin, et sans doute plus tard (il ne savait monter à cheval). Refuser l'offre aurait néanmoins impacté le crédit qu'Eleonnora s'efforçait d'obtenir. Il ne lui infligea pas cela pour le moment, se contentant d'un regard au pauvre bougre, où l'on pouvait distinctement lire "courage mon gars". Tranquillement, et en silence, il incita Deïa à le précéder dans la calèche, avant d'y jeter ses paquetages, puis son fessier. Il avait beau dire, quelques parts de son anatomie appréciaient grandement cette décision. Notamment son dos, ses jambes, et ses pieds. La chienne, elle, s'était assise sur le sol, avec de fréquents regards autour d'elle, inquiète. Elle reçut moult gratouilles derrière les oreilles pour la calmer, et la réconforter.

Enfin ils étaient seuls, et allaient pouvoir parler à coeur ouvert, par-delà les masques. Avec un soupir de contentement, Valmys laissa son dos s'appuyer de tout son poids contre son dossier, quand bien même cela impliquait de subir tous les cahots de la route. Il n'avait pas l'air noble, affalé ainsi, mais peu lui importait. Il savourrait. Une façon comme une autre de montrer sa reconnaissance, non ?
Il ne craignait pas les chemins. Mais c'était un peu compliqué à expliquer dans le feu de l'action. Un jour il conterait à Eleonnora toute la distance qu'il avait pu parcourir sur le continent maudit. Il lui conterait les mille façons de survivre sans tuer les dangers qui peuvent surgir. La présence de Deïa l'aidait d'autant plus à se sentir en sécurité. Ses nouveaux pouvoirs l'aideraient sans doute également, sitôt qu'il pourrait en faire usage sans craindre de créer un trou dans la réalité. Ainsi au lieu de tenter de justifier pourquoi il ne se répandait pas en remerciements idôlatres, Valmys préféra pouffer de rire à l'évocation de taxes Délimariennes. Ah, combien il la comprenait ! Quand il avait vu le montant de la taxe pour ceux qui avaient le malheur d'être nés embrassés par la magie, il avait préféré s'intéresser à un moyen plus discret de rejoindre l'Océanique. Quelle ironie. N'avait-on pas idée, aussi, de pénaliser les êtres pour ce qu'ils étaient ? Une taxe sur l'usage de la magie paraissait bien plus sensé au jeune Cawr.

Le regard de Valmys se tourna vers l'extérieur quand celui-ci lui fut désigné, mais son attention restait sur sa jeune soeur. Elle essayait, encore une fois, de répondre à une question qui concernait ce qu'elle avait à l'intérieur d'elle par ce qu'elle présentait à l'extérieur. Qui espérait-elle tromper ? Un être qui entendait les chants-noms, ou un être que l'affection liait à son nom ? Par ailleurs, Valmys songea qu'il lui faudrait prévenir sa soeur, concernant ses Hommes. Si elle n'avait effectivement eu de nouvelles de leur Père, ce dernier n'avait sans doute pu finaliser son apprentissage sur quelques aspects pratiques de ses fonctions. Cela aussi, il allait devoir l'évoquer. Leur père...
Finalement, le sujet tant attendu arriva sur la table. Enfin, il serait arrivé sur la table si table il y avait eu dans cette calèche. Ce pouvait être un aménagement sympatique par ailleurs. Une petite table suspendue au plafond afin de pouvoir réagir selon les pentes, et y être rabattue par un système de poulies... Ouaaais. Valmys aurait volontiers redessiné une calèche digne de ce nom à Eleonnora si son carnet n'avait pas été coincé dans ses bagages. Pas qu'il fut inaccessible, mais le Cawr fonctionnait encore un peu à l'économie d'efforts, par réflexe, son voyage n'étant pas achevé. Avec un sourire qui se voulait rassurant, il expliqua, pragmatique :

"- Je pense pouvoir te construire un bras. Sans doute ce soir : je vais avoir besoin de matière première pour le faire, et pour t'en faire un solide. Je peux trouver les minéraux qui m'intéressent, mais ils seront compliqués à récolter au sein d'une calèche." Son sourire se fit plus malicieux. L'enviait-elle ? Par les pouvoirs qui étaient siens, il pouvait entendre la Terre, ce qu'elle avait à lui dire... Et par conséquent trouver jusqu'aux pierres les plus rares qu'avait à offrir cet archipel. La rareté ne l'intéressait guère, en ce cas, plutôt les propriétés. Il lui fallait du métal qui résistât aux éléments, fut à la fois léger et dur. "Nous pourrons ensuite voir pour que tu puisses en user par ta magie. Cela peut nous prendre un peu de temps, il nous faudra de la prudence. Mais... Nous avons le voyage pour ce faire, n'est-ce pas ?"
Oui, il venait de s'inviter, au moins pour quelques jours. C'était légitime. Même lui prenait des pincettes, la magie étant quelque peu imprévisible. Il avait partiellement retrouvé comment user d'elle pour bouger des objets distants, sort dont il avait toujours abusé. Cela ne l'empêchait pas de se montrer méfiant. D'autant plus que chaque taverne qui avait ponctué son voyage l'avait alimenté d'histoires plus ou moins épiques sur ces aléas magiques. Comme cet Homme qui avait changé la main de sa femme en chapeau.

"- Ce serait bon pour toi ?" Il lui laissa le temps de répondre, tranquillement, calmement, avant de continuer sur le ton flegmatique d'une conversation entre adultes : "Je suis devenu ChanteTerre. Père est un vampire, désormais." Valmys guetta la réaction de sa soeur. Le conteur qu'il était aimait toucher les émotions de son auditoire, et il était certain que celle d'Eleonnora, la décomposition de son masque, espérait-il, devait valoir le coup d'oeil. "J'ai pu le recontacter par pierre de communication, et j'ai un ami qui se charge de lui rendre ses souvenirs dans ses rêves. Dähddy se souvient peu à peu de nous." À nouveau, il resta à l'affût de sa réaction et, surtout, de ses demandes. Elle en avait fatalement, avoir tout ce temps passé sans lui, et après avoir dû prendre ses fonctions sans son soutien.

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Eleonnora ouvrit la bouche mais aucun son n'en sortit. Elle se ravisa, secouant la tête comme prise au sein d'un duel intérieur. Qu'est ce qu'il faisait chaud ici...Les sourcils froncés elle desserra les lèvres d'un air vindicatif cette fois ci mais se ravisa à nouveau. Non, aucune réponse ne semblait appropriée à de telles nouvelles. Et puis mince! On étouffe ici! D'un geste vif et maladroit elle tenta de faire glisser la fenêtre de la carriole. Elle du s'y prendre à deux fois, laissant échapper un juron au passage. Elle passa finalement sa tête par l'ouverture en hélant le chauffeur. Celui ci ne répondit pas, trop occupé à...allez savoir quoi! Il rêvassait! La Bourgmestre reteint une nouvelle insulte, serrant la mâchoire. Pourquoi tout le monde devait-il l'agacer ainsi aujourd'hui? D'un geste de la main elle fit comprendre à un mercenaire d'approcher.

"Arrêtez le convoi."
"Mais madame..."
"TOUT DE SUITE!"

Le soldat, pâle de s'être fait ainsi mordre par les ordres de sa supérieure s'en alla se dirigea vers la tête du convoi au pas de course. Ils ne durent pas attendre bien longtemps avant que ce dernier ne se stoppe à nouveau. Sans attendre plus longtemps Eleonnora attrapant la main de son frère, ouvrit la porte dans la volée. Sous le regard ébahit des mercenaires et autres diplomates, la jeune femme quitta le périmètre de leur protection de son habituel air déterminé. Il ne manquèrent pas de se faire rattraper par le chef de sa sois disant garde rapprochée de pacotille.

"Dame Ostiz! Vous ne pouvez pas..."
"Excusez moi, êtes vous en train de formuler un ordre à mon égard Sir Rodrigue? Je ne crois pas que les choses aillent dans ce sens."
"Veuillez excuser mon impudence...mais il se trouve que je suis payé pour votre protection et vous n'êtes pas en mesure de vous protéger seule sans vouloir vous offenser."
"Qui peut bien vous payer pour vous croire capable de protéger une héroïne de guerre? Oh...c'est vrai...c'est moi!"
"Je ne suis pas sur que vous comprenez l'enjeu de..."
"Donc en rectifiant donc les dogmes établis, je vous ordonne de reprendre la route. Le prochain camp de garde ne se trouve qu'à quelques kilomètres, je, nous vous rejoindrons là bas. Moi et ce ChanteTerre au pouvoir...inconsidérable."

Le soldat défigura le petit elfe du haut de sa monture. Il eu une moue peu certaine, jeta un regard là où le convoi s'impatientait. Le dilemme était bien trop grand. Si il arrivait quoique ce soit à la Bourgmestre, il s'en serait trouvé responsable et ce serait pour lui la honte publique...mais en connaissant le caractère de cette nouvelle élue, elle lui aurait rendu la vie impossible si il osait l'obliger à faire quoi que ce soit de censé. Même son cheval qui semblait sentir la pression qui reposait sur les épaules de son cavalier piaffait. Il soupira, elle lui rendait déjà la vie impossible celle là.

"Nous viendrons vous chercher si le moindre retard est noté."
"Evidemment." Répondit la demoiselle avec un sourire convenu.

Il talonna le flanc de sa monture, repartant au galop. Eleonnora attendit un instant que le convoi ai prit de la distance pour enfin souffler. Elle passa ses mains le long de son visage crispé. Elle aurait très bien pu se couvrir de honte s'il avait décidé de jouer au bon petit soldat de la patrie. Son tempérament spontané lui jouera de mauvais tours un jour.

"Nous ne sommes plus dans la calèche...Es-tu content?" Elle s'était tournée vers son frère. Elle ne l'avait pas remarqué avant mais sa chienne semblait l'avoir suivit comme son ombre. Et devant le ton amère de la jeune femme, ses poils s'étaient hérissé dans un grognement sourd. "Oh et dis donc à cette chienne de me laisser tranquille! J'ai tellement de raison de...de...aaaah" Ses mains se crispèrent dans une expression de frustration. Elle avait perdu tout contrôle de ce qui se passait autour d'elle et elle détestait ça. Elle inspira longuement. Elle expira. "Valmys...quand comptais tu me faire part de ces nouvelles?" Elle était censée être une des personnes les mieux informée de toute cette putain d'île et elle ne savait même pas que son prédécesseur s'était absenté pour cause de vampirisme?? "Je veux dire...Pourquoi personne n'a eu la descence de me faire part de cette...nouvelle? Avec les moyens que nous possédons, ce n'est pas bien compliqué..." Elle était terriblement déçue. Elle en arrivait à la conclusion que de Bourgmestre elle ne possédait que le titre. Même Autone devait en savoir plus sur les secrets d'état...même son frère, aussi insouciant soit-il devait en connaitre plus qu'elle. Elle ne savait pas ce qu'étaient les instructions de son père avant qu'il ne disparaisse mais elle ne le laisserait pas faire d'elle un pantin sur un siège.
Elle secoua la tête, elle devait remettre ses idées en place. Rien de tout cela n'était bien important; "Enfin, pourquoi? où? Quand? Comment?" Sa rancune envers son père, ses ambitions politiques, sa peur de l’abandon et de la perte de contrôle...Elle attrapa son frère par les épaule forçant son regard à pénétrer le sien. ".... Et dis moi surtout...qui? Qui a fait ça?"

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Jadis, quand Valmys avait rencontré Eleonnora, la force de caractère de cette dernière ne lui avait pas échappé. De ses expressions vives et franches, passionnées, il avait déduit la flamme de moult sentiments, mais avait cru naïvement qu'elle peinait à en montrer les vraies couleurs -en témoignait sa relation ambiguë avec Aurore.
Le jeune Chanteterre remettait tout cela en question et en perspective, désormais. Les yeux arrondis façon poisson, la bouche bée, immobilisé par ce désarçonnage soudain, une seule pensée résumait ce qu'il vivait : ah ben si, elle était tout le temps comme ça. Non, en vrai, il s'était peut-être passé quelque chose. Peut-être que sa montée au pouvoir l'avait troublée au point où une attitude aussi affirmée était une sorte de protection pour ne pas laisser paraître l'incertitude que pouvait avoir une élève passée maître en l'absence de son mentor. Moui, c'était plus crédible. Plus rassurant, en tout cas. Cette hypothèse rendait Eleonnora moins effrayante, plus proche de lui, moins semblable à certains gueuleurs d'ordres des mers.

Tétanisé, Valmys ne trouva rien à dire durant ce temps, gênant, qui s'écoula avant que le convoi ne s'arrête. Il commençait même à douter de ce qui pouvait lui arriver. Qu'avait-il fait, qu'avait-il dit ? L'avait-il échaudée, ou vexée ? Un nœud discret commençait à se faire, dans sa gorge et dans son ventre, empreinte d'un souvenir ancien. Il comprit encore moins lorsque son poignet fut pris et que, comme un vague mouchoir, il fut emporté par sa jeune sœur vers une destination connue d'elle seule. Il ignorait encore si c'était la confiance ou la curiosité qui le poussait à se laisser faire. Peut-être était-ce juste la stupidité.
De la conversation avec Rodrigue, il avait espéré pouvoir obtenir quelques réponses. Il n'en fut rien.  Néanmoins, le Chanteterre ne parvint pas à masquer sa très grande surprise à la mention de ses pouvoirs inconsidérables. Euh, oui, c'était vrai... Dans la théorie. Dans un monde merveilleux ou le Baôli n'avait pas troublé la magie telle qu'ils la connaissaient. Et même ! Il... Il n'était pas sûr !
Rodrigue céda, et Valmys ne fit aucun geste pour empêcher cela. Ses sens encore neufs lui faisaient craindre un nouveau haussement de ton. Ce n'était pas que la voix d'Eleonnora n'était pas appréciable. Il avait juste les oreilles sensibles. Le Cawr regarda ses affaires partir devant lui, en espérant ne pas les regretter.

Deïa, à ses pieds, observait les humains avec un air profondément désabusé.

Et pour une fois, Valmys était davantage sur la défensive que sa chienne, laquelle avait eu tout le temps de découvrir combien certains caniches pouvaient aboyer forts sans jamais représenter de menace. Là, elle percevait bien qu'aucun danger ne guettait son chiot -et il valait mieux pour ledit danger. Plus Eleonnora parlait et plus Valmys, inconsciemment, passait derrière Deïa, jusqu'à la grattouiller nerveusement. Comment lui dire sans la vexer ? Qu'aurait fait Aldaron à sa place ? Il avait bien une idée, mais cela impliquait d'ouvrir la bouche...
Ce qu'il ne fut prêt à faire que lorsqu'enfin elle lui donna la parole. Sa voix était alors un peu pâle, inquiète. C'était sa voix de petite proie quand il essayait de parler normalement à un certain elfe aux crocs pointus.

"- Je ne sais qui l'a mordu. Cela a eu lieu après l'éveil du Baôli. J'ai voulu lui parler par nos pierres de communication, mais... Il n'était plus le même." Et il se souvenait encore de cette blessure que Dawan avait dû soigner en lui, quand il s'était cru à nouveau orphelin. Il s'en remettait tout juste... À tâtons et avec difficulté, mais il était en bien meilleur état. "Mais tu sais... Il m'avait dit vouloir vivre éternellement avec Achroma. Je vois souvent ce dernier, à ses côtés, ainsi qu'une autre vampire. Je pense que la situation lui convient." Vivre éternellement impliquait de ne plus être elfe. Voir souvent Aldaron impliquait une communication renouvelée. Un lien qui se recréait, en fait. À nouveau, Valmys essayait de plaire, se faire adopter. Sans poney à voler, c'était moins aisé. Mais dans le regard que le vampire posait parfois sur lui, il se demandait s'il n'y avait pas un petit quelque chose en plus, comme un spectre du passé qui poussait délicatement le nouveau-né vers lui.

Le Chanteterre prit une grande inspiration, ainsi que son courage. Il abordait désormais le point le plus périlleux. Mais il avait Deïa avec lui, n'est-ce pas ? Et Eleonnora ne lui ferait aucun mal, non ? Il était son frère, il était un baptistrel, et un mage exceptionnel... L'attaquer pouvait la mettre dans l'embarras. Aurait-elle au fond d'elle assez de raison pour se souvenir de cela, malgré le choc qu'elle venait de vivre ?

"- Eleonnora, ma sœur... Je crains que le silence de ceux qui t'entourent n'aie pour cause que leur crainte de ta réaction. Ils t'ont accordé leur confiance en te faisant bourgmestre. Ne crains pas de les décevoir. Je suis certain que tu es à la hauteur de tes nouvelles fonctions et que Père, s'il était là, croirait en toi également. Mais que faut-il craindre, à ton avis : un peuple déçu, ou un peuple qui, de peur, va vouloir mordre ?"

Ses propres lèvres étaient pâles, sous l'effet du pincement qu'il leur infligeait, gêné de s'exprimer aussi ouvertement. Mais s'inquiéter, protéger, n'était-ce pas là le rôle d'un grand frère ?

"- Je tiens à toi, je n'aimerais pas qu'il t'arrive quelque chose de mauvais. Prends soin de toi."

Et d'eux. Ce dernier point viendrait sans doute tout seul, à l'avenir. Pour le moment, il n'avait pas l'air de peser suffisamment dans la balance des émotions de sa sœur. Ces sujets-là étant abordés, ils demandaient tous deux une réflexion qui prendrait sans doute du temps, notamment celui des émotions qui s'estompaient. Restait encore une chose. Avec une moue mi-figue mi-raisin, gênée malgré un début de sourire en coin, comme s'il s'apprêtait à raconter une quelconque plaisanterie, il ajouta :

"- Ceci étant dit... T'a-t-on parlé de l'éveil du Baôli ? As-tu remarqué que la magie semblait différente ?"

Son sourire venait de là : si Eleonnora ne l'avait pas remarqué, sa réaction pouvait certes être crainte... Mais également justifier la situation cocasse et unique qu'ils allaient vivres tous les deux. Il appréhendait autant qu'il avait hâte de voir l'expression qui allait passer sur le visage de la terrifiante bourgmestre, quand elle réaliserait qu'ils risquaient forts d'être piéton, et que nul Rodrigue ne viendrait la secourir.

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Eleonnora vivait en permanence dans l'action. Il n'y avait pour son esprit ambitieux aucun répit nécessaire. C'était comme si elle n'avait jamais quitté le champs de bataille. Elle devait gagner, coup sur coup, ne se permettre aucun écart et rester toujours sur le vif. Foncer tête baissée était sa seule manière de contrer le temps et les événements. Après tout elle était humaine. Elle n'était qu'un moucheron pour qui les aiguilles de la montre s'affolent, un papillon de nuit à l'existence éphémère. Elle comptait ses ambitions en années et en voyait malheureusement le bout. Et dans la turbulence, il était impossible d'y voir clair. Mais voulait-elle pour autant penser à autre chose? La distraction que lui offrait ses fonctions était royale. Jamais seule, jamais l'esprit pour autre chose. Travailleuse idéale, aliénée par sa tâche, elle en arrivait presque à mettre de côté sa solitude. Mais le soir, lorsqu'elle posait sa plume à côté de son encrier, qu'elle soufflait sur les dernières bougies et que la pénombre s'installait autour de ses draps chauds, c'était là qu'ils resurgissaient. Elle les voyait flotter au dessus du lit, la fixant de leurs yeux vides et morts. Oh oui, elle n'avait jamais quitté le champs de bataille. Alors elle prenait des somnifères lorsqu'il lui était impossible de boire verre sur verre. Elle forçait ces monstres à rester sous son lit, elle étouffait leurs plaintes. La jeune femme avait enterré ses morts aussi vite que sa cité avait recouvert ses fosses communes.
Un nouveau chapitre de sa vie venait de commencer et voilà que ce frère surgit de nul part venait lui rappeler le passé. Le placard était ouvert, et les monstres qu'elle ne voulait pas affronter étaient libérés. Pères, frère, amants, adversaires et amis; Ils étaient tous là.

Alors évidemment qu'elle était échaudée. Elle avait passé des mois entiers dans l'ignorance de ces êtres qui étaient pas revenus. Elle regrettait de se donner en spectacle ainsi mais mieux valait-il que seul Valmys en soit témoin. Elle ne disait pas avoir une entière confiance en lui et sa malice (mais faisait-elle réellement confiance à quelqu'un d'autre qu'elle même dorénavant?) pourtant il demeurait un son frère. La famille était un bastion, une valeur sure qui ne lui avait jamais fait défaut. Même si, au fil des années et des expériences, il semblait que cette confiance s'éffritait...
"Il souhaitait s'enfuir et vivre son idylle loin de tous, avec son vampire; Il me semble qu'il l'avait mentionné..." Un homme d'une telle responsabilité mettre de côté son pouvoir pour quoi? L'amour? La demoiselle desserra les lèvres pour en faire sortir un rire nerveux. Elle s'en souvenait comme si c'était hier. Il lui avait annoncé en toute légèreté sa démission prochaine. Devenir Bourgmestre, mais à quel prix? Sa réaction ne fut pas la joie escomptée. Elle qui avait tant rêvé de ce moment. Cela lui avait laissé un souvenir amer dans la bouche. Tout ne se passait pas comme elle l'avait prévu. Peut-être était-elle trop possessive? "...Mais ce n'est pas une simple fuite en amoureux, n'est ce pas?"/color]Quelque part serait-elle soulagée qu'il ne les oublie pas volontairement. Et cela l'aurait un tant soit peu soulagée de poser un nom, un visage sur l'horrible personnage qui avait pu la rendre rendre encore plus seule. Peut-être avait-elle simplement peur qu'il l'abandonne lui aussi?  "Parce que je suppose que maintenant il...nous a oubliés." Dans les iris de ce petit elfe se reflétait une lueur qui lui était familière. Avec un miroir elle aurait pu admirer la même dans ses yeux. Elle s'était alors sentit plus proche de lui qu'elle ne l'avait jamais été. Aldaron était encore une fois le lien qui entrecroisait leurs destins. Et à mille lieux de tout les reproches qu'elle voulait lui soumettre elle comprit que ce garçon partageait la même solitude qu'elle.
Elle l'écouta donc sans sourciller en dépit de l'angoisse que semblait soulever les propos qu'il tentait de construire.
Un sourcil se leva alors qu'il soufflait les dernière parole de son discours moralisateur.

"Penses-tu que j'ai une mauvaise estime de mes capacités? Je loue le peuple qui a su voir en moi ce qu'il recherchait. Ce n'est pas lui qui m'attaquera en premier sois en sur. Et j'attend ces faiseurs de messe basse sur le pied de guerre, ne t'en fais donc pas.
Pourquoi crois-tu donc que je suis la gouvernante la moins informée de toutes les contrées humaines mon frère? Que sais-tu de la confiance que notre père plaçait en moi? Peu, apparement. Mais demande donc au conseil les dernières directives laissées, à ses partisans, ses commandants de cet obscur marché...cet obscur marché pilier de notre glorieuse économie soit dit en passant. Quel Bourgmestre digne de ce nom peut fermer les yeux devant l'impuissance, le contrôle factice qu'il possède? Devrais je me taire en les voyant faire des messes basses et planifier des réunions qui ne me concernent aucunement? Ils hochent gentiment la tête devant mes décisions...Mais n'est ce pas ce qui était dicté? Je me charge de la lumière, et eux de l'ombre. De ne rien savoir, de vivre cette ignorance me rend folle Valmys! Alors peut-être qu'il serait bien que le peuple morde au final...qu'ils prennent conscience du réel pouvoir que je possède."
 Plus elle avait l'impression que le pouvoir lui échappait, plus elle durcissait sa poigne. Ils comprendront alors l'erreur de l'avoir mise à l'écart de leurs conspirations. Certes le marché noir n'était une institution uniquement caladonnienne; Certes il ne lui était pas agressif; Mais comment vraiment le savoir sans pouvoir être au coeur du problème? La paranoïa était-elle un symptôme du pouvoir? Allez savoir...mais il semblait qu'elle les voyait partout ces intrigants. Ils avaient en leur possession une partie de SON pouvoir, comment pouvait-elle se taire?

"Mais peut-être pourrais-je enfin m'accorder le véritable respect de mon père, les informations qu'il me doit, si je lui raccommodais l'esprit à ma manière..."
Elle n'eut pas le temps de lever les yeux au ciel car elle s'était déjà rendu compte de la véracité de ses propos. Elle y avait bien pensé; On disait que la mémoire des nouveaux vampires étaient dans une telle brume qu'on pouvait presque la reconstruire à souhait. C'en était la fois tentant et effrayant. "Attends...Où se trouve notre père en ce moment précis? S'il se trouve présentement avec son vampire et ses courtisants...Aldaria...?" Son teint encore rougit par la colère se mit à perdre de ses couleurs. Cela signifiait que le maitre du marché noir se trouvait affaibli et à la merci du pays dont il drainait l'argent. Non, avec sa mémoire il ne pouvait piper mot...Elle tourna une mèche de ses cheveux entre ses doigts fins. Mais son frère semblait ne pas en savoir long sur la véritable situation. Donc sans informations supplémentaires, elle était à la merci de son imagination. Mais voilà qu'elle se remettait à penser au boulot.
"Marchons veux-tu..."

Mais à l'interpellation de son frère elle se retourna avec un sourire tendu aux lèvres.
" J'ignore peut-être certains secrets d'Etat mais je me tient au courant de la santé publique! Pour autant suis peu apte à utiliser la plupart des sorts que l'on pouvait réaliser auparavant..." Elle secoua son bras unique devant le visage du petit elfe. "...donc je n'ai aucune crainte à la dégénérescence de ma propre magie. Oh mais tes capacités vont évidemment bien au delà de ces changements...n'est ce pas?"  Sa moue circoncise en disait long sur son appréhension. Il devenait presque évident que son caprice allait lui peser plus qu'elle ne l'aurait pensé.[/color]

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
À entendre Eleonnora, tout devenait clair. Il y avait plus encore qu'un "simple" manque de confiance en soi, et d'appui paternel. Il y avait la solitude ; non pas celle d'une absence d'entourage, mais celle d'un mauvais entourage. Valmys n'aurait su estimer si tout cela était fondé ou non. En revanche, il percevait la sincérité de sa sœur. Le manque de contrôle, et cette sensation d'injustice... Il crut sentir de la rage, aussi, cette détresse mêlée d'énergie. C'était bien là une des forces de sa sœur : elle avait en elle une énergie féroce qui lui permettait de se battre et d'aller de l'avant. Le jeune Chanteterre devait reconnaître lui envier cette tête pleine de caractère qui faisait les indomptables.
Néanmoins, il eut préféré que cela se manifesta autrement que par un bras de fer avec son peuple. Savait-elle combien le sang coulait facilement ? Savait-elle quelle était la douleur infligée ? Tout ça, pour quoi ? Pour prouver sa valeur à des gens qui n'étaient pas même ceux qui en seraient exsangues ? Aux notes de sa voix, Valmys devina que riposter, tenter de la raisonner, seraient vain. Ses émotions guidaient ses actes. Dès lors, pour obtenir ce qu'il voulait, c'était par ce biais-là que le dernier Cawr devait parler à sa sœur. Ce qui était parfait, c'était qu'elle lui donnait les clefs pour ce faire.

Bon, par contre, il n'avait aucune idée de comment il allait les faire voyager jusqu'au prochain village. Il eut un ricanement amusé, en voyant enfin sur les traits de la bourgmestre les traces de l'acceptation de la vérité. Au moins lui épargna-t-il un ébouriffage de cheveux en bonne et due forme - uniquement parce qu'il savait que cela serait contre-productif. Plutôt que se préparer à marcher, il posa ses affaires et son fessier à terre, et commença à fouiller son sac. Le regard de Deïa oscillait entre la curiosité de ce que faisait son proétégé, et la méfiance vis-à-vis de celle-qui-restait-debout-pendant-que-Valmys-était-vulnérable.

"- Assieds-toi.  Tant que nous sommes seuls, j'ai quelque chose à te proposer."

Tandis qu'il fouillait, sortait de sa sacoche des affaires diverses et variées, matériel de dessin, amulettes, pierres et bouts de bois divers et variés (dont quelques flûtes), il précisa :

"- Dähddy est sur Calastin en ce moment. Il ne se "souvient" pas de nous, mais nous sommes plusieurs à lui conter son passer. Un de mes précédents maîtres, Dawan Sywel, qui vit désormais dans le monde des rêves, s'attache à lui rappeler ses souvenirs. Il lui a parlé de nous. Je lui ai parlé de toi."

Voyait-elle où il venait en venir ? Il parlait si calmement, si légèrement, comme si le sujet n'avait que peu d'importance. Une façon pour lui de chercher à apaiser sa sœur par une présence qui n'aurait rien d'oppressant ou de dangereux. Au fond, il était bien une des rares personnes auprès desquelles elle devait vraiment pouvoir reposer ses angoisses. Ses desseins n'étaient pas tournés vers la politique.
Bientôt, le Cawr de la terre put brandir une petite pierre aux allures reconnaissables entre toutes. Une pierre de communication. Mais il n'y avait bien que lui pour savoir faire la différence entre toutes les pierres qu'il avait, et savoir laquelle appelait Dähddy, laquelle réchauffait les cœurs, laquelle appelait Teotl. Il tendit la pierre à Eleonnora.

"- Ce que je puis te proposer, c'est de lui parler, directement. Lui expliquer tes ennuis. Lui demander s'il peut t'aider. Lui dire qu'il te manque, si cela te sied. Moi, je m'écarterai, je vous laisserai seuls, et je verrai pour commencer à travailler sur une façon de nous emmener au prochain village plus rapidement. Est-ce que cela te sied ?"

Il avait parlé avec le plus de douceur possible, et sa bouille avait quelque chose entre l'inquiétude et la bienveillance. Ses intentions auraient peut-être pu se traduire par un gros câlin plein de réconfort, si leur relation avait été autre, et si l'esprit de Valmys n'avait pas été à ce point tourné vers la praticité. En attendant, cette petite pierre, cette tentative pour la faire aller mieux et la soutenir, c'était un peu son "je t'aime" de grand frère, celui qu'il n'avouerait jamais à voix haute.

Si Eleonnora accepte :


[HJ : je te laisse me prévenir de ce que fait ta perso', et si tu veux qu'alda réponde avant ou non ?Surprised ]

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
    [Petit post, navrée du délai x.x]

    Le nouveau-né avait tressé ses cheveux pour l'entraînement avec soin pour qu'ils ne se prennent pas dans son arc. Les cibles étaient à bonne distance, pour que la tâche ne lui soit pas trop aisée. Sur les falaises, près de Sélénia, la chaleur semblait cuire ses comparses vampiriques mais lui ? Il n'avait pas de problème avec le soleil. Il pouvait y être exposé sans douleur. On l'avait nommé Ast. Un petit nom pour désigner le vampire bizarre qu'il était bel et bien devenu : il ne craignait pas le soleil et ne buvait pas le sang. La présence du liquide carmin n’excitait pas sa Faim. Des sbires activaient les cibles pour que l'archer améliore ses réflexes et la coordination de ses gestes.

    Néanmoins la sensation de mouvement magique l'arrêta dans son entraînement. C'était une perception bien connue à présent. Si aux premières demandes de contact, Aldaron avait été déboussolé, il avait fini par accepter d'avoir des nouvelles de son fils adoptif régulièrement. Il s'était même attaché à lui, dans une certaine mesure, comme s'il ressentait le besoin de couver des personnes chères à son cœur. Il attrapa la pierre et alla s'asseoir sur un rondin de bois, veillant à signaler à son maître d'arme qu'il s'arrêterait là pour aujourd'hui. Il posa la pierre sur une autre souche et lorsque le visage vaporeux de Valmys fut à sa vue, un sourire fin s'étira sur ses lèvres : « Bonjour Valmys, non, tu ne me dérange pas, je viens de finir mon entraînement. » Une vérité pour moitié, il avait effectivement fini son entraînement, mais cela était parce qu'il l'avait interrompu. « Tu as l'air bien joyeux. » Et il ne tarda pas à comprendre le pourquoi de ce ton enjoué. Eleonnora, on lui en avait parlé. Dawan pour partie, ses anciennes connaissance pour le reste. Il n'en demeura pas moins vrai qu'il fut profondément surpris en voyant le visage de la dite-Eleonnora.

    Ses lèvres s'entrouvraient légèrement, sous le choc. Il se souvenait, de ce visage, non pas dans ses propres souvenirs... Mais dans les rêves d'Artane Nordan qu'il avait dévorés avant que le pauvre bougre n'en puisse plus de son intrusion affamée et finisse par s'exploser de lui-même le crâne contre un mur. « Bonjour, Eleonnora... » finit-il par dire, d'une voie un peu perturbée et hésitante qu'on n'avait pas connu au pragmatique et directive Bourgmestre Leweïnra. Comme nouveau-né et comme père, il tâtonnait encore, se retrouvant avec des enfants que son cœur aimait déjà sans qu'il ne sache pourquoi. « Je suis heureux de faire ta connaissance et... » Un sourire, doux autant que timide s'étirait sur ses lèvres : « Tu es une très jolie femme. » De la part d'un homme marié, c'était en toute chasteté qu'il lui faisait ce compliment. Il lui trouvait de beaux traits, mais assurément pas les siens : « Toi non plus tu n'es pas... Tu n'es pas de mon sang n'est-ce pas ? Je ne reconnais pas mes traits en toi. » Tout comme il ne les voyait pas en Valmys. « Mais je t'ai... Adoptée ? J'espère que mon absence ne te déstabilise pas trop, tu dois pouvoir compter sur Valmys, il me semble. Il me plairait de te rencontrer, si tu le souhaites... A Caladon – tu es bien à Caladon, c'est cela ? »

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Eleonnora n’aurait pu réellement expliquer comment elle s’était trouvée avec cette pierre entre les mains. Elle se trouvait sans réel préambule face à l’image de son père adoptif. Enfin si on pouvait affirmer que ce vampire hésitant était bien Aldaron Leweinra…Elle tenait la pierre du bout des doigts comme si elle menaçait d’exploser à tout instant. La jeune femme jeta un regard fuyant vers son frère, ses yeux envoyant un signal de détresse. Mais voilà que l’image déphasée du vampire commençait à émettre des sons. A vrai dire il avait l’air aussi perdu qu’elle, ce qui n’arrangeait rien à la situation. D’habitude il était la figure droite et sure qui savait recadrer ses émotions (qui avaient tendance à légèrement déborder). Elle comprenait évidemment la bonne intention de son frère mais se trouver face à cet étranger dont le visage n’était plus que le pâle souvenir de la personne qu’était son père n’était pas forcément une expérience agréable. « Bonjour…Aldaron » répondit-elle les yeux plissés par le trouble qui l’habitait. Ils se regardèrent dans un silence évocateur attendant la réaction de l’autre.
Elle se demanda comment son frère avait réagi la première fois. Elle en venait presque à admirer la force dont il faisait preuve. Il semblait prendre soin de père comme une infirmière à son chevet. Eleonnora avait beau diriger une cité entière, elle était loin de faire dans le social. Et elle se savait déjà incapable de soutenir tant de temps ce regard vide de souvenir, ce visage qui n’était que le vague souvenir de l’elfe qu’elle avait tant admiré dans le passé. Il n’était plus qu’un être perdu pour qui le monde n’était qu’un vaste territoire étranger. La douceur et l’insouciance de ses compliments lui alla droit au cœur. Et dans la bienveillance de ses mots elle fut aussi attendrie que face au regard de l’hermine qui semblait, au loin, l’écouter d’une oreille discrète. Pendant un instant elle se senti attristée de ne rien pouvoir faire. Encore une fois, du haut de sa stature de Bourgmestre, elle était totalement impuissante. Malgré cela elle voyait dans les pupilles de celui qu’elle avait appelé père la vague lueur d’une émotion. Peut-être était-ce ceci qui animait le petit elfe, le poussait à revoir son père de jour en jour ; L’espoir qu’il se souvienne.

Toutefois, en cet instant précis la situation paraissait si improbable que la demoiselle avait du mal à en garder son calme. Elle avait un peuple à charge, elle ne pouvait pas non plus avoir un enfant aussi encombrant sur les bras. Et son sourire ne faisait que se crisper à la vue de cet être doux et inoffensif. C’était donc ça un des hommes les plus influent de tout le nouveau continent ? Laissez-moi rire ! Lui qui tenait les marchés du monde connu d’une main de fer présentait une voix hésitante et un sourire tremblant.
Elle se racla la gorge et releva le menton de son air familier de supériorité. Cela la heurtait un peu ses sentiments de devoir de l’informer de vérités générales mais ce devait être un mal nécessaire « Tu m’as…adoptée comme tu le dis. Mais à la gloire de mon véritable sang, je n’ai pas pris ton nom car je compte bien marquer celui-ci dans les annales. Oh oui, car je ne suis pas simplement ta fille, je suis aussi ta digne héritière au siège du conseil de la glorieuse cité de Caladon » dit-elle non sans une pointe de fierté dans la voix. « Te souviens-tu au moins de…de ta gloire passée ? Père, je fais de mon mieux pour faire Caladon la cité qu’elle mérite d’être, je reprends le flambeau avec fierté mais je ne sais pas…j’ai l’impression que tu n’as pas laissé le champ aussi dégagé que je ne l’aurai espéré… » La jeune femme bascula sa tête en arrière en laissant un rire nerveux soulever sa poitrine. Comment pouvait-elle espérer qu’il lui parle du marché noir, de ses conseillers et des secrets d’états s’il ne se souvenait même pas du visage de ses enfants ? Elle se rendait compte de l’absurdité des reproches qu’elle comptait lui faire. Elle en avait fait une liste longue comme son bras. Mais à quoi bon s’il n’avait aucune réponse à lui apporter. Elle pourrait très bien déverser sa frustration en lui récitant pendant des heures tout ce qui faisait de sa vie de Bourgmestre un grand complot, un étau de paranoïa et une masure de solitude.
« Pour autant ne te fais aucun souci, je saurai, comme à mon habitude, prendre le contrôle de la situation. J’ai eu un bon maitre. » L’image qu’elle souhaitait renvoyer était celle de la force, de l’implacabilité du monolithe face à la tempête. Un jour il reviendra parmi les vivants, il reprendra la place qui lui reviendra et il se souviendra d’elle comme cette Bourgmestre capable et forte. Son sourire ne manqua cependant pas de s’élargir lorsque ce dernier lui proposa une visite. « Je ne suis pas actuellement à Caladon… » Elle jeta un regard circulaire vers Valmys qui semblait bien occupé au loin. « ...Enfin ce n’est que temporaire, je serai heureuse de te revoir...en chair et en os cette fois ci. Caladon serait tout aussi joyeuse de ton retour, tu sais à quel point tu étais apprécié ici…Même si j’ai gagné les élections haut la main après ton départ. Puis, je suppose que tu trouves à…Aldaria. » Elle mettait tant de cœur à marquer chacune de ses pensées par des expressions adéquates que ce mot sembla lui écorcher la bouche. « Je ne sais pas comment tu t’y plais…mais il serait peut-être raisonnable pour toi de revenir à la maison, n’est-ce pas ? Tu sais, je dis ça pour ton bien Aldaron… »

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Spoiler :


    L'Ast sentait, dans les yeux d'Eleonnora, qu'elle le jaugeait. Lui qui avait voulu prendre des pincettes, voilà qui n'était guère une façon de lui retourner la politesse. Néanmoins, il comprenait. Elle n'était ni la première, ni la dernière à le regarder en cherchant à comprendre ce que l'elfe était devenu, en passant entre les filets de la mort. En quel genre d'animal avait-il été transformé ? Pour ainsi dire... En une personne assez égarée, qui peinait à faire ses marques, allant d’intuition en intuition, pour poser les pierres de son chemin. Il avait beaucoup à apprendre et même s'il avait l'immense chance d'être soigneusement entouré, il n'en demeurait pas moins vrai qu'on ne pouvait retrouver plus de cinq siècles de vie en une poignée de semaines. Cela prendrait du temps... Et tant qu'il n'aurait pas retrouvé le collier contenant son chant-nom, cela serait progressif et lent. Il la sentait septique et fière aussi, lorsqu'il la vit redresser le menton. Il en eut un fin sourire en coin. Il aimait ce caractère farouche, cette rebuffade qu'on attribuait souvent à son nouveau peuple : les vampires. « Je suis fier de toi, de la place que tu as, dans cette cité. » répondit-il, lorsqu'elle annonça quelles étaient ses attributions.

    Bourgmestre. Sa fille était une dirigeante. Il fallait croire, en effet, qu'elle avait cela dans le sang et dans la tête. Il admirait sa détermination. Son tempérament changeait grandement des bassesses qu'il rencontrait en nombre dans la cours des Kohans. « Je suis à Gloria, oui, mais je n'apprécie pas cette ville. Je préfère Caladon. Les gens ici me donnent plus envie de leur arracher la langue que de les écouter parler du dernier ragots puérile qui traîne aux tables de jeux de la cours. » répondit-il avec une sincérité qui ne masquait pas la violence du vampire qu'il était devenu. « Mais je dois le faire. Ivanyr est le dirigeant d'un clan vampirique. Sélénia a accepté de les accueillir. Le royaume du peuple de la nuit s'est financièrement effondré. Nevrast est à sa ruine. Nous avions besoin d'un refuge, le temps de nous reconstruire... Et Caladon n'est pas très connue pour sa charité, si je ne m'abuse. » railla-t-il, mais avec une certaine affection. Car en dépit de la radinerie dont souffrait la Revenante, il était plus à l'aise dans ses rues commerçantes que dans le marbre d'une château Kohan.

    « On m'a dit que tu avais fait la guerre. » Et qu'elle y avait perdu un bras. C'était par sa ferveur qu'elle avait gagné la confiance et les voix du peuple pour devenir Bourgmestre. « C'est très courageux. Cela ne m'étonne pas que tu aies alors été élue. » Il renouait les informations les unes aux autres. Il avait appris que la nouvelle Bourgmestre avait fait montre d'une bravoure et d'une intelligence remarquable. Aldaron rattachait alors ces informations à Eleonnora, sa fille. Il n'y avait que cela, dans sa mémoire. Des informations dispensées qui n'avaient pas vraiment de sens, mais côtoyer les siens l'aidait à assembler les pièces du casse-tête jusqu'à leur donner du sens, comme maintenant. « Cela est d'autant plus important alors que tu sois bien entourée. » fit-il, en revenant sur insinuation qu'il avait cru comprendre, en filigrane, lorsqu'elle lui avait dit avoir l'impression qu'Aldaron n’avait pas laissé le champ aussi dégagé qu'elle ne l’aurait espéré. Il n'avait jamais compris jusqu'alors pourquoi les membre de ce qui s’appelaient Marché Noir, lui avait confié que des directives anté-vampirisme avaient été de garder le contrôle sur Caladon et d'accompagner la nouvelle Bourgmestre.

    Peut-être que l'elfe qu'il fut avait craint pour sa fille, après la guerre ? Ou tout autre chose ? « Je ne me souviens pas de toute ma gloire passée, excepté ce que j'en ai lu dans les livres ou qu'on m'a conté. Je me souviens néanmoins de combien on peut être fier d'avoir combattu, la première fois, et combien on en ressort changé. On est plus engagé. Parfois on en veut même encore, de cette guerre. Et parfois, on aimerait oublier les horreurs qu'on y a vu et qu'on a vécu. Et on fait n'importe quoi pour oublier. Il y a des personnes autour de toi, qui sont là pour veiller sur toi, à ma demande. Ou du moins à la demande de celui que j'étais. Je suis navré d'apprendre qu'ils te gênent... En quoi ne te laissent-ils pas assez de champ libre ? » Il était prêt à y remédier, dans la mesure du possible. Si ces hommes appliquaient ses directives passées... Ils pouvaient aussi changer de comportement si Aldaron donnait d'autres ordres. Il ne voulait néanmoins pas laisser tomber Eleonnora. Si elle était sa fille, alors il désirait que rien de mal ne lui arrive et il la chérirait et la protégerait autant qu'il le pourrait. Il sentait cela en lui. Comme il l'avait ressenti avec Valmys.

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Les vampires avaient toujours été regardé sous le prisme de leur dangerosité. Même si Caladon avait une politique de tolérance et d'ouverture envers les nombreux peuple de l'archipel, les humains regardaient toujours aussi mal les crocs acérés de leurs compagnons. Elle même se souvenait, dans sa trouble jeunesse, des miséricordes qu'avait créer ce peuple belliqueux. Les rues de gloria n'avaient pas toujours été aussi sure qu'on ne l'imaginait. Mais tout cela n'était plus qu'un vague souvenir. La bourgmestre comptait d'ailleurs plusieurs représentant de la race parmi ses mercenaires; Et ces derniers étaient grassement récompensés, à la hauteurs de leurs compétences remarquables. Non elle n'avait jamais eu à se plaindre d'eux lorsqu'ils restaient à leur place. C'est ce qu'il semblaient avoir apprit récemment en essuyant la crise économique qui les touchaient de plein fouet. Elle aimerait appeler cela un retour du destin mais ce serait presque cruel. Elle avait presque pitié d'eux en les voyant se réfugier au sein du royaume humain. Elle disait bien presque parce qu'elle ne voulait pas non plus ressentir de la sympathie pour une peuplade qui choisissait délibérément de faire des accords courtois avec la monarchie de Kohan. Eleonnora ne rata pas les commentaire de son vampire de père à ce sujet. Elle esquissa un sourire narquois. Au moins elle était sur qu'il n'était pas perverti par la cours de son homonyme à la tête de Sélénia. Elle aimait presque la violence dont il faisait preuve dans ses propos. C'en était tout de même surprenant venant de lui. Elle l'avait connu froid, impassible, diplomate au possible. La spontanéité des paroles sortant de sa bouche amusaient presque sa fille. Elle pourrait bien s'entendre avec cette version de son père finalement.

Pour autant, il n'avait pas tord. Caladon n'aurait pas forcément accepté d'accueillir les vampire en leurs terres. Mais elle comprenait tout à fait l'avantage que pourrait en tirer Sélénia...c'est surtout cela qui l'inquiétait. Une telle alliance était un terrible argument sur la table des négociations. Pour cela elle devrait tenir son père, dans ses gardes fous, espérant que son chef d'amant partage son avis. Toutefois la Bourgmestre tenait elle aussi à son alliance. Délimar était une autre raison pour ne pas trop s'approcher de ce peuple.
«...Caladon a d'autres chats à fouetter en effet. Mais nous ne nous estimons pas hostiles pour autant. Non...ce qui m'étonne réellement c'est la somme qu'à du soulever le trésor royal pour accueillir tout un peuple en ses terres. Certes, le territoire Sélénien est beaucoup plus conséquent que le notre mais je ne suis pas sure que leur économie se porte aussi bien que la notre...mais après tout ce ne sont que des rumeurs. » Peut-être que depuis qu'Aldaron avait disparu de la circulation le marché noir avait ralenti la cadence de son drainage...Elle en doutait. Vu comment l'ancien dirigeant avait tout planifié, il devait avoir de multiple scénarios de secours bien avant que l'on y pense. Elle pensait surtout que les Sélénien faisait comme si de rien n'était en attendant que la tempête ne passe. Car c'était une évidence, les vampire seraient leur solution. «...Pour autant, qu'ils soient aisés ou pas, ils tireront avantage de votre situation à un moment donné. Enfin, c'est ce que ferait tout dirigeant digne de ce nom. » Elle haussa les épaules. C'est exactement ce qu'elle ferait et peut-être s'en mordrait-elle les doigts un jour de ne pas s'être d'avantage interposée entre le peuple de la nuit et son homologue Sélénien. Mais Eleonnora se rassurait en se rappelant la nature fière et indomptée des vampires. Espérons juste qu'ils demeurent aussi fourbe qu'on le raconte.
Elle connaissait la nouvelle dirigeante du royaume mais il lui semblait qu'elle serait plus convaincante que son coq de frère. Elle savait au moins protéger ses arrière, Eleonnora ne pouvait lui enlever ça.

Malgré la rancune plus ou moins fondée de la jeune femme, ce n'était pas pour autant qu'elle souhaitait une guerre avec les Sélénien. Les souvenirs de la dernière était encore bien trop présents. Elle redressa machinalement la broche qui maintenait sa cape. Couvrant distinctement son côté droit, le tissu laissait à ses interlocuteurs la liberté d'imaginer ce qu'il cachait: rien. Pourtant aux paroles de son père la demoiselle ressentit un léger frissons là où le fantôme de son bras se situait. Cela lui arrivait de temps en temps. Il lui arrivait de se relever avec se bras là le matin, comme si elle avait oublier qu'il avait disparu. Evidemment elle ne manquait pas de s'affaler. C'était un symptôme fréquent ressenti après la perte d'un membre disait son médecin. Cela restait tout de même déroutant. Elle répondit par un léger hochement de la tête. « Merci, je n'ai fait que mon devoir. » C'était une phrase toute faite qu'elle répétait à longueur de journée. On y ressentait presque de la blazitude maintenant. Elle se demanda cependant comment tout cela lui remontait aux oreilles. Même si c'était des informations maintenant connues du grand public, un mot de plus et son opinion pouvait être modifié...« Je ne suis pas la seule dont cette bataille a changé l'existence... » Elle lui jeta un regard pleins de sous-entendus. Sa fierté l'en empêchait mais elle pourrait presque exprimer son inquiétude. « ...Nous avons tous perdu beaucoup, n'est-ce pas? » Et gagné en quelque sorte. Elle avait perdu un bras et était devenue Bourgmestre. Il avait perdu la mémoire et rejoint son amant; Les deux revers d'une même médaille. Valmys avait perdu un père, elle avait perdu un amant...mais la vie continuait. Elle n'avait plus de temps à consacrer à ces jérémiades sentimentales.

« Mais je suppose que l'ancien toi avait prévu ma situation actuelle avant même que je le suggère...Il aimait avoir ses petits secrets...même à propos de sa succession. A vrai dire, je n'ai pas d'idée précise sur ce que tu as dicté mais les secrets sont un poisons insidieux et vicieux. Certes tout Caladonnien sait manier la vérité à sa manière mais je ne sais pas...j'ai l'impression que l'on me dissimule des choses père. » Elle eu un regard en circulaire avant de souffler plus bas; « J'ai l'impression d'être sous les feux de la rampe pendant que, dans l'ombre, le marché noir contrôle mon économie...Je n'ai aucune emprise sur lui, je n'en connais pas les responsables mais sans toi aux commandes...il m'effraie. » Elle ne pouvait imaginer ce que ressentaient les Séléniens. Mais surement que sa situation était pire. Elle se sentait dépossédée de tout pouvoir. Mais si ils se doutaient de ce que la peur pouvait provoquer chez les hommes...

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
    « Leur économie ne se porte guère bien, en effet... » La noblesse était très dépensière, par ego, plus que par utilité. Les finances n'étaient pas bonnes mais à terme, peut-être que ce ne serait qu'un mauvais temps un passer. Aldaron ignorait encore l'impact du Marché Noir sur cette crise économique. Ses souvenirs étaient bien éparses, il les apprenait, les découvrait, morceau par morceau. Il ne voulait pas presser les choses car il savait que c'était dangereux pour lui. Si les vampires oubliaient leur première vie, ce n'était pas sans raison. Son impatience venait ronger le frein de sa raison. Il y résistait, tant qu'il le pouvait. « Mais c'est le prix à payer, parfois, pour se faire des alliés. » Et cela, Victoria l'avait assez bien compris. Avoir des vampires dans ses rangs, redevables, valait quelques sacrifices dans le trésor royal déjà bien grignoté. Les vampires avaient été détruits, peu nombreux, contraints de ne plus mordre par des lois restrictives. Leur nombre avait décru au fil des batailles et des guerres. Leur race était à l'agonie, l'immaculation n'aidait pas à la pérennité du monde de la nuit. Il avait besoin d'un nouveau souffle, et il en aurait un.

    « Ils tirent déjà avantage de notre condition... Leur ego se plaît à nous regarder ramper dans la boue, défaits et affamés. Ils nous contemplent comme de puissants lions qu'ils ont domestiqués. Cela leur fait beaucoup de bien. » Le ton était froid mais neutre. Les séléniens se gorgeaient d'orgueil et d'assurance. Mais le peuple de la nuit était fourbe. Il n'était pas un animal qu'on pouvait domestiquer. Il mordrait à la première occasion glorieuse... Du moins, Aldaron l'espérait. Il lui tardait de connaître ce qu'Ivanyr désirait pour son peuple, mais pour l'heure, ils avaient besoin des Séléniens afin d'assurer leur précaire survie. Ils donnaient beaucoup, dociles. Ils acceptaient énormément de concessions, d'humiliations... Parce que c'était nécessaire et qu'ils finiraient par mourir dans le cas contraire. Les vampires étaient des prédateurs. Trop de personnes l'oubliaient quand leur ego voulait leur faire croire qu'ils en avaient dompté un. Et tôt ou tard la bête mordrait. Tout cela n'était qu'une question de temps.

    L'Ast esquissa un fin sourire lorsqu'elle souligna ne pas être la seule dont cette guerre avait changé l'existence. Elle avait aussi beaucoup changé pour lui. Il avait perdu sa mémoire et gagné une seconde existence. C'était assez différent, même si, pour être tout à fait honnête, il ne savait pas exactement ce qu'il avait perdu, ce qu'avait été sa vie d'elfe. Il n'en récoltait que des bribes éparses, des informations fragmentaires sans parvenir à résoudre ce qu'Aldaron fut. Il semblait être un personnage rendu complexe par toutes les activités qu'il menait en dehors de la lumière. Il avait beaucoup d'alliés et avait prévu beaucoup de chose, après sa vampirisation. En témoignait le sentiment de sa fille. « Je comprends ce que tu ressens. » Il avait emmené la pierre de communication avec lui pour se mettre un peu à l'écart et se poser au pied d'un arbre. Il avait beau ne pas être impacté par le soleil comme tous les vampires, il n'en demeurait pas moins vrai que celui-ci tapait fort.

    « Car j'ai ressentis la même chose, depuis mon éveil. Cette sensation qu'il y avait des choses qui se passaient autour de moi sans que je ne les contrôle. Je crois que j'avais prévu ma vampirisation et que j'avais donné des directives si cela venait à se produire un jour. Cela s'est produit et tout s'est mis en marche sans que j'en comprenne le sens. C'est déroutant... Au début. J'en ai voulu à mon autre moi de contrôler mon nouvel univers. Il n'avait pas le droit... Ça m'appartenait. » Il avait voulu esquiver ça, toutes ces personnes qui venaient à lui et qui organisaient au mieux, tel qu'ils avaient connu Aldaron autrefois, sans faire attention à ce qu'il était aujourd'hui. Des choses se passaient en son nom, sans qu'il ne parvienne à définir si c'était bon pour lui ou non... « Et puis j'ai commencé à voir les choses autrement. A accepter que je ne puisse pas avoir tout contrôle... Et aussi, à faire confiance à l'homme que j'étais. Je n'aurais jamais fait en sorte de me mettre des bâtons dans les roues. Ce que j'avais fait, je l'avais mis en place pour moi... Je pense que si je t'aimais comme ma propre fille, ce que j'ai fait pour toi, je l'ai fait en voulant ton bien. Je suis incapable de te dire ce que j'ai fait, j'ai tout oublié, même ça. Il va me falloir du temps pour saisir tout ce que je manigançais dans l'ombre et pour en reprendre le contrôle complètement. »

    Il se mordit la lèvre avant de continuer : « La seule chose que je peux te conseiller c'est de... Faire confiance à l'homme que tu appelais père. Je n'ai peut-être pas fait les meilleurs choix, ou pas fait ceux que tu aurais voulu mais tu n'as pas à être effrayée, car je ne te veux aucun mal. Et si je désirais tout contrôler, véritablement, j'aurais fait en sorte de placer l'un de mes hommes de main au titre de bourgmestre pas... Pas une personne qui m'a l'air extérieure à tout cela. Je crois que j'ai fait ce que fait tout père fait : t'aider du mieux que je le pouvais. Je suis parti trop tôt pour t'accompagner vraiment. Ce que tu vois comme une perte de contrôle... Tu devrais le prendre comme une aide... Au moins pour le temps que je recouvre ce que je faisais. Dès que je le pourrais, dès que j'aurais des cartes en main, je te promets de te donner plus de visibilité sur l'économie de Caladon. En attendant, laisse-toi porter... ? »

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Eleonnora haussa un sourcil. Elle avait peu de fois entendu son prédécesseur s'exprimer avec tant de froideur, surtout en ce qui concernait un incident politique. Devait-elle vraiment prendre ce ton au sérieux? Car tout avait changé...il avait le visage de celui qu'elle avait connu mais sous ces paupières cendrées ses iris avaient tourné au rouge. Elle n'aurait jamais cru l'ancien Bourgmestre s'impliquer autant dans la cause d'une race comme celle...des vampires. De toute évidence elle avait face à elle un homme différent de celui qu'elle soutenait. Pourra t-elle toujours être de son côté? Elle n'étais surement pas du genre à se tourner vers Sélénia de son propre gré; La jeune femme  se réjouirait presque qu'il prenne le revers de leur ego en pleine face. Toutefois elle se souvenait bien de tout ce qu'un peuple comme celui des vampires avait déjà provoqué dans le passé. Elle espéra silencieusement que ce qui existait de l'ancien Aldaron saurait raisonner la fougue du vampire nouveau né. La demoiselle avait souvent souhaiter voir ce masque de marbre se briser au profit de réelle émotions, alors qu'elle se ridiculisait dans ses éclats impétueux et incontrôlables. Cependant, elle se surprit à souhaiter que son nouveau père ressemble plus à l'ancien. Peut-être aurait-elle voulu que rien ne change, que tout soit resté comme avant. En regardant cet inconnu elle se dit que les sacrifices étaient sans aucun doute nécessaire pour en arriver là où elle en était. Si cet homme n'avait pas disparu subitement, perdu la mémoire et enrobé chez les vampires, serait-elle Bourgmestre à l'heure qu'il était?

De toute manière le sourire de ce vampire suffisait à la rassurer. Même si la peur, l'angoisse de na pas tout contrôler l'habitait, il lui rappelait qu'elle avait encore des alliés. A vrai dire, il y a quelques instant elle s'attendait à le blâmer pour tout les malheur que sa position lui faisait subir. Mais de le savoir entraîné dans le même rouage lui convenait davantage. Il était quelque part prit à son propre jeu. Aurait-il pensé un instant, lorsqu'il concoctait ses plans, de ses propres réactions? Égoïstement la demoiselle aimait savoir que quelqu'un partageait son trouble.
Et maintenant elle faisait face à cet homme aux talents simplement endormis. Il ne se rendait pas compte du rôle qu'il avait et qu'il aurait à jouer, ni de quelle mission il était investi. Elle avait la forte impression qu'il se jugeait encore sur une échelle qui ne convenait pas à son personnage...Sa fille avait du mal à imaginer comment tout cela doit être dérangeant et à côté sa situation semblait, encore une fois, bien minable. Et d'une autre part elle était soulagée de savoir que l'on souffrait autant qu'elle.
«Je suis heureuse de voir que tu puisse me comprendre... Et je suis sincèrement désolée pour...ce qui t'es arrivé. Si de mon côté, je peux faire quoi que ce soit, n'hésite donc pas. Je ne serai pas en reste.» Elle ne pouvait être que sincère pourtant elle n'avait aucune idée de si ce changement impactait la vie du nouveau vampire de façon positive ou négative. Elle n'avait pas d'autre choix que s'en remettre à lui, à ceux qui l'entouraient avec bienveillance. Lin dépit de son influence, elle aurait du mal à l'aider dans cette situation. Mais il venait de promettre de lui offrir ses cartes une fois qu'il les aura toutes en main...Autant en rester là. Elle ne manquera pas de lui rappeler cette promesse en temps venu. Elle avait conscience que, maintenant, elle ne pourrait pas en tirer beaucoup. «Je te fais confiance, celui que j'appelais père est toujours là. Et si tu fini par t'en souvenir, peut-être que nous pourrons nous entretenir davantage... » Ses lèvres s'écartèrent en un léger sourire. Se laisser porter? Il était mignon en fait. Elle supposa qu'il n'était pas raisonnable de parler politique avec l'ombre d'une personne qu'elle connaissait. Mais ce n'était qu'une question de temps, n'est pas?
«Pour le moment... » Elle jeta un regard dans la direction de Valmys qui...qu'est ce qu'il faisait au juste? Elle haussa les sourcils avant de revenir à l'image du vampire. « Pour le moment je vais suivre ma voie. Mon père m'a nommée pour cela, il devait être conscient de mes capacités, été je n'ai pas l'intention d'en dévier. Donc ne te soucie pas de moi. » C'était plus pour lui qu'il devait se faire du soucis...Elle lance un nouveau regard derrière son épaule où Valmys semblait s'agiter. «Par les....Je dois y aller! Prends soin de toi et ne mords personne!»
Sans en dire plus elle mit terme à la communication. Elle ramassa ses jupes pour se précipiter vers son idiot de frère. Alors qu'elle se rapprochait une odeur acerbe lui monta au nez. Elle arrêta sa course pour relever son unique bras devant son visage. C'était bien ce qu'elle avait cru voir. Brûlante, suant les poisons, la jeune femme pouvait voir vibrer son ventre plein d'exhalaisons. Plantée là, les flèches ne pourraient donner beaucoup de répit à la pauvre bête. Les jambes tremblotantes son combat semblait perdu d'avance. Eleonnora posa une main sur l'épaule de son frère. «Valmys, qu'est ce que tu fais? Partons de là. »

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
"- Nan, attends, j'y suis presque !"


Valmys avait répondu en toute innocence, le nez baissé sur son ouvrage. Son attention se déporta néanmoins subtilement sur sa sœur, puisque cette dernière l'avait rejoint. Il perçut son inquiétude, ou plutôt quelque émotion primitive face à la prédation. Perplexe, il cessa d'user de sa magie, et osa enfin regarder autour de lui. Quelques mèches de ses cheveux semblaient avoir disparues, et devant lui, la terre était mise à nue, parfois creusée.

"- Ah..."

Il revit la bête, immense, sombre, dont le corps troué suintait de pestilence. Fermement ancrée sur ses pattes tordues et griffues, la créature dardait un regard vide hanté de lumière sanguinolente sur eux. Sa gueule s'ouvrit, lentement, sur des crocs luisants d'une bave visqueuse, grouillants de vers. Elle ne bougeait pas, haletait juste. Danger imminent, dormant, presque. Qu'attendait-elle ?
Valmys eut un rire. Une de ses mains vint s'agiter dans les airs, juste au-devant de lui. L'illusion s'estompa, après quelques essais infructueux.

"- Voilà. Désolé, je pensais m'en occuper plus tard..."

Elle avait été le fruit involontaire de tentatives laborieuses d'accomplir ce qu'il aurait jadis bien plus aisément réussi. Au moins commençait-il vaguement à comprendre les principes de cette nouvelle magie, qui n'allait plus tant se chercher en eux, mais dans des aspects plus précis de la trame. Enfin... Si l'on pouvait parler de précision devant tant d'instabilité. La trame ressemblait à une surface d'eau dans laquelle on aurait fait pleuvoir, et il était complexe pour le moment de différencier les sources des ondes.
Distrait de son labeur, Valmys pouvait accorder toute son attention à sa sœur. Il avait perçu sa peur, il ressentait tout autant son soulagement. Si son instinct fraternel le sommait de la taquiner sur sa peur, sa nature de Cawr eut le bon goût de passer au-devant.

"- C'est fini. Tout va bien. Tu as déjà affronté pire que cela."

En appelant son honneur, son amour-propre, Valmys savait que ce dernier consolerait et rassurerait sa sœur bien mieux que lui. La laissant s'auto-congratuler, le jeune mage profita de cet instant pour finir son ouvrage. Il le tendit ensuite à Eleonnora.

"- Tiens. Essaye-le."

C'était un bras, mécanique. Toutes les articulations étaient présentes, du coude jusqu'aux phalanges de la main. La matière en était indescriptible : terre, bois ? Pierre ? Les trois à la fois ? En tout cas, il avait été comme vernis, ou cuit, et se présentait comme lisse de surface, et solide, tout en laissant apparaître, comme une décoration peinte, les rainures chaotiques de ses matériaux. Pour le moment, des sortes de tresses végétales composaient les lanières qui devaient aider à attacher la prothèse au corps d'Eleonnora. Valmys proposa qu'ils les changeassent par un tissu plus solide sitôt qu'ils auraient retrouvé des terres civilisées, ou par une attache plus "chirurgicale" sitôt que la magie se serait stabilisée. Il effectua d'ultimes ajustements, adaptant la taille de sa création aux proportions de sa sœur. Cela lui prit un moment, beaucoup de sourcils froncés, de grognements. Quelques miettes de prothèse tombèrent alors qu'elle se reforgeait. S'écartant, pour vérifier l'exactitude de son ouvrage, Valmys eut un soupir soulagé... Et clairement fatigué.

"- Pfiou. Voilà qui est fait. Je me sens trop épuisé pour te montrer tout de suite comment t'en servir, mais j'imagine que ce sera plus aisé demain... Pour peu que nous trouvions quelque auberge ou nous reposer."

Et ce n'était pas en restant plantés là qu'ils allaient trouver ladite auberge. Valmys n'aurait pas craché sur quelque convoi pour porter ses jambes à sa place. Étrangement, ce genre de convoi n'était pas à leur disposition. Il attrapa ses affaires.

"- Allez. En route. Tu me raconteras comment ça s'est passé, avec Dähddy ?"

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Eleonnora essuya sa main moite, essayant de ne pas laisser la frayeur qui l'avait fait reculer quelques instants plus tôt. Qu'est ce qui pouvait bien lui prendre à jouer comme ça? Son esprit devait être bien plus tordu qu'elle ne l'imaginait si ce genre de vision sortait spontanément de sa tête. Sans dire un mot de plus elle avait secoué la tête de façon désinvolte ne laissant pas de chance à sa voix de se dérober. La peur, est quelque chose d'effroyable, une sensation atroce, un spasme affreux de la pensée et du coeur, dont le souvenir seul donne des frissons d'angoisse.
Mais le sentiment véritable de frayeur n'avait lieu, ni devant une attaque, ni devant la mort inévitable, ni devant toutes les formes connues du péril: cela a lieu dans certaines circonstances anormales, sous certaines influences mystérieuses en face de risques vagues. La vraie peur, c'est quelque chose comme une réminiscence des terreurs fantastiques d'autrefois. Un homme qui croit aux revenants, et qui s'imagine apercevoir un spectre dans la nuit, doit éprouver la peur en toute son épouvantable horreur. C'est cette impression de mystère qui s'était dégagée de la gueule fumante de l'animal. Peut-être avait-elle senti la trame se mouvoir. Après tout la jeune femme n'était elle non plus pas dépourvue de capacités...Mais il avait bien raison ce bougre, elle avait fait face, avec bravoure à bien plus qu'une simple image de bête mourante. Elle n'avait pas perdu sa superbe pour autant alors un événement aussi futile n'aurait pu la terrasser. Elle se racla la gorge.

« Bien évidemment, j'ai vu la mort dans les yeux, langues sortir des bouches et les ongles être arrachés. Je n'ai donc peur que de peu de chose..Je me suis inquiétée pour toi simplem- » La bras mécanique que son frère tendait avec insistance pendait devant ses yeux. « Oh...oui, merci. »

Elle jeta un regard aux alentour avant de dégrafer la broche qui soutenait la cape qui couvrait la partie droite de son corps. Elle hésita un instant, laissant ses doigts parcourir le tissus de sa manche tombante. Ce n'était pas souvent qu'elle montrait sa blessure aussi explicitement. Elle avait mit beaucoup de temps à se dévoiler devant ses dames de chambre. Son bras coupé, la preuve de sa bravoure, le symbole de son sacrifice pour Caladon était lorsqu'on le regardait de plus prêt un simple moignon, petit et difforme. Elle aurait bien sur pu faire repousser son bras mais pour la légende et la postérité aussi elle était capable de nombreux sacrifices. Dans un élan de décision elle retroussa sa manche, mettant sa peau à nu. L'épiderme à la forme désormais boursouflée frissons comme un petit animal qui sortait enfin le nez de sa tanière. Eleonnora n'attendit pas une seconde de plus avant de plaquer la prothèse à même sa peau. En quelques cliquetis elle sangla l'objet pour qu'il adhère parfaitement aux formes de son corps. Il pendouillait là, à la place de son membre arraché. Elle le soupesa, l'examina, approcha son visage avec soin, parcourant les articulations avec curiosité. Impossible de déterminer le façonnage véritable de cet objet mais l'élégance de l'objet bien qu'encore brut semblait déjà avoir l'intérêt de sa future propriétaire.

Elle laissa à son frère le temps de se débattre avec ses envies d'artisan perfectionniste. Eleonnora examinait silencieusement l'air concentré de ce dernier, grognant, fronçant des sourcils alors que la matière lui résistait puis se façonnait lentement sous ses doigts. Peut-être était-ce le soulagement de ne pas s'être fait attaquer par une bête aux yeux fous, peut-être était-ce celui d'avoir vu son père ou tout simplement celui de ce silence qui apaisait la jeune femme. Elle senti sa poitrine lentement redescendre. Le bruit des feuillages répondaient à l'action du jeune Cawr en ondulant doucement sous la brise. Autour d'eux il n'y avait rien, à des lieux de toute vie humaine, de la turbulence des marchés et de la rumeur du port. Pas de regard en coin ni de sollicitation, pas de foule ni d'entretien. Dire qu'elle avait vécu ces derniers mois dans une agitation constante était presque un euphémisme. Alors cet aparté, à l'ombre des branchages luxuriant sonnait comme un étrange songe. Même ses rêves peuplés de spectres et de sang ne lui avaient jamais laissé ce répit là. Après les cris et les émoi elle se sentait si fatiguée...Qu'est ce que c'était fatiguant d'être une femme puissante...

Elle en aurait bien redemandé mais il semblait que une fois l'oeuvre finie, l'artisan avait lui aussi besoin de repos. Eleonnora examina plus rapidement le bras articulé pour y constater les changements; « Ce n'est pas si mal, pour l'instant ce n'est qu'un bel objet mais je suppose que t'occupera du reste plus tard. Tu t'en est bien sorti....merci Valmys.»  Elle prit soins de défaire les sangles de la prothèse, ne voulant pas abimer les attaches encore précaires pendant la route qui allait être inévitable. « Mais tu sais à quoi ça me fait penser? » Elle le regarda se relever avec un dynamisme dont elle ne le pensait pas capable au vu de son teint blanchâtre. Elle suivit en attrapant sa cape au passage. Fouillant dans la doublure d'un geste habile elle sortit un collier au pendentif familier. « Tu t'en souviens? » Le flamand en fer métal doré se balançait au rythme des pas de la demoiselle. Elle se sentit vite embarrassée d'avoir sorti ce vieux bijou de nul part. Après tout elle aimait dire qu'il fallait se souvenir d'où l'on venait. Elle gardait donc souvent son animal totem sur elle. Puis il fallait bien l'avouer, ce genre de présent ne s'oubliait pas facilement.  « Dire que tu es passé de ça à un bras parfaitement reconstitué! L'évolution est plutôt surprenante, n'est-pas?» Elle avait de la gratitude envers lui.


« Avec Dad-Aldaron nous avons été assez brefs...c'est assez troublant de le voir ainsi; Comme si ce n'était plus vraiment lui...Il n'a pas pu me donner beaucoup d'information, je ne sais même pas comment il s'est retrouvé l'a bas. Mais je voudrais bien te parier que c'est son amant qui a...qui l'a...mince.  » Elle faisait rouler nerveusement le petit bijou entre ses doigts.Qu'est ce que cela changeait de toute manière? Elle se focalisait sur des choses sans réelle importance. Les étaient les faits, seules leurs conséquences importaient. «Les vampires...sont sanguins, c'est le moins qu'on puisse dire. Je ne sais pas si c'est une bonne chose s'il reste au sein d'une communauté expatriée, pleine de rancœur et d'animosité les premiers mois de sa vie vampirique...Je me doute qu'il vive son idylle amoureuse mais je ne sais pas...c'est un homme puissant. » Et qui recouvrirait bientôt la mémoire. Depuis leur arrivée triade n'avait jamais prit parti pour quelqu'autre cité, royaume ou ethnie...Elle se doutait que la situation des vampires finirait par dégénérer, ces derniers étant incapable de cohabiter en paix avec quoique ce soit.
Elle soupira. « Mais mes émois n'en valaient pas la chandelle. Je m'excuse de... »
Une silhouette se dessinait lentement à l'horizon soulevant dans son sillage un nuage de poussière. « Tu vois ça?» Elle pointait du doigt le point qui s'était transformé en cavalier et qui soudainement était bien proche. Il n'était pas seul, c'était certain. La jeune femme recula d'un pas. Était-il là pour elle? Ah oui, elle aimait se mettre dans des situations compromettantes et ça le conseil n'allait pas l'apprécier. le conseil ni personne, elle serait la risée des dirigeants si l'on apprenait qu'elle avait quitté délibérément son convoi pour se faire attaquer par la suite...Mais elle n'était en rien une guerrière et était accompagnée d'un mage sur les rotules. Elle caressa la crosse de son feutonerre.

« Dame Ostiz!» Son nom résonna d'un ton familier. Elle pouvait maintenant distinguer les couleurs de Caladon se détacher par dessus les feuillages. Le soldat s'arrêta à leur hauteur dans un nuage de poussière. Il avait l'air essoufflé mais surement soulagé de voir le duo saint et sauf.
« Je ne m'attendais pas à ce que notre Bourgmestre soit aussi loin sur le chemin... » Il tapa sur l'encolure de sa monture avant de passer une jambe de l'autre côté. « Vos humeurs sont-elles apaisée? »

Eleonnora regarda le soldat le sourcil levé. Avait-elle vraiment engagé un mercenaire aussi insolent? Il faisait comme si ce genre d'incident se produisait régulièrement...quelle impertinence...Derrière lui haletaient deux autres montures. Au moins, elle le reconnaissait, ses hommes de main avaient le sens des priorités. Elle n'allait pas rougir d'avoir réagit ainsi impulsivement quelques heures plus tôt mais elle avouait que sa bêtise finirait par la mettre dans le pétrin si elle continuait ainsi. Le fait que sa garde veille sur elle comme on veillerait sur une enfant était un peu réducteur...Mais était-elle vraiment en position de faire un nouveau caprice? Elle donnait elle m^me des raisons d'être babysittée...

« Vous savez que certains se sont vu enfermé pour moins que ça?...Vous avez levé les yeux au ciel ma parole! »
« Je ne vois pas de quoi vous parlez madame...»
« Aah, là! Vous l'avez refait! »
Il ne pipa mot et tendit les rênes de la monture avec insistance. Ces mercenaires n'avaient vraiment peur de rien. Eleonnora hésita un instant, un regard de défi transperçant cet impudent avant de se saisir vivement des lanières. Elle lui tourna le dos avec un air hautain. C'est à peine si on l'entendait marmonner dans sa barbe.
«Sir.»
Il leva un bras indiquant la seconde monture à Valmys avec une fermeté respectueuse.

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Certaines choses se passaient de mots, a fortiori quand ces derniers auraient blessé l’orgueil ou l’égo. Il n’y avait pas même besoin de chant-nom pour lire en Eleonnora. Valmys s’amusa intérieurement de ce privilège qu’ils avaient, lui, le vent, et la forêt, quand bien même il savait n’être ni le bouclier ni l’arme qui permettait à sa soeur d’affronter les souvenirs et blessures qu’elle cachait sous sa cape. Chacun réagissait différemment à une épreuve qui venait autant fracturer l’histoire d’un corps. Certains riaient pour s’en détacher, et survivre. D’autres contemplaient le silence, ne trouvant de mots qui s’accordassent à leurs émotions. Un sourire, une larme, un haussement d’épaules, y avait-il quelque chose qui ne sonnait pas faux ?
Les froncements de sourcils et grognements insatisfaits de celui qui modelait la terre et la végétation venaient offrir à Eleonnora un bon prétexte auprès d’elle-même pour ne pas parler, et avoir quelque autre élément sur lequel porter son attention. Son bras était toujours absent, mais il y avait cette prothèse qui se construisait. Quelque chose qu’elle n’avait jamais eu encore, et que les autres n’auraient pas. Du reste, le Chanteterre faisait de son mieux pour respecter sa jeune soeur. Ses gestes étaient précis, et délicats. S’il devait la toucher pour orienter sa magie ou vérifier quoi que ce soit, c’était du bout des doigts, concentré sur son ouvrage. Une infinie précaution entourait sa magie, l’embêtant pour parvenir à ses fins, mais protégeant celle que la guerre avait blessée. Lorsqu’il eut terminé, Valmys s’écarta, vérifia son travail, soupira, et offrit sa proposition autant que ses questions, en reprenant son sac.

Les compliments et les remerciements étaient aussi inattendus qu’ils étaient appréciés. Eleonnora n’aurait peut-être pas parlé ainsi en public. Dans tous les cas, elle parvint à dessiner sur le visage de Valmys un sourire fier, et dans son coeur une douce chaleur. Il n’était pas un être de suffisance, mais recevoir un tel présent de celle pour qui la sueur de son front et de sa magie venaient de se répandre avait une saveur unique, des plus appréciables. La bourgmestre présenta ce pendentif en métal qu’il lui avait fait jadis, et le baptistrel ne put masquer sa surprise. Agréable surprise. Il avait été persuadé qu’elle laisserait cet objet dans un coin, et elle le portait avec elle. Etait-ce pour l’objet en lui-même ? Par affection ? Dans tous les cas, elle avouait bien des choses par-delà ce simple geste. Touché bien plus par cela que par la constatation d’une évolution qui n’avait pas vraiment eu lieu, Valmys voulut encourager sa soeur. Il la préserva donc de toute gêne, se contentant de la remercier sans se moquer et sans la pousser à ouvrir davantage son coeur. Un très fin sourire trahissait qu’il l’avait bien comprise.

Lui aussi avait été troublé, au tout début, quand la recherche de son père par pierre de communication l’avait guidée vers ce vampire tout neuf. Aldaron l’avait prévenu, jadis, l’avait incité à se préparer. Il lui avait donné un guide, un fil conducteur, afin d’accomplir sa quête. Les histoires de politiques n’inquiétaient guère Valmys qui, défait de tout devoir en ce sens, ne voyait pas le danger qui se profilait à travers le père qu’était ce nouveau vampire. Il s’apprêtait juste à porter à Eleonnora les mots qui avaient su l’accompagner dans le deuil et la naissance, lorsqu’elle lui indiqua quelque nuage de poussière vers l’horizon ; assez loin pour être indistinct aux yeux qu’avaient eu Valmys jadis, assez proche pour que désormais ses sens de Sainnur puissent le distinguer. Sa main vint sur celle qu’Eleonnora avait portée à son feutonnerre. Elle oubliait un peu vite qu’il y avait aux alentours des personnes qui potentiellement pouvaient souffrir des meurtres. Valmys avait déjà subi ses premiers mensonges avec suffisamment de peine, il n’avait pas envie de découvrir l’effet que lui faisaient de tels éclats dans les vibrations du monde - et ce, encore moins en étant seul avec sa soeur, et un inconnu.

Le cavalier était pour le moins audacieux. Parler ainsi de la bourgmestre, en connaissant lesdites humeurs ! Cherchait-il à en tester les limites ? Valmys essaya de deviner son âge. Il songea également que ce n’était peut-être là qu’une façon de vérifier qu’il était bien face à la véritable Eleonnora, et non pas quelque copie ou illusion. Il allait être servi, c’était certain. Un sourire en coin, amusé, étira les lèvres du baptistrel, en voyant sa jeune soeur se remplumer pour mieux répondre. Tout allait bien. Le Sainnûr prit les rênes de la monture qui lui était donnée, en remerciant l’audacieux garde qui était venu à leur secours, et en expliquant qu’il ignorait totalement comment monter à cheval. L’unique fois où cela lui était arrivé, il avait davantage été le bagage de la monture qu’un cavalier. Il n’aimait pas utiliser les bêtes. Ainsi marcha-t-il aux côtés de l’animal, en profitant pour faire autant sa connaissance que celle de leur compagnon de route, récoltant discrètement juste assez d’informations pour lui faire parvenir un présent, sorte de remerciement, ou excuse, pour la gêne occasionnée.

Sitôt qu’il eut obtenu ce qu’il voulait, Valmys se fit de plus en plus discret, économisant ses forces. Par chance, les forces d’Eleonnora avaient eu le bon goût de marquer un arrêt non-loin, se doutant que quelque regret était possible. La bourgmestre s’en défendit à sa manière, avec panache. Du moins, ce fut le vague souvenir que le baptistrel garda de la soirée, focalisé qu’il était sur le repas qu’il se devait de prendre et ses pieds qu’il devait reposer. Il n’offrit de parole que le nécessaire pour se montrer respectueux, avant d’aller se jeter amoureusement dans son lit, et s’endormir presque immédiatement.

Le lendemain, à l’aube, il rejoignit Eleonnora. Il était question de lui apprendre à maîtriser son bras, et ce sans faire exploser l’auberge. Il fallut un bon thé et un petit déjeuner copieux pour remettre Valmys totalement d’aplomb, et rouvrir ces petits yeux que le sommeil avait englué. Lorsque ce fut fait, il proposa à Eleonnora de faire leur premiers essais en extérieur, autant pour protéger les autres que pour éviter une potentielle gêne à la bourgmestre si ses essais n’étaient pas fructueux du premier coup. Leur décision prise, il s’attela à des explications imagées sur la trame, la façon dont elle intervenait en chaque chose, et la façon par laquelle il fallait, pour user de son bras, autant glisser la trame en lui qu’autour de lui. Il ignorait les impératifs diplomatiques du voyage d’Eleonnora. Lui, il avait toujours tout son temps pour expliquer, ré-expliquer, protéger, jusqu’à ce que sa jeune soeur se soit complètement approprié ce bras tout neuf.

descriptionA bras ouverts [Valmys]  EmptyRe: A bras ouverts [Valmys]

more_horiz
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
<<