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    22 septembre 1763

    Il aurait été préférable qu'il s'agisse de Cynoë. Le dragon d’améthyste s'était introduit dans la famille Kohan depuis trop longtemps, pervertissant un peu plus l'esprit vacillant de la lignée régnante. Il avait jadis été lié à la défunte Princesse Esmelda dont l'amour avait mené à l’écœurement et à la rébellion les glacernois. La Princesse n'était plus mais cette bête coriace avait survécu... Pour se lier à nouveau à une figure royale, telle une sangsue qui refusait de perdre l'emprise qu'elle avait sur les têtes qui dirigeaient le peuple humain. Cynoe était avide de la couronne... Et où est-ce que sa soit-disant sagesse draconique avait mené l'empereur ? Guerre, décisions stupides, relations diplomatiques désastreuses, famine dans les campagnes. Cynoe était un parasite que Naal aurait voulu détruire une bonne fois pour toutes. Il y avait eu trop de guerres, Thelem, son fils, y avait perdu la vie. Ce monstre d'écailles devait s'éteindre pour que le peuple des hommes respire librement mais ce n'était que partie remise. Son tour viendrait.

    On lui avait signalé le vol d'un autre monstre épris d'une Princesse. Avant que celle-ci ne devienne folle et périsse comme Esmelda, avant que le lézard verdâtre ne forme emprise sur une tête plus couronnée encore, au gouvernement elfique, qui battait déjà bien de l'aile, à ce qu'il en avait entendu. Oui, bien avant cela, il allait le tuer. Autrefois, en Almara, l'on se battait pour ne pas devenir l'esclave Lié d'un dragon. On refusait de vivre ensemble. Les almaréens ne construisaient jamais leur ville sur le territoire d'un dragon... Et exigeaient le même respect de la part des écailleux. Ils n'étaient pas les bienvenus, on leur faisait comprendre et les plus sages partaient. Les autres connaissaient la colère des lames et la foi d'Almara. Ainsi, coexister avec les dragons étaient possible, tant que ceux-ci demeuraient libres et ne s'attachaient à aucun bipède. Séparés d'eux. Mais ils ne pouvaient cohabiter, car la tentation du Lien, par l'amitié, aurait été trop vive pour que ces créatures cupides parviennent à résister.

    Jamais il n'y eut de Lié, en Almara. Et ceux qui étaient nés en Ambarhùna n'avaient fait que déclencher des guerres. La paix habitait l'ancien continent, c'était le retour des dragons qui avait lancé la convoitise et fait renaître les vielles rancœurs. Les vampires étaient sortis de leur trou pour une conquête effrénée. Les elfes avaient agité les flambeaux de leur haine millénaire. Et les humains, stupides, avaient servi de chair à canon. Les dragons liés étaient un fléau, avides de puissance et l'un d'entre eux était responsable du pire des crimes. Le Tyran avait tué Néant, par abus, à l'usure. Mais les autres peuples n'avaient pas tiré les bonnes leçons de cette période tragique. Ils avaient continué d’acclamer dragons et dragonniers, adorant la magie comme on s'éprend de l'ivresse aux temps des vendanges. Il n'y avait jamais assez de vin et toute une année durant on veillait à la croissance des vignes. Ils avaient entretenu la gangrène mais les chimères avaient, dans toute l'horreur de leurs actes, eu cela de bon que la vérité avait éclaté. Le Lien  était malsain. Les peuples devaient se libérer de l'emprise des dragons... Et ils le feraient par la force.

    Comme on lui avait signalé, le dragon de Jade volait avec sa Liée en direction d'Ipsë Rosea. La ville était à quelques heures à cheval. Assez loin pour qu'on ne vienne pas à temps en aide à cette créature enjôleuse qu'on nommait dragon. Mais bien assez proche pour que de la ville, en ce temps dégagé, pour la première fois, on voit tomber du ciel un dragon. Il avait prié, longuement, et avait béni les Brise-Sorts venus avec lui accomplir cette mission. Ils étaient valeureux, extrêmement courageux, ils étaient l'élite de l'armée délimarienne. Mais ils avaient retiré leurs insignes, loin d'ici, portant une sombre tenue de camouflage alors qu'ils se tenaient, à l'abri de l’œil, dans un sous-bois. Il n'était plus un Serviteur du Néant, mais depuis il avait retrouvé une foi féroce, il était accompagné de trois esprits-liés et son corps s'était mis à renier la magie, presque comme autrefois. Naal avait vu cela comme un signe, tout Oracle qu'il fut autrefois pour son Dieu. Un signe qu'il devait purifier ce monde du Lien.

    Il était temps. Une dragon vert approchait. Naal, dans ses vêtements sombres, était hors des sous-bois, avec un visage qui n'était pas le sien. Il mirait le dragon en plein vol. Il croyait que les cieux et la terre lui appartenaient. L'almaréen fermait les yeux et sa main se portait sur la torque à son cou. Une dernière prière, dans ce calme avant la tempête. Il implorait Néant de prendre Orfraie en pitié. Elle n'était qu'une pauvre victime dont l'esprit avait été réduit en esclavage par un dragon. Elle ne l'avait pas choisi, elle ne l'avait pas voulu. Mais peut-être s'en était-elle persuadé. Comme beaucoup, elle avait noué une amitié forcée mais l'esprit n'aimait pas être contraint, alors elle avait peut-être fini par se convaincre elle-même que son union a Firindal était une bénédiction, une amitié magique. Naal éprouvait de la pitié pour elle... Il priait pour qu'elle survivre et qu'elle combatte le poison que le dragon avait glissé en elle, toutes ses années durant. Qu'elle en sorte forte et libre... C'était tout le mal qu'il pouvait lui souhaiter. Par réalisme, il savait aussi qu'il n'était pas si simple de se reconstruire quand son âme avait été déformée puis déchirée...

    Un souffle et ses yeux s'ouvraient à nouveau, féroce dans sa volonté. « Thanatos ! » cria-t-il... Mais ce n'était pas sa voix. Elle était mêlée de quelque chose de surnaturel. Le dragon allait être frappé d'effroi et sa peur viscérale, Orfraie la sentirait comme elle sentirait combien Firindal craignait la mort en l'instant, alors qu'une force invisible forçait les ailes du saurien à se refermer. Les étoiles qui tombaient du ciel n'étaient que des illusions, la preuve que la chute attend ceux qui jouent des faux semblants. Il savait qu'il pourrait mourir... Mais tous les hommes mourraient un jour. Et tous les hommes devaient servir Dieu. Il le faisait pour Néant et tout ce qu'il avait enduré. Les Brises-Sorts sortaient du bosquet pour l'attaque : ce devait être bref car la surprise était leur seule force face à ses monstres titanesques. Le combat ne devait pas perdurer. Il frapperaient vite et fort... Ou ils mourraient tous.

    Une pensée allait aux personnes que Naal tenait en son cœur. Une seconde pensée alla à l'Unique. Et le dragon s'écrasait au sol, minimisant la chute comme il le pouvait.


Dernière édition par Naal du Néant le Sam 21 Déc 2019 - 21:24, édité 2 fois

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C'était une belle journée. Le temps était plus que clément, en cette fin de mois de septembre, et l'air était encore très doux malgré l'arrivée prochaine de l'automne. Le soleil brillait, haut dans un ciel bien bleu et sans nuage à l'horizon. Au loin, Orfraie distinguait nettement les reflets chatoyants du lac d'émeraude ainsi que la haute silhouette d'Ipsë Rosea, perchée sur sa colline. Bientôt, les deux Liés pourraient se reposer.
En effet, Firindal et Orfraie avaient quitté la quiétude de la cité aux aurores, sans un bruit, dans l'optique de passer toute la matinée ensemble sans se préoccuper du sort du monde. Ils en avaient profité pour s'entraîner ensemble, le Jade étant tout particulièrement fier de montrer ce qu'il avait appris tout seul en matière de vol. Orfraie, pour sa part, lui avait montré ses propres ailes et avait profité de la présence de son Lié pour les tester en situation réelle, c'est-à-dire en sautant de son dos en plein vol. Le test avait été concluant, Firindal n'ayant guère eu besoin de sauver sa douce moitié d'une chute mortelle. Et après tant d'exercice, il était temps de rentrer, de se restaurer et de se reposer.

# Sais-tu ce que je vais faire, lorsque nous serons arrivés ? #
# Non, dis-moi ? #
# Je vais me rendre au lac et y plonger. Un bain me fera du bien et, qui sait, un poisson ou deux. #


Même si Firindal ne pouvait le voir, Orfraie sourit. L'idée était attirante, que ce soit la baignade ou étendre davantage ce moment ensemble. Elle lui demanda, après un instant de réflexion :

# Puis-je t'accompagner ? #
# Bien sûr, ma douce liée. #

Le saurien ronronna de plaisir tandis que l'Ataliel lui caressait les écailles du cou de ses mains gantées. L'idée d'étendre le temps passé ensemble plaisait aux deux Liés, sans surprise, et Firindal rectifia doucement sa trajectoire pour se rendre au lac, et non pas à Ipsë Rosea comme prévu initialement. Orfraie profita de ce nouveau plan pour fermer les yeux et se détendre. Voler était une merveilleuse sensation, même si les premières fois avaient été sportives. Une fois la nausée passée, ainsi que la peur du vide, l'ancienne Rôdeuse avait été capable d'apprécier cette chance inouïe en compagnie d'un être exceptionnel. Après la perte de ses pouvoirs Baptistrals, bien des siècles auparavant, Orfraie se souvenait avoir sombré dans une profonde dépression de laquelle elle avait eu bien des difficultés à sortir. Et, alors qu'elle allait mieux, la cicatrice était restée vive, même en tant que Vampire. C'était la naissance de Firindal, au creux de ses mains, qui avait refermé cette blessure que la princesse des ombres avait si longtemps pensé inguérissable.

Plongée dans son monde, Orfraie ne se doutait pas que, dans l'ombre, une menace mortelle se préparait à passer à l'action. Il lui sembla soudainement entendre un mot, porté par le vent, et elle fronça les sourcils. Était-ce son imagination qui lui jouait des tours ? Était-ce le manque d'oxygène en altitude ? Elle rouvrit les yeux, saisit le pommeau de la selle à deux mains, puis se pencha sur le côté afin d'observer la terre en contrebas. Et ce fut à ce moment précis que Firindal poussa un cri de peur, que la Liée poussa à son tour lorsque le jeune dragon commença à tomber.

Cramponné de toutes ses forces à la selle, Orfraie grimaça lorsqu'elle sentit les lanières qui l'empêchaient de tomber lui serrer les mollets plus que de raison. Le vent sifflait fort à ses oreilles, ses cheveux, pourtant attacher en une unique tresse, lui masquaient une partie de la vue. La panique s'empara de l'Ataliel alors qu'elle sentait le vide s'ouvrir dans son dos. Firindal, malgré ses efforts, avait perdu le contrôle de ses ailes et c'était retourné en plein vol. Un puissant rugissement, entre le cri de détresse et de colère, s'échappa de la gueule ouverte du saurien et vrilla les tympans de sa liée.

Via leur lien, elle ressentit sa terreur et sa propre peur, celle de mourir également, se mélangea à la sienne. Son cœur se brisa dans sa poitrine alors que, à la force de ses bras, Orfraie se redressait pour atteindre les lanières qui retenaient ses jambes. Elle aussi, se pensait immortelle, mais une chute comme celle-ci la tuerait sur le coup, tout comme elle tuerait Firindal. Le temps n'avait peut-être pas d'emprise sur eux, mais ni l'un, ni l'autre, n'était invincible. Dans un dernier effort, les larmes brouillant sa vue, ses cheveux dans la bouche, Orfraie parvint à attraper les lanières et, grâce à ses lames cachées, les sectionna. Aussitôt rappelée vers le sol, l'ancienne rôdeuse se retrouva suspendue la tête en bas, uniquement retenue par l'autre jambe, alors que le sol se rapprochait dangereusement. Les attaches serraient tant sa jambe que, déjà, elle commençait à s'engourdir, il fallait donc agir.

Un véritable cri s'échappa des lèvres de la guerrière lorsque, dans un ultime effort, elle parvint à élancer son corps vers le haut et, toujours grâce à sa lame cachée, sectionna les dernières attaches. Le vide la happa aussitôt et elle tandis la main, dans l'espoir vain de saisir Firindal. Ce dernier, juste au-dessus d'elle, hurla dans sa direction tandis que son esprit criait son nom. Ses ailes semblèrent se décoller de son corps, juste un peu, mais suffisamment pour que le saurien retrouve une position plus adéquate à un atterrissage en catastrophe. C'était au moins cela, songea Orfraie alors que son esprit, dans la certitude de mourir dans peu de temps, se tourna vers sa femme bien-aimée. Ce n'était pas un lié, mais deux, qu'elle laissait derrière elle.

# TES AILES ! #

Le cri de Firindal ramena Orfraie à la raison. Ses ailes, oui, elle aussi en avait ! Puisant dans ses forces, la Liée de Feu activa le premier glyphe de son manteau des ombres, ce vêtement qui la quittait si rarement. Et aujourd'hui, son sens de la mode allait lui sauver la vie. Les pans du manteau, qui était aussi sombre qu'une nuit sans lune, s'étirèrent et se durcir, permettant ainsi à l'Ataliel de stopper progressivement sa chute, et même de planer. De son côté, Firindal parvint enfin à freiner sa chute, mais il s'écrasa plus qu'il ne se posa, sa douleur parvenant à sa Liée par vague insubmersible. Cette dernière perdit son souffle et sentit sa gorge se serrer alors qu'un nuage de terre et de poussières cachait le lieu de la catastrophe, dont elle se rapprocha rapidement. Son armure, dans un nuage d'ombres mouvantes, se matérialisa sur son corps, mais Orfraie se posa avec aussi peu de grâce que Firindal, roulant dans l'herbe et se cognant. Mais ni la douleur, ni la terre, ni même le sang qui coulait le long de sa tempe l'empêchèrent de se relever et de courir vers le jeune dragon, dont elle apercevait les écailles alors que la poussière retombait enfin.

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    Son visage, sous sa capuche, était celui d'un Elenien. Ses cheveux blonds étaient rasés sur les côtés ; il avait une balafre, un peu au dessus de l’œil droit. Ses mires étaient d'un bleu tirant sur le vert des océans et sa peau halée comme le sable rappelait le temps passé à l'extérieur pour apprendre à combattre et pour s'illustrer sur les champs de bataille. Ce visage anguleux était celui de Thomas Torn. Un soldat de jadis que Naal avait tué. Ou plutôt que Gilgamesh avait tué alors qu'il possédait Naal. Il se souvenait encore de la froideur de sa dépouille et le Sans-Visage s'était remémoré ses traits avec exactitude pour en couvrir le faciès trop identifiable de l'almaréen, comme une illusion destinée à ce qu'il ne soit pas reconnu, si d'aventure, l'Ataliel venait à le croiser.

    Un souffle. Il avait l'impression d'entendre les battements de son propre cœur, alors que l’adrénaline étirait la seconde de l'avant bataille. Cette infime seconde pleine de peur juste avant que ne commence le combat, celle où on se rendait compte de combien la vie ne tenait qu'à un fil et si Dieu le voulait, il survivrait. Car son Dieu était puissant et transcendait la mort elle-même. L'appel du Vide était vivace, et l'émotion soudaine, violente, en son cœur, lui venait du Rien. La gloire serait rendue au Néant bafoué, le dragon périrait : il en avait la pleine foi. Et s'il se trompait ? Alors, il ne s'en rendrait pas compte car il serait mort au combat. Il se tournait vers la cible, la respiration plus rapide à l'approche du combat. La tension montait dans son corps et ses poings se nouaient à la garde de ses armes.

    En difficulté, le dragon se posait avec violence. Naal aurait menti s'il avait affirmé qu'il n'éprouvait aucun plaisir à le voir ainsi tomber. La rage dans son cœur aimait infiniment le voir s'écraser sur le sol comme un vulgaire tas de charbon, incapable de déployer ses précieuses ailes. Ligoté par la force absolue de Néant, une proie dans le filet d'un fanatique. Oh oui, il jubilait... Mais la partie était encore loin d'être gagnée. La dragonnière s'était péniblement défaite de sa selle avant d’atterrir un peu plus loin. La poussière s'éleva et dans cette vision floue, les Brise-Sorts quittaient le sous-bois où ils s'étaient tenus en embuscade. Ils partaient à l'assaut du flanc gauche de la bête. Il était temps. « Fyli. »

    L'instant d'après, il était sur le flanc droit de la bête, profitant de la diversion improvisée des soldats, de l'autre côté, pour venir abattre sa perce-maille sur l'aile. Le poison narcotique de sa larme ferait bientôt effet, si jamais leur combat venait à s'éterniser plus qu'il ne le fallait. Il déchirait l'aile de jade en une large plaie et alors que le dragon s'apprêtait à cracher du feu sur les assaillants, Naal invoqua un nouveau mot de pouvoir de la torque Anávasi : « Enochos ! » A nouveau, ce n'était pas sa voix, elle était déformée par son Dieu et l'usage de ces trois mots en peu de temps commençait à lui brûler la gorge. La gueule du dragon ne cracha qu'un grondement, à défaut de feu. Forgé par Néant, sa présence interdisait à toute magie de naître dans un rayon de cinq mètres autour de lui. Il ne tarderait pas à être pris pour cible...

    Et cela ne manqua pas lorsque Naal se prit un violent coup de patte niveau de la tête. A terre et sonné sur le coup, ses yeux ne voyaient qu'obscurité alors que les sons de la bataille parvenaient encore à ses oreilles. Cela grondait et l'humain se redressa péniblement : plusieurs petites écailles vertes s'étaient enfoncées sur son visage falsifié et sa gorge. Il sentait le sang couler de sa tempe et le long de son visage, et sa vue, quand elle lui revint, étaient teintée d'écarlate. Il n'eut le temps de s’appesantir que la gueule du dragon s'abattait à nouveau sur lui. Ses crocs transpercèrent son armure, venant broyer son bras droit alors que l'almaréen plantait sa lame à l'intérieur, perforant le palais de la créature. Cela fit se reculer Firindal et l'épargner, plus parce que des Brise-Sorts étaient à présent sur son dos, à le blesser lourdement qu'autre chose.

    Endurant la blessure par la grâce du Pangolin, Naal loua mentalement Néant de l'épargner et quand son regard se porta sur la dragonnière prenant naturellement la défense de son bourreau de lézard, il pesta. Ne pouvait-elle pas fuir ? Elle serait bientôt libre de ce monstre. Elle serait à nouveau elle-même, défaite des chaînes auxquelles son esclavage l'avait si solidement nouée. Oui, elle serait bientôt libre alors pourquoi fallait-il qu'elle se débatte ? C'était évident, même si Naal s'y était attendu, il avait espéré que la mort imminente du saurien fasse ouvrir à cette pauvre femme les yeux. C'était vain... Mais il avait prié pour elle en ce sens, pour qu'elle soit touchée par un miracle et la grande miséricorde du Néant. Non, elle devrait souffrir... Et il pestait contre cela. Car c'était la faute de ce foutu dragon !

    Prenant sa lame en main gauche, le fanatique s'élança à la gorge du dragon, là où les écailles étaient plus fragile, avec perce-maille. L'adrénaline du moment le faisait encore combattre, épuisant lourdement ses force en peu de temps. Sa respiration était si hâtive et se yeux si remplis de haine.

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Tout s’était passé très vite. L’instant d’avant, le duo volait tranquillement vers une destination paisible. L’instant d’après, leurs vies étaient menacées. Orfraie s’était posée sans grâce, mais, au moins, était-elle en un seul morceau. Ce qui n’était pas le cas de Firindal. Leur lien était le vecteur d’une douleur et d’une peur que l’ancienne baptistrelle n’avait jamais ressentit jusqu’alors. Elle lui nouait la gorge et faisait cogner son coeur dans sa cage thoracique, alors qu’elle courrait, courrait plus vite qu’elle n’avait jamais couru, même pour sauver sa vie.

Dans l’urgence et face à l’inévitable combat, Glorlëthalion se matérialisa. La coiffe de guerre vint recouvrir la chevelure d’Orfraie d’un carcan d’ébène et de dorures, de sous lequel quelques mèches enflammées s’échappaient. Encore loin, l’Ataliel ressentit la première blessure aussi certainement que si elle l’avait reçue. Elle hurla, en écho au cri du dragon dont l’aile venait d’être déchirée en une fine ligne sanguinolente. L’odeur du sang prit la guerrière à la gorge alors qu’elle encochait une flèche sur Palantir et tirait sur la première silhouette qui passa sous son regard. Celle-ci s’effondra, mais cette petite victoire n’apporta aucun réconfort à la Liée. Même une deuxième cible touchée n’y parvint pas.

Ne cessant sa course, car elle voulait être auprès de lui, Orfraie redoubla d’efforts. Elle vit Firindal frapper l’un des assaillants à la tête, puis le mordre alors qu’il était au sol. Mais, alors qu’elle aurait du s’en réjouir, la dragonnière pâlit et chargea de plus bel. La lame venait de transpercer le palet du dragon et les assaillants se trouvaient à présent sur son dos. Elle les y rejoignit d’un bon prodigieux pour un simple humain et les surprit. Habituée à se battre sur un dragon en mouvement, Orfraie para un coup d’épée et lança son pied dans le ventre de l’un des assaillant, le faisant tomber et s’écraser plusieurs mètres plus loin tant la force du coup avait été grande.

L’adrénaline aidant, Orfraie bloqua plusieurs autres coups destinés à Firindal, criant sa rage à chaque impact. À la troisième, une puissante onde de choc provenant de Glorlëthalion projeta tous les assaillants au sol, à portée des griffes et des crocs de Firindal. Orfraie descendit également d’un bond, sautant par-dessus l’articulation de l’aile indemne pour se poster devant le cou du saurien afin de le protéger. Son épée était déjà maculée d’un peu de sang, le pommeau représentant de dragons entrelacés, et elle la leva devant t-elle pour se préparer au combat à venir. Derrière elle, elle entendait le cœur du dragon battre, battre plus vite que jamais et propulser le sang hors de son corps. L’odeur du sang de dragon était sucrée et attirante, c’était la première fois qu’Orfraie la sentait, et pendant un instant elle pensa aux propriétés mystérieuses de ce sang qui, si elle y goûtait, pourrait l’aider à défendre son lié face à ces hommes, puis à défendre les tout les autres. L’idée était fort attirante, mais en son fort intérieur, la Liée savait que ce n’était pas une bonne chose à faire.

En son fort intérieur, Orfraie voulait également poser la question. Ce simple « pourquoi » qui lui brûlait les lèvres. Mais en vérité, elle le savait déjà, ou pensait-elle savoir. Ce mouvement anti-lien, elle l’avait vu grossir et ne s’y était pas trop attardé, pensant que la situation allait se tasser. Mais elle avait eu tord et, à présent, Firindal et elle en payait le prix fort.

Si vous voulez sa vie, vous devrez d’abord prendre la mienne, pensa t-elle.

Elle avait remarqué qu’elle n’était pas la cible principale. Ils l’avaient laissé venir à eux, alors qu’elle s’était posée bien plus loin. Et même en sa présence, Firindal était resté la cible principale. Orfraie resserra sa prise sur la garde de Fëalocë à cette pensée, fixant son adversaire en armure. Il semblait être le mieux équipé et devait être le chef. Il lui avait même semblé l’entendre prononcer quelques mots dans une langue inconnue, mais dont les sonorités ne lui étaient pas inconnues. Du Glacernois? Ou peut être de l’Almaréen?

Hélas, le temps était au combat. Profitant du bras invalide de son adversaire, Orfraie chargea de toute sa vigueur. Dans son élan, elle retourna son épée et la saisit par la lame, ses gants en peau de dragon la prévenant d’une éventuelle coupure, pour frapper avec le pommeau d’ithilidin directement à la tête, laissant le soin au dragon blessée de s'occuper des autres assaillants visiblement moins bien équipés.

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    Le coup à la tête, lui fit perdre son casque, révélant un visage fort heureusement modifié par ce sort appris, pendant ces heures macabres où il était resté auprès de la dépouille sans vie de son Dieu. Les petites écailles de jade lui faisaient des balafres sanglantes dans le cou mais l'adrénaline de l'instant l'aidait oublier la douleur. S'il survivait, il la sentirait bien ensuite. Le coup d'Orfraie avait été violent et manqua de le faire tomber au sol, il avait posé une main à terre pour ne pas chavirer et se redresser. Il recula néanmoins, persuadé que la dragonière ne voudrait s'éloigner de Firindal pour le poursuivre. Sa force de Shedim allait poser problème au pauvre humain qu'il était, ainsi cracha-t-il du sang, puis ce nouvel édit de Néant : « Enochos ! » Sa voix était déformée, maintenant que la Princesse des Ombres l'avait entendu sortir de ses propres lèvres, elle saurait qui avait fait tomber son dragon du ciel.

    Néanmoins, dans le regard de l'almaréen, maintenant qu'il était face à la Liée et non plus le dragon, il n'y avait plus de rage, mais une peine sincère et profondément désolée. Il n'avait pas envie de s'attaquer à elle même si elle le défiait du regard, il n'avait pas envie de la combattre, ni de lui faire le moindre mal. Mais il savait que s'il parvenait à tuer Firindal, il lui en ferrait inévitablement. Car ces monstres avaient droit de mort sur les bipèdes qu'ils enchaînaient comme des esclaves par le Lien. Il était écœuré, dégoûté. Il voyait Ô combien l'amour dans les yeux d'Orfraie, la peur et la colère. Un amour factice, forcé par le Lien. Un amour trompeur, un poison. Et il se souvenait de cet amour qu'avait éprouvé Néant pour le Blanc.

    Les forces surhumaines d'Orfraie la quittaient. Elle pourrait sentir, comme lui, le poids de son armure et de son épée, la fourbure de son corps au combat, sa force amoindrie lorsqu'elle frapperait. Mais surtout, il l'avait libéré d'une chose avant que les événements ne s'aggravent : sa télépathie avec Firindal. Elle allait s'en sentir perdue, c'était certain. Elle lui en voudrait probablement et il n'attendait pas à ce qu'elle le remercie. Mais il l'épargnait de la souffrance que ressentirait Firindal et qu'un dragonnier ressentait à l'identique. Il l'épargnait de sentir la mort quand elle viendrait, pour qu'elle, elle survive. Il l'espérait, n'avait-il pas prié pour cela ? Pour qu'elle se réveille libre et qu'elle affronte le sevrage de la perte comme on extrait le poison d'une plaie. Guérirait-elle ? Le Lien était si cruel, si abominable.

    Plus alerte, il veilla surtout à esquiver  ou parer ses coups, refusant de la frapper ou de l'attaquer. Peut-être qu'elle finirait par comprendre qu'il n'avait rien à lui reprocher, à elle. Il n'éprouvait que peine et pitié pour son âme déformée par le Lien. Il savait néanmoins que ce petit jeu ne pourrait pas durer indéfiniment. Orfraie était vindicative et pour cause : les Brises-Sorts et les chasseurs de dragon almaréens n'y allait pas de mains mortes. Relevés, ils avaient achever de faire des ailes de Jades des lambeaux sanglants. Firindal ne pourrait plus voler de sitôt, si tant est qu'il y parvienne un jour et qu'il survive seulement à cela. Si Naal voulait que ses alliées s'en prennent à la gorge et aux yeux de ce monstre, il allait falloir qu'il occupe un peu mieux la Flamboyante.

    Mais ses véritables attaques ne furent pas assez concluantes. La dragonière était bien plus douée que lui en combat rapproché et il le constata très vite lorsque son bras déjà malmené craqua un peu plus, manquant de lui blanchir la vue sous la douleur, et qu'il se prit un coup d'épée bien sentit, malgré son armure, sur le flanc opposé. Cela aurait pu être pire, mais fort heureusement, sa parade était solide, et il eut le concours d'un allié qui vint frapper l'immaculée alors qu'elle se penchait en avant pour frapper Naal. Le dévot n'eut qu'à esquiver, laissant la jeune femme tomber en avant, sur le ventre, alors qu'il revenait sur elle, pesant de tout son poids et de celui de son armure lourde, en un appui solide entre les omoplates. « Cessez. » gronda-t-il, essoufflé. La voix déformée par la blessure qu'avait causé sa torque légendaire. User de tant de mots de pouvoir en si peu de temps lui avait raillé la gorge. « Ce n'est pas contre moi que vous devez vous battre. »

    Il cracha du sang, à nouveau, salement amoché par cette bataille. « C'est contre votre Lien lorsqu'il vous conduira devant les portes de la mort. Il faudra que vous luttiez et que vous vous accrochiez. » Il agrippa fermement son armure, au niveau d'une épaule : « Vous êtes une femme forte, Orfraie Ataliël, et vous devrez vivre. » Il inspira à nouveau, conscient de la douleur que cela lui causerait : « Fyli. » Nouveau mot, nouvelle souffrance. Il emmenait avec lui la Princesse. Il étaient non loin de l'entrée de la ville d'Ipsë Rosea, à quelques minutes. Ici, le soleil brûlait doucement une campagne qui chantait une ode à la nature, loin de se douter de ce qui se passait dans le sous-bois, à des heures à cheval de là. L'éloigner de son dragon, voilà ce qu'il avait fait. Pour que les autres fassent leur œuvre.

    Il roula boula un peu plus loin, meurtri, le souffle coupé. La douleur était atroce, dans ce calme campagnard. Mais cela ne durerait pas et l'almaréen se redressa, ravalant sa souffrance comme il le pouvait. Cela commençait à lui devenir difficile...

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Cliiiing ! Le pommeau de Fëalocë rencontra le heaume de son adversaire avec une force décuplée par la rage de la Liée de Feu. Le choc, très violent, se répercuta dans les bras de l'Ataliel et fit presque tomber son adversaire, qui se retint à une main et s'aida de celle-ci pour se redresser. Orfraie avait déjà repris correctement son arme et s'apprêtait à porter un nouvel assaut lorsque, après avoir craché un peu de sang, son ennemi prononça un nouveau mot dans cette langue inconnue. Ce mot, c'était le même qui avait fait tomber Firindal, elle le comprit en sentant soudainement le poids de son armure sur ses épaules. Son bras était également plus lourd, mais elle raffermit sa prise sur son épée.

Puis soudain, elle sentit s'étioler son lien avec Firindal. Cela n'était pas sans lui rappeler les combats contre les Chimère, le Jade ayant été possédé plusieurs fois. Orfraie inspira profondément et prit son épée à deux mains. S'il pensait lui faire peur ou amoindrir sa détermination, son adversaire se trompait lourdement. Les coups qui suivirent furent moins vifs, mais pas moins précis. Hélas, sans sa vitesse surhumaine, la Princesse des Ombres peinait. Après plusieurs passes vigoureuses, elle se rendit compte que son adversaire ne contre-attaquait pas vraiment. Il se contentait d'esquiver ou de parer, sans jamais chercher à la blesser alors qu'elle, elle voulait sa vie. Lorsque leurs regards se croisèrent, alors que leurs lames s'entrechoquaient, Orfraie fut surprise d'y lire une véritable peine. À moins que l'homme soit bon acteur ? Décidée à ne pas se laisser attendrir, la dragonnière reprit ses assauts, chaque coups étant portés par les mugissements et les râles de douleur de Firindal, dont les ailes étaient écarlates. Le voir ainsi lui brisait le cœur et, si elle y parvenait, cet homme et ses sbires le paieraient au centuple. Mieux valait-il pour eux qu'ils meurent sous les crocs de Firindal plutôt qu'entre ceux de la Liée de Jade.

Un nouvel assaut toucha son but et la Dent de Dragon préleva un peu de sang malgré l'armure adversaire. Orfraie prit son arme à deux mains pour donner à son coup un maximum de puissance, mais sans ses sens ultra-développés, la dragonnière n'entendit pas arriver un nouvel adversaire. Elle prit le coup dans le dos, manqua son attaque et tomba en avant à cause de ce nouvel élan. L'armure amortit le choc, mais avant qu'elle puisse se relever, Orfraie sentit son adversaire poser son pied entre ses omoplates et s'appuyer de tout son poids. En temps normal, la guerrière se serait relevé malgré ce petit désagrément, mais sa force n'était plus et elle se retrouva démunie. Derrière elle, Firindal soufflait très fort et elle redoutait de le voir.

Cessez ? La joue contre l'herbe, Orfraie grimaça. Une partie de ses cheveux lui masquaient la vue. " Comment osez-vous. " Lui répondit t-elle. C'était la première fois qu'elle lui parlait directement et le ton de sa voix était aussi las que le sien, ses mots beaucoup moins piquant qu'il avait pu l'imaginer. " Soyez maudit ", lui répondit t-elle. Elle connaissait ce discours, celui des anti-lien qui pensaient tout savoir mieux qu'elle, savoir ce qui était bien pour elle. Elle l'avait vue dans son regard pendant leur affrontement, il était de ceux-là.

Elle ne répondit pas par la suite et le sentit l'agripper par l'épaule. Elle aurait voulu pouvoir se retourner et lui planter sa lame cachée dans la gorge, mais il s'appuyait encore sur son dos. Et puis soudain, dans un murmure roque, elle entendit un nouveau mot. L'instant d'après, l'air était chargé d'une nouvelle odeur et elle entendait le chant des oiseaux. N'ayant plus le poids de son adversaire sur le dos, Orfraie se redressa difficilement. D'abord à quatre pattes, elle tenta de reprendre son souffle, puis se redressa à genoux. Elle chercha l'homme du regard et le découvrit gisant à quelques pas, tout autant fatigué. Et c'est alors qu'Orfraie réalisa où elle se trouvait, alors que l'ombre de la colline se dessinait un peu plus loin. Elle connaissait ce choix, ce champ, car il bordait Ipsë Rosea. " Qu'avez-vous fait ? " Elle se redressa vivement, parfaitement alerte, et bondit sur sa proie. Tombant lourdement sur lui, elle leva le bras droit et frappa directement dans le nez. " Qu'avez-vous fait ?! " Reprit-elle sans réellement attendre de réponse. Folle de rage, si loin de son Lié, elle frappa encore et encore. Elle ne pouvait pas l'aider, lui, le grand Jade, alors cet homme paierait, même si ça devait être sa dernière action en ce monde.

Car Orfraie n'était pas dupe, elle savait que dans son état, la vie de Firindal était menacée. Les larmes se mêlèrent à la terre, sur son visage, lorsqu'elle se débarrassa de Glorlëthalion. La coiffe de guerre roula dans l'herbe, un peu plus loin, hors de portée.

Et puis soudain, elle l'entendit. Elle entendit ce cri de détresse, de tristesse. Ce rugissement d'agonie, au loin, qui appartenait à Firindal. C'était la dernière fois qu'elle entendait sa voix. Son poing manqua sa cible et Orfraie hoqueta. C'était comme un coup de poignard en plein cœur, comme si le vide s'installait au creux de son être. La dragonnière eut soudainement froid et, avec ses forces restantes, se releva. Elle fit quelques pas dans l'herbe, oubliant le tueur de dragon, et porta son regard à l'horizon. Elle devinait sa silhouette, petit point noir près de la forêt. Elle se trouvait si loin de lui, alors qu'elle était à ses côtés quelques instants auparavant. Orfraie tomba à genoux, les mains sur les épaules, sans un mot ni un cri. Cette sensation, elle la connaissait. Des siècles auparavant, elle l'avait ressenti à l'instant ou elle avait brisé son serment. À l'époque, elle avait choisi sa voie, mais aujourd'hui, la rage bouillonnait en elle. Un autre avait fait ce choix pour elle, un autre avait déchiré son âme. L'écho du dernier râle d'agonie de Firindal se répercuta contre Ipsë Rosea avec la force d'une massue, lui sembla t-il, et Orfraie tomba en avant. Elle se retint avec ses mains alors que sa vision devenait floue.

Un cri. Elle poussa un cri de douleur, de détresse, de rage et de tristesse. Elle n'en avait pas conscience, mais des voies approchaient, des bipèdes attirés par ce cri et par le bruit du précédent combat. " Regarde papa, c'est Orfraie ! " Entendit-elle.

" Assassin. " Murmura t-elle, la voix brisée. Elle se redressa, à genoux, et se tourna vers le tueur de dragon. Salement amoché, le visage ensanglanté, elle aurait voulu qu'il ressente sa douleur, qu'il sente son âme se briser en autant de morceaux qu'un miroir éclaté. Dans son esprit, elle le maudit, lui et les mille prochaines générations à venir. " Vous l'avez tué. " Elle se mit à frissonner, incapable de se réchauffer malgré le soleil qui l'aveuglait. La douleur était t-elle qu'Orfraie tomba en arrière. Allongée, elle se sentait fatiguée et lasse. Elle avait tant combattu dans sa vie, vécue tant de drame, survécus à tant de guerres. Elle ne pouvait concevoir la vie sans Firindal, elle ne voulait plus souffrir, elle voulait voler avec lui pour l'éternité. Égoïstement, peut être, elle ne songea pas à Luna, ni à cet enfant à naître. A la place, elle ferma doucement les yeux, les traits anormalement paisibles, la tempête soudainement apaisée.

" Mais vous avez perdu. "

Elle inspira une dernière fois, puis son souffle la quitta définitivement, le restant de son âme s'envolant pour un dernier voyage.

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    Le ciel était si bleu, si clair. Si paisible. Le ciel ne pleurait pas la mort de Firindal, alors c'était que ce n'était pas triste. Il la libérait. Le soleil caressaient leurs peaux ; il le réchauffait. Il leur offrait sa clémence, promesse de lendemains. Naal avait foi, mais il était aussi pragmatique. Le Lien aurait de grandes chances de la tuer, elle aussi. Et il le regrettait. Ce qu'il avait fait ? « Je vous ai épargnée. » Épargnée de la sensation de mort que ce monstre partagerait avec sa dragonière. Épargnée de la vue de son trépas. Épargnée de la solitude qu'elle aurait trouvé dans le sous-bois. Épargnée des coups et des blessures qu'il avait encaissé bien plus qu'il n'avait donné, pour qu'elle ait toutes ses forces afin de combattre la mort où le Lien la tirerait. Il l'avait épargnée, parce qu'il aimait profondément les vivants. Savoir qu'elle s'éteindrait, cette femme battante, ce feu vivant, était un crève-cœur, pour lui. Le poing dans le nez fut douloureux, comme tous les autres. Le pangolin l'aidait à encaisser, mais cela restait pénible. Néanmoins, pour rien au monde, il ne se serait esquivé de son sort. Il était à sa juste place.

    Il était prêt, au fond, à lui servir de sac de frappe, autant qu'elle le voudrait, pourvu qu'elle exsude tout ce qu'elle avait en elle, et qu'elle y trouva la force de continuer à vivre. Il la laissait frapper, sans l'entraver, sans la repousser, l’accueillant en son sein, pour la consoler par la violence. Elle ne voulait pas entendre la vérité et il comprenait son obstination. Il comprenait sa colère et il l'acceptait. Il aurait tout donné pour l'épargner encore, pour qu'elle survive. Si c'était sa vie qu'elle voulait, le dévot la lui offrait. Lui ne désirait rien d'autre que sa survie à elle, qu'elle s'accrocha. Il comprenait combien c'était douloureux. Ses vies antérieures lui étaient encore floues, mais il ne souvenait avoir été lui aussi dragonnier. Il se souvenait de la douleur insoutenable lorsque le monstre qui l’enchaînait avait perdu la vie. Les larmes qu'il vit sur le visage d'Orfraie, il aurait voulu pouvoir les sécher. Prendre le temps, pour elle, de la soutenir. Saisir son visage entre ses mains et la regarder droit dans les yeux pour lui rappeler qu'elle avait encore tant de belles choses à vivre avec les bipèdes. Tant de choses dont son dragon l'avait éloignée en faisant passer leur Lien avant tout au monde.

    Mais il n'avait pas ce pouvoir : il n'était qu'un inconnu. C'était bien pour cela qu'il l'avait ramenée près d'Ipsë Rosea : pour que la Princesse y trouve des visages familiers qui lui donneraient envie de se battre. Le dernier coup frappa le sol lorsqu'on entendit Firindal agonir. Naal serra les dents mais ne put empêcher ses propre larmes d'exprimer sa compassion. Il se souvenait... Il se souvenait si bien de cette mort-là. De toutes celles qu'il avait traversées, cela avait été la plus difficile. Un véritable combat, chaque jour. Il avait essayé de tenir, mais le monstre qui l'avait empoisonné par le Lien avait eu raison de lui. Il se souvenait très bien de l'âme qui se déchirait, en lui. Il n'y avait rien de plus abominable et ces dragons en étaient la cause.

    Il se redressa, cracha du sang et porta son regard sur la dragonière au moment où elle retombait à genoux. Il se fit violence pour bouger, se porter à ses côtés. Son hurlement de douleur fit vibrer son âme. Il ne regrettait pas son geste, mais il était profondément touché par ses conséquences. « Battez-vous. » Mais elle tombait en arrière et il la rattrapait, amortissant sa chute. Il l'allongeait car malgré son ordre, il sentait combien la dragonière avait déjà lâché prise. Il le voyait, dans ses yeux, l'abandon, avant qu'elle ne les ferme. Il avait perdu ? Oui, il n'avait eu qu'en partie ce qu'il voulait. Le reste de ses espoirs vains étaient en train de s'envoler. Il le savait et le reconnaissait : « J'ai perdu. » Qu'elle parte au moins avec cela. Elle inspira une dernière fois et il sentit son dernier souffle échouer sur son visage ensanglanté.

    Il caressa ce visage aux traits elfiques, si doux et paisible dans la mort. Il étouffa un sanglot, face à l'échec. Il s'y était attendu, mais cela ne rendait pas cela plus simple. Il vint embrasser son front et murmura près de son visage sans vie : « Soyez bénie, Étoile-Déchue. » Elle l'avait maudit, mais lui la bénissait. Il leva son regard vers les gens qui approchaient et parmi eux une mage qui avait vénéré le Blanc. Il disparut.

    Près de la dépouille de Firindal, ses hommes se relevaient péniblement, disparaissaient, emportant les morts, effaçant leur traces, efficaces. La tête du monstre avait été tranchée et le regard plein de larmes de Naal se chargea d'une profonde haine à l'égard du dragon de jade. Le monstre était mort, mais il avait emmené une âme innocente avec lui. Il lui avait fait croire qu'il était tout son monde, qu'elle ne pourrait plus rien faire sans lui. Il avait déchiré son âme en s’agrippant, de ses pattes crochues, à sa Liée. Monstre ! Odieuse créature ! Perfide et corruptrice ! Le monde se porterait mieux sans cette abjecte création. Le silence était revenu dans le sous-bois. Les autres étaient partis, il n'y avait ici que la sang, le dragon et lui.

    Naal se laissa tomber à genoux, les yeux clos, salement amoché. Il entama une prière, pour que la Corneille envoie au Néant l'histoire de ce lieu. Il effaçait, tout ce qui s'était passé ici de telle sorte à ce que rien ne puisse jamais écouté le crime qui avait été commis. Ni vibrations baptistrales, ni sorts, ni glyphes... Tout ceci était envoyé au vide pour protéger ceux qui avaient œuvré, avec lui, pour le bien du monde. Cela prit quelques minutes, et lorsqu'il eut fini, il resta quelques secondes, immobile et silencieux avant de disparaître à son tour. Il avait besoin de soins et il savait que Kehlvehan lui en donnerait.

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