22 Juillet 1764
Auberge des Étoiles Bleues.
Un fin rayon de soleil venait de s'infiltrer tout juste à travers les planches du volet passant juste au dessus des paupières de la féline. Réveillé en douceur par la chaleur et la lumière soudaine, Reynagane s'étira autant qu'elle le pouvait en lâchant un grand bâillement bruyant tout en poussant le pied du petit lit avec ses pattes arrières. Voilà bien longtemps qu'elle n'avait pas dormit aussi lourdement que cette première nuit depuis des lustres dans un vrai lit.
Allongée, ses pensées divaguèrent longuement sur les deux semaines qu'elle venait de passer à rejoindre Sélénia, enfin Portus Regius. Tout lui semblait avoir prit une toute autre tournure depuis sa descente dans le gouffre de Cordont. Difficile à croire que presque deux semaines étaient déjà passées depuis le passage de Rog, la découverte de l'entreprise Ychgama et la rencontre avec Udyog. Enfin par respect, mieux valait dire la dernière Couronnes de Cendres.
Tatant de la patte le sol, les griffes de la Gräarh se refermèrent sur son carnet en cuir et se redressa pour mieux l'ouvrir et y lire les dernières notes. Un ronronnement discret s'échappa de sa gueule alors que Pankhÿ baillait sur la rambarde du lit. Reynagane prit soin de lui donner un petit coup de langue sur le front avant de reporter son attention sur son carnet de voyage. Au plus grand plaisir, du moins elle le supposait, du petit oiseau vert qui enfonça sa tête dans son poitrail en refermant les yeux.
« Le trajet de Cordont jusqu'à Portus est resté bien calme, pour mon plus grand plaisir. Je ne suis pas encore très à l'aise sur l'eau ma foi, mais par les Esprits, j'ai bien fait de faire ce voyage en bateau. Il reste beaucoup de chose à faire et on a peut-être tous une chance d'avoir la quatrième Couronnes à nos côtés lorsque le temps sera venu. Trouver un moyen de prendre le collier au Roi des pirates. - Lui demander. (je rigole) – Non y a pas trente six mille solutions, il faut se rendre au sein de la Confrérie. Mais avant, je dois retourner sur Néthéril. »
La Gräarh inspira profondément en observant l'esquisse approximative du collier qu'elle avait vue avec ses amis sur la fresque dans la forge. Collier qu'Udyog demandait avant tout autre accord sans aucun doute. Comment allaient-ils tous faire pour dérober un objet pareil à un type pareil ? Rien que d'y penser, voilà que la féline avait un frisson dans le cou.
Il allait pourtant falloir se pencher grandement sur la question et son idée d'infiltrer la Confrérie restait maintenant un de ses objectifs principaux. Pas seulement pour le collier, c'était une bien trop grosse responsabilité pour elle, mais si au moins elle parvenait à comprendre un peu plus le fonctionnement de ces fou furieux ainsi que leurs projets sûrement abominable, alors il y aurait une chance pour elle de faire gagner du temps au sien. Car même si elle rechignait le fait de devoir revenir dans la Légion, elle était de plus en plus convaincu que son plan, bien que suicidaire, aiderait les Gräarhs avant l'arrivée des Couronnes de Cendres. Avait-elle peur ? Certainement. Mais pas autant qu'avant. Reynagane savait ce qu'elle voulait maintenant.
Reynagane quitta son lit pour se débarbouiller et remettre les poils de sa tête en place, l'esprit toujours aussi décalé dans le temps. Après une prière aux Esprits et après s'être assuré que le présent de la dernière Couronne était toujours cachée sous une planche de la chambre, la Gräarh quitta la pièce avec un petit oiseau vert dans la capuche et un sac plus léger sur le dos. Elle avait encore deux jours avant son départ de la ville, et elle comptait bien en profiter. Qu'allait t'elle dire à son retour dans la Légion ? Une grosse appréhension lui fit accélérer les battements de son cœur alors qu'elle quittait l'auberge. Le présent d'Udyog était une chose auquel elle n'aurait jamais cru avoir la chance d'avoir en sa possession. Personne ne peut se douter de recevoir une telle prouesse et même elle, avait grand mal à croire à qui était destiné normalement cette encre tatooglyphe et à qui on l'avait confié. Il était évident que c'était en partie pour cela qu'elle devait rentrée à la Légion. Trouver quelqu'un qui accepterait de lui tatouer une telle encre ne serait pas chose aisé, encore plus avec son statue, mais peu importe. Si l'encre ne devait pas tomber entre de mauvaises griffes, il n'y avait qu'une seule alternative possible. Mieux valait que Laalach ne soit jamais au courant.
Chassant ses terribles angoisses au plus profond de son esprit, la jeune Gräarh avait plus de facilité à se concentrer sur le présent. Imposant des barrières dans sa tête pour ne pas se noyer à chaque question. Et c'est ainsi qu'elle s'avança dans la rue qui montait vers les restaurants et cafés des Hommes.
La ruelle embrasée.
Le ventre gargouillant, Reynagane sentait les effluves de la ville et des épices de plus en plus fort autour d'elle tandis que ses pas avancer machinalement vers une épicerie ou il y avait la queue jusqu'à l'extérieur. Elle aurait très bien pu prendre dans ses réserves de nourriture, mais quel diablotin lui avait piqué l'envie de se balader si tôt. Jamais elle ne trouverait quelqu'un qui veuille bien proposé une soupe de lardons ou de pain à la viande. Il y avait aussi l'option du marché mais l'odeur de la ruelle lui criait de rester à faire la queue pour entrer dans l'épicerie.
Des regards curieux se tournaient souvent vers elle mais pour son plus grand plaisir, pas mal de Gräarhs pouvaient être aperçut dans Portus Regius et même dans les alentours. Avec du temps, et les promesses de l'alliance entre l'Empire et la Légion, voir des Gräarhs ici deviendrait aussi naturel que pensable. Chasser l'idée que les félins avaient été un jour des esclaves. Même si l'Empire n'avait pas pratiquer depuis bien longtemps, les mémoires des Hommes savaient faire focus longtemps sur une chose.
Tapotant de la patte les sols pavés, l'intérêt de Reynagane dans la file d'attente se portèrent sur deux jeunes femmes assises à une terrasse qui semblaient manger un bol de fraises de bon matin. Les pupilles dilatées en ressentant le goût de ces merveilleux petits fruits, la Gräarh sentit tout de suite le goût de cette sorcellerie fondre dans sa mémoire. Les Gräarhs mangeaient quasiment que de la viande, certes, mais le jour ou elle avait goûté des fraises au domaine Espérancieux, une explosion de saveur avait fait pétiller ses papilles gustatives pendant de longues heures. Han des fraises. Oui elle avait envie de fraises maintenant.