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Août 1763 - Chaîne des Nin-Daaruth

Le vent ne cessait de hurler entre les pics abrupts, déchirés comme les crocs d’une mâchoire gigantesque. Les monts Nin-Daaruth n’avaient rien d’hospitaliers mais ils se drapaient d’une beauté sauvage et sans concession que le vampire admirait et dont il ressentait l’appel jusqu’au plus profond de ses os. Cheminer sur ces pentes raides et ces chemins escarpés à flanc de précipices lui apportait une vive sensation d’être en vie, même dans la non-mort. Sur la ligne d’horizon en direction de la côte, la sinistre forêt de Licorock étendait sa glaciale et cauchemardesque luxuriance, semblant le narguer. Il devait absolument en finir avec ce qui se trouvait à l’intérieur dès qu’il le pourrait. C’était un rendez-vous qu’il ne pouvait qu’honorer, dès que son peuple serait suffisamment en sécurité. Tant qu’un seul vampire du Triumvirat serait encore sur Nyn-Tiamat, il ne voulait pas engager les hostilités. Pour le moment, ce n’était pas un conflit à proprement parler qu’il recherchait mais un dragon rouge, ce qui, dans ce décors blanc et gris, n’était vraiment pas une tâche des plus ardues. Et en soit, il l’avait déjà trouvé, mais l’immensité du bestiau le contraignait à jouer les alpinistes en priant que l’autre gargantuesque ne se décide pas à bouger lui aussi pendant ce temps. Dès qu’il en avait l’opportunité, il usait de bonds, même si cela signifiait qu’une fois sur deux il provoquait un éboulement plutôt que sa téléportation. Lorsque sa vue commença à s’emplir de plus de rouge que de blanc, il se décida à donner de la voix et à appeler la créature.

De ce que Kaalys lui en avait dit, cette espèce de montagne sur pattes était le dragon qu’il voyait dans ses cauchemars, de fait si c’était le cas il devait absolument le confronter pour savoir ce qui se passait, son lien avec lui, pourquoi oui, pourquoi apparaissait-il dans ses pensées alors qu’aucun autre spectre ne lui en disait mot. Le Dragon de l’Ire avait peut-être les réponses qui lui manquait et si c’était le cas ? Il l’aurait pourchassé sur tout l’Archipel pour les obtenir. Tandis qu’il approchait en faisant très attention de ne pas plonger vers une mort certaine, le haut mage ne put que se faire spectateur diligent des sentiments qui éclosaient en lui avec une force insoupçonnée : tendresse féroce, fierté orgueilleuse, profonde tristesse, acide amertume… Un instant, son pas s’altéra et il prit le temps de profondément inspirer et expirer pour garder tout cela sous contrôle. Lorsqu’il releva la tête, ce fut pour croiser un oeil de la taille d’un navire. Surpris, ne s’attendant pas à ce que l’autre l’ait entendu au travers de ce blizzard, il cilla et resta un instant les bras ballants, avant de se reprendre et de lui rendre son regard. Devoir plonger sa mire dans un seul oeil immense était quelque peu troublant, cependant, et même fort déconcertant. S’il avait voulu le regarder face à face et verbatim, il aurait été contraint à des allées et retours entre les deux énormes globes, ou à une sacrée entorse du cou. Bien, il avait son attention, et maintenant, que se passait-il ? Comment expliquer la raison de sa venue sans passer pour un fou ? Dragon ou non, il n’était pas certain que l’autre puisse croire à la vérité nue si elle était servie sans enrobage. Et dans le même temps, il ne savait pas comment arrondir les angles.

A Néant la douceur !

Cela fait 5 ans que je suis éveillé dans ce monde et pendant ces 5 ans vous êtes apparus dans mes transes et mes souvenirs alors que je n’ai absolument aucune connexion qui me ramène à vous. Je veux savoir pourquoi

Voilà qui ne pouvait être plus clair et honnête non ? Il se tint face à l’immense museau écailleux sans reculer, plus craintif du maelström d’émotions qui rugissait en lui que de cet être immense qu’il ne connaissait que par les dires d’un autre dragon et par quelques images dans son esprit.

Disposez-vous de la moindre information qui puisse m’aider ? Du moindre indice ? Votre nom, je l’ai appris de Kaalys, jamais auparavant je ne l’avais su. Et vous ? Est-ce que vous savez qui je suis ?

Allait-il enfin pouvoir comprendre ces énigmes qui le poursuivait depuis des années ? Qui lançaient leurs assauts au plus mauvais moments pour l’abattre et lui défaire ? Est-ce que cet être, ce dragon, était bien la clef qui manquait à son terrible puzzle ? Tout semblait le lui indiquer alors… alors il espérait…

Qui je suis vraiment ?

Son regard clair se posa dans l’iris ignée, alors qu’il haletait de devoir parler aussi fort pour se faire entendre au travers du blizzard. Son coeur mort aurait pu battre à tout rompre s’il avait possédé cette capacité. La question qui quitta ses lèvres ensuite fut celle qui le taraudait depuis déjà longtemps et qu’il avait posé à d’autres sans que la réponse ne l’apaise.

Pourquoi ?

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¤ Au bout du monde ¤

Agrippé à l’un des flans d’une des montagnes composant la chaine de Nin Daaruth, l’enfant de l’orage se reposait, profitant d’un rare instant de calme. Ce moment, le rouge l’avait mérité. Quand avait-il pu souffler ainsi pour la dernière fois ? Depuis combien de temps n’arrêtait-il pas de se dresser face au danger ? Le Néant n’était plus. Le Tarenth n’était plus. Le Tyran Blanc n’était plus. Les déesses n’étaient plus. Les chimères n’étaient plus. Les grands dangers auxquels il avait dû faire face avaient été vaincus. À présent, le guerrier pouvait se permettre un peu de repos. Une détente toutefois relative. Ses enfants n’étaient pas loin et il demeurait ce mal étrange en provenance de la forêt qui étendait un malaise spirituel que Verith s’assurait de repousser pour ses enfants et pour lui-même. Mais cette simple action était pour lui une bagatelle par rapport à tout ce qu’il avait dû traverser ses dernières années.

Cet instant de paix était bon, mais il restait relatif. La paix n’était pas encore acquise. Le combat du colérique n’était pas encore terminé. Il avait encore du travail. Il avait encore deux ennemis à abattre. Toutefois, il pouvait bien attendre quelques heures de plus après avoir été de reléguer au deuxième plan par des menaces plus importantes et surtout plus immédiates. Verith devait être en forme avant de s’élancer dans une nouvelle bataille. Et ici, en ce lieu reculé et difficilement accessible, la seule chose pouvant éventuellement troubler sa tranquillité était ses fils. Du moins, c’est ce qu’il pensait.

« …. »

Le rouge, qui avait les yeux fermés, fronça légèrement les sourcils alors qui lui semblaient entendre au loin quelque chose. Un bruit, un cri devenant murmure en se perdant entre les montagnes. Il s’agissait sans doute du vent, ou alors d’un animal se faisant dévorer par un autre. Le dragon décida de l’ignorer.

« Ve … ire. »

Le bruit recommença, il semblait un petit peu plus proche qu’avant, du moins en le rapportant aux proportions d’un dragon. Il ne s’agissait pas d’un bruit mental, il ne pouvait pas s’agir d’un dragon tentant de communiquer avec lui. Pour autant, le bruit semblait avoir une forme bien particulière. Presque comme un mot, différent d’un cri d’animal. Toutefois, le colérique décida encore une fois de l’ignorer. Préférant rester plongé dans le calme et le repos.

« V …. De l’ire. »

Il fallut un peu moins d’une minute avant que le bruit se fasse une nouvelle fois entendre, cette fois-ci plus distinctement, quoi qu’encore lointain. Qui pouvait bien venir en pleine montagne pour se mettre à crier ? À moins que cela ne soit simplement le vent et son esprit lui jouant des tours. L’enfant de l’orage dodelina de la tête et la reposa contre le sol, fronçant les sourcils un peu plus fort, se concentrant pour revenir au calme duquel on tentait de l’extirper.

« Verith de l’ire. »

Le dragon libre leva la tête d’un seul coup. Non ce n’était pas possible, c’est bien lui qu’on appelait. Qui pouvait bien l’appeler ? Qui osait prononcer ainsi son nom ? Qui avait l’outrecuidance de vouloir ainsi troubler son repos ? Lentement, Verith observa autour de lui, essayant de localiser la source de l’appel. Il n’y avait que blancheur immaculée. Des flancs de montagnes escarpés et couverts de neige, certes pas aussi parfaits que le croc du dragon et le croc du dragonnet. Le rouge ne vit rien et s’apprêta à reposer une nouvelle fois son museau contre le sol lorsque l’appel se fit encore entendre. Cette fois-ci, Verith localisa directement la source. Il n’en revenait pas. Un bipède se tenait à flanc de montagne, sur un chemin plus que primaire, balloté par le vent et la neige et hurlait son nom en sa direction. Le colérique vint passer ses griffes contre son front essayant de ne pas exploser sur place ses enfants étaient un peu plus loin, sans une cavité de la montagne, et il n’avait aucune envie de les inquiéter ou de se montrer dans un état de rage profonde. Et pourtant il n’en était pas loin tellement il n’en revenait pas. Et pourtant il aurait dû s’en douter. Et pourtant, il le savait. Les bipèdes sont pires qu’une tique. L’un de ces misérables était venu jusqu’ici, jusque sur une montagne de la chaine de Nin Daaruth, afin de l’importuner. L’inconscience de ces vers de terre et leur insolence étaient véritablement un abime sans fond. Venir ici, avec toute la difficulté que ca représente et le risque de mort plus qu’élevé à cause d’une chute, d’un éboulement, d’une avalanche, du vent ou même du froid. Tout ça simplement pour importuner un dragon et donc encourir la mort. Verith en resta sidéré l’espace de quelques secondes, tandis que le bipède continuait à hurler son nom.

La pensée selon laquelle il ferait mieux d’ignorer l’appel du bipède et attendre de le voir chuter ou être emporté par le vent pour venir s’écraser et mourir contre les rochers effleura l’esprit de l’enfant de l’orage. Toutefois cette idée fut rapidement chassée par le fait que l’autre continuerait de brailler et le dragon ne pourrait avoir la paix. Que Vie soit témoin de l’immense patience dont il peut faire preuve pour ces créatures inférieures dont il ne désire que la disparition.

Peut-être est-ce en raison de la curiosité, de la sidération, ou du désir d’en finir rapidement afin de retourner au calme, sans toutefois penser pouvoir l’obtenir à nouveau suite à ce dérangement, que Verith déploya ses ailes et se laissa glisser contre le vent avant de donner quelques petits battements d’ailes afin de rejoindre le flanc de montagne sur lequel se trouvait l’importun bipède. Venant s’y accrocher, il finit par lever le museau, le mettant de profil, afin d’observer au plus prêt l’être qui osait le déranger. La surprise frappa ce dernier lorsqu’il vit l’œil immense du dragon rouge face à lui. Une surprise qui n’échappa pas au colérique. Quoi ? Ce dernier se rendait dans un endroit particulièrement dangereux en empruntant un chemin suicidaire, l’appelait et s’étonnait ensuite de le voir apparaitre. Une pointe de lassitude gagna le géant de feu. En même temps, à quoi s’attendait-il de la part de bipèdes ?

Un léger grognement fini par s’échappa du rouge alors que le vampire restait ballant et sans réaction. Si ce dernier était monté jusqu’ici l’opportunité pour au final ne rien dire, le rouge allait assurément laisser sa colère exploser et faire un quelque chose de dingue pour se défouler. Peut-être raser le dernier nid de vampire de cette île depuis que leur pseudo forteresse n’était plus. Après tout, un vampire venait le déranger, alors ce peuple paierait pour cela. Après tout, ça ne serait pas le seul crime que ces cadavres suceurs de sang auraient commis envers sa lignée. Finalement, juste avant que Verith ne décide d’arracher le flanc dans la montagne sur lequel il se trouvait pour entrainer le bipède dans un éboulement mortel, ce dernier se mit à parler.

« Cela fait 5 ans que je suis éveillé dans ce monde et pendant ces 5 ans vous êtes apparus dans mes transes et mes souvenirs alors que je n’ai absolument aucune connexion qui me ramène à vous. Je veux savoir pourquoi. Disposez-vous de la moindre information qui puisse m’aider ? Du moindre indice ? Votre nom, je l’ai appris de Kaalys, jamais auparavant je ne l’avais su. Et vous ? Est-ce que vous savez qui je suis ? Qui je suis vraiment ? Pourquoi ? »

Verith hurla intérieurement sa rage et son désespoir. Pourquoi était-ce à lui de s’occuper des cas désespérés provenant des bipèdes? Pourquoi était-ce à lui de répondre à leur question ? N’avaient-ils pas quelqu’un d’autre à qui ils pouvaient s’adresser … oh oui, Verith et Kälyna avaient tué ce quelqu’un. Mais qu’importe, ne pouvaient-ils pas se débrouiller par eux-mêmes ? Certes, d’accord, les bipèdes étaient à ses yeux tous des incapables, mais tout de même ! Le rouge jure intérieurement à l’encontre de Kaalys, c’était donc ce fichu ancien lié qui l’avait amené jusqu’à lui. Voilà que les anciens liés et les bipèdes complotaient contre lui dans le but de troubler sa tranquillité. Il aurait dû se débarrasser de celui-ci dès le début ! Verith nota dans son esprit de penser à le faire lors de leur prochaine rencontre.

Lentement, le dragon rouge redressa son museau.

« Je sais qui tu es. »

Verith commença à charger sa gueule de flamme avec l’intention de réduire en cendres l’indésirable.

« Un misérable vermisseau qui ne connait pas sa place et qui a eu l’audace de se hisser jusqu’ici, au plus proche des cieux, tout ca pour m’importunité avec des questions ridicules. J’ai tué votre protecteur, mais je ne l’ai pas fait pour prendre sa place ! »

Soudainement, l’enfant de l’orage s’arrêta dans son action alors qu’il détaillait le bipède qu’il allait frire dans quelques instants. Si, il savait qui ce dernier était. Refermant sa gueule, les flammes jaillirent par ses naseaux, venant faire fondre et roussir autour du bipède, laissant un cône au centre dans lequel Achroma se trouvait et où il ne risquait rien. L’enfant de l’orage marqua une courte de pause alors qu’il dévisageait son interlocuteur.

« Si. Je sais qui tu es. Je t’ai déjà vu dans les souvenirs d’un autre. Tu étais là, tu as assisté à la mort du Tarenth et à la libération du Tyran Blanc. Je t’ai déjà senti à Gloria. Sous la terre, marionnette du Tyran, tu lui servais de bourreau, tu étais seul, brisé, séparé de celle qui partageait ton âme. »

La voix du colérique se chargea de mépris.

« Je sais qui tu es, toi, bipède lié, dragonnier de Silarae. Celle qui parjura et ne tint pas son engagement envers moi. Celui de me ramener la tête de l’assassin de mon frère. Je suis apparu dans tes transes dis-tu ? Alors cela ne peut signifier qu’une chose. Tu t’acquitteras du parjure de ta liée, mais plus encore, tu iras trouver ta place de l’autre côté du miroir. Ta liée est morte et toi non, une déviance qui doit être rectifiée. »

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Et bien ? Qu’est-ce qui lui arrivait ? Qu’avait-il dit pour le plonger ainsi dans le silence ? Certes, il voulait bien comprendre que cela soit dément, qu’il ait pu le voir tout ce temps dans ses transes et ses souvenirs s’ils étaient des étrangers, lui plutôt que quiconque d’autre, certes, il voulait bien croire également qu’il ne l’avait pas annoncé avec force délicatesse et que cela pouvait choquer. C’était purement anormal et il le savait bien. Prenant son mal en patience, il décida de le laisser digérer cette information, comprenant parfaitement, en fin de compte, qu’il ait besoin de quelques instants pour pondérer tout cela. Peut-être aussi était-il nécessaire de prendre du temps pour qu’il puisse lui dire si oui ou non ces visions étaient dues à un lien entre eux ou pas du tout. Soupirant, il croisa les bras et attendit, se campant sur place pour résister au vent. Puis, soudainement, une réponse. Bien plus preste qu’il ne l’avait espéré. Attentif, il releva le regard dans le grand oeil avec force espoire… pour être immédiatement déçu et même désabusé. Un soupire échappa à ses lippes et il s'apprêtait à bondir hors de portée sans même essayer de contredire le dragon. Sans doute y aurait-il en vérité matière à vitupérer, mais présentement, il n’avait absolument aucune intention de perdre son temps ou son énergie à essayer d’éduquer une créature aussi inepte. Tant pis pour ses espoirs, il semblait qu’on l’eut leurré en lui parlant de cette bête. Peut-être même était-ce une tentative de se débarrasser de lui.

Cependant, l’attaque ne vint pas. Stoïque, il haussa un sourcil, absolument pas convaincu qu’un miracle ait subitement transformé ce lézard buté en une créature sensible. Cependant, qu’il n’attaque pas, ou pas immédiatement, lui allait fort bien, il se dépenserait moins pour repartir. Et ce fut donc sans se cacher qu’il lui tourna le dos avec l’intention de le laisser à sa mauvaise humeur. Ses pas ne s’arrêtèrent qu’à la reprise de parole du dragon et il tourna vaguement la tête vers lui. Ses sourcils se froncèrent, et il pivota pour lui faire face une fois de plus. Tient donc, finalement il le connaissait ? Rien de ce qu’il énonçait de faisait rejaillir de souvenirs chez lui et sa seule réaction primaire fut un léger sourire à l’amusement caustique. Aldaron au féminin ? Que c’était mignon. Pourtant, de ce qu’il en avait vu avec Kaalys, les dragons savaient reconnaître le genre des bipèdes. Est-ce que le côté sauvage lui volait cette capacité en plus de celle de la courtoisie et du bon sens ? Mais non, il semblait simplement qu’encore une fois, il eut surestimé son interlocuteur. Plus les minutes passaient et plus il avait l’impression qu’on avait réellement cherché à lui faire perdre son temps. Il ne savait pas pourquoi le dragon rouge apparaissait dans ses souvenirs mais si ça ne lui revenait pas, c’était sans doute parce que leur relation avait eut la même teneur que cet échange : stérile au possible.

Pourtant il devait avouer qu’après avoir fait tout ce chemin, cela le frustrait énormément que de devoir abandonner à cause du barbarisme primaire de cette montagne d’écailles. Pourquoi tout les dragons ne pouvaient pas être comme Kaalys ? Raisonnables, pertinents, logiques, critiques… ah oui… parce que le monde n’était pas une utopie bien entendue. Un nouveau sourire acide vint orner ses lèvres alors que les trois éclats de sa personnalités tombaient d’accord sur un commun désamour des manières du sac d’écailles.

“On va commencer par se calmer, hein, mon petit monsieur

Le ton était posé, à peine ironique, alors qu’il croisait les bras pour garder les pans de sa cape contre lui. Sincèrement, il perdait son temps, l’autre le prenait pour quelqu’un d’autre. Mais au moins, ça lui éviterait que l’autre pique une crise et vient lui réclamer après ensuite à grands coups de crocs ou de gerbes de flamme. Sauver les meubles semblait la seule chose à faire dans l’état actuel de ses plans, autant prendre dix minutes et ne pas en perdre des centaines.

Je ne suis pas dragonnier, je n’ai pas été dragonnier et sincèrement, je ne m’en porte pas plus mal. Je ne sais absolument pas qui est cette… Silarae… et si vous avez un contentieux avec elle, je ne saurais que trop vous suggérer d’en faire le deuil si cette dragonnne est bien morte, ou d’aller trouver un chemin vers le royaume des âmes pour aller réclamer votre dû comme l’huissier caladonien dont vous empruntez les façons

On avait pas idées d’ennuyer les braves gens avec des affaires aussi désuètes. Mais s’il n’arrivait pas à passer à autre chose, ce n’était pas étonnant qu’il soit aussi têtu qu’un placard. La frustration de cette bête devait être immense à force de ruminer sur des centaines et des centaines d’années tous les torts réels ou imaginaires qu’il avait pu subir. Quelle triste état, que de ne pas savoir oublier et laisser aller. Voilà une leçon fort bien acquise pour lui, il ne voulait pas être comme ça.

Maintenant, si vous ne m’êtes pas plus utile que des tétons sur un plastron, je vais retourner à des affaires plus productives. Merci bien de ces… charmantes… paroles… Nul besoin de me raccompagner, je saurais trouver mon chemin

Dire que sa frustration crevait le plafond était un doux euphémisme. Il fulminait.

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¤ Jugement de l’arrogance ¤

Dans les hauteurs, en plein air et à flanc d’une des montagnes de la chaine de Nin Daaruth, un dragon, descendant de la lignée de l’orage, et un bipède se faisaient face. Le vent froid comme la mort de l’île de Nyn-Tiamat, que les Graärh de la légion du nord qualifiaient de vivifiant, accompagnait cette rencontre terrible. Car lorsqu’un bipède irrévérencieux croise le chemin de Verith, on peut être sûr qu’une tempête éclate. Celle-ci ne naitra point de l’entrechoquement de la chaleur torride des brises et venant du sud, poussé par l’air marin tel un bateau afin de traverser l’océan, et de l’air glacial contraint au voyage par le zéphyr. Une tempête sans précipitation, nulle averse de pluie pouvant calmer le brasier brulant auquel elle donnera naissance. Un ouragan de feu provenant du Soleil Rouge, aussi éblouissant qu’une journée ensoleillée et aride durant la saison chaude de Néthéril. Emportant sécheresse et canicule, tant et si bien l’ile gelée arrachera le titre d’ile estival à sœur du sud-ouest. Nul rafraichissement provenant des brumes marines ne saurait apaiser ce tourment. Un solstice éternel, les journées à venir ne connaitraient point de nuit, point de clair de lune, tant et si bien que la définition de beaux jours changera pour qualifier ceux de profonde fraicheur.

Les créatures habitant l’ile gelée devraient prendre ombrage de cette rencontre, car elle pourrait changer la face de leur habitat. D’autres en revanche pourraient y trouver leur compte. L’ouragan de feu chasserait de glace, permettant à un jardin de naitre. La fonte des glaciers donnerait naissance à des fleuves où les poissons pourraient proliférer. Une végétation aquatique s’y développerait afin de permettre aux petits poissons de se cacher dans les algues. En surface la terre deviendrait fertile, l’abeille pourrait butiner entrainant une véritable efflorescence de fleurs, leur senteur parfumée étouffant le crottin des troupeaux de chèvres dont les mouches se régaleront. Des plantes jailliront des bourgeons, lors de la floraison la nature montrera alors toute sa beauté. Des arbres au feuillage verdoyant, des bosquets fleuris, la fructification viendrait à son tour, certains végétaux se pareraient de fruit qui naitrait seul comme les fraises ou par grappe comme le raisin. Il faudra les laisser mûrir et une fois faite la récolte s’annoncera prometteuse alors le temps de la moisson viendra. La nature si bien faite s’en chargera d’elle-même. Grillonset moustiques se nourriront du labeur des plantes. Le chant des rossignols jouant en harmonie avec les cigales accompagnera ce banquet. Alors, dans cette ivresse, les couleuvres s’agiteront, furtivement elles se faufileront dans l’herbe afin de s’en prendre aux oiseaux et les chasser. Enerver d’avoir été interrompus dans leur repas et leur panse criant encore famine, ils s’attaqueront aux criquets pour s’en repaitre. La couleuvre ayant fait son œuvre, elle s’en ira se cacher là où la terre s’est lézardée. Les restes du banquet non cueillis par les animaux tomberont au sol. Certains finiront leur chute contre les galets et éclateront, leurs graines seront alors expulsées. Il leur faudra attendre le passage des chèvres en promenade vers les pâturages, leurs sabots frapperont la terre, appuyant sur la graine pour qu’elle s’enfonce dans le sol. Ici, à l’abri des prédateurs, les semailles pourront germer. En quelques années, la campagne de la nature prendra fin, elle régnera en maitre. Les descendants des bêtes cornus emprunteront leur chemin de leurs ancêtres. Elles s’arrêteront sur les berges afin de boire, avant de continuer leur route au travers des champs de blés et de tournesols pour enfin pouvoir paitre là où le foin pousse.

De la colère et du feu du dragon, provoqués par l’irrévérence d’un bipède, un monde pourrait être détruit et un nouveau pourrait naitre. Pour autant un dragon pouvait parfaitement le faire seul sans l’aide d’un bipède. Les dragons sont et resteront toujours les phares illuminant les contrées afin de permettre à la vie de se développer, et ce phare n’a nul besoin d’être allumé par une intervention extérieure. Tout ce que les bipèdes savent faire c’est épuisé la vie de toutes ses forces, la détruisant à une fois à sec, sans rien faire naitre derrière.

L’irrévérencieux osait lui parler comme s’il était son égal ou son ami. Ce n’était pas le cas et ça ne le serait jamais et il allait lui en cuire. Un grondement réprobateur et de mauvais augure s’échappa du rouge. Il avait tellement de manières de mettre fin à la misérable existence de l’individu qui se tenait devant lui. Il pouvait lui attraper la jambe à l’aide se son fil d’or et voir le projeter afin de voir s’il allait planer comme un cerf-volant, ou au contraire s’écraser brutalement contre les rochers en contrebas. Peut-être que celui-ci dévalerait la pente en direction du rivage, roulant sur la plage où la neige remplace le sable, s’étendant de tout son long  tout en glissant sur la glace recouvrant une partie de la mer, jusqu’à atteindre la partie où les vagues la submergent, coulant à pic pour se faire emporter loin et à jamais de la vue du colérique par les flots. Imaginer ce scénario fut plaisant pour le dragon, mais irréalisable. Les bipèdes sont bien trop fragiles, celui-ci se briserait en morceaux à peine aurait-il touché les rochers en contrebas. Quoi qu’il en soit, cela rappela qu’il fallait aujourd’hui faire prendre leur bain à ses deux fils. Peut-être devraient-ils proposer aux deux baigneurs un bain de minuit et afin de leur soumettre un défi. Celui de rapporter le plus de coquillages, chercher et nager à travers l’écume pourraient être un bon entrainement, surtout pour Nephilith qui pourrait renforcer ses ailes.

Verith fut brutalement tiré de ses pensées quand le bipède osa lui tourner le dos. Comment osait-il ? Cet insecte irrévérencieux se présentait jusqu’à lui pour lui poser des questions comme s’il avait le droit d’exiger de lui quoi que ce soit. Et quand il parvenait toutefois à obtenir une réponse de celui-ci, ce dernier le contredisait. Les paroles de colérique ne sont que vérité, car la ruse, la fourberie et le mensonge ne sont pas ses armes ! Comment osait-il traiter un dragon de la sorte, lui cette misérable vermine qui n’apportait rien de bon à ce monde. Lui ce vil lié ! Ce vampire !

L’enfant de l’orage vit rouge. Il se redressa dans toute sa majesté, un grondement menaçant s’échappant de lui. Il allait le tuer, ensuite il irait rendre une petite visite à Kaalys pour lui apprendre à envoyer vers lui non seulement un bipède, mais aussi un bipède irrévérencieux. L’esprit du colérique tonna.

« J’ignore pour qui te tu prends bipèdes, mais si Kaalys a toléré ton comportement ça ne sera pas mon cas ! Je ne souffre pas du laxisme de cet ancien lié. Si tu ne connais pas ta place, je m’en vais te l’inculquer ! »

Il allait le tuer d’un coup propre et net en pulvérisant son esprit inférieur avec le sien. La voix mentale du colérique tonna dans la trame avec éclat et il s’apprêta à s’élancer. Quand soudainement, dans la caboche des deux protagonistes résonna celle autorité d’une troisième personne.

« Il suffit ! Ce n’est pas bientôt fini ce vacarme. Verith tu vas réveiller les enfants si ça continue ! »

Bientôt, entre les montagnes, se dessina une ombre gigantesque, presque aussi grande que Verith, accompagné de puissant battement d’ailes. Keetech, la dragonne d’orage fit son apparition. Fusillant du regard les deux protagonistes à l’origine de tout ce boucan, et surtout son mari.

« Cesse de tourmenter ce bipède. »

« Je ne tourmente rien ! Il s’est adressé à moi et m’a questionné comme si je lui devais une quelconque réponse. Je n’ai, à ce que je sache, à son égard aucune dette à lui payer et il n’a rien accompli pouvant justifier qu’il soit digne d’une quelconque réponse de ma part. Et quand bien même, je lui annonce une vérité, il la rejette mettant la parole d’un dragon en doute. Pourquoi poser des questions si c’est pour ensuite se faire traiter comme un menteur ? »

Le regard de la dragonne bicentenaire se posa sur le bipède alors qu’elle s’approchait du flanc de la montagne, remarquant ce que son mari n’avait probablement pas remarqué, sa frustration, mais surtout le trouble qui l’habitait.

« Ne vois-tu pas que ce bipède semble perdu ? Je vous ai entendu. Si le petit Kaalys l’a envoyé vers toi en dépit du danger que cela représente, c’est probablement parce qu’il a jugé que toi seul pouvais l’aider. »

Le colérique renâcla.

« Pourquoi aiderais-je ceux que je considère comme les ennemis de mon espèce ? »

« Parce que tu as failli réveiller les petits alors que j’ai mis à temps fou à les coucher et que sans mon intervention ils le seraient ! La jeunesse ne doit pas voir son sommeil troubler. De ce fait, tu ne le feras pas pour lui, mais tu le feras pour moi. Tu vas essayer de l’aider et tu vas essayer d’être gentil avec lui. »

L’enfant de l’orage eut envie de hurler sa rage au ciel, les bipèdes étaient décidément une véritable plaie. Keetech tourna ensuite son regard en direction du vampire qui s’était retrouvé malgré lui au milieu d’une dispute conjugale entre deux dragons.

« Les jeunes dragonnets ne sont pas toujours très malins et il n’est pas rare qu’il coure où fassent courir aux autres des risques inconsidérés. Toutefois Kaalys vous a envoyé vers mon époux, en dépit de l’énorme risque que cela représente. Je ne pense pas que cela soit inconsidéré. Il ne vous aurait pas envoyé vers le dragon le plus opposé aux bipèdes et le plus tempétueux s’il n’était pas certain que seul lui puisse vous aider. Je ne peux qu’inciter fortement celui-ci à vous apporter l’aide que vous recherchez. Mais je ne peux pas l’y obliger. Dans votre intérêt, ne vous le mettez pas à nouveau à dos. Adressez-vous à lui de la bonne façon et vous ne le froisserez pas. »

Le museau de Keetech se pointa ensuite vers les deux protagonistes.

« Et vous faites tout cela en silence. Si jamais les enfants se réveillent. Je vous jette tous les deux dans la mer pour vous apprendre ! »

Le regard du colérique suivit son épouse qui doucement commençait à tourner les ailes pour s’éloigner, avant de revenir se poser sur les bipèdes. Il était visiblement très contrarié et affichait un air particulièrement sévère à l’encontre du bipède.

« Chez les dragons, il est d’usage de se présenter lorsque l’on adresse la parole en premier ainsi que d’exprimer ses salutations. Keetech souhaite que je t’aide, soit, mais je préfère te prévenir que cela ne sera pas gratuit. Je n’aide pas bénévolement ceux que je ne considère pas comme mes alliés. »

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Il lui avait ouvertement tourné le dos et il partait, commençant son escalade pour pouvoir descendre la montagne par le même flanc qu’il avait attaqué lors de la montée. Tout était dit. L’autre n’avait pas l’intention de l’aider, il n’avait donc pas de raisons de rester. Son temps serait plus utile à préparer le départ de son peuple et son installation sur Calastin. Tant pis. Il aurait dû être moins naïf et ne pas s’accrocher à l’espoir d’une réponse. On ne l’y reprendrait plus. Derrière lui résonnait le fracas causé par le dragon, mais il n’en avait cure, résolument tourné vers son nouvel objectif. S’il entendit les grondements et menaces, la seule chose qu’il répondit à cet étalage d’animosité bornée fut un sarcasme plein de lassitude.

Pour Néant en jupons d’amuseuse publique

De toute façon, n’importe quelle réponse aurait reçu le même accueil alors à quoi bon ? Quand un cochon ne savait pas apprécier la confiture, on ne lui en donnait pas. Continuant son avancée, il retrouva le passage par lequel il était arrivé et escomptait s’y engager rapidement. C’était néanmoins sans compter sur l’intervention d’une autre masse d’écailles et il s’arrêta en levant les yeux au ciel avant de jeter un vague coup d’oeil torve par dessus son épaule. Un autre dragon, charmant… il ne lui manquait plus que ça, vraiment. Pinçant les lèvres, il assista sans plus de confiance ou de bienveillance à l’échange qui prit place devant lui. Il ne faisait pas confiance naturellement, dragon ou bipède, alors ce que ça lui inspirait ? Rien d’optimiste.

Un léger tic vint crisper le côté droit de son visage. Il n’était pas des plus heureux de cette intervention car il ne croyait pas à une aide par la force. S’il ne voulait pas prêter assistance, c’était son droit, il ne revenait pas dessus malgré sa frustration. Ce n’était pas cela qui le dérangeait vraiment, c’était cette insupportable hauteur. Mais rien qui ne se réglait pas en partant maintenant car même s’il restait, il n’était pas dit que cela aboutisse. Incertain, devant sa congère ouverte, il attendit de voir comment cela se jouait, croisant les doigts pour ne pas encore tomber sur un lézard mal embouché. La conclusion ? Moins que ce qu’il aurait pu espérer, plus que ce qu’il attendait. Un entre-deux. Frustrant aussi.

Et bien ça m’éviterait d’avoir à descendre cette montagne au moins

Oui, il en était là. Il observa avec un peu plus d’aménité la dragonne nouvellement apparue, ne sachant toujours pas comment prendre tout cela. S’adresser de la bonne façon ? Ce n’était pas lui qui s’était permis d’insulter l’autre. Il n’avait fait que le questionner, et il avait même accepté son refus. Si après ça on voulait le voir ramper, c’était non un point c’est tout. Mais elle avait de toute évidence au moins l’intention de l’aider, et elle ne s’adressait pas à lui comme au dernier des moins que rien, et pour cela, elle méritait sa courtoisie. Il hocha la tête et la remercia sobrement mais en toute sincérité. C’était un relatif progrès, il ne cracherait pas dessus comme un idiot. Se tournant proprement, il croisa les bras et regarda le rouge.

Ah donc vous avez l’intention de me faire payer une aide que votre compagne vient de vous sommer de donner ?

De mieux en mieux, il aurait vraiment tout vu. Il savait déjà que le mot pain ne voulait pas dire la même chose pour tout le monde mais ça avait l’air de s’étendre aussi à d’autres concepts. Bon, très bien, s’il prenait sur lui d’avoir la patience et l’objectivité de le juger, certes, c’était compréhensible. Pourquoi pas après tout, à la limite c’était acceptable en soi. Frisant le ridicule dans le contexte actuel mais très bien, il était bon prince. Mais ça ne faisait pas tout. Il n’avait pas l’intention de simplement accepter, nez au vent, en attendant que ça lui tombe sur la tête. Oh que non. Puisqu’il avait été prêt à partir avant, il l’était encore à l’heure présente et il partirait si c’était vraiment nécessaire et qu’il ne voyait pas d’autre issue.

Encore faudrait-il que vous sachiez m’aider, et pour le moment je suis plutôt circonspect sur cette possibilité. Vous n’avez de toute évidence même pas écouté ce que j’ai pu vous dire. Je vous ai justement demandé qui j’étais

Mais non, il avait été plus occupé à grogner et à préparer sa répartie destinée à le prendre de haut. Comme quoi, s’il avait écouté, peut-être que tout ça aurait pu avoir été évité. Ou pas, il le soupçonnait d’être capable de trouver des opportunités de rabaisser les autres dans n’importe quelle situation. Il aurait très bien pu dire aussi qu’il l’avait offensé en soufflant trop fort. Bien, maintenant peut-être avait-il entendu le problème. Il ne pouvait pas se présenter s’il ne savait pas qui il était. Et il voulait savoir qui il était. C’était comme demander à un poisson de s’excuser de ne pas grimper aux arbres. Là encore, sur le papier, il voulait bien, mais dans ce contexte précis c’était irritant au possible.

Dites-moi votre prix, car je n’ai strictement pas l’intention d’accepter sans savoir. Vous ne faites pas la charité, c’est logique, et moi je n’accepte pas un marché sans connaître les termes, surtout pas avec vous

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¤ Le prix de l’aventure ¤

« Ah donc vous avez l’intention de me faire payer une aide que votre compagne vient de vous sommer de donner ? »

L’enfant de l’orage n’allait pas aider de gaité de cœur le bipède insolent qui lui faisait face. Sa femme l’avait certes sommé de l’aider, mais elle avait oublié de preuve d’un peu plus de précision. Certes il aiderait, mais à ses conditions.

« Vous les bipèdes, vous êtes arrogants et vous pensez que tout vous est dû alors que vous n’apportez strictement rien de bon. Il est vrai que ma femme vous a promis mon aide, mais c’est tout ce qu’elle a dit. Mon aide tu auras, mais je suis encore libre d’y poser mes conditions. Peut-être aurais-je été plus disposé à le faire bénévolement si tu avais fait preuve de respect, mais ce n’est pas le cas. Vois donc le prix que je t’impose comme une leçon. »

Un long et profond soupir intérieur secoua l’esprit de Verith, la créature face à lui était désespérante.

« J’ai bien ouï ta question bipède. Mais entre la mienne et la tienne, il existe une différence fondamentale. Je te demande qui tu es aujourd’hui. Tu me demandes qui tu étais les jours précédents les cinq années de ton éveil. Tu as oublié ton identité passée, mais ton cas est-il à ce point désespéré pour que tu ne connaisses pas ton identité présente. Cela fait cinq ans, cinq longues années que tu erres sur ce monde, ignorant de ton toi passer. Mais ces cinq années, la recherche de ton identité passée, la bravoure et la folie de gravir cette montagne pour se présenter à moi, l’irrévérence dont tu fais preuve depuis le début de notre rencontre, tous ces éléments forgent ton identité présente. Si tu ne sais pas qui tu es aujourd’hui, comment peux-tu espérer savoir qui tu étais hier ? Vous les bipèdes êtes beaucoup trop irréfléchi, et ce manque de sagesse vous conduit à faire des erreurs épouvantables qui ont le plus souvent des conséquences sur autrui en plus de vous-même. »

Le colérique se repositionna sur le flanc de la montagne pour adopter une position plus confortable. La discussion risquait d’être longue, laborieuse et surement déplaisante, alors autant éviter de s’infliger une position inconfortable.

« La requête que tu me présentes aujourd’hui est la première du genre. Jusqu’ici, on me demandait toujours de sauver une vie. Un homme rejeté par son dieu. Une fillette broyée par le Néant. Une dragonne à l’âme déchirée. Pour autant, en y réfléchissant bien, ta requête n’est inédite que par sa forme, mais elle reste assez proche des autres. Tu veux connaitre ton toi passé. Tu veux ramener ton toi passé à la vie. Au final, il s’agit encore d’un sauvetage. Il est donc possible que je te demande le même prix qu’à tous les autres. Ta mort … ou peut-être la cessation de ton existence … et ta vie … non-vie … ou peut-être existence, ce sont les termes les plus appropriés pour un vampire … elles m’appartiendront. Tu ne seras pas autorisé à cesser d’exister autrement que par mes griffes. Et en ce qui concerne ton existence, sache simplement que je n’ai pas l’intention de la conserver, les créatures, même vous les bipèdes, doivent rester libres. Aussi il pèsera simplement une dette sur ton existence, lorsque tu t’en sauras acquitté elle t’appartiendra pleinement. Je me présenterais donc à toi un jour, avec une requête et tu devras l’accomplir loyalement. Et si un jour tu souhaites récupérer la cessation de ton existence, nous verrons alors le moment venu ce que tu pourras offrir en échange. »

La liberté de choisir sa mort et la liberté de ne pas pouvoir refuser d’exécuter une requête tout en ayant l’obligation de l’exécuter loyalement. Voilà le prix de l’aide de Verith. Au final l’inconnu ne résidait plus que dans ce que le colérique pouvait demander à l’avenir. Mais après tout, le bipède ne souhaitait-il point obtenir les informations de son passé ? Si tel était le cas, il devrait en payer le prix. Au moins aurait-il l’occasion de montrer sa détermination au rouge. Il avait certes gravi une périlleuse montagne, mais cela restait insuffisant.

« L’inconnu se dresse devant toi bipède. Auras-tu le courage de plonger dedans ? Où seras-tu un couard ? Toute aventure réclame un prix dont il faut s’acquitter. On ignore qu’elle en saura la récompense et l’issue, mais ne dit-on pas que ce qui compte le plus est le voyage ? Redeviendras-tu ton toi passé ? Ou ne servira-t-il qu’à forger ton toi futur ? »

Le colérique dodelina légèrement de la tête

« Ou peut-être mieux vaut-il rester dans l’ignorance ? La vérité est une griffe à double tranchant. Elle peut apaiser comme elle peut blesser. Le choix est tien. »

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Et hop, encore des insultes. C’était à se demander qui se montrait insolent envers qui en fin de compte. Lui, à poser une question légitime, ou le dragon, qui se permettait toutes ces indignités ? Il commençait presque à penser que Verith n’avait pas confiance en lui-même, pour avoir tant besoin de rabaisser les autres à tout bout de champ. Amusant comme ce qu’il reprochait aux bipèdes représentait parfaitement ses propres actions draconiques. Un petit complexe à soulager peut-être ? Il le laissa dire. L’opinion de Verith n’était rien du tout à ses yeux, et il n’attendait que de savoir de quel prix il se réclamerait. Tout le reste ? Les ptites psychoses du dragon, sa frustration, ses biais, sa puérilité, il n’en avait à présent que faire puisqu’il était évident qu’il s’agissait d’un être borné qui n’aurait jamais le courage d’admettre avoir tort ou accepter de regarder au delà de ses jugements préconçus. Le monde était ainsi fait que certains n’étaient pas dotés du plus de bon sens que pouvait contenir un dés à coudre et il avait bien mieux à faire que de se tuer à le transformer ne serait-ce qu’en bol. Grand bien lui faisait donc de sa gargarisation inepte, tant qu’il en venait au fait. Il l’énonça enfin, et ce fut sans même hésiter un instant que le haut mage répondit, avec tranquillité et détermination.

Je refuse

Voilà qui était dit. Composé, il laissa un instant au couperet le temps de tomber dans l’esprit fermé du dragon avant de poursuivre d’un ton aussi tranquille que le vent le lui permettait en l’instant.

Plus que le chemin c’est la compagnie qui compte Verith. Vous ne remplissez pas les critères qui me feraient accepter. Je ne remettrais ni ma vie ni mes capacités entre de telles griffes. Encore moins lorsque le gain est si hasardeux et avec les miens dans la balance. Entendez donc mon refus comme j’ai entendu le vôtre. Et si vous me pensez couard, je l’accepte aussi

C’était dit sans aucune agressivité mais avec beaucoup de sérieux. Il était Parangon et il avait tout un peuple à protéger, Aîné d’une race que tous cherchaient à abattre. Il ne pouvait pas se permettre de se passer n’importe quelle laisse au cou. Et certainement pas d’une laisse comprenant de façon si pauvre ce qu’il était. Il se détourna une fois de plus, tranquillement après l’avoir salué. Il n’avait guère à dire au-delà de son refus et ne pensait pas que lui expliquer la raison lui apporterait quoi qu ce soit si ce n’était du temps perdu, encore.

Je ne resterais pas dans l’ignorance. Je vais continuer à chercher. Mais pas auprès de vous. Adieu

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¤ Fin des négociations ¤

L’enfant de l’orage avait formulé son prix, maintenant c’était au bipède de l’accepter ou non. Il était libre de faire ce choix, libre d’accepter ou non, bien sûr le colérique serait déçu si celui-ci n’acceptait pas, pour autant il avait cette possibilité. Après tout, Verith n’avait pas tourné ses propos de manière à laisser sous-entendre qu’il devait obligatoirement accepter. La réponse ne tarda pas à tomber et le vampire refusa. Un petit soupire de déception s’échappa du rouge. Les bipèdes décidément.

« Tu me déçois bipède. Toutefois, tu restes libre d’accepter ou de refuser mon offre. Tu as fait le choix de le refuser, mais tu l’as fait pour de mauvaises raisons. »

Le dragon dodelina de la tête.

« Ne crois pas que tu sois le seul à qui j’ai fait cette offre par le passé. Bien d’autres sont déjà venus à moi. Perdu, trahi et ne sachant que faire. Je ne crois pas leur avoir dit, pas plus qu’à toi, que je vous accompagnerais dans ce voyage. Je me contente simplement de mettre ceux qui sont égarés sur une voie. À eux de la suivre, ou non, par la suite. Cette voie est hasardeuse, certes, tout comme l’est la vie ou un combat. J’ai quitté la terre qui m’a vu naitre pour aller sur celle qui a vu naitre mes ancêtres, dans l’espoir d’y retrouver un frère que je n’ai jamais connu. Une fois sur place, je n’ai vu rien d’autre qu’un continent dévaster par vous et où mon frère était déjà mort. Si j’avais su ce qui m’attendait, y serais-je allé ? Ca je l’ignore, mais une chose est sûre, en dépit de la souffrance endurée, je ne regrette pas le choix que j’ai fait ce jour-là de déployer mes ailes pour me plonger dans l’inconnu. »

Lentement le colérique commença à étendre ses ailes.

« Bipède. On n’a rien sans rien. Lorsque l’on souhaite avancer, il faut nécessairement payer un prix, celui-ci peut-être plus ou moins grand, mais on finit toujours par le payer, un jour ou l’autre. Tu as décidé de ne pas le payer aujourd’hui, mais peut-être le payeras-tu demain. Peut-être celui-ci serait-il plus grand ou plus petit que celui que je te proposais aujourd’hui ? Qui peut le dire ? Dans tous les cas, une chose est sûre, l’avenir est hasardeux et jamais tu ne pourras … non, jamais tu ne devras te débarrasser de ce hasard. »

C’est en repensant au Tarenth que le rouge avait changé sa formulation à la dernière seconde. Vouloir connaitre l’avenir scelle définitivement celui-ci et conduit au désastre.

« Soit, tu peux partir. Ce n’est pas comme si tu n’avais rien appris aujourd’hui. Mais si ta quête devait échouer, sache que mon offre tiendra toujours. »

Après tout Verith, n’avait-il pas dit au bipède que celui-ci était un dragonnier ? Qu’il avait assisté à la mort du Tarenth et à la libération du Tyran ? N’avait-il pas dit que l’ancienne liée du vampire devait ramener la tête de l’assassin de son frère, être que servait l’ancien lié ? Keetech ne pourrait pas dire qu’il n’avait pas aidé ce bipède. Il en avait bien dit assez pour le mettre sur la voie. À lui à présent d’accepter cette vérité qu’il refuse et suivre la piste de miette de pain.

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