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descriptionL'ombre d'un appel [PV Dragons] EmptyL'ombre d'un appel [PV Dragons]

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8 novembre 1763

Un large banc de poissons s’approchait d’elle, ignorant totalement sa présence. Dans les faits, elle était essentiellement invisible pour eux, se confondant avec un récif corallien parmi tant d’autres. Soudainement, le récif s’anima, dévoila une gueule garnie de crocs qui aspira plusieurs poissons d’un coup. Nynsith se détacha du sol marin et retrouva son apparence habituelle en savourant sa collation.

C’est à cet instant qu’elle reçu l’appel. Non pas un appel basé sur le son, non. Quelque chose de plus profond, dont la nature était indéniable. Entroxucec l’entendit aussi.

« Qu’est-ce que c’est? »

« Un autre Dragon. »

Elle ferma les yeux focussa sur ce qu’elle ressentait, et les voix de son esprit commencèrent à murmurer les morceaux d’un nom, jusqu’à finalement parler à l’unisson. Cet appel provenait d’Aïasil, l’ancienne Liée. Pourquoi l’appeler elle? Étrangement, cet appel semblait contenir une certaine détresse, mais aussi de la résignation. Enfin, l’Océane perçu des images, des sensations. Du froid, de la glace, mais aussi de l’eau partout autour. Ayant identifié l’endroit, elle se mit en route, nageant à toute vitesse. Sans savoir pourquoi, elle avait un mauvais pressentiment, elle comprenait que quelque chose de majeur c’était produit et qu’elle ne devait pas perdre de temps.

Malgré sa nage rapide, le voyage lui semblait s’allonger à mesure qu’elle montait vers le nord. Elle happait de manière ponctuelle tout ce sur quoi elle tombait pour ne pas être trop ralentis par la fin. Comme un phare, l’appel d’Aïasil continuait à résonner dans son esprit et allait en s’intensifiant. Un sentiment de solitude se devinait à présent, ainsi que la colère et le désespoir. À un point du trajet, Nynsith aperçu une petite silhouette qui planait dans le ciel. Elle sauta hors de l’eau, déploya ses ailes et monta à sa hauteur : c’était Kaiikathal, une Dragonne encore jeune qui avait également entendu l’appel. Elle semblait exténuée d’avoir volé trop longtemps, aussi l’Affamée la laissa se cramponner à elle et poursuivit le reste du voyage hors de l’eau. Une nuit complète passa sans qu’elle ne ferme l’œil, mais elle aurait voulu dormir que cela lui aurait été impossible.

9 novembre 1763

La Dévoreuse parvint aux Crocs de Givre alors que le Soleil en était à son zénith. Les échos de l’appel se faisaient plus fort que jamais, mais encore fallait-il qu’elle retrouve la Dragonne d’Obsidienne. Elle grimpa en altitude, utilisant ses sens de Reine des Chasseresses pour mieux voir l’ensemble de la région. Sondant les glaces de son esprit, elle perçu éventuellement que d’autres étaient présents. Se laissant guider par son ressenti, elle pénétra dans une large cavité créée par la fonte graduelle des eaux et marcha un moment à travers celle-ci.

Seulement, elle se figea en voyant ce qui l’attendait. Au sol gisait le corps d’Aïasil, sans vie Considérant qu’elle était partiellement encastrée dans la glace, sa mort n’était pas récente. À ses côtés se dressaient Kaalys, mais également une petite Dragonne rosée dont la nature était sans équivoque.

« Est-ce bien elle? »

Nynsith détourna son regard de l'Opale sans répondre à Entroxucec et regarda à nouveau l’Obsidienne. Elle se rapprocha du cadavre pour mieux l’étudier, désireuse de comprendre ce qui avait pu causer sa perte. Aucune blessure n’était visible. Aucun signe de combat autour non plus.

« Comment? »

Ses yeux étaient toujours rivés sur le corps tandis qu’elle posait sa question. Quelque chose n’allait pas. Quelque chose qui n’aurait pas dû se produire s’était produit quand même. L’Océnane laissa entendre un grondement profond et lent qui fut amplifié par l’écho des lieux, sonnant presque comme le tonnerre.

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L’appel avait couru sur ces écailles comme une onde, les lui hérissant avant de plonger en elle et de l’étreindre viscéralement. C’était l’appel d’un dragon, elle en était certaine. Rien n’aurait pu faire ainsi rugir le feu en elle, si ce n’était un autre dragon. Elle avait détalé immédiatement, sans prendre garde d’expliquer son soudain tourment à son lié. Elle s’était éloignée du navire ancré sur une plage de Calastin, elle avait galopé autant que possible et quand ses pattes n’avaient plus suffit, elle avait cherché à s’envoler. Cet appel, il n’était pas de ceux que l’on pouvait ignorer. Elle vola jusqu’à ce que ses ailes lui fassent mal, grondant doucement, serrant les crocs et se forçant à continuer… Mais bientôt le vent se fit trop fort et elle perdit de l’altitude, ses forces se consumaient, son jeune corps ne pouvant pas suivre la détermination avec laquelle elle tentait de progresser. L’appel résonnait toujours, la poussant en avant. Jusqu’au moment où elle n’eut plus aucune force, où sa vision se brouilla et où elle se sentit lentement descendre, dans un courant d’air, vers la surface de l’eau. Elle ne dû son salut qu’à l’apparition de la Dévoreuse, Nynsith. Son ombre énorme vint la couvrir, son esprit vint frôler le sien, l’encourageant à s’accrocher à elle et elle n’accepta qu’après quelques instants de plus à lutter, venant se blottir en un petit rond dans le creux de la nuque puissante de la Chasseresse. Rapidement, elle sombra dans un sommeil réparateur.

Lorsqu’ils parvinrent à destination, le lendemain, elle avait les muscles en souffrance, les ailes engourdies, la gorge sèche mais elle n’était pas moins déterminée à continuer. Elle avait rêvée de la dracène noire pendant la nuit, un rêve lacé de souffrances et de folie, l’appel s’était fait plus fort, plus vibrant, à lui hérisser les écailles. Quelque chose n’allait pas avec Aïasil, mais quoi ? Ils arrivaient, semblait-il, aussi sauraient-ils prochainement. La bise glacée fouettait son museau, et elle serra des yeux en allongeant le cou pour essayer de distinguer ce qui se passait. La jeune écailleuse interrogea Nynsith, pour savoir si elle distinguait la dracène sombre ou non. Elles montèrent encore, afin de prendre davantage la vision de la région, avant de s’engouffrer dans une cavité. Kaiikathal se redressa, crête dressée, et se fit plus attentive encore, sa queue hérissée ondulant de droite et de gauche. Près d’elle, il y avait la chose magique bizarre qui semblait accompagner Nynsith comme un poisson nettoyeur. Là, sur la surface inégale, gisait une forme qui la glaça profondément, l’emplissant d’une profonde tristesse. Il y avait un autre dragon également, aussi sombre que le gisant, et… une petite boule couleur de lapin sans poils, qu’elle reconnut aisément. Il s’agissait de Shyven. Prenant son envole, elle vint se poser près du cadavre tout en étendant son esprit aux autres dragons présents. Tout d’abord Nynsith, pour la remercier, puis Shyven pour fêter leurs retrouvailles et enfin Kaalys pour le saluer.

Puis, elle s’avança vers la dépouille d’Aïasil, lentement, et vint humer le bout de son museau. Elle sentait la mort et le désespoir, une profonde douleur, palpable dans l’air, piquante sur sa langue. Au grondement de la Chasseresse, elle répondit d’une plainte-mélopée, sa queue allant et venant avec nervosité. Quelque chose lui remuait les écailles. Elle chercha à essayer d’user du glyphe sur l’anneau à sa corne, celui permettant d’appeler son lié, afin qu’il puisse également savoir ce qui se passait. Pourtant, il semblait que la magie de l’objet ne pouvait agir. Peut-être en raison du lieu, peut-être en raison de la distance. Elle ne pouvait en être certaine, mais la conclusion était la même : Elle ne pouvait pas le faire venir. Secouant légèrement la tête, la dracène observa de nouveau le corps sans vie, ne comprenant pas ou ne voulant pas comprendre ce qui se passait. Pourtant, il fallait bien l’accepter, l’esprit d’Aïasil avait rejoint le choeur des voix des ancêtres. *Le lien… l’absence de Lien… c’est ça qui l’a vaincu. Elle était fatiguée sans son bipède. Alors elle a arrêté de lutter* Cela lui faisait peur. Si elle partait, est-ce que Nathaniel serait aussi fatigué ? Est-ce qu’il mourrait aussi ? Elle n’avait pas envie de lui infliger cela. Ni à elle-même d’ailleurs. Elle émit de nouveau un profond roucoulement et se mit sur les pattes arrières, lançant un chant en mémoire de la dracène disparue.

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¤ Trop tard ¤

Comme à son habitude et depuis qu’il en avait obtenu l’autorisation, si on peut dire, Verith partageait son temps entre sa famille, ses propres recherches et la Bâoli. Et ce moment même, le colérique était plongé au cœur du volcan, dans cette pièce recouverte de glace. Il était sous forme d’ombre, collé au plafond, et sous lui s’activaient plusieurs graärh. Certains, comme lui, cherchaient à comprendre ce puits de magie, d’autres restauraient le lieu ou redécouvraient leur histoire perdue. Le passé du peuple félin pouvait s’avérer intéressant, il y trouverait surement des éléments lui permettant de comprendre et d’élucider les mystères du Bâoli. Mais ce n’était pas à lui de le faire. Il laissait cette tâche à ce peuple. Il les avait déjà aidés à redécouvrir ce lieu, le dragon ne pouvait pas faire tout le travail à leur place. Et il ne devait pas le faire. Il s’agissait du passé des graärh, c’était donc à eux de le redécouvrir.

Plongé dans une transe méditative, écoutant et analysant la magie qui baignait ce lieu et perturbant tout signaux pouvant provenir de l’extérieur, l’enfant de l’orage ne perçut pas l’appel de la dracène couleur d’obsidienne. Un appel à l’aide, un appel empli de désespoir. Un appel auquel le fils de Skade avait déjà répondu il y a plusieurs mois de cela. Un appel dont il avait été le seul à répondre. Lui qui était pourtant l’ennemi du lien. Par la faute de la saturation ambiante de la magie, le rouge ne perçut pas la détresse d’Aïasil. En revanche, il ressentit sa mort. Cette dernière vint le heurter comme flèche vint heurter un cœur. Le rouge eut le souffle coupé l’espace d’un instant. Sans doute avait-il ressenti sa mort, car c’est grâce à sa magie qu’elle avait échappée à la mort lors de leur dernière rencontre. L’ayant retenu sur ce monde, la tirant vers la terre pour l’empêcher de s’élever vers les cieux. La puissance de Verith avait, semble-t-il, duré un temps. Avait-il prolongé l’agonie de la dragonne ? Non, il se refusait à y croire. Il lui avait simplement laissé une chance. Une chance de survivre, une chance de vivre libre. Malheureusement, la flamme d’Aïasil venait de s’éteindre. Pourquoi ?

L’espace d’un instant, le rouge crut à une attaque extérieure lorsqu’il ressentit cette douleur au cœur. Qui ? Qui osait l’attaquer ? Il posa instinctivement son regard sur les graärh en contrebas qui ressentirent immédiatement la colère du rouge. Non, cela ne provenait pas d’eux. Ils n’avaient rien fait. Il lui fallut une seconde supplémentaire pour comprendre d’où venait cette douleur. Sans attendre, l’enfant de l’orage déferla tel un torrent d’ombre au travers du tunnel menant à la sortie, créant l’émoi chez les félins. Il surgit de la montagne, reprenant sa forme physique et s’envolant en poussant un effroyable rugissement avant de bifurquer vers le nord. Il savait ou elle était, précisément. Il avait juste à suivre cette douleur. Avec un peu de chance, il pourrait la ramener. Avec un peu de chance, il ne serait pas trop tard.

Il ne lui fallut guère longtemps pour arriver au-dessus du récif des crocs de givres. Il entendit alors en provenance d’un des glaciers un rugissement. Il le reconnut aussi tôt, il s’agissait de celui de sa fille. Elle aussi avait entendu l’appel ? Verith amorça rapidement sa descente. Le plafond de la cavité à l’intérieur de laquelle reposait la dracène d’obsidienne, et où se trouvait Nynsith, Kaalys, Shyven et une dragonne inconnue, fut parcouru de fissures. Le bruit de glace se brisa se mit à raisonner. Puis soudainement, les rayons de lumière du soleil vinrent illuminer cette pièce. Verith était au-dessus du glacier, bien trop petit pour lui, en arrachant le sommet, le projetant au loin.

Le regard alarmé du rouge se posa directement sur la dragonne d’ombre. Il projeta sa magie et son esprit à son encontre. L’atmosphère se mit à vibrer comme jamais auparavant, la puissance du rouge emplissant l’espace. Malheureusement trop tard il était. Le calme vint s’abattre aussi vite de l’agitation était venue. Voilà plusieurs jours déjà qu’Aïasil était morte. Il n’avait pas entendu son appel, mais il avait ressenti sa mort … malheureusement il l’avait ressenti avec plusieurs jours de décalage. L’énergie baignant le Bâoli avait dû faire interférence. Le cœur du rouge se serra. Il arrivait trop tard, cette fois. Ces battements d’ailes se firent plus faibles, le colosse de flamme vint lentement amerrir.

« Je suis arrivé trop tard pour la sauver cette fois-ci … »

Inconsciemment, les images de l’événement s’échappèrent de l’esprit du rouge, pour venir toucher celui des dragons en présence. Aïasil appelant à l’aide, mourant au sein de la forêt de Licorok, allongée auprès de sa liée décédée. Le rouge arrivant, lui demandant si elle souhaitait continuer à vivre, puis l’arrachant avec force aux griffes de la mort. Une profonde tristesse accompagnait ses souvenirs. Mais rapidement et comme à son habitude, cette tristesse devint colère et la colère devint haine.

« Où étais-tu ? … Où étais-tu pour ta sœur ? … Kaalys ? »

Le rouge tourna son museau en direction de l’ancien blanc. Dans ses yeux baignaient tristesse et rage face à l’injustice de cette situation. Il pouvait le voir, le sentir. Cette mort n’était pas récente, contrairement à l’arrivée des parties en présence. Où était le fils de Sahila et d’Atalos pendant ce temps ? Où était la famille d’Aïasil pendant qu’elle se mourait ?

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L'appel s'était fait viscéral, il ne pouvait l'ignorer. Tel le chant d'une sirène, il s'était envolé sans attendre, sans prendre garde et sans explication. C'était un appel qu'il avait redouté et espéré à la fois. Redouté, car il s'agissait de sa soeur, mais espéré car Aïasil ne le considérait plus comme sa famille depuis longtemps, car elle n'était plus que l'ombre d'elle-même. Elle avait changé, après la mort de sa liée, et Kaalys n'avait pas été capable de l'aider. Peut-être aurait-il dû être davantage présent, mais aurait-il pu ? Elle l'avait rejeté à chaque tentative et il avait abandonné, las. On pourrait le lui reprocher et il était prêt à l'accepter, sa tristesse n'en restait pas moins réelle, en tout cas.

Shyven entre ses pattes, ou parfois sur son dos, Kaalys avait volé aussi vite que possible, sillonnant les cieux de Calastin en ligne droite, passant au-dessus des bourgs et des villes sans s'en soucier, son ombre immense masquant la lumière du soleil ou se dessinant sur le blanc laiteux de la lune. Puis il avait laissé les côtes de l'île derrière lui. L'appel était comme un phare en pleine nuit. Aïasil avait longtemps été introuvable pour l'ancien blanc, se dissimulant à ses sens, se jouant de lui parfois. Aujourd'hui, pourtant, elle l'appelait. Elle appelait tous les dragons.

Kaalys et sa fille furent les premiers à arriver, à se glisser entre la roche et la glace du récif pour retrouver la dépouille d'Aïasil. Elle gisait sur le flanc, au fond d'une cavité qui protégeait son corps sans vie des intempéries et le dissimulait aux regards trop curieux. L'ébène l'observa de loin, imprégnant l'image de son corps sur sa rétine tandis que Shyven faisait ses premiers pas sur la glace. Sa mort n'était pas récente, se rendit compte Kaalys avec tristesse.

Il s'approcha enfin, un poids sur le poitrail, et poussa un long mugissement, son souffle se transformant en vapeur au contact de l'air froid. Avait-elle finalement cessé de lutter ? La perte de son lien avait fait d'elle une créature que Kaalys n'avait pas reconnue, luttant contre elle-même. Il se sentait coupable de ne pas avoir davantage insisté, de ne pas l'avoir forcé... Même s'il savait que cela était inutile, que le fossé entre eux ce serait simplement creusé davantage... Mais pourtant, la culpabilité et la tristesse éteignaient son coeur tandis qu'il se couchait près du corps sans vie, posant son museau contre celui de sa soeur.

- Une étoile a rejoint le ciel et je penserais à toi à chaque fois que mon regard s'y posera. Il tourna son regard vers Shyven. - Aïasil était une chipie, mais elle avait bon fond, dit-il avec tendresse. Elle a perdu son Lien deux fois et cela l'a détruite de l'intérieur. Elle s'est longtemps caché à mes sens et lors de notre dernière rencontre, elle ne me considérait plus vraiment comme son frère... La douleur a créé un faussé que j'ai été incapable de combler. Et j'ai abandonné.

Une nouvelle leçon pour la petite Opale, saurait-elle être meilleure que son père ?

Quelque temps plus tard, Kaalys ne saurait pas dire combien de nouvelles présences se firent sentir. La jeune dragon redressa le museau à l'approche de Nynsith et d'une très jeune dragonne dont il ne connaissait pas le nom. N'ayant pas vu la mère de Shyven depuis de nombreux mois et connaissant les sentiments de cette dernière envers sa progéniture, Kaalys se redressa sur son séant et s'assura que la petite Opale n'était pas trop loin de lui. C'était sa première rencontre avec sa mère et celle-ci ne se déroulait pas sous les meilleurs auspices…Kaalys garda le silence lorsque Nynsith demanda ce qui avait eu raison d'Aïasil, mais la petite dragonne répondit à sa place. En se concentrant un peu sur cette dernière, l'ancien nacré sentit l'emprise du Lien en elle. Ce même lien qu'avaient connu Aïasil et lui-même à leur naissance. Cela lui éteignit le coeur et il se joint à son chant, l'espace d'un instant.

Un instant qui fut brisé par l'arrivée d'un autre dragon, bien plus massif que ceux déjà présents. Kaalys leva les yeux vers le ciel, alors que le haut de la grotte était arraché par des griffes d'ébènes. Verith, évidemment. À la vue du géant grenas, le presque-lié songea à Achroma et sa dernière rencontre avec le dragon de l'Ire. Réputé pour être buté sur bien des sujets et avoir une opinion bien arrêtée sur le Lien, il y avait fort à parier que sa présence soit très déplaisante. Et cela ne manqua guère, alors qu'il transmettait à tous des images de son sauvetage d'Aïasil. Les images firent baisser la tête au jeune dragon.

- Pas là, répondit le jeune dragon en redressant le museau.

C'était là une évidence, il n'avait pas été là, que ce soit de son fait ou de celui d'Aïasil, il n'avait pas été présent. Mais ce n'était pas une discussion que le jeune dragon voulait avoir en cet instant, pas devant la dépouille de sa soeur, pas avec un être aussi buté que Verith. Kaalys connaissait déjà le discours.

- Là d'où vous venez, que ce passe t-il à la mort d'un dragon ?

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Qu’était la véritable nature des dragons et qu’est-ce qui les poussaient à être si solidaires ensemble dans les moments les plus difficiles ? Malgré la distance, le caractère des uns et des autres, leur Lien respectifs et tout ce qui s'ensuivit … Le nid des uns et des autres n’étaient plus quand un grand cataclysme arrivait.

Seul restait peut être l’unité d’une race, et des grandes réunions de famille avec des différends à régler.

Shyven avait l’esprit bien préoccupé ce matin, peut être un peu trop pour l’âge qu’elle avait. Cela étant, même si elle n’était pas encore une vénérable dragonne pouvant donner conseils et faire état d’un grand savoir, les mois passaient, et avec  eux, la petite rose n’était plus vraiment si petite que cela.

Elle se sentait grandir, et si de nombreuses choses encore étaient à découvrir pour elle, le monde faisait un peu plus de chance chaque jour, et sa condition de dragonne libre la préoccupait beaucoup.

Ce jour là, elle avait entendu l’Appel. Comme tous les autres dragons. Ça n’était pas un appel joyeux, mais plutôt un cri de douleur, une flamme qui s’éteignait, celle d’Aïasil. Une rupture dans le calme plat de leur nid avec Kaalys, mais aussi une rupture qui avait du secoué l’archipel tout entier.

Alors son père et elle n’avaient pas beaucoup réfléchis. Evidemment, ils devaient se rendre sur place, pour constater par leurs propres yeux ce qui s’était passé, qu’est-ce qui avait fait trembler la mémoire draconique.

S’en était suivi des longs jours de vol, où Kaalys n’avait pas chômé pour aller au plus vite à destination. La petite opale, quant à elle s’était laissée porter par les vents avec lui. Elle avait au départ essayer de voler avec lui, et puis quand sa résistance physique était à bout, elle avait accepté de se laisser porter par le grand saurien.

Les Crocs de Givre se dessinaient enfin à l'horizon, et avec eux trois autres dragons en plus d’eux deux. Elle reconnaissait d’abord aisément Kaiikathal, parce que même si la plus petite des trois, Shyven la connaissait déjà.

Elle lui adressa ses salutations, et sa joie de la retrouver dans un moment aussi … Particulier. Shyven essayait de tirer tout le positif à elle, parce que garder son calme n’était pas vraiment des tâches les plus simples, surtout à la vue des discussions qui se lançaient …

Shyven écouta ce que son père, et les autres lui disaient avec sagesse : le Lien avait causé la perte de ce dragon, c’était une évidence. Une réflexion plus profonde sur celui-ci devait être engagé, s’en était certain.

Mais même pour l’esprit de Shyven, pourtant éclairé et cherchant toujours au maximum le bon compromis, la question était épineuse. Cela n’était pas l’affaire d’une simple petite discussion.

Certains en avaient même fait le combat d’une vie, et c’est précisément la première chose que la dragonne sentait quand elle vu finalement son imposant Grand-Père. Un esprit très puissant, vénérable à plus d’un titre, mais aussi consumé par la Haine et la Colère.

Une Haine et une Colère qui en avaient inspiré d’autres. Shyven s’était battu à sa manière contre celle-ci, en empêchant Vaea d’arriver à ses fins. Elle s’était autoproclamée Tribunal Vivant, défiant ainsi à sa manière non seulement un dragon, mais aussi des siècles d’Histoire qui la contemplait présentement.

Shyven salua l’ancestral Verith avec tout le respect qui lui était dû. Elle ne chercha pas à cacher ses désaccords, ni ce qu’elle avait fait par le passé, mais décida de faire preuve de soutien malgré tout pour le vénérable de la famille. Ils ne s’étaient pas tous réunis ici pour discuter de leurs opinions, mais bien pour aider une âme en peine à partir de leur monde, pour éteindre une Flamme proprement. Pour cela, au même titre que tous les autres, Verith méritait autant de soutien que Shyven pouvait lui donner. Même si elle n’était pas persuadée que ce soit vraiment ce qu’il cherche.

Même si les deux esprits ne s’étaient encore jamais réellement rencontrés, la petite opale en avait suffisamment entendu parler pour avoir une idée assez arrêtée sur qu’il était, et ses convictions. Et l’interpellation que le grand rouge lança au père de Shyven ne fit que conforter la rosée dans ses idées.

Elle décida alors de s’écarter un moment, laissant les deux à leur discussion, et chercha la présence du dernier dragon, ou plutôt de la dernière dragonne, présente en ces lieux. En vérité, cette empreinte, elle aurait pu la reconnaître instinctivement entre milles. Ces choses étaient assez indicibles, mais Shyven sentait qu’il s’agissait du maillon manquant dans son schéma familial. Celui qui n’était jamais là physiquement, mais qui n’avait jamais cessé d’être là, dans un coin de sa tête.

Sa mère. Nynsith, la Dévoreuse.

Shyven ne savait pas trop quoi lui dire. Elle sentait la dragonne sur la défensive, voir dans le déni. Elle tâcha donc de ne pas se montrer trop affective, et l’approcha prudemment.

“Bonjour … Mère ?”

Cela faisait bizarre à la petite opale de prononcer ce mot là, vraiment, à la bonne personne. Elle inclina sa petite tête en sa direction, avant de reprendre :

“J’aurai aimé que notre première rencontre se fasse en de moins pire circonstances …”

La petite opale était déstabilisée, et ne savait pas trop comment engager la suite de cette conversation. Seulement elle savait également que le moment où elle pouvait partager des instants avec cette dragonne étaient très rares. Alors elle ne pouvait pas simplement se résoudre à simplement se taire et passer à autre chose. Elle essaya d’en savoir plus :

“Et vous, que pensez-vous de … Tout ça ?”

Shyven s’appuya à l’aide d’images mentales concernant leur famille, la mort d’Aïasil, le lien, et tout ce qu’il en découlait. Elle n’avait jamais connu l’opinion que de Kaalys sur la question, et c’était fait le sien entre temps, mais comme Nynsith était sa mère, la petite opale sentait que pour ses valeurs personnelles, il aurait été bon de connaître son avis sur la question.

descriptionL'ombre d'un appel [PV Dragons] EmptyRe: L'ombre d'un appel [PV Dragons]

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Le Lien. Évidemment, c’était le Lien qui l’avait tuée. Un signe supplémentaire que cette liaison était contre nature. Nynsith serra la mâchoire tandis que sous ses pattes maintenant crispées, la glace se fracturait. Comme en réponse à sa colère, le plafond de la caverne fut arraché avec une telle force que tout la structure glacière fut ébranlée. Son père avait lui aussi perçu l’Appel et à présent il tentait à présent un ultime sauvetage, en vain.

La Dévoreuse savait qu’il avait déjà secourue Aïasil, elle-même lui avait déjà partagé l’information, sans pour autant détailler comment les choses s’étaient produites. À travers les souvenirs de Verith, elle perçut comment l’Obsidienne c’était vu offrir une seconde chance, car elle avait déjà failli succomber au Lien une première fois. Sa détresse et son désespoir étaient tout simplement inimaginables à envisager pour l’Océane. Ou peut-être que si. Comment réagirait-elle si elle perdait sa famille? Si du jour au lendemain, ses parents ou ses frères trouvaient la mort? Car si elle ne comprenait pas comment un Dragon pouvait vouloir être lié à un bipède, elle comprenait tout de même qu’il s’agissait d’une relation similaire, quelque chose de profond. Probablement qu’elle retournerait sur le continent sauvage, qu’elle retournerait rejoindre les autres Dragons, des Dragons qui n’avaient jamais eu la malchance d’être mêlés au monde des bipèdes.

Sans aucun détour, le grand Rouge confronta Kaalys quant à son absence auprès de sa propre sœur et celui-ci ne pu qu’admettre son tort. L’Affamée avait longtemps eu une relation ambigüe avec l’ancien Nacré, sans pour autant ressentir d’animosité à son égard, mais leur dernier échange concernant l’œuf de Shyven avait été particulièrement houleux et ils ne s’étaient pas recroisés avant aujourd’hui. S’il avait eu la décence de reconnaître qu’il avait failli, il eut également l’audace de demander comment se passait la mort d’un Dragon. Lui qui avait été lié de naissance, lui qui n’était pas du continent sauvage, comment pouvait-il se permettre une question du genre? Et comme elle allait lui répondre, une autre voix, très jeune, l’interpella.

« Bonjour… Mère ? »

Nynsith baissa doucement les yeux sur la jeune saurienne aux écailles roses.

« J’aurais aimé que notre première rencontre se fasse en de moins pires circonstances… Et vous, que pensez-vous de… Tout ça ? »

Des images mentales fusèrent bientôt, mais Shyven pu sentir que celle qu’elle appelait sa mère refermait son esprit devant elle, refusant les images qu’elle partageait.

« Ta mère venait d’un temps oublié. C’était une créature qui ne méritait rien d’autre que le sort qu’elle a connu. »

L’Opale reçu en bloc un mélange de sensations et d’images crues, très désagréables : la possession de Nynsith par Angamar, sa libération difficile, la destruction de la Chimère par les soins de Verith et, encore plus vivace que le reste, cette sensation de détresse, de dégoût et de colère qu’avait ressenti la Dévoreuse en découvrant que son corps avait été utilisé contre son gré.

« T’a-t-on expliqué comment le Lien a permis aux Chimères d’entrer en ce monde? »

Ce furent cette fois-ci des images de Gilgamesh dévoilant la vérité qui bombardèrent la petite, encore une fois sans aucun filtre.

« La mort d’Aïasil n’est qu’une preuve supplémentaire que le Lien n’apporte rien de bénéfique. »

Ses paroles étaient dures, presque grinçantes, mais n’étaient pas nourries par la colère, étrangement.

« J’aurais préféré ne jamais croiser ta route… »

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Alors qu’elle achevait la mélopée, Kaiikathal entendit puis vu les paroies de la caverne se fissurer et elle émit un grondement mécontent, rabattant sa crête sur son cou. Qu’est-ce qu’il se passait ? Ce qui se passait, de toute évidence, c’était qu’un gros dragon rouge n’arrivait pas à entrer. Est-ce que c’était une raison pour arracher un morceau de nature ? Elle en doutait un peu, mais de toute façon elle n’avait pas vraiment l’impression qu’il écouterait, vu son oeil. Il avait l’air paniqué ou en colère. Un parent de Aïasil ? Elle s’écarta du corps sans vie, pour laisser au nouvel arrivé tout loisir de constater le départ de la noire, et attendit. Trop tard pour la sauver cette fois ? Elle pencha le museau sur le côté.

*Peut-être que tu ne devais pas la sauver, Rouge*

Parfois, il n’était pas dans l’ordre naturel de sauver une vie même draconique. Elle ne se plongeait pas encore dans la vie de la dracène décédée mais elle la sentait prise dans l’étau de la souffrance. Peut-être Aïasil était-elle enfin libérée de la souffrance et libre de se réincarner de façon plus heureuse maintenant. Il ne fallait pas qu’il se lamente pour cela. C’était les bipèdes qui se flagellaient et se lamentaient et ils ne le faisaient pas réellement pour le mort mais pour eux-mêmes. Pour autant, la tristesse du grand dragon se transforma bien vite, la rendant à nouveau perplexe. Pourquoi toute cette haine ? Pourquoi toute cette tristesse pour une âme partie qui allait pouvoir se reposer et revenir plus tard ?

Elle ne comprenait pas ce qui se passait entre le grand rouge et le dragon noir. Elle se doutait qu’ils discutaient mais elle ne ressentait que des sentiments et elle ne comprenait pas ce qui leur arrivait. Et puisqu’elle ne comprenait pas, elle demandait, lançant son esprit à la rencontre des leurs pour leur faire part de son interrogation. Puis, elle rejoignit Shyven, se posant à côté d’elle, uniquement pour sentir de nouvelles tensions. Décidément ! Les dragons ici n’agissaient vraiment pas en nuée. Tout ne semblait être que des tensions, des sentiments et sensations négatives. Même la vacillante lueur de Shyven semblait n’avoir valut que de mauvaises vibrations sur les écailles. Venant presser la pointe de son museau contre la rose, elle lui parla.

*Qu’est-ce que vous vous dites ?*

Elle n’était pas privative des discussions qui se nouaient, mais elle aimait bien peau-de-lapin et elle n’avait pas envie qu’on lui hérisse les écailles. En fait, cela commençait même à lui devenir absurde.

*Vous tous. Est-ce que vous êtes venus pour vous tirer la queue ou pour accompagner Aïasil vers les étoiles ?*

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¤ Tristesse & colère ¤

Verith observait d’un œil mauvais, remplit de colère et de reproche, Kaalys. Où était-il ? Lui qui partageait le sang de cette dragonne gisant au sol sans vie. Où était-il ? Pour quelle raison n’avait-il pas pu lui venir en aide ? Qu’est ce qui avait pu être bien plus important que sa sœur ? Le rouge aimerait savoir pourquoi ce misérable n’avait pas été là. Dépendamment de sa réponse Verith parviendrait ou non à se contrôler.

« Pas là. »

Le cœur du rouge du rouge rata un battement sous la fureur qui l’animait. Comment ça « pas là » ? Il ne se cherchait même pas d’excuse ? Il reconnaissait sa faute ? Non … tout ceci ne sonnait que comme que l’insolence aux oreilles du fils de l’orage. Ses crocs grincèrent alors qu’il dévisageait l’ancien blanc. Ses griffes le démangeaient. Un bout coup de patte le remettrait surement à sa place. Plus encore, avec un peu de chance il lui trancherait le cou et n’aurait plus jamais à subir sa misérable présence. Les liés sont si méprisable. Comment peut-on les appeler dragon ? Heureusement pour Kaalys, un événement capta son attention.

« Nynsith ! »

L’esprit du rouge claqua dans la trame comme une assourdissante détonation. Le père de la dévoreuse tourna son museau, regardant de biais sa progéniture. La colère scintillant dans les orbites du colosse de flamme ne lui était adressée, mais elle ferait parfaitement office d’avertissement si elle continuait dans cette voie.

« Ne soit pas cruel envers la petite. Elle aussi est une victime des chimères, tout comme toi. »

Verith s’apprêta à se retourner en direction de Kaalys, quand son attention fut de nouveau attirée ailleurs. L’énorme museau du colérique se tourna en direction de la toute petite dragonne aux écailles abyssales. L’ire battait la mesure, mais l’enfant de l’orage parvint à la calmer. Il s’agissait d’un dragonnet. Il devait faire preuve de retenue comme avec les autres jusqu’alors.

« Le lien est contre nature. Il n’appartient pas à l’ordre naturel des choses. La mort d’Aïasil par le lien n’est donc en rien naturelle. Mais je lui ai laissé le choix. La sauver ou l’achever de mes griffes. Elle a voulu vivre, alors je l’ai aidé à vivre. Au moins a-t-elle pu vivre libre pendant un temps. Mais tu as peut-être raison. Peut-être n’aurais-je pas du l’écouter. Peut-être aurais-je dû l’achever. Au moins le lien n’aurait pas eu raison d’elle. Peut-être ferais-je  ce choix après ce qui va suivre. Peut-être mieux vaut-il que je me couvre de sang de lié que de laisser le lien vous prendre en premier. La souffrance de vivre dans la honte est peut-être moins grande que celle de voire les dragonnets que vous êtes mourir par les bipèdes et leur lien. »

Le rouge ramena son museau en direction de Kaalys. Il huma l’air et très vite, le dégoût vint se mêler à la colère.

« Tu empestes le bipède … et tu empestes le lien. Voilà donc pourquoi tu n’étais pas là … Kaalys. Quelle honte. Quel déshonneur. Tu es écœurant. »

Un profond soupire s’échappa du fils de Skade.

« Moi, l’ennemi du lien, j’ai plus fait pour Aïasil la lié, que son propre frère. Je crois que je n’ai rien connu d’aussi triste. »

Verith leva une patte, la plaça au-dessus du glacier et la descendit lentement, avec une certaine délicatesse, venant récupérer entre ses griffes le corps froid de la dragonne d’ombre.

« Son esprit et son âme sont déjà partis depuis longtemps. L’un a rejoint les étoiles, l’autre le royaume des morts. Il nous reste plus qu’à s’occuper à la dernière attache de ce plan. Nous allons brûler sa dépouille. La magie qui s’en dégagera nourrira la terre. Et cela empêchera les bipèdes de venir la profaner. Il y a un petit ilot à l’est. Je pense que se sera parfait. Même si cela ne vaut pas l’un des quatre berceaux. Qu’est ce que vous en pensez ? »

Les quatre berceaux ne diraient absolument rien aux dragons en présence, à l’exception de Nynsith. Rares sont les dragons à mourir sur le continent sauvage, mais lorsque cela arrive, le dragon mort ou mourant est conduit dans l’un de ces quatre lieux. Les berceaux doivent leur nom à la vie qui s’y développe. Mais il s’agit en réalité de cimetière de dragon. Le premier se situe au cœur d’une jungle luxuriante. Le second dans les profondeurs du plus grand lac du continent. Le troisième aux abords d’une chaine de volcan. Le dernier, en revanche, est peu connu, car c’est ici que meurent ceux qui ont été mit au ban de la société.

« Tu as abandonné ta sœur, Kaalys, n’insulte pas plus sa mémoire en assistant à ce qui va suivre. Retourne auprès des bipèdes, c’est là la place que tu as choisie. »

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Au moins, cela avait le mérite d’être clair, avec Nynsith. Si Kaalys lui avait quelquefois parler de sa mère, la décrivant comme quelqu’un de très particulier, le Tribunal Vivant compris rapidement à qui elle avait à faire.

Pour autant Shyven fut sensible aux images que sa mère lui transmettait, mais probablement pas de la façon dont elle s’y attendait. Evidemment, tout ceci était très cru, et vraiment pas ce que l’on s’attendait à voir quand on était une petite dragonne comme Shyven. Pour cela pour un temps, elle fut déstabilisée et dût digérer l’information. Mais elle s’aperçut bien vite qu’à travers toutes ces bribes de récit, sa mère avait aussi ses traumatismes, très graves, causés par des choses sur lesquels même les pontes de savoirs qu'étaient les dragons n’arrivaient pas à trouver de consensus.

Cela attristait Shyven, mais elle comprenait. Nynsith s’était complètement recroquevillée, et elle devait à présent vaincre ses démons intérieurs pour pouvoir avancer. La petite dragonne fit un petit signe de tête descendant à sa mère, comprenant encore une fois qu’elle ne désirait pas poursuivre la “conversation”. Shyven adressa cependant avant de clore le sujet des images de bienveillance, et de sollicitude, si elle le désirait.

La petite opale ne voulait pas brusquer sa mère, mais elle sentait au fond d’elle que dans ce genre de moments poignants, il était parfois bon de se sentir en famille. Shyven ne comprendrait sans doute jamais ce que Nynsith avait vécue, mais elle pouvait au moins l’aider à sa façon à se sortir de cela, où à lui faire oublier.

Cependant, est-ce que la Dévoreuse pouvait le comprendre ? Rien n’était moins sûr. Mais cela ne préoccupa pas plus que cela Shyven. Cela viendrait, en son temps. En bien des choses, le Temps était un bon allié de l’Équilibre.

La petite opale apprécia l’aide du Grand Rouge, qui s’avéra plus protecteur qu’elle ne l’aurait pensé de prime abord. Elle lui adressa un petit signe de tête en guise de remerciement, ainsi que des sentiments de gratitude.

Shyven sentait que lui aussi, avait des comptes à régler avec ces choses qui régissaient l’ordre du monde depuis de très nombreuses années. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne faisait pas vraiment dans la subtilité. Les mots étaient durs pour son père, tant est si bien que celui-ci décida de garder le silence face à ces nombreux reproches. Shyven prit le parti d’envoyer son soutien émotionnel à son père, soucieuse avant tout de l’état de santé de celui qui l’élevait depuis qu’elle avait été mise au monde.

Pour autant elle ne se permit pas de réagir aux propos de l’Ire personnifiée, parce que le Tribunal Vivant souhaitait se placer en retrait de tout ceci. Elle voulait comprendre. La petite opale se doutait bien que le discours de Verith était naturellement très orienté, et que son père représentait un courant de pensée totalement différent …

Pour autant, le Lien avait toujours été avec eux, c’était une chose inhérente de ce monde, et Shyven se posait vraiment la question de pourquoi l’on posait sans cesse des questions aussi vieilles que le monde, sans pour autant progresser, patte après patte. La petite opale sentait qu’il y avait des irritants à démêler, cela l’intéressait.

Shyven accepta la proposition de Verith pour la dépouille de sa tante. La petite opale considérait de toute façon qu’elle n’avait pas grand chose à y redire : elle n’avait connu d’Aïasil que les discours que son père avait sur elle, tous ici la connaissaient sans doute mieux que la petite opale.

En revanche, quand chacun s'apprêtait à partir, Shyven s’approcha de Verith et se décida à mêler son esprit curieux à celui du vénérable. Elle sentait bien que ce n’était pas vraiment le moment de le titiller et comme Kaiikathal l’avait si justement rappelé, ils n’étaient pas là pour se tirer la queue, aussi décida t-elle de faire fi de ce qui s’était passé avec son père. Cela était un conflit qui ne concernaient qu’eux, Shyven n’avait pas vraiment sa voix au chapitre.

En revanche, pour le reste, elle fit part de ses interrogations au Vénérable, décidant que plutôt qu’avoir peur de cette Colère, il fallait essayer de la comprendre :

“Grand-Père, j’ai conscience que la situation n’est peut-être pas vraiment propice à tout cela, mais j’aimerai à l’occasion disposer de votre savoir et vos craintes sur le Lien.”

Pour appuyer sa réflexion, Shyven transmis au grand rouge des images sur son estimé rôle de Tribunal Vivant, sur sa mission qu’elle sentait avoir vis-à-vis de l’Équilibre de ce monde, et tout le reste. Au vue de l'irritabilité du Dragon Libre, elle espérait ne pas trop l’avoir brusquer, mais la petite opale se disait que peut-être, celui-ci aurait été content de savoir que plus tard, quelqu’un aurait été curieuse de connaître son expérience.

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La voix de son père résonna dans sa tête comme s’il venait de hurler. Nynsith se sentait mal, mais pas physiquement. Non, c’était quelque chose de plus profond, quelque chose qu’elle avait laissé de côté sans vraiment s’en rendre compte, une manière de se défendre. Sans le savoir, Shyven venait de réveiller ce trouble contre lequel aucune griffe ni aucun croc ne pouvaient quoi que ce soit, et voilà que Verith la réprimandait pour son attitude. Heureusement pour la Dévoreuse, l’intervention de Kaiikathal détourna l’attention, lui donnant un sursis pour tenter de se ressaisir. Elle ne pouvait pas se permettre de paraître vulnérable ici, elle avait une réputation à conserver.

« Nynsith? »

L’Océane se recula un peu, laissant la discussion se dérouler sans elle.

« Je ressens ce que tu ressens. »

« Je n’aurais pas dû venir ici. »

« Je vais essayer de faire quelque chose. Me fais-tu confiance? »

« Oui. »


Bientôt, la saurienne ressenti un étrange besoin qu’elle ne pouvait assouvir autrement qu’en se remémorant des moments positifs : la naissance de ses deux frères, ce moment juste après la victoire contre les Chimères, ses retrouvailles avec son père, mais également d’autres souvenirs plus lointains qui la ramenaient plusieurs années plutôt, sur sa terre natale…

L’échange avec Entroxucec avait été en réalité très bref, mais ses effets furent immédiats. Sans se sentir vraiment mieux, Nynsith était à même de reprendre le contrôle. Son père venait de mentionner les quatre berceaux, lieux sacrés du continent sauvage, en quelques sortes.

« Oui, elle le mérite. Je vais… aller attendre à l’extérieur. »

Bien que le dessus de la cavité soit à présent inexistant, l’Affamée préféra sortir par où elle était entrée plus tôt, longeant le couloir naturellement creusé par la fonte. Dehors, elle se percha sur une large excroissance de glace, profitant du vent et du son des vagues. Lorsque son père décollerait en direction de l’îlot évoqué, elle le suivrait afin de rendre à Aïasil les hommages qui lui étaient dûs.

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Elle était réellement très perturbée. C’était la première fois qu’elle voyait un dragon aussi attaché à une idée de bipède. La famille ? Pourquoi est-ce que la famille comptait autant pour lui ? Défaite du passif des autres dragons adultes entre eux, la jeune marche-tempête n’hésita donc pas vraiment à répondre au dragon rouge qui la perturbait autant. Après tout, s’il parlait c’était qu’il était prêt à s’expliquer davantage non ?

Pourquoi est-ce que tu en veux au Noir, Rouge ? Je n’ai jamais vu ici ou écouté dans la voix des anciens de dragon qui utilise des mots bipèdes plutôt que les sentiments de nuée. Qu’est-ce que ça change que ces deux-là aient la même parenté ? S’ils n’étaient pas d’une même nuée comme a l’air d’être le cas, alors il n’avait guère de raison d’être là

Maintenant qu’elle était morte ça n’avait plus d’importance, mais lorsqu’elle était en vie peut-être qu’elle n’aurait pas voulu le voir et avoir son aide. Ils ne pouvaient pas savoir. Aux yeux de la jeune dragonne, il portait là une antipathie et des questions qui n’avaient pas lieux d’être. Qu’est-ce que ça pouvait lui faire, ce que ce dragon avait fait ou non ? Est-ce que c’était pour ça qu’il était venu ou pour répondre à l’appel de Aïasil ?

Je ne sais pas ce qui vous ait arrivé par le passé, mais tu ne penses pas que tu déshonore davantage sa mémoire en te hérissant inutilement les écailles envers un autre dragon venu ici pour saluer son départ ? Vous pourrez toujours vous gronder dessus quand elle sera totalement partie non ?

Il n’y avait pas d’agressivité dans le contact de sa voix, ni d’ailleurs de réprobation à l’égard de sa colère en elle-même car cela ne la concernait pas vraiment. Elle lui offrait simplement un avis tier sur le fait de s’en prendre à Kaalys maintenant alors qu’il y avait bien plus important que ces disputes. S’approchant, elle éleva son petit museau vers Verith et Kaalys, les observant de ses yeux d’or, et poussant un petit roucoulement d’apaisement.

Tu sais Rouge, si le monde a accepté le Lien, c’est peut-être parce qu’il est plus naturel que tu dis. Peut-être que ce sont les êtres eux-mêmes qui en font de mauvaises choses. Je suis liée, et mon bipède m’a sauvé la vie. J’aurais été prise par les chimères, déformée et détruite si je n’avais pas eu sa lumière pour me retenir. Ce n’était pas les voix des anciens, ni d’autres dragons, c’était mon lié

Là encore, elle exposait avec une simplicité détachée son point de vue.

Si mon lié me demande quelque chose que je ne pense pas bon, je dis non, voilà tout. Peut-être que d’autres liés doivent aussi dire non, pour que cela se passe mieux ? Et pour ton aide à Aïasil, je te dis simplement que si tu n’es pas arrivé à temps, c’est que cela ne devait peut être pas être nécessaire. Ne te rend pas triste, elle est en paix, maintenant. Dis lui juste au revoir et bonne chance ?

Elle se remit sur ses pattes avant et cligna des yeux, avant de détourner un moment le museau sur Shyven et Nynsith.

Tu ne sauras jamais si ton aide était une bonne chose avant, mais je pense que si je perdais mon lié et que je souffrais, je préfèrerais mourir. La vie ne mérite pas qu’on se déchire les ailes. C’est juste que certains êtres ont plus peurs de l’inconnu après la vie, non ? Ils se disent qu’ils abandonnent quelque chose mais qu’ils ne savent pas ce qu’ils y gagnent. En tout cas, les bipèdes ont l’air de penser comme ça

Elle ne comprenait pas vraiment les bipèdes, là-dessus, car pour elle, la mort n’était qu’une aventure de plus. Elle croquerait davantage le monde avant, mais quand elle aurait vu du monde ce qu’elle voulait, elle partirait aussi, et elle reviendrait sans doute pour le croquer à nouveau sous une autre forme. C’était mieux que ramper au sol, malheureuse pour le restant de ses jours.

Toi aussi tu souffres beaucoup. Je crois que tu te fais souffrir pour beaucoup de choses. Aujourd’hui, ici, il n’y a que des dragons. Même moi qui suis liée, je suis ici seule. Pourquoi est-ce que tu n’essaierais pas d’alléger ta souffrance auprès des tiens ? Si tu passes ton temps à souffrir tu ne vis pas vraiment …

Pas étonnant qu’il soit aussi agressif à se faire souffrir pour tout et n’importe quoi. Cela ne devait faire aucun bien à son esprit et cela déteignait sur les autres, comme ce pauvre Kaalys qui n’avait rien demandé à personne.

Et Shyven a raison. Il y a des dragons qui sont prêts à t’écouter tu sais

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¤ Ce que je crois ¤

L’enfant de l’orage était beaucoup remonté contre le dragon blanc devenu noir, et à raison. Ce dernier n’avait, à ses yeux, rien fait pour lui venir en aide. Pire encore il était allé folâtrer avec des bipèdes, allant même jusqu’à renouer avec ce lien maudit dont la présence avec presque disparut de lui lors de leur dernière rencontre. C’était une preuve de plus pour le colérique le lien et les bipèdes détournaient les dragons des leurs. Mais la raison de cette colère était peut-être un peu plus profonde que cela. La sœur du colérique était morte également et lui aussi n’avait rien pu faire pour la sauver. Lui-même n’avait pas été là pour lui éviter un funeste destin. Mais à la différence de Kaalys, il combattait sur un autre front à ce moment, sa route ayant croisé celui d’un Tarenth honnit. Il était en colère contre le nouveau lié, car il lui rappelait son propre échec passé. Mais il lui en voulait également, car contrairement à lui, il ne faisait rien pouvant justifier cette absence, plus encore quand l’état de la défunte dragonne ayant mené à son trépas était connu depuis plusieurs mois.

Alors qu’il récupérait entre ses griffes, avec toute la délicatesse et la tristesse du monde, le corps interne de la dragonne sombre, la voix de Shyven lui parvint. Il lui répondit rapidement. Il était d’accord pour mener ce genre de discussion et de lui ouvrir les yeux sur le danger que représentait le lien, aussi bien pour leur espèce que pour le monde en lui-même. Le regard de Verith quitta enfin le corps d’Aïasil, ne l’ayant pas quitté des yeux un seul instant des yeux alors qu’il la levait, comme s’il avait peur de la briser. L’enfant de l’orage pointa son museau en direction de Nynsith. Celle-ci semblait abattue. Y était-il allé trop fort avec elle ? Il savait ce que Shyven représentait à ses yeux. Il comprenait sa réaction. Pour autant l’acceptait-il ? Non. Il laissa son esprit vagabonder jusqu’à pour lui transmettre une caresse mentale.

¤ Tu es forte, Nynsith. L’ire et l’orage coulent dans tes veines. Tu peux tout surmonter. ¤

Shyven n’était pas responsable de l’état de sa fille, elle était une victime tout comme elle, s’en prendre à cette dernière n’était donc pas la solution. La responsabilité de ce qu’elle avait vécu incombait aux chimères. Chimères qui avaient été repoussées. Il ne restait d’elles plus que les traces d’une bataille. Du point de vue de Verith, Shyven était pour Nynsith une trace de cette bataille. Un peu comme une cicatrice. Mais on ne fait pas disparaitre une cicatrice, on apprend à vivre avec. Elle est un témoignage de ce qu’on a vécu, défaite comme victoire. Nynsith a peut-être été défaite par une chimère, mais elle a participé au combat contre leur dirigeant et a vaincu.

Finalement, ce fut la petite dragonne des abysses qui attira le plus l’attention du colosse de flamme. Son regard d’or vint se poser sur elle.

«  Nuée … voilà fort longtemps que je n’ai pas entendu ce mot. Je ne m’attendais pas à l’entendre de la part d’une liée. Pour autant, sais-tu ce qu’une nuée signifie ? Crois-tu que cela constitue une limite ? Crois-tu que cela constitue une frontière ? Une nuée n’est qu’un sous-ensemble d’une entité bien plus importante : notre race. Doit-on ne pas se soucier du sort d’un autre dragon parce qu’il n’appartient pas à notre nuée ? Non. C'est conception bien trop étriquée.

Vous êtes des liés. À mes yeux vous représentez le vecteur d’un ennemi, d’un danger pour cette race qui est la mienne. Pour autant vous êtes vous aussi des dragons. Maintenant, que se passerait-il si j’adoptais la vision étriquée que tu me présentes ? Je vous tuerais tous, sans la moindre exception, pour purger cette menace qui pèse sur les miens. Mais adopter une vision des choses aussi étriquer, se serait adopter le point de vue d’un bipède. Et les dragons ne voient pas les choses du même point de vue qu’eux.

Le monde a accepté le lien ? Voilà des paroles qui me semblent bien naïves. Ce n’est pas ce que j’ai vu et encore moins vécu lorsque je combattais les chimères. Le monde a failli être détruit par le lien. Il a conduit à la libération des chimères. Le lien met en péril non seulement la race des dragons, mais également le monde lui-même. Le lien n’a rien de naturel. Le lien fut la création d’un être avide de pouvoir et dont l’avidité aura conduit sa propre race à sa perte. Le lien fut longtemps étouffé par ceux qui ont créé ce monde et dont la résurgence n’est due qu’au manque de vigilance de ceux-ci. Non petite écaille, je ne crois pas que le monde ait accepté le lien. Je crois que, tout comme les dragons, il le subit.

Tu défends le lien, tu le glorifies, tu dis que celui-ci t’a sauvé la vie, mais ce n’est pas ce que je vois. Sans lien, les chimères ne seraient jamais venues. Sans lien, tu n’aurais pas été prise par les chimères ni encourut le risque d’être déformée ou détruite par elles. Sans lien tu n’aurais pas été enfermé dans ta coquille attendant qu’enfin tu puisses étendre tes ailes et goûter la liberté des cieux, tu fus retenu emprisonné jusqu’à ce que ton geôlier vienne daigner t’ouvrir la porte de ta cellule. A mon sens, le lien est plus responsable de ton malheur que de ton bonheur. »


Le colérique marqua une courte pause avant de reprendre.

« Vraiment ? J’imagine que tous les dragons liés morts durant les guerres des bipèdes se disaient la même chose. Je ne participerais pas à ta guerre. Mais lorsque les bipèdes auxquels ils étaient liés ont  enfilé leurs armures et pris leurs armes, ils ont rappliqué sans attendre, participant ainsi de gré ou de force aux combats. Et pourquoi cela ? Car si l’un meurt, l’autre meurt également. Tel et la destinée des liés. Ces dix dernières années, j’ai vu plus de dragons mourir que lors des deux cents autres. Un seul d’entre eux était un libre, les dix autres étaient des liés. Le lien est une promesse de mort. Aïasil a lutté autant qu’elle a pu, mais regarde-la à présent. Regarde la bien, petite écaille, car voilà ce qui t’attend également. Voilà le sort qui attend tous les dragons liés. »

Un soupire s’échappa du colérique.

« Je vous mets en garde, tout comme j’ai mis en garde tous les dragons liés que j’ai rencontrés, aussi bien sur les bipèdes que le lien. Tous m’ont pris pour un fou. Tous disaient que j’étais aveuglé par ma haine et par ma colère. Résultat ? Tous sont morts aujourd’hui. Conclusion ? L’aveugle ce n’était pas moi, mais eux, aveuglé par le lien. Aïasil fut la seule à ouvrir les yeux, mais pour cela elle a dû vivre la perte de deux liens. Mon cœur saigne, car un dragon est mort et la chose m’est encore plus insupportable en raison des circonstances. Elle a vu la vérité, mais ce lien maudit l’a pris. Elle m’a demandé de l’aider, mais je n’ai pu être là lorsqu’elle a encore eu besoin de mon aide. Partir comme elle est partie, je n’appelle pas ça la paix, petite écaille. »

Verith dodelina de la tête.

« La vie mérite d’être vécue. La vie doit être respectée. La vie ne doit pas être abandonnée. Encore moins par nous, dragons, car c’est grâce à la magie qui émane de nous qu’elle peut s’épanouir. J’ai pu me rendre de l’autre côté du voile et je n’ai pas apprécié ce que j’y ai vu. »

Le rouge marqua de nouveau une courte pause.

« Je te remercie pour ta tentative de réconfort, petite écaille. Mais tu perds ton temps. Le monde ne tourne pas rond et cela depuis longtemps. Personne n’a jamais rien fait pour le remettre dans le droit chemin. Tant que cette situation demeurera, je continuerais de souffrir et je continuerais de me battre pour corriger ce qui doit être corrigé, réparer ce qui peut être réparé. Quelqu’un doit s’en charger. Car si je ne fais rien, ce sont ceux auxquels je tiens qui souffriront. »

Le regard de Verith se posa de nouveau sur Aïasil.

« Assez parler pour le moment. Occupons-nous d’Aïasil. Nous l’avons déjà fait suffisamment attendre. »

Le colérique commença à ouvrir ses ailes à et battre de ces dernières, commençant à prendre de la hauteur. Son regard méprisant empli de rancœur se posa sur Kaalys.

« Par égard pour cette petite écaille qui a fait un pas envers moi. Je suis prêt à tolérer ta présence. À condition que l’autre dragon ici présent l’accepte. Mais ne me provoque pas. »

Verith se tourna sans attendre prenant la direction de la petite ile qu’il avait indiquée précédemment. Faisant connaitre à Aïasil son ultime vol.

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Shyven s’était rapprochée de son grand père pendant les échanges entre dragons. Ça n’était pas qu’elle reniait son Père, très loin de là, elle tenait à son Papa-tout-chaud qui avait toujours été là pour lui dans ses premiers instants de vie.

Elle avait cependant pris peu à peu conscience de son importance dans le monde en tant que membre de son espèce, et surtout, elle avait une place dans la Nuée de Verith et Keetech, au même titre que ses oncles ou Nynsith, bien que celle-ci la rejetait en bloc pour l’heure. La famille restait cependant important pour la dragonne rose, et elle tenait à faire le pont, être présente à la fois pour son père qui avait besoin de son affection, mais aussi pour son grand-père, sa mère, et toutes ces personnes de sa lignée qui avait cruellement besoin de soutien, et peut être un peu d’elle aussi.

Shyven écouta donc poliment la réponse de Verith à Kaiikathal, cette dernière qui avait manifestement essayer de calmer les tensions dans la conversation. Shyven n’était pas plus intervenue que cela mais à raison. Elle pensait que la vie était ainsi faite, et que parfois pour que les choses avancent, il fallait aussi accepter de se dire les choses.

Verith s’était montré dur envers Kaalys, Shyven avait du faire une croix pour commencer à bâtir une relation avec sa mère, et probablement que Kaiikathal qui était une très jeune liée dans la petite assemblée ici devait se sentir profondément esseulée dans ce genre de débats. Mais ces choses se devaient d’être dites, il en allait de l’équilibre de la situation. On ne pouvait développer une bonne relation avec ses paires si l’on ne s’expliquait pas les choses.

Pour ce qui était du lien, et ce qui l’impliquait, la petite opale ne désirait pas plus que cela s’exprimer, estimant qu’elle n’avait pour l’instant pas grand-chose à rajouter sur les débats en cours. Elle-même ne connaissait que ce qu’elle avait entendu, ou vu, mais en son état de petite dragonne libre, elle ne pouvait pas vraiment ajouter au débat, si ce n’est pour apporter sa vision équilibrée des choses.

Mais présentement, elle sentait que ça n’était pas cela dont les dragons ici présents avaient besoin.

Ils cherchaient à comprendre, et à faire leur deuil aussi. Ils avaient besoin de réponse quant à cette mort brutale, comme toutes celles qui les précédaient, et cela Shyven pouvait bien le comprendre, même à son jeune âge.

Elle aussi désirait comprendre, mais du fait qu’elle ne connaissait pas vraiment Aïasil ,elle y était naturellement moins attachée. En fait, la Petite Opale cherchait surtout sa place dans cette nuée qui était sa famille, mais qui sur bien des aspects lui paraissait très étranger.

Ainsi, alors que la petite tribu se rendait sur l’île que le Grand Rouge avait indiqué, Shyven se permit d’étendre son esprit à son grand-père, et à sa mère si elle voulait bien l’entendre. La petite opale y alla doucement, et transmis en sentiment une volonté de bien faire.

« Mère, Grand-Père, une fois cette cérémonie terminée je … Souhaiterais mieux vous connaître. »
Shyven hésita un peu sur ses mots, mais décida finalement de continuer : puisque l’heure était aux confessions et aux discours, elle décida de développer sa pensée :

« Depuis tout à l’heure, vous parlez de combats et questionnements qui semblent secouer la nuée depuis longtemps déjà, et j’ai l’impression de me sentir pas suffisamment légitime à m’y impliquer en votre comparaison. Pour autant, ces choses là me parlent, j’ai le sentiment qu’elles sont essentielles pour me constituer en tant que dragonne libre, en compagnie d’autres choses. Mais aujourd’hui je n’ai pas toutes les clés pour comprendre … Alors voilà, j’aimerai faire cet effort avec vous. »

Shyven eut un regard attristé vers le corps de la défunte, et se permis finalement d’ajouter :

« Peut être que cela permettra également de nous rapprocher. Car je ne souhaite pas avoir à connaître d’autres morts dans ma nuée, sans avoir pris le temps de connaître ces personnes qui font partie de ma famille, son histoire, ou sans savoir même qui elle était. »

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Dans sa tête résonnait les paroles que son père lui avait partagée juste avant qu’elle ne sorte dehors. La brise était fraiche, portant des gouttelettes d’eau qui venait s’accumuler sur la glace et y geler petit à petit, changeant lentement la forme de la glace. Nynsith inspira profondément l’air salin, observant l’horizon.

~ Qu’as-tu fais au juste? ~

~ Je t’ai forcée à avoir besoin de pensées heureuses. Je ne peux pas guérir tes blessures, mais je peux y mettre un baume, même temporaire. ~

~ Malgré les dires de mon père, je ne sais pas si j’arriverai à soigner ces blessures. J’ai essayé tu sais. Moi, Nynsith, la Dévore-gloire, incapable de faire face à ses propres souvenirs. Incapable d’accepter ce qui s’est passé. ~

~ Tu m’as pourtant bien acceptée. ~

~ C’est vrai. Mais tu fais partie de moi. Et tu m’as aidé contre Angamar. ~

~ Ta fille… ~

~ Non. Appelle-là par son nom, s’il te plait. ~

~ Shyven fait aussi partie de toi maintenant. De ton existence. Et tu finiras par l’accepter comme tu m’as acceptée. ~

~ … Je préfèrerais parler d’autre chose. Penser à autre chose. Aujourd’hui n’est pas un jour heureux. Un Dragonne est morte et rien n’aurait pu la sauver. ~


Entroxucec respecta la demande de l’Océane et la laissa à ses souvenirs heureux. Plusieurs mètres sous elle, un bloc de glace à la dérive fut ramené vers le glacier par les vagues et se fracassa au point de se fendre, produisant un tintement particulier. Au-dessus d’elle, l’énorme silhouette rouge de son père passa, tenant entre ses griffes le corps inerte d’Aïasil. L’Affamée se donna un élan en hauteur et commença à battre des ailes pour rejoindre les autres, mais demeura silencieuse.

À un moment, Shyven lui parla, ainsi qu’à Verith, mais elle ne dit rien, sans non plus la repousser. Elle ne focussait en ce moment que sur ce pour quoi elle suivait de près le grand Rouge. Lorsque le petit groupe arriva sur l’île, l’aîné du groupe posa l’Obsidienne avec délicatesse et la cérémonie se déroula en toute quiétude, loin des yeux bipèdes. Nynsith ne brisa son mutisme qu’une fois, s’adressant à tous d’un ton très serein.

« Ce qui se passe ici ne concerne pas les bipèdes. Ne leur en parler pas. Ne leur partager pas. Il en va du respect d’Aïasil l’Obsidienne. »

Elle-même n’avait assisté à ces obsèques qu’une fois dans sa vie, alors qu’elle était très jeune. Un rude combat avait opposant deux Dragons avancés en âge avait mené à la mort d’un d’entre eux. Il ne s’agissait pas d’un combat opposant deux camps ennemis, ni d’un combat mené pour le plaisir. Ç’avait été un combat emprunt de respect et c’est d’ailleurs le vainqueur qui avait été le premier à rendre hommage au vaincu. La jeune Dragonne avait alors saisi toute l’importance et le respect qui venait avec ce geste et ce même sentiment provenant du savoir ancestral lui-même se ressentait aujourd’hui à travers ses paroles.

Ce n’était donc pas simplement une question d’empêcher les bipèdes de venir souiller la sépulture d’Aïasil par leur seule présence, mais surtout une question d’assurer à son esprit le repos qui lui était dû après son combat à elle.

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¤ Le dernier chant ¤

Kaiikathal était parvenue à faire changer d’avis Verith. Cette chose était assez rare pour pouvoir le souligner. Elle démontrait néanmoins que, même si le rouge avait des avis parfois très tranchés ou absolus, il n’était pas impossible de l’amener à modifier sa pensée, du moins partiellement, avec les bons mots. La petite écaille abyssale avait su trouver les bons mots. Tout le monde n’en était pas capable. Ainsi, l’enfant de l’orage accepta de tolérer la présence de Kaalys lors de la crémation d’Aïasil. Quand bien même il estimait toujours qu’il n’en était pas digne. Le noiraud accepta, remerciant Kaiikathal au passage, avant de se faire silencieux. Le rouge avait conditionné sa présence au fait que celui ne le provoque pas et celui-ci semblait bien s’en assurer. Lentement, avec précaution, le rouge vint se saisir du corps sans vie de la dragonne d’ombre, l’extirpant de la glace qui avait commencé à la recouvrir.

« Mère, Grand-Père, une fois cette cérémonie terminée je … Souhaiterais mieux vous connaître. »

Le museau du colosse de flamme se tourna en direction celle qui se disait sa petite fille. Elle était peut-être l’enfant de sa fille, ce n’est pas pour autant que Verith était prêt à la reconnaitre comme un membre de sa famille. Elle demeurait le fruit l’enfant de Kaalys, un lié devenue ancien-lié puis de nouveau lié. Le temps dirait si elle tirerait plus de la lignée de l’orage ou non.

« Nous verrons cela, après la cérémonie, quand la peine de la mort d’Aïasil se fera moins fort. »

Le dragon rouge déploya ses ailes puis donna une impulsion. Il s’extirpa de la mer, prenant de la hauteur avant de faire signe aux autres de le suivre. Sans plus attendre, Verith prit la direction de la petite ile indiquée plus tôt. Une fois sur place, il vint déposer le cadavre de la dragonne d’ombre au sol. Fermant les yeux, il inspira profondément.

« Je cracherais la première gerbe de flammes. Puis ce sera à Nynsith, suivi après de Kaalys. Shyven, Kaiikathal. Si vous en êtes capable, vous soufflerez également votre feu. Après quoi, nous soufflerons ensemble jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de corps, jusqu’à ce que les flammes l’aient engloutie. »

Le rouge marqua une pause, gardant le silence alors qu’il observait Aïasil. Il se remémora toute leur rencontre. Depuis le sommet des montagnes d’Ambarhùna où les elfes avaient élu domicile, jusqu’à la forêt de Nyn-Tiamat. Dans sa poitrine son cœur se serra. Il aurait aimé que les choses se passent différemment. Il aurait aimé qu’elle ne meure pas. Finalement, la gueule du colérique se chargea de flammes qu’il s’empressa de faire jaillir, venant embraser le cadavre. Puis, une fois que tous eurent soufflé une première fois, il recommença à nouveau, cette fois-ci avec tout le monde en même temps. La température grimpa en flèche. La terre sur laquelle reposait le cadavre se mit à fondre. Et l’eau aux alentours de la petite île se mit à bouillir. Bientôt, la chair, les écailles et les os de la dragonne furent dévorés par la magie des cracheurs de feu, venant les réduire en un tas de cendre. Lorsque le calme revint, Verith reprit la parole.

« Il est à présent temps pour Aïasil de prendre son dernier envol, vers les étoiles. »

Verith déploya grand ses ailes et donna un puissant battement face à lui, droit sur les cendres de la défunte dragonne. Balayer par une forte bourrasque, les restes de la petite ombre s’envolèrent au-dessus de la mer, montant vers le ciel au gré des vents.

« Puissions-nous ne jamais avoir à refaire cela. »

Enfermant un grondement dans sa gorge, le colérique vint faire vibrer les écailles de son coup et de son poitrail. Les tintements vinrent s’empreindre de magie, ressemblant à mille et un carillons et tambours jouant en harmonie. Remuant lentement la tête, le vent vint se mettre à siffler entre ses cordes, tels mille et un flûtes et violons. Une symphonie unique s’échappa du dragon, accompagnant le dernier envol d’Aïasil. [/color]

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