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Début Mars

Depuis son arrivée en Tiamaranta, Claudius ne pensait jamais faire la chose qu’il allait faire aujourd’hui.

Il voyait enfin Delimar de ses propres yeux, après avoir voyagé pour s’y rendre.

Ce simple fait lui donnait un sentiment bizarre au ventre, et il n’était pas ici question de sa douleur au coeur qui ne le quittait plus depuis la malédiction du grand rouge. C’était presque comme si une page venait de se tourner dans sa tradition ultra-fidèle à Selenia. Il était à Delimar.

Lui qui avait combattu avec force l’Alliance des Cités Libres au moment de la guerre civile, qui les avaient traité maintes et maintes fois de traîtres, qui les avaient traditionnellement accusé coupables de biens des maux de l’Empire, et qui n’avait jamais renoncé à les annexer plus tard, s’était rendu Delimar, et avait payé leur fameuse taxe.

La chose fascinait intérieurement Claudius : le monde bougeait, et bougeait vite. Et il allait à l’Église.

Ou plus précisément au Temple. Car le Maître de Guerre ne se rendait pas là uniquement pour faire du tourisme, mais bien pour s’entretenir avec une personnalité de marque de cette ville, très attiré par la religion.

Naal du Néant, pour ne pas le citer. Mais pour être honnête, ça n’était pas la première fois qu’ils se revoyaient depuis leur fameuse chasse au dragon qui avait profondément marqué les esprits. Disons plutôt que c’était la première fois qu’il allait revoir en face le Chasseur du Vide. Parce que bien entendu sa Corneille, comme il l’appelait, venait prendre de ses nouvelles régulièrement depuis lors.

Pour une fois donc, Claudius qui n’était pas plus dévot que cela - il était bien entendu croyant aux Huit, sans vraiment pratiquer ni ne jurer que par eux à longueur de journée -, se retrouvait à aller dans un Temple.

Le moins que l’on puisse dire cependant, c’est que celui-ci était facilement repérable. D’une architecture pyramidale assez gigantesque, l’édifice à la gloire des dieux de ce monde était supplanté par un obélisque qui brillait sur toute la cité. Bien que ce n’était pas vraiment le genre d’architecture que le Havremont aimait, il ne pouvait nier que ce bâtiment avait un certain cachet, et lui avait donné un certain frisson de la découverte.

Pour le chemin vers celui-ci, Claudius se contenta de suivre les différents pèlerins qui se rendaient là bas. Aussi étrange que cela pouvait lui paraître, le Havremont n’était personne ici, aussi devait-il se contenter de marcher avec les habitants de la cité.

Disons que c’était une idée différente de la vie.

Malgré ces petites perturbations, Le Havremont s’accomodait bien à l’Océanique pour l’instant. Force est de constater que l’on y respirait le même air qu’à Selenia, bien qu’il devait avoir proféré de nombreuses insultes n’allant pas dans ce sens.

Une fois dans le temple, Claudius s’arrêta un instant pour admirer chaque autel, profitant de l’instant pour découvrir l'architecture singulière de cette ville. Du haut de son savoir peu élevé sur ces choses là, Le Maître de Guerre trouva les choses bien agencées, il y avait suffisamment d’espace pour tout le monde, et sans nul doute que ce lieu inspirait la toute puissance des divinités qui avaient jadis été parmi les hommes - bien que le peuple Sélénien était encore persuadé du contraire, au grand dam du protagoniste -.

Le Havremont ne chercha pas bien longtemps son nouvel ami : il était au centre du temple, face à l’autel à la gloire de Néant. Là, quelques délimariens se bousculaient pour sans doute bénéficier des savoirs de l’Oracle.

Claudius se fraya un chemin parmi eux en douceur, attendant gentiment son tour avant de pouvoir parler au chef de file du Culte, se prêtant assez gentiment au jeu.

Une fois qu’il fut à portée, Claudius ne ploya pas le genou, mais lui tendit simplement une main, avant de lui adresser un sourire amical et de lui dire, d’un ton bas, presque sur le ton de la confession :

“Pourriez vous me bénir pour soigner un coeur maudit, Chasseur du Vide ?”

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    Les prières avaient toujours été une habitude, pour Naal du Néant. Ecrites et récitées par cœur, il lui semblait étrange de devoir en apprendre de nouvelles, c’était inhabituel. La vérité, néanmoins, méritait d’être connue par ses fidèles : il n’était pas homme à faire manger des foutaises à ceux qui plaçaient leur croyance entre ses mains. Il avait beaucoup appris, depuis sa renaissance, et cette connaissance, il s’en faisait un devoir honorifique que de la transmettre. Il avait réécrit leurs textes sacrés, retirant des premiers les oeillères de l’ignorance et traduisant en plusieurs langues pour la rendre plus accéssible que l’almaréen. Beaucoup, parmis son peuple, n’avaient pas accepté l’échec que leur ancestrale ethnie. Ce nouveau testament avait eu du mal à passer, mais patience et pédagogie leur avaient fait comprendre que croire en des faussetés ne les aiderait jamais à atteindre la grandeur d’âme qu’ils recherchaient par la foi.

    Avec une certaine forme de fatalité résignée, ils l’avaient accepté. Les Sept Déesses étaient entrées dans leurs croyances, et leurs statues, dans la temple à la gloire de Néant, auraient pu être un blasphème jadis. Cela ne l’était plus aujourd’hui. Les temps changeaient, et les humains, prompts à l’adaptabilité, changeaient également, révélant-là leur plein potentiel. Claudius aussi changeait. Beaucoup avaient été surpris de voir le Maître des Armées des Kohans se présenter au sein de leurs murs. Non pas parce qu’il s’agissait d’un Sélénien, car il était courant de recevoir quelques visites diplomatiques dument annoncées. En vérité, c’était plus parce que Claudius n’aimait pas l’Alliance. Il ne voyait en eux que des traîtres et pourtant ? Il était bien ici, en chair et en os, avec les croyants, au sein du temple de Néant.

    Le prêtre portait une coule d’un blanc immaculé contrastant nettement avec sa peau sombre, ainsi qu’une chasuble d’un bleu céruléen brodé de fils argentés qui formaient des prières en langue ancienne, pour la gloire Néant dont il était l’Oracle. Il se tenait debout, les pieds nus à même le sol de pierres froides et ténébreuses, et les mains ouvertes accueillant les fidèles les uns après les autres pour les bénir. Il était difficile, pour lui, de manquer la haute silhouette des Claudius. Elle n’était ni assez petite pour un almaréen, ni assez grande pour un glaçernois, contrastant alors dans cet entre-deux notable. Il prit sa poignée de main, veillant, comme à son habitude, à ne pas serrer trop fort. Son bouclier lui conférait une forcé égale à celle des Sainûrs : il avait dû s’adapter depuis qu’il en était l’élu. Mais il en avait l’habitude : jadis, lorsqu’il fût Serviteur du Néant, il était le seul surhomme parmis les hommes. Et il n’avait jamais broyé le moindre fidèle : ça n’était pas aujourd’hui que cette erreur commencerait.

    Il apposa sa seconde main sur leur poignée cordiale de salutations : « Je vous bénis Claudius de Havremont, au nom du Néant. » Il eut toutefois un sourire triste : « Je ne saurais, toutefois, vous guérir du mal que ce monstre vous a infligé… » Et étrangement, il ne parlait pas de Verith, mais du Tyran Blanc qui avait été à l’oeuvre. « Cela dépasse mes compétences. » Il ajouta plus bas : « Cela a toujours été hors de mes compétences., sans quoi… J’aurais pu sauver Néant. » Mais cela n’avait pas été le cas. Claudius était le premier humain à souffrir du même mal qui avait affaibli à petit feu le Dieu. En lieu et place de cela, il avait du tuer l’entité qu’il aimait plus que tout au monde, afin d’abréger ses souffrances. Ses propos devaient paraître bien sybilins pour Claudius : avait-il compris ce qui lui était arrivé, face à Verith et qui causait son malheur ? L’amaréen l’intima d’un petit signe de tête pour le suivre un peu plus loin, dans un chapelle isolée où ils pourraient discuter en tête à tête, sous la surveillance de Dieu.

    « Lorsque Verith de l’Ire est venu vous voir, le soleil était à son zénith. Je vous ai vu, j’ai vu ce qui vous est arrivé et… Avez-vous… Avez-vous compris ce qui s’est passé ? Ce n’est pas une simple malédiction qui vous afflige. Vous êtes probablement le premier humain à connaître le même supplice que Néant lui-même : le Tyran Blanc a volé votre coeur. » Le premier humain, oui. Les autres personnes qui aient connu cette souffrance en baignant dan sle Néant lui-même n’étaient autre que les quatres serviteurs du Néant : Aldakin, Dradrok, Lyra et Naal. L’almaréen avait parlé assez bas et avait attendu que Claudius soit assis sur un banc pour lui évoquer tout ceci, au cas où il s’effrondre de surprise ou de peur.

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« Je vous bénis Claudius de Havremont, au non du Néant. »

Claudius eut un petit sourire alors qu’il prenait la main de Naal, que le Maître de Guerre sentit ferme, mais malgré tout … Contrôlé ? Sûrement que l’oracle qui était capable d’escalader des dragons en proie à une pleine crise de folie devait se contenir.

Il souriait parce que cela faisait longtemps qu’il n’avait pas entendu cette phrase, au moins depuis qu’il avait combattu avec les forces d’Aldakin lors de la guerre civile de l’Empire.

“Voilà très longtemps qu’un Oracle ne m’avait plus accordé ce privilège, Roi d’Almara.” glissa t-il au milieu de leur petite conversation. Le Havremont avait effectivement une histoire particulière avec les almaréens, et même s’ils avaient dû faire des choix différents, sa loyauté sans faille pour Fabius avait fait que le Maître de Guerre avait côtoyé beaucoup des semblables de Naal, et s’était toujours assez bien entendu avec.

Du moins jusqu’à ce que quelques mouvements politiques les sépare. Mais à l’heure où on tuait des dragons, et où on assommait un empereur d’un bon coup de poing, pouvait-on encore parler de querelles politiques entre les peuples ? En tout cas, Naal l’avait béni sans demander son reste, ce qui prouvait encore une fois une certaine miséricorde de la part de cet homme.

Pour ce qui était du reste, cependant, la chose s’avérait bien plus grave que Claudius n’aurait pu le penser de prime abord :

« Je ne saurais, toutefois, vous guérir du mal que ce monstre vous a infligé… Cela dépasse mes compétences. Cela a toujours été hors de mes compétences., sans quoi… J’aurais pu sauver Néant. »

Le Havremont eut un petit rire nerveux, avant de s’éloigner vers un banc, se faisant guider par Naal. Allons, où est-ce qu’il voulait en venir ? Le mal qu’on lui avait infligé était-il si terrible que ça ?

« Lorsque Verith de l’Ire est venu vous voir, le soleil était à son zénith. Je vous ai vu, j’ai vu ce qui vous est arrivé et… Avez-vous… Avez-vous compris ce qui s’est passé ? Ce n’est pas une simple malédiction qui vous afflige. Vous êtes probablement le premier humain à connaître le même supplice que Néant lui-même : le Tyran Blanc a volé votre coeur. »

Claudius écarquilla les yeux quand Naal lui fit part de ceci, et se tint évidemment la poitrine, là où se trouvait anciennement son coeur, réceptacle de sa nouvelle douleur avec laquelle il apprenait à composer depuis qu’il la sentait. C’était inattendu, et d’une façon générale assez … étrange ?

“Allons, l’on m’a infligé à moi, une même malédiction qu’un Divin à la puissance mille fois supérieure à la mienne ?”

Le Maître de Guerre eut un petit rire grave et nerveux, avant de passer la main sur son visage et de reprendre :

“Je savais que l’on m’en voudrait quand je vous ai aidé à mettre un terme à la vie de ce dragon, mais à ce point … Nous vivons dans un monde bien étrange, Naal.”

Claudius soupira, avant de baisser la tête. Il n’était pas un homme de foi et d’une entière dévotion aux Huit, mais comme tout Tiamarantiens, il avait baigné dans cette culture religieuse pendant toute sa vie, et surtout il avait été témoin de ses grands conflits qui avaient secoué le monde.

Mais jusqu’à lors, il ne s’était jamais senti aussi important, et surtout il n’avait jamais eu le besoin ou l’envie de se sentir important.

“Je ne fais rien de plus que me battre pour ma patrie, et me voilà à tuer un dragon, faire front face à un vampire de mille deux-cent ans, et me voir infliger une malédiction qui n’a pas été vaincu par Le Dieu Unique lui-même, aussi tout puissant soit-il.”


Claudius eut un petit sourire, et porta son regard fatigué vers l’Oracle :

“J’imagine que c’est une manière comme une autre pour le Destin de nous dire qu’il est tourné vers nous. J’aurais simplement aimé qu’il prenne une forme autre qu’un esprit vengeur d’une entité démoniaque qui a mis notre ancien continent à genoux, et celle d’un Prince Noir qui ne réfléchit plus que par son égo et le pouvoir, emportant nombre de mes amis dans sa fièvre de conquête.”

Il soupira finalement :

“J’ai du mal à comprendre ce qu’il m’arrive, à moi qui ai fait sa carrière dans l’armée sans de plus grandes prétentions que cela, mais si nous en sortons vivant, je veux bien jurer devant l’Unique que nous allons faire un grand festin en son honneur. Ou quoique ce soit d’autre qui vous semble approprié, d’ailleurs !”

Il eut un petit rire soudain, avant de se lever, soufflant en utilisant ses jambes : même s’il essayait de le cacher au maximum, la douleur était bien là, comme un rappel constant de ses méfaits face à la race draconique.

Il fit finalement à Naal :

“Il paraît que votre ville est pleine de merveilles, tant est si bien que même dans l’Empire en chante ses louanges depuis un bon bout de temps maintenant ! Me feriez vous l’honneur d’être mon guide, Oracle ?”

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    L’ombre passa brièvement dans le regard pourtant si clair de l’almaréen. Claudius lui parlait d’un temps où son peuple n’avait pas été au sommet de sa gloire et quand bien même les erreurs faisaient partie de la vie, celle-ci avait été particulièrement douloureuse. Ils avaient été trahis, utilisés, bafoués, poussés à commettre des crimes pour un monstre de dragon albinos. Il avait honte, pour son peuple. Il avait honte de ce qu’avait fait Aldakin. Sa pupille avait pris un titre qu’il ne méritait guère. Oracle. Aldakin n’avait jamais été l’Oracle de Néant, mais celui d’un Tyran. Il savait que Claudius l’avait côtoyé, tout comme le père Tryghild. Peut-être restait-il quelques bonnes choses en cet homme qu’il avait condamné à mort. Peut-être que Claudius avait pu voir cela, ce que Naal avait appris à Aldakin. Il avait aussi connu sa folie et sa volonté fermement anti-magique. Destructrice.

    Il avait honte de cela mais il le confessait sans peine. C’était une période douloureuse pendant laquelle lui-même n’était plus. Il avait été absorbé par Néant et il avait senti toute sa souffrance, son agonie, jusqu’au ce qu’il soit ramené à la vie pour ôter celle de son Dieu tant aimé. Et aujourd’hui ? Ce monstre était toujours là, lié à Verith, infligeant des peines à un bipède comme Claudius. Naal lui expliqua la situation et Claudius en sembla fort surpris. Le dévot en resta pour autant sérieux, dans son expression, ne renonçant à aucun moment à ce qu’il avait énoncé comme vrai, aussi incroyable que cela puisse être. Il finit par acquiescer doucement de la tête, et se remettre progressivement de sa surprise. Il ne chercha pas à l’interrompre : cela devait faire son chemin tout seul et cela le faisait. Naal se contentait d’être là, au besoin. Il l’écoutait et devoir lui parler aider Claudius à mettre ses idées en place, à formuler, mettre des mots sur ce qui lui arrivait.

    Puis il se releva en lui demandant une visite de la ville. « Bien sûr. » souffla-t-il avec un calme souverain. « Je voudrais vous montrer quelque chose. » Il l’invita à le suivre d’un geste vif de la tête alors qu’il entamait la marche, un peu plus loin que les bancs et l’autel. La pyramide était vaste, à base carrée et après quelques mètres de marche, sous la voute d’un verre obscure, il y avait un jardin. La terre était un sable blanc, remplissant des carrés bordés de bois dans lesquels poussaient des fleurs aux pétales épais, comme s’il s’agissait d’une épaisse boule de coton. « Mon corps a été forgé par Néant lui-même. Je suis probablement le seul être humain en ce monde que l’ainé ait façonné. Et je suis… Etrange. De moi, je forme de petites graines. Des graines du Vide. Il en pousse tantôt ces fleurs… » Il désigna les fleurs qui formait des boules cotonneuses. Il en cueillit une délicatement. « Tantôt d’autres. Mangez-la. » fit-il en la tendant à Claudius. Elle rassasiait amplement.

    « Elles n’ont besoin ni d’eau, ni d’une terre fertile. Elles auraient pu pousser en Almara même, tant nos terres étaient arides. Celles-ci nourrissent et les autres… » Il le conduisit un peu plus loin, vers un carré aux fleurs noires et aux pétales si fines qu’elle avaient l’air translucides. « Les autres sont… Comme du verre noir. Presque. Blessez un mage, tel que votre vampire de 1200 ans, avec une arme forgée de ceci et il ne sera plus un obstacle. Ces fleurs poussent avec la foi. Il faut croire qu’importe en quoi, mais croire… » Il eut un sourire en coin, en jetant un coup d’œil au Havremont : « Et je pense que vous avez suffisamment de foi en vous pour que vous vous forgiez vos propres armes. » Pas seulement du verre noir. Naal lui parlait aussi de sa croyance en l’Empire et de sa volonté de bien faire qui pourraient le mener loin sur l’assemblée politique. Il prit quelques graines qu’il plaça dans une petite bourse de cuir avant de la tendre au sélénien.

    « Ayez foi, Claudius. Le destin place des épreuves sur notre chemin pour que nous révélions le meilleur de nous-même… Néant m’a dit une fois que les Dieux n’étaient que des âmes, semblables aux nôtres, qui avaient été élevées non pas dans la quête de pouvoir, mais dans la foi et la certitude que l’on peut créer tout ce que l’on veut… Avec cette foi. »

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Claudius et l’Oracle eurent cette petite conversation nécessaire quant aux événements pour le moins extraordinaires qui étaient arrivés en chaîne au Maître de Guerre, puis ils passèrent à un tout autre sujet.

En vérité, cela aidait le Havremont de pouvoir être compris par quelqu’un, d’avoir pour une fois une épaule sur laquelle se reposer. Ça n’était pas qu’il était vraiment seul, mais pour le moins, depuis que le Havremont avait tué Cynoë, il se sentait profondément seul. Sa famille l’aidait bien sûr, mais il avait été puni par le grand dragon rouge par un des plus durs châtiment, on le dévisageait très souvent à la Cour de Sélénia, et s’il s’était réussi à se forger quelques sérieux alliés, rien ne remplaçait ce vide qui s’était creusé petit à petit dans son esprit, pour venir jusqu’à dans sa poitrine.

Mais là était tout le poids des dirigeants, et du fardeau que cela impliquait : pour sûr, beaucoup de séléniens devait penser à l’heure actuelle qu’ils étaient privilégiés, payés à rien faire, un reliquat d’un système archaïque qui n’attendait qu’un coup de balai pour faire voleter la poussière. Mais la vérité, c’est que depuis que Claudius avait fait cet affront à la Couronne Kohan, lui qui avait toujours été loyaliste et toujours soutenu les souverains quoi qu’il en coûte, dusse t-il subir la perte de ceux qu’ils aimaient, il n’avait jamais autant été préoccupé et n’avait jamais autant travailler de sa vie.

Cela se voyait d’ailleurs, car une petite calvitie était venu se nicher sur le haut de son crâne, sa barbe était plus fournie qu’à l’époque, et des cernes se dessinaient en dessous de ses yeux pour qui l’observait bien.

Non, Claudius n’avait rien d’un être divin comme son interlocuteur en face de lui : il n’était qu’un être humain pas plus différent des uns et des autres, si ce n’est que lui avait le statut social et l’audace de dire quand quelque chose le révoltait. C’était peut être pour cela que tant de gens étaient prêts à croire en lui.

Le Havremont soupira une nouvelle fois, laissant ses réflexions à plus tard. Bien que Naal avait une grande capacité d’écoute, il ne comptait pas refaire le monde avec lui. D’abord parce qu’ils n’avaient pas que cela à faire, et ensuite parce que toutes ses réflexions étaient hélas inhérentes à la vie de dirigeant. La solitude, le travail acharné, la haine des uns, le soutien des autres. Toutes ces choses-là étaient incompressibles, et Claudius se devait d’être fort, car il allait devoir les surmonter les unes après les autres afin d’aspirer à celui qu’il voulait être.

Il reporta alors son attention vers son divin camarade, qui avait généreusement accepté d’être son guide, et voulait lui montrer quelque chose. Il le suivit, en profitant pour observer tous les détails de ce grand temple délimarien qui disposait d’une structure ingénieuse en pyramide. Ça n’était pas vraiment le style de Claudius, mais il admettait que cela avait du cachet et une inspiration prononcée qui reflétait bien ce qu’était l’Océanique.

Sans doute eusse t-il aimé qu’à la Majestueuse, les bâtiments adoptent un style comme celui-là, plutôt qu’une bête construction autour d’un château qui retirait tout le charme et l’histoire d’un Empire comme celui de Selenia.

Mais là également, c’était un tout autre sujet et le Havremont se concentra plutôt sur ce petit jardin sombre à la terre faite de sable, où il y voyait des grandes fleurs qui semblaient ravies de pousser ici : qu’était-ce à dire que ceci ? Claudius n’en savait rien, car en 51 ans de vie, il n’avait jamais rien vu de tel.

Fort heureusement, son ami almaréen allait lui éclairer sa lanterne …

« Mon corps a été forgé par Néant lui-même. Je suis probablement le seul être humain en ce monde que l’ainé ait façonné. Et je suis… Étrange. De moi, je forme de petites graines. Des graines du Vide. Il en pousse tantôt ces fleurs… Tantôt d’autres. Mangez-la »

Claudius regarda Naal, quelque peu interloqué alors qu’il lui tendait cette fleur qui lui avait affectueusement cueilli. L’intention était louable, mais le petit discours qui lui avait tenu juste avant, rebuta quelque peu Le Havremont, qui ne put s’empêcher d’avoir un petit sourire avant de lui dire :

“Donc, simplement pour que l’on soit clair, vous me demandez de manger une partie de vous, c’est bien cela ? … Voilà longtemps que quelqu’un ne m’avait pas fait d’avances si prononcées, Oracle !”

Claudius étouffa un petit rire, rougissant quelque peu de sa plaisanterie avant de prendre la fleur et de la savourer. Cela n’avait le goût de rien de semblable. C’était étrangement très aérien, comme si l’on mangeait du coton. A la fois ça n’avait le goût de rien de particulier, mais cela n’était pas désagréable en bouche. Le Havremont y revenait plusieurs fois, avant d’avoir entièrement mangé l’aliment.

Il avait l’étrange sensation de n’avoir rien manger, d’avoir apprécier ne rien manger, et d’être tout de même être rassasié.

“C’est … Étrange en effet, Vous êtes b… Enfin je veux dire, c’est très bon.”

Le Havremont rigola un bon coup cette fois-ci, avant d’écouter les explications de son ami :

« Elles n’ont besoin ni d’eau, ni d’une terre fertile. Elles auraient pu pousser en Almara même, tant nos terres étaient arides. Celles-ci nourrissent et les autres… Les autres sont… Comme du verre noir. Presque. Blessez un mage, tel que votre vampire de 1200 ans, avec une arme forgée de ceci et il ne sera plus un obstacle. Ces fleurs poussent avec la foi. Il faut croire qu’importe en quoi, mais croire… Et je pense que vous avez suffisamment de foi en vous pour que vous vous forgiez vos propres armes. »

Claudius eut soudainement un regard plus qu'intéressé, quant à ces explications et ce désir explicite de voir Achroma tomber. Naal lui tendit une petite bourse de cuir, que le Maître de Guerre prit délicatement dans sa main. Bon bien sûr, cela ne changea pas vraiment le fait que le Havremont allait devoir atteindre l’Aîné (ce qui sonnait comme une toute autre paire de manches, connaissant la puissance et la dangerosité du mari d’Aldaron).

Claudius se tut cependant encore un instant, bien qu’il voulait grandement remercier son ami pour ce cadeau qui avait la puissance de résoudre tant de problèmes, car Naal n’avait pas encore fini de lui parler :

« Ayez foi, Claudius. Le destin place des épreuves sur notre chemin pour que nous révélions le meilleur de nous-même… Néant m’a dit une fois que les Dieux n’étaient que des âmes, semblables aux nôtres, qui avaient été élevées non pas dans la quête de pouvoir, mais dans la foi et la certitude que l’on peut créer tout ce que l’on veut… Avec cette foi. »

Le Havremont mis une main dans sa barbe fournie, alors que dans son autre main, déjà les graines semblaient révéler entre ses doigts pour un bref instant, une énergie chaude, qui brilla pendant un court instant. Était-ce une de ces fameuses manifestations de cette foi ?

Claudius n’en savait rien, à dire vrai, mais voilà quelque temps qu’il avait remarqué ce phénomène sans trop pouvoir l’expliquer. Encore une épreuve de ce fameux destin dont parlait son ami ? Peut-être. Le Havremont pris à son tour la parole :

“Je … Suis sans voix quant aux cadeaux que vous me faites, Oracle de Néant.” Claudius passa son regard de Naal à la petite bourse qu’il tenait entre ses mains, avant de reprendre : “Je ne sais pas si je suis digne de tant d’offrandes, car je suis intimement convaincu de n’avoir pas grand chose de semblable à ce qui vous anime, et vous constitue … Mais sincèrement, merci.”

Claudius se tut un instant, avant de frissonner un instant quand il repensait aux paroles de son ami, et ce que cela allait impliqué :

“Ces graines représentent bien plus que de la foi mon ami. Elles viennent d'atterrir dans ma main, et pourtant elles représentent déjà l’espoir de tout un peuple qui attend de se tirer de la famine, et de se libérer du joug des souverains qui les dirigent, ou qui ont des vues sur notre terre … L’on fait très certainement des miracles avec la foi, mais cet espoir que ce petit sac représente, est inestimable.”

Claudius baissa la tête, avant de passer une main sur son visage, chassant cette fois une larme qui sortit de son être plus qu’à fleur de peau et tendu pendant ces dernières semaines :

“Je ne pourrais probablement jamais vous rendre la pareille. Alors sincèrement, merci pour tout ce que vous faites pour nous, pour moi. Bien plus qu’un cadeau, j’ai conscience du poids des valeurs que vous posez sur mes épaules en m’offrant ce sac. J’espère en être digne, autant que vous l’êtes, Oracle.”

Voilà longtemps que Le Havremont nourrissait une amitié pour le peuple almaréen, depuis ses premiers rapprochements auxquels il avait participé avec Fabius Kohan, mais il ne pensait pas voir la chose se concrétiser de façon aussi belle aujourd’hui.

De l’espoir, voilà une sensation qui avait manqué à Claudius, qui semblait piéger dans une spirale infernale depuis quelque temps.

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    L’Oracle eut un sourire en coin à l’éclaircissement que formulait Claudius. Des avances ? Oh ! Oui, maintenant qu’il y pensait, cela pouvait être pris en ce sens et bien que cela ne lui ait pas effleuré l’esprit initialement, il trouvait amusant que cela ait effleuré celui de Claudius. « Votre épouse ne vous fait plus d’avance ? » railla-t-il. « Peut-être devriez-vous lui en faire pour renouveler la flamme. Ainsi vous n’aurez plus à craindre que cela fasse trop longtemps… Bien que je doute qu’un homme de si belle carrure n’ait réellement pas eu d’avance depuis autant de temps que vous le pensez. Vous, les Ambarhùniens, vous semblez faire de la fidélité une exclusivité : cela doit vous défaire la vue. » Et cela n’avait jamais été son cas. Il avait été fidèle, dans son affection, à bien des personnes sans jamais tarir d’affection tant que les sentiments étaient partagés. Il avait découvert chez les autres hommes combien une union était sacrée et exclusive. Combien la tromperie était un péché et parfois même un crime. Naal aimait sa liberté, sans pour autant désapprouver ou juger. En vérité, s’il y avait eu ce principe d’exclusivité des couples sur Angellan, il y aurait peut-être eu beaucoup moins de guerres, jadis. Et il n’aurait pas été tué pour avoir refusé de prendre parti.

    Attentif à sa réaction, il observa Claudius manger la fleur, curieux de son appréciation. Il ne s’était pas attendu à quelques propos à moitié inavoués de la part de Claudius, mais cela l’amusa. Il était bon ? « On me le dit souvent. » fit-il, avec un sérieux qu’un petit sourire en coin venait trancher. Puis il reprit, au sujet des fleurs et du verre noir, avec cette pédagogie solennelle que possédait le dévot. Il remit les graines entre ses mains et elles semblèrent, un bref instant, parcourues d’une lumière imprévue. Il jeta un coup d’œil au maître des armées, comme pour lire dans son regard si celui-ci avait une explication. Mais il semblait tout aussi perplexe que lui. Certains événements n’avaient pas d’explications immédiates. Cela viendrait peut-être, avec le temps. Il accueillit ses remerciements chaleureux avec un doux sourire, presque habitué. Pendant des milliers d’années, il avait béni et conseillé son peuple. Chaque fois, on lui avait adressé des remerciements qu’il n’attendait pas vraiment. Il avait été placé sur cette terre pour guider son peuple dans la foi de Néant et il avait accompli cette mission chaque jour avec la volonté de donner et de partager. Il n’attendait pas de remerciements, bien qu’il trouvât normal que, lorsque les mots vinrent à manquer, l’on manifestât sa gratitude à autrui. Il se satisfaisait de l’espoir qui venait d’éclore en lui, mince, mais vivace et prometteur. Il était persuadé que Claudius ne devait baisser les bras en si bon chemin.

    « Vous n’avez à être digne que de votre propre espoir, Claudius, pas du don que vous recevez. Ne doutez pas de ma fierté, quoique vous fassiez. Vous m’épatez déjà beaucoup. » Il lui adressa un petit signe de tête, l’invitant à le suivre alors qu’il marchait, pieds-nus, vers l’extérieur du temple. « Les révélations que je vous ai soufflé au sujet des Elusis, risquent de mettre à mal Tryghild Svenn, notamment dans son rapprochement balbutiant avec Victoria. » Si Naal appréciait Victoria, il la trouvait bien jeune pour régner. Sans compter qu’il s’agissait d’une femme. Pouvait-on dire qu’elle avait les épaules assez larges pour ce qui l’attendait, face aux Elusis ? Elle était cernée d’ennemis. Le seul espoir que l’almaréen entrevoyait pour le royaume humain n’était autre que Claudius. « Son amitié pour Aldaron est aussi tendre que malheureux. Je pense qu’elle croit encore en lui, comme une sœur qui attend le retour d’un frère égaré. Mais je doute qu’il revienne tel que jadis. Il n’a pas été seulement vampirisé… Il a été Lié. Vous, les Amburhùniens, vous avez souvent pris le parti de penser que se lier à un dragon était un honneur. Vous en oubliez que leurs esprits à tous les deux, dragon comme bipède, se mélangent et se tarissent. En étant de natures incompatibles, leur union les aliènent. Aldaron n’aura plus jamais les mêmes considérations humaines qu’avant. Il est au-delà. Mais je crois que Tryghild ne peut l’entendre. Mais placée entre lui et Victoria, son intendance ne saurait subsister. Elle dit vouloir se retirer, ne pas pouvoir faire face. »

    Quittant la pyramide pour le parvis, les pieds nus de l’Oracle marchaient dans la neige à moitié fondue. Il eut un sourire, amusé : « Vous saviez que nous n’avions pas de neige sur Almara ? Beaucoup trop chaud pour cela alors… Cela me rappelle les souvenirs lointains d’Angellan. Là-bas nous avions des hivers rudes, et je n’ai pas revu la neige pendant des siècles, Jusqu’à Tiamaranta. Maintenant. » Malgré ces millénaires de vies, il découvrait et redécouvrait encore bien des choses. La chaleur cuisante d’Almara lui manquait toujours, mais la neige ne lui déplaisait guère. Il secoua la tête, comme pour chasser ses souvenirs et revenir au sujet d’importance : « Vous connaissez ma fille, Minerva. Vous avez su l’impressionner, au temps où les Serviteurs du Néant menaient des troupes sur vos terres. Elle est très engagée, ici, à Délimar. Elle pourrait succéder à Tryghild sans effort. Un rapprochement entre nos cités pourrait alors se faire plus facilement. Les gens ici ont une dent contre les Kohans. Pas contre les Havremont. » Il monta sur les remparts de la ville, passant près des gardes en armures qui veillaient sur la ville. De là-haut, on voyait les campagnes alentour et les falaises. Côté ville, les habitations étaient encore en constructions. Délimar n’utilisait pas la magie comme les autres cités, si bien que son avancement était moindre. Néanmoins les maisonnées finies avaient des murs robustes. « Que ferez-vous pour le peuple des Hommes, si vous devenez Empereur ? » lui demanda-t-il, curieux d’entendre ses idéaux.

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Claudius rigola de bon cœur quand il vit que l’Almaréen avait manifestement compris ses grivoises plaisanteries. Plaisanter de la sorte, même si le niveau n’était pas très élevé il fallait bien se l’admettre, ne lui était plus arrivé depuis un certain temps, aussi il profita de cet éphémère moment où il pouvait simplement se contenter de rire.

Il se teinta cependant d’un peu de sérieux quand la question vint sur les avances que lui faisait son épouse, et sa fidélité quant aux engagements du mariage :

“Détrompez-vous Naal ! Mon épouse et moi-même vivons encore de jours heureux même après nos nombreuses années de mariage ! C’est simplement qu’en ce moment, je trouve mon bonheur dans les bras d’un homme, qui fut très majestueux, mais qui est aujourd’hui hélas malmené, voir en piteux état, mais que je m'accroche à sauver mordicus. Il est des choses que l’on ne peut expliquer, mais je l’aime depuis mon plus jeune âge.”

Claudius émit un petit soupir et pris un sourire en coin de nouveau :

“Je vous accorde cependant un point. Ma femme n’a jamais compris la relation quasi fusionnelle que j’ai avec l’Empire, elle en est même jalouse parfois ! Ce n’est pas faute de lui avoir expliqué que non je n'étais pas si souvent derrière l’Impératrice Victoria parce que je désirais la courtiser, mais plutôt parce que la mission qui m’anime me pousse à la fréquenter souvent. Mais bon, vous savez ce que c’est … Quand la foi véritable vous anime, vous pouvez essayer de la transmettre, mais il est difficile d’atteindre sur un autre être, le même engagement qui vous fait battre votre cœur. Ou plutôt le non-cœur me concernant !”

Le Maître de Guerre eut un nouveau petit sourire : après tout, n’était pas Naal du Néant qui le voulait. Il suffisait de contempler le temple pour s’en apercevoir : nombreux étaient tatoués, venaient chercher des réponses, priaient pour le salut de leurs âmes auprès des Huit, et pourtant un seul avait un antique pouvoir véritable et une longévité extraordinaire.

Claudius écouta avec attention le reste de la conversation et accepta avec modestie les compliments qu’il avait reçu de Naal et suivi de près l’Oracle qui l’invita vers la sortie du temple. Le Havremont prêta l’oreil quand le prêtre lui fit part de la situation politique à Delimar :

« Les révélations que je vous ai soufflé au sujet des Elusis, risquent de mettre à mal Tryghild Svenn, notamment dans son rapprochement balbutiant avec Victoria. »

Claudius passa une main dans sa barbe avec attention. Il ne connaissait que l’intendante Svenn que de nom, et comme les nombreuses autres personnalités influentes de l’Alliance il s’en était fait une idée très rapide : une tête qui avait la langue bien pendue envers sa Nation, sans grand intérêt. Au mieux c’était un obstacle à la domination de l’Empire sur Calastin, dans le pire des cas elle représentait un ennemi.

Les choses avaient quelque peu changées depuis l’implication plus marquée de Claudius dans les sphères politiques de son pays. Mais en toute honnêteté, Le Havremont se sentait bien plus proche de personnalités comme Naal et d’autres Almaréens qu’il avait côtoyé dans le temps, plutôt que d’autres personnes.

Aussi fut-il content d’apprendre cette nouvelle, d’autant que cela allait probablement affaiblir la réputation de l’actuelle Impératrice Kohan, et faciliter la vie du Maître de Guerre pour les quelques tractations qui étaient en cours de son côté.

« Son amitié pour Aldaron est aussi tendre que malheureux. Je pense qu’elle croit encore en lui, comme une sœur qui attend le retour d’un frère égaré. Mais je doute qu’il revienne tel que jadis. Il n’a pas été seulement vampirisé… Il a été Lié. Vous, les Amburhùniens, vous avez souvent pris le parti de penser que se lier à un dragon était un honneur. Vous en oubliez que leurs esprits à tous les deux, dragon comme bipède, se mélangent et se tarissent. En étant de natures incompatibles, leur union les aliènent. Aldaron n’aura plus jamais les mêmes considérations humaines qu’avant. Il est au-delà. Mais je crois que Tryghild ne peut l’entendre. Mais placée entre lui et Victoria, son intendance ne saurait subsister. Elle dit vouloir se retirer, ne pas pouvoir faire face. »

Claudius se frotta la barbe, et haussa les épaules quant à cette dernière remarque. Certes il eût été mentir de dire qu’Aldaron n’avait pas changé ces dernières années, mais quant à savoir la cause … Si Naal était convaincu que la faute du lien était prépondérante, ce qui n’étonna guère le Havremont qui se souviendrait encore longtemps de leur première rencontre, son point de vue était plus nuancé :

“Vous avez peut-être raison. Pour autant, si je pense que le feu qui anime Aldaron est peut être alimenté par son Lien, je pense que bien d’autres raisons l’ont poussé à faire ses propres choix. L’amour inconditionnel qu’il porte pour son époux qui l’a amené à embrasser le destin des vampires en tête de ligne. Si Tryghild s’entendait bien avec lui, je ne peux que comprendre sa peine, car c’est aussi mon cas. Mais bon, tout ceci ne sont que des analyses d’un simple humain mortel, qui n’est pas grand chose si ce n’est sa propre personne. Vous êtes sûrement plus à même de trouver la réponse exacte à tout cela.”

Claudius soupira. Après tout, à la différence de son comparse du Néant ou même d’Aldaron, il n’avait rien d'exceptionnel. Il n'était à sa connaissance pas sous la bonne grâce des dieux, il n’avait pas d’époux étant un vampire millénaire dont la place était plus dans les livres d’histoire plutôt que dans la vie réelle, et surtout il n’avait aucun passe droit face à la mort. Bien qu’il le cachait, Le Havremont faisait toutes ses actions car il était simplement convaincu que c’était les bonnes choses à faire, se contentant de son instinct et de son amour pour son pays comme simple boussole.

Il ne comprenait pas tout, et n’avait jamais eu l’ambition de vouloir tout comprendre, laissant les faits extraordinaires de leur monde à des gens tout aussi extraordinaires. Et depuis qu’il avait tué Cynoë, il avait scellé son destin. Il avait choisi de prendre part à des conflits qui dépassaient bien souvent la pensée d’un simple humain.

En vérité, s’il vivait encore aujourd’hui, la peur que tout s’arrête le lendemain était bien réelle.

Une fois qu’ils furent dehors, Claudius écouta avec un certain amusement Naal parler d’Angellan. Il semblait justement en parler comme si tout cela était absolument normal. Si on avait dit un jour au petit Claudius qu’il allait côtoyé des personnages de ce genre, qui faisaient partie de récits légendaires, et bien s’entendre avec, il ne l’aurait jamais cru. Le Destin le surprenait de plus en plus en ce moment. Le Maître de Guerre qui n’avait connu rien d’autre qu’Ambarhùna, et les terres de Tiamaranta, eut un petit sourire avant de dire :

“Après tout, il fallait bien un événement exceptionnel pour que je vienne de moi-même à Delimar”

Claudius fit un clin d’oeil au Roi d’Almara, avant d’acquiescer ensuite quand il évoqua sa fille. Minerva Sarawynn : voilà également un nom qu’il n’avait pas entendu depuis des lustres. Il fut cependant content d’entendre de ces nouvelles. Le duel amical qu’il avait mené avec elle du temps de Fabius lui avait laissé des traces, bien qu’il l’eut gagné. C’était une sacrée femme, à bien des aspects.

“Je suis content de l’entendre, et pour elle Minerva est une femme méritante, qui dans mon souvenir ne laissait personne indifférent. C’est très certainement un très bon choix pour votre cité. J’aurai bien évidemment plaisir à collaborer avec elle, si le destin le veut bien également.”

Claudius s’était permis cette dernière phrase, car si l’idée de retrouver une entente et une collaboration saine avec Minerva le tentait bien, il était tout à fait conscient qu’avant tout cela, Le Havremont allait devoir survivre à ce qui attendait l’Empire. Ce qui n’était pas gagné d’avance, bien au contraire.

Claudius suivit paisiblement l’Oracle, contemplant avec lui les remparts et abords de Délimar, et haussa un sourcil quand Naal lui demanda ce qu’il ferait pour le peuple, s’il était amené à avoir la Couronne entre ses doigts. Le Maître de Guerre le regarda un instant, avant d’inspirer, et de répondre :

“Eh bien, voilà une bonne question. J’ai toujours eu comme intime conviction personnelle que nous devions retrouver l’âge de grandeur de notre pays, tel qu’il était il y a de nombreuses années. Mais bien que je ne le dise pas souvent, ce serait mentir que de ne pas admettre que de nombreuses choses ont changé depuis tout ce temps. Notamment à cause des derniers Kohans à la tête de ce pays, la Couronne a grandement perdu en crédit, tout autant que les nobles dont je fais partie. Je pense donc que ma première mission irait en ce sens. Je voudrais redonner ses lettres de noblesse à notre Nation, la faire redevenir un Empire, et que le peuple cesse de croire que nous sommes des élites bonnes qu’à soutirer leurs deniers et s’empiffrer avec. Qu’ils nous voient plutôt comme un modèle, une source d’inspiration, atteignable par des efforts faits au service de la nation. Cela sera le socle pour bâtir un nouveau projet.”

Claudius eut à nouveau un petit rire, songeant à quel point tout ce discours sur la noblesse et les élites devaient paraître si lunaire pour un délimarien. Mais Le Havremont restait persuadé qu’un Chef, c’était fait pour Cheffer. Et que peu de monde ne pouvait s’en targuer.

“Du reste, j’ai de nombreuses idées en tête, tantôt empruntées à mes expériences, et tantôt à l’Histoire. Par exemple, je voudrais que tout enfant naissant dans l’Empire, et que tout citoyen de Selenia, puisse avoir une éducation minimum.”

Claudius fit un petit clin d’oeil à Naal avant d’ajouter subtilement :

“Les Déesses sont avec nouuuuuuus !”

En agitant les mains, et en ayant un regard tel qu’il faisait croire qu’il avait vu la personnification des Huit devant lui. Il eut un petit rire, donnant une petite tappe sur l’épaule de son compagnon, avant de reprendre plus sérieusement :

“Je veux également que l’on redéfinisse ce qui fait de nous des Séléniens, et que l’on établisse de véritables valeurs autour de cela. Ce sentiment d’unité nous manque, et a tendance à se perdre depuis que de nombreux prédateurs sont à l'affût autour de notre territoire. L’Empire a beaucoup souffert de ses récents déboires.”

Le Havremont soupira, avant d’à nouveau regarder Naal, et d’ajouter :

“Je pourrais vous expliquer en long en large et en travers tout ce à quoi je songe, car ce sont des questions que je me pose chaque jour. Nous en aurions alors très certainement pour la nuit à écouter mes divagations, mais disons que essentiellement, j’espère que l’Empire dans lequel je me projette sera une nation forte, qui n’ignorera pas son passé, mais surtout qui aura la volonté de construire des choses nouvelles et inédites jusqu’à lors. Un rapprochement de plus près que de simples visites diplomatiques avec votre cité en serait un bon exemple, mais aussi avec les Graärh, qui semblent être une peuplade aux convictions sembables aux nôtres.

J’aimerai aussi que l’on entretienne un lien beaucoup plus centré sur la proximité avec nos citoyens. Si je ne puis tous les connaître de leurs prénoms comme avec mes hommes à l’armée, je sais qu’ils ont beaucoup souffert de cet éloignement qui s’était beaucoup marqué ces dernières années avec les Kohans. C’est quelque chose que j’aimerai revoir à ma façon. Je n’ai pas l’intention de leur laisser la mainmise sur le pouvoir, mais j’aimerai qu’ils comprennent à quel point le rôle de l’Empereur est important, et pourquoi il est bon de le suivre.”


Claudius haussa les épaules avant de finalement faire d’un petit air laconique :

“Tout un programme en somme. De quoi bien s’occuper pour cette vie, et toutes celles à venir.”

Le Havremont quitta les yeux de l’almaréen une seconde pour s’appuyer sur les remparts de la ville un instant, et souffler un grand coup. Encore fallait-il qu’il survive à cette vie, pour mettre tout cela en place.

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    Si Claudius avait l’intention de travailler avec Minerva, cela était assez bon signe. Le peuple humain n’avait pas à se déchirer de la sorte : ce que les délimariens demandaient surtout, c’était qu’on arrête de les prendre pour des idiots et des bonnes poires. Chose dont la Couronne Kohan n’avait, visiblement, pas décidé d’accepter. Il devait avouer que des efforts étaient faits, avec Victoria. Naal avait eut l’honneur de la rencontrer de façon informelle. Mais elle était bien jeune, en plus d’être une femme, pour arriver à redresser la barre d’un navire littéralement en train de couler. Claudius représentait, à ses yeux, un meilleur choix, à plus forte raison qu’il était un homme. Être capable ne faisait néanmoins pas tout : il fallait des projets, une vision de l’avenir à laquelle s’accrocher pour déployer les efforts conséquents qui allaient devoir être nécessaire. Peut-être faudrait-il même une sorte de rupture et si changer de famille régnante en était une, il était aussi important qu’elle ait des idées bien différentes.

    Et c’était un changement en profondeur dont Claudius lui faisait mention. Un changement qui allait dans les fondements même de la définition de la noblesse. Aller au mérite avait été un crédo en lequel Naal avait longuement cru, bien qu’il s’agisse, sur Almara, de briller en termes de piété et de dévotion à l’Empire, plutôt qu’en fait d’armes et de service à la nation. L’idée était néanmoins très similaire et il ne doutait pas que le peuple almaréen se retrouve dans un tel mode de fonctionnement. Il eut un sourire en coin lorsque le Havremont évoqua un certain épisode, à Sélénia, où Naal avait usé de la bêtise du peuple pour les conduire là où il voulait. Une éducation serait nécessaire, assurément. Probablement même y aurait-il une place pour une éducation religieuse. Les préceptes de la bible réécrite par le dévot faisaient état de vérités au sujet des déesses et de leur place. Il avait fait en sorte que cela soit traduit pour être accessible au citoyens de Délimar, mais l’effort pourrait être poursuivi au-delà. Si les Séléniens étaient croyant et passer du temps dans les temple, il serait bon de mettre à profit leurs prières pour les instruire au niveau spirituel.

    Claudius lui parlait également d’une volonté de créer une véritable identité pour l’Empire, créer ce qui pourrait la démarquer des autres nations. Aux yeux de Naal, si le peuple humain s’unissait à nouveau, le simple fait qu’il s’agisse d’un peuple d’humains était déjà une singularité en elle-même à exploiter. Du reste, ils étaient surtout un véritable patchwork auquel il serait complexe de définir une identité… Mais à qui se penchait sur le sujet, il n’y aurait rien d’impossible. « En effet, il y a du travail devant vous. Vous en avez toutefois déjà accompli beaucoup. Tâcher de ne pas oublier de vous retourner pour regarder le chemin parcouru. Voir vers l’avenir est une bonne chose mais il peut être épuisant de courir. Du reste, je crois qu’il n’y a rien d’impossible à celui qui a la foi. Même si vous n’allez pas au bout de votre projet, l’important sera d’avoir posé la première pierre, au moins, au cours de votre vie. Peut-être même deux ou trois. » Il eut un sourire à cette pensée, car il s’avait combien l’humanité était éphémère et que le poids de l’héritage donnait aussi des ailes aux générations futures pour prendre la relève. « Profitez de votre séjour pour chercher l’inspiration. »

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