13 Septembre 1763
Jardin de la Loge
Jardin de la Loge
À force de faire les cent pas, j'avais fini par transformer le petit coin d'herbe en petit morceau d'hiver. Ma frustration, sensiblement liée aux pouvoirs du Léopard, avait formé des petits nuages cotonneux desquels tombaient des flocons paresseux. En deux heures que j'attendais, j'avais eu le temps de former un épais tapi de neige, tuant malheureusement la végétation en dessous. Ce n'était pourtant pas ma faute. J'étais arrivé à l'heure convenue par le vieux maître Eliowir pour continuer ses tests/leçons sur mes pouvoirs. Même si j'aimais me faire désirer, arguant que seules les super célébrités avaient le loisir de pouvoir arriver en retard, j'avais fait l'effort d'être arrivé avec un peu d'avance. Je ne respectais l'autorité que si celle-ci pouvait m'apporter quelque chose… et malheureusement pour moi, seule la Loge détenait le savoir que je convoitais. Je devais donc me plier aux exigences d'un viel elfe sans ronchonner. Tout de même… il abusait. J'avais pourtant signalé ma présence à un messager, pourquoi diantre n'est-il toujours pas là ?!
Je croyais qu'après ma petite catastrophe improvisée d'hier, j'avais réussi à titiller sa curiosité et lui donner envie de se pencher sur mon cas. Franchement, ce n'était vraiment pas professionnel tout ça…
Désespéré, je finis par me jeter dans mon tas de neige, les bras écartés. Étalé de tout mon long dans la poudreuse, ma queue reposant mollement dans le prolongement de mon corps, il ne me manquait presque plus que des oreilles amovibles et plus de poils pour me confondre avec mon Esprit. Respirant à plein poumons, je finis par calmer les battements de mon cœur, chassant par la même occasion mes petits nuages au profit de ceux du ciel de Calastin. Je ne su combien de temps je restai là, allongé dans l'herbe hivernale quand une ombre vint me perturber et qu'une tête entra dans mon champs de vision. Mes sourcils se haussèrent à la vue du tatouage qui ornait le front de ladite tête. Ce n'était definitivement pas maître Eliowir…
-Mára amaurea melin héru moriquende. Lótesse i úrin kal tye acsa.1
Je remerciais mes jeunes années Althaïa de m'avoir appris les rudiments de la langue elfique. Je n'étais bien sûr pas obligé de l'utiliser, mais je savais que les règles de politesse étaient très importantes pour le beau peuple. Encore une fois, je voulais bien me faire voir si je voulais accéder à la connaissance…
Réalisant que je n'étais pas du tout dans la bonne position pour le saluer correctement, je me relevais prestement, replaçant ma couronne sur ma tête et lissant mes vêtements. Finalement, j'exécutai le salut elfique en bonne et due forme.
-Je m'appelle Ezel Bonaventure, du Cirque du Renouveau. Que puis-je pour vous héru moriquende2 ?
Il ne ressemblait pas un garde, je n'étais donc pas en infraction avec une quelconque loi de la ville… peut-être un étudiant de la Loge ? Ou bien le noble à qui appartenait le jardin ? Dans tout les cas, je lui offrais un sourire innocent -pour une fois- et un regard pétillant de malice.
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1"Je vous salue Maître Elfe. Puisse le soleil éclairer votre chemin."
2"Maître elfe"