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Pourrait-elle un jour considérer ce lieu comme son foyer ? C'était difficile à dire pour l'heure actuelle. La ville se reconstruisait, comme elle d'une certaine manière, alors au moins elle pouvait sentir cette étrange compassion pour la chue. La chue... Quel étrange nom, n'était-ce pas d'une certaine manière horrible d'avoir attribué ce titre à la ville ? Serait-elle à jamais définie par ce terrible événement ? Bien sûr, la souffrance pouvait être un catalyseur ou un piédestal pour quelque chose de plus grande, une sorte de preuve flamboyante montrant que l'on avait survécue et qu'on en était ressortie grandi. Ou bien elle l'empoisonerait à vie, l'enfermant dans un rôle qu'elle ne pourrait se défaire.

-Nous nous sommes bien trouvées au final, Cordont... souffla-t-elle en se massant la tempe. Elle était fatiguée, il commençait à se faire tard, mais Nayrae ne pouvait se résoudre à aller se coucher.

Dormir relevait souvent d'une épreuve pour la solaire, car les nuits sans cauchemars étaient rares. L'appréhension et la peur pouvaient la tenir éveiller pendant des heures durant, jusqu'aux moments où elle s'écroulait de fatigue. Ce n'était clairement pas le mode de vie le plus sain, mais elle n'avait pas de meilleure alternative pour le moment. Sûrement elle pourrait trouver une solution pour mieux dormir, que ce soit par la magie ou un apothicaire, mais Nayrae s'y refusait. Ses cauchemars lui faisaient revivre de manière chaotique les pires événements de sa vie, ses crimes, ses souffrances, ses regrets... Elle se devait d'en tirer des enseignements et de la force, cela faisait partie de sa voie de rédemption, cette souffrance était nécessaire.

Ainsi Nayrae était de ces personnes à travailler tard le soir éclairé à la seule lumière d'une bougie. La chambre de l'auberge qu'elle louait était le plus souvent la dernière encore allumée le soir.

Au moins pouvait-elle profiter d'un certain moment de solitude pour travailler sur des projets qui lui étaient propres. En journée son temps était pris dans des collaborations avec d'autres mages du conseil et pour aider la ville dans sa reconstruction. Elle n'était certes pas encore totalement habituée à travailler dans un collectif et les autres elfes la mettaient toujours mal à l'aise dotant plus qu'ils étaient désormais une espèce en voie de disparition et que cela créait... des réactions pour le moins variées disont. Cela lui faisait bien évidemment penser à sa famille et à ce qu'ils étaient devenus, elle n'avait cependant pas le courage d'aller chercher la vérité. Elle s'était même surprise à prier pour le salut de leurs réincarnations. C'était de la lâcheté, prouvant toujours et encore qu'elle devait changer.

Pas aujourd'hui, pas ce soir. Après tout ce n'était pas comme si elle pouvait prendre un bateau et foncer chez les vampires d'un claquement de doigts...

Ce soir, elle continuerait calmement son étude élémentaire. Par la grâce des septs, ses dons magiques trouvaient tous leurs potentielles dans l'ensemble des flux élémentaires. C'était pour elle un cadeau magnifique, car manié les éléments lui permettaient de sentir plus proche de la défunte sororité. Si bien sûr le flux du feu était son plus grand atout, Nayrae mettait un point d'honneur à manier les 3 autres flux avec autant de ferveur. L'elfe solaire avait également décidé d'étudier les combinaisons élémentaires. Le feu en lui-même était une puissance destructive et créatrice aux potentiels importants, mais associé au flux de l'air elle pouvait découpler sa puissance. Nayrae explorait donc toutes les possibilités imaginables, cherchant à repousser les limites de son imagination et des sentiers déjà battus. Elle avait pour ambition de consigner le tout dans un grand ouvrage et ainsi transmettre toute la beauté qu'elle voyait de la maîtrise de ses éléments. Bien plus qu'un livre sur la magie, c'était une ode à sa foi, une déclaration d'amour qu'elle voulait écrire pour les déesses.

Et c'était cette pensée qui allait l'animer cette soirée jusqu'aux moments où la fatigue viendrait la chercher de force. Nayrae enfila son manteau le plus chaud et pris avec elle un grand sac de toile rempli de matériaux servant pour ses travaux. Descendant dans la salle commune, la solaire salua brièvement le gérant qui ne fut guère étonné de la voir sortir malgré l'heure avancée.

Elle n'avait pas en tête une destination précise, elle souhaitait juste s'éloigner des lieux de vie, non pas qu'elle allait mener des expériences dangereuses, mais le risque 0 n'existait pas et surtout elle ne voulait pas importuner qui que ce soit. Lorsqu'elle trouva enfin l'endroit adéquat, Nayrae commença à vider méthodiquement son sac, argile, métaux, précieux, gourde d'eau et de multiples liquide, mais également ses "breitha". Où plutôt ses premiers modèles de breitha, la plupart était ronde et certaine carrées. Elle était toute étiquetée de symbole, représentant des éléments, feu, eau, terre, foudre, etc. Les breitha malgré leur variété avait tous un objectif commun, celui d'exploser.

Nayrae aimait la symbolique de l'explosion. Bruyant, remarquable, voire même extravagante. Quelque chose d'éphémère, mais qui laissait une impression de grandiose qui perdurait dans le regard de ses spectateurs. Une breitha ressemblait à bien des choses, un coup de foudre, un sursaut de peur, une révélation soudaine, un instant bref mais intenses.

-La beauté n'est réellement belle que lorsqu'elle est éphémère, murmura-t-elle comme une prière tout en saisissant l'une des breitha. Celle-ci était étiquetée avec le symbole de l'eau, l'élément d'Aear.Elle jongla avec elle un moment pendant que son esprit réfléchissait à comment améliorer son efficacité. La Breitha d'eau était une petite boule de terre cuite, union de Naur et de Cae, qui contenait en son intérieur de l'eau. Le principe était relativement simple, mais peu employé, l'eau avait la particularité de se trouver en plusieurs état, celui de glace était le secret de l'explosion. En effet en passant de son état liquide à solide, l'occupation de l'espace s'en retrouvait bouleversé, l'état solide demandait beaucoup plus de place que l'état liquide. Ainsi, en gelant l'eau contenue dans la boule de terre, cette dernière finissait immanquablement par céder, la glace venant briser ce qui la contenait. L'effet cependant était minime et donc l'explosion relativement faible et comme pour se rafraîchir la mémoire, Nayrae jetta la breitha devant en elle en y gelant l'eau.

Le résultat fut bien entendu la petite explosion, dispersant terre et glace dans une petite zone.

-Un sort ou une rune permettant d'augmenter le volume d'eau en même temps que le gel pourrait augmenter l'effet et la zone de l'explosion, dit-elle pour elle-même pendant que ses doigts venaient tapoter ses lèvres. Il faudra aussi d'autres matériaux que de la terre cuite, des métaux pourraient être intéressant, il faudra tester à quel point la glace peut se montrer puissante face à des matériaux plus solide... Peut-être pouvait-elle même tester d'autres liquides ou même ajouter un élément, que donnerait un mélange de foudre et de glace ?

Elle sourit, la myriade de possibilités était une source d'excitation difficile à contenir. Sûrement prierait-elle les 7 afin de les remercier une nouvelle fois des magnifiques cadeaux qu'elles avaient laissés dans ce monde.

descriptionEt ça fait bim bam boom ! [pv : Shyven] EmptyRe: Et ça fait bim bam boom ! [pv : Shyven]

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Cela faisait quelques temps que Shyven s’était installé officiellement aux alentours de Cordont : facilité géographique pour visiter Ilhan – dont elle ne cachait pas sa proximité – mais aussi pour visiter ses autres amis bipèdes du continent … Et aussi et surtout pour garder des yeux sur les projets qu’elle avait initié avec le Tisseur.

Le Conseil des Mages, cette organisation dont elle avait soufflé les grandes lignes à Ilhan et qui était maintenant un lieu avec une identité propre. Il était visité, on y travaillait … En bref, le lieu prenait vie, et cela rendait joyeuse Shyven. Joyeuse, mais aussi intriguée et intéressée. Car Le Tribunal Vivant le savait, c’est ce lieu qui serait un garant important de l’Équilibre chez les bipèdes. Shyven savait que même si pour l’instant, il n’était pas grand-chose, son influence grandirait avec les années. Il n’était qu’une question de temps avant que les bipèdes de cette île ne se tourne vers eux pour quémander conseil au sujet de la magie … Ces bipèdes qui s’étaient cru malins de tuer des dragons n’auraient plus d’autres choix que de traiter avec l’un d’eux. La vengeance était un plat qui se mangeait froid, et aux yeux de Shyven, tout n’était qu’une histoire de calcul et d’attente.

Mais elle rangea ses pensées au ton bien politique pour un dragon qui n’avait finalement qu’à exécuter sa volonté pour qu’on se plie à elle, pour se concentrer dans l’instant présent. Pour cette soirée, Shyven était seule, et avait décidé d’entreprendre une chasse nocturne.

Une chasse pour se sustenter, certes, mais aussi pour mettre ses capacités à l’épreuve : la dragonne ne s’était plus battue depuis un certain temps, et profitait de ses moments solitaires pour garder ses capacités de super-prédateur bien échaudées. Bien sûr, la dragonne avait pris soin de demander auparavant à Ilhan où elle pouvait s’adonner à ses activités afin de ne pas causer problèmes aux alentours.

Mais alors qu’elle était sur la piste d’un animal quelconque, sûrement un lapin à en juger par les empreintes que la dragonne pistait, elle entendit et sentit non-loin quelque chose de plus intéressant, des pas de bipède, ou tout du moins cela y ressemblait, à en juger par les oreilles de Shyven, ainsi qu’une forte présence magique … Et quand Shyven percevait cela, elle ne se trompait que rarement : les dragons avaient un sens aigu pour détecter un usage de la Trame, ou du moins quelqu’un qui en était fortement imprégné au quotidien.

Curieuse comme pas deux, L’Opale abandonna sa traque pour se mouvoir tranquillement vers ce bipède qui avait cru bon de s’aventurer seul la nuit par ici. Bien sûr, se pouvait être dangereux de suivre une piste comme celle-ci à une heure avancée de la nuit, mais en principe, elle n’aurait pas trop de problème. Shyven avait bien fait attention de rester dans la zone d’influence de l’Alliance, pour éviter toutes rencontres disons « problématiques » avec des bipèdes mal-lunés voulant potentiellement lui faire du mal. Même si de façon très honnête, Shyven riait au nez de ces gens-là, mais elle ne voulait pas créer plus de problèmes, si elle devait être amené à se défendre. Son espèce avait déjà rencontré suffisamment de troubles sur cette île.

Elle s’approcha donc, et finis par trouver sa nouvelle « proie » : dans une petite clairière, était penché sur des petits objets une elfe à la peau toute dorée. Une espèce rare, songea Shyven, dans la mesure ou nombre de ses congénères avaient péri de la terrible Peste de Corail, ou avait fait le choix de devenir vampire. Shyven s’en approcha un peu plus, et après quelques instants son esprit reconnu la jeune elfe : se devait être Nayrae Syzÿgiehnn, une jeune recrue du Conseil. Si Shyven ne l’avait jamais rencontré personnellement, elle avait eu vent de son admission.

Cela était donc une information intéressante. Quelques secondes de plus, et elle vit de petites explosions partir de l’endroit où se trouvait l’elfe. Plissant les yeux, l’opale se demandait ce qu’elle fabriquait : elle avait senti une grande concentration d’énergie élémentaire se diffuser d’un seul coup, comme si ces petites choses disposées devant elle en contenait énormément. Une invention bipède ? Peut-être. Shyven courba sa tête, alors que Nayrae détaillait ce qu’elle venait de faire à voix haute, comme pour répondre aux questions que l’Opale se posait :

« Un sort ou une rune permettant d'augmenter le volume d'eau en même temps que le gel pourrait augmenter l'effet et la zone de l'explosion, il faudra aussi d'autres matériaux que de la terre cuite, des métaux pourraient être intéressant, il faudra tester à quel point la glace peut se montrer puissante face à des matériaux plus solides ... »

Ainsi donc, elle essayait de faire la plus grande explosion possible ? Il n’en fallut pas plus pour que la dragonne y mette son grain de sel. Sortant de sa cachette en bondissant d’un coup non loin de la zone où la jeune elfe se trouvait, Shyven fit :

« Et pourquoi pas les confronter au feu des dragons ? Je ne connais pas meilleur combustible, cela pourrait donner l’énergie nécessaire pour mettre ces petits objets à l’épreuve … »

Shyven eut un petit sourire, et ouvrit grand les yeux d’un coup. Il est vrai que son apparition soudaine, en plus de son contact télépathique soudain pour répondre à Nayrae devait probablement surprendre la jeune elfe. Aussi la dragonne se présenta :

« Je suis Shyven, Dragonne Libre, Tribunal Vivant et co-fondatrice du Conseil des Mages. Je vous ai entendu, alors que j’étais non loin d’ici. La curiosité m’a prise, alors … Me voilà. »

Shyven eut un petit sourire, et plutôt que de s’entremêler dans milles présentations, décida de revenir au sujet initial :

« Quelles sont ces petites choses que vous trafiquer depuis tout à l’heure ? Je sens une grande empreinte magique en elles. Essayez-vous de fabriquer une arme, où y trouvez-vous une satisfaction quelconque ? »

La dragonne arqua la tête sur la droite, d’un air curieux. Les bipèdes avaient des coutumes étranges parfois, aussi préférait-elle demander avant d’émettre tout jugement sur la situation. La dragonne eut un petit sourire avant d’ajouter :

« Et pourquoi pas fusionner deux éléments sinon ? Sous les bonnes propriétés, après tout, l’eau et l’air peuvent créer la foudre. »

Cela, Shyven en savait quelque chose : l’orage, c’était une affaire de famille. Mais peut-être que Nayrae y avait déjà songé : pour cela, elle laissa la jeune elfe répondre à ses interrogations.

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-Et pourquoi pas les confronter au feu des dragons ? Je ne connais pas meilleur combustible, cela pourrait donner l'énergie nécessaire pour mettre ces petits objets à l'épreuve...

Nayrae était encore plongé dans ses réflexions sur ces petites bombes, ainsi quand la voix de la dragonne vint caresser son esprit, elle répondit d'abord normalement, comme si la présence de Shyven était normale.

-Oui, mais je ne vois pas comment me "procurer" du feu de dragon, je ne vais tout de même pas importuner un dragon pour... Puis son esprit réalisa enfin que ce n'était pas "normal", elle n'était plus seule. Nayrae se retourna brusquement et un son proche de : ahglzprl sous un ton très fort et aiguë sorti de sa bouche le tout accompagné de bras se balançant d'une manière peur esthétique ?

La dragonne se présenta, la co-fondatrice du conseil des mages, rien que ça ! Comment était-ce seulement possible ? À son tour elle se présenta, s'inclina le plus bas possible devant la saurienne, reprenant un peu son calme. "C'est un immense honneur Dragonne Shyven, je... on me nomme Nayrae Syzÿgiehnn, humble mage du conseil". C'était bien la première fois qu'elle se trouvait aussi proche d'un dragon, un honneur qu'elle ne méritait pas, mais ce n'était pas à elle de choisir ou pouvait se porter l'intérêt d'un saurien.

Elle fut ensuite interrogée sur ces créations, ces petites breitha intriguait la saurienne, quoi de plus normal pour la co-fondatrice du conseil des mages ? Était-ce des armes ou bien autre chose ? Shyven lui parla également d'intégrer deux éléments, ce que Nayrae avait bien tendu envisager.

Elle prit une profonde inspiration, elle avait beaucoup à dire, mais il fallait organiser son esprit pour ne pas perdre la dragonne, bien qu'elle doutait que l'intelligence supérieure des sauriens puisse facilement être embrouillée.

-Pour vous répondre, mes "breitha" sont à la fois des armes et à la fois autre chose. Il s'agit d'abord d'une expérience de pensée couplé à ma piété. Ma magie est presque exclusivement élémentaire, cela m'offre une myriade de possibilités dont la limite sont celles de mon esprit et de la création divine. Je veux montrer la beauté des éléments lorsqu'ils s'associent ensemble, comme la beauté des déesses unies main dans la main. Et... je trouve qu'une explosion est une manière intéressante de représenter cela... Il était difficile d'expliquer son goût pour l'explosion, la brève et silencieuse attente avant la détonation, l'excitation qui monte et ensuite "BOOM", le cœur qui s'arrête net, le frisson qui parcoure le corps, la monté de l'adrénaline. Cependant je ne suis pas assez naïve pour ne pas voir le potentiel destructeur de mes créations. Avec une faible concentration de magie et une taille réduite, les Breitha sont inoffensives et peuvent être utilisé dans une perspective artistique, mais dans le cas contraire et en fonction des éléments utiliser... Elle ne termina pas sa phrase, la suite étant évidente, les breitha pouvaient tuer et détruire pour qui le souhaitait. Quand mes travaux seront terminés, tous sera consigné dans un livre et soumis aux instances du conseil, je ferais confiance à leur sagesse sur la publication éventuelle.

Nayrae alla ensuite fouiller dans son sac jusqu'à plusieurs feuilles. Sur laquelle on pouvait y voir des dessins très détailler de Breitha, la plupart ronde, certains carrés ou triangle encore. Chaque figure était détaillée de texte et parsemée de flèche. Nayrae pointa du doigt l'un des schémas pour y attirer l'attention de la dragonne. "Si la foudre vous intéresse, alors je vous présente la Breitha Aear na Annon Gwaew (Océan avec grande (pour dire élément supérieur) Vent)... oui c'est assez long Breitha ANAG pourrait être plus simple... mais bon elle n'est même pas encore au stade de prototype. Vous voyez cette Breitha est grossièrement en deux parties, interne et externe. La partie plus externe est remplie d'eau et de la partie interne de foudre. L'idée est simple et vous l'aurez sûrement déjà deviné. Le problème est davantage de contenir la foudre, c'est malheureusement un élément instable et à l'heure actuelle réussir à la conserver la foudre dans un contenant ! J'ai déjà réfléchi à plusieurs matériaux conducteurs, mais ce sera une véritable épreuve d'obtenir quelque chose de stable et de manipulable. Bien entendu tout ça part du principe que je n'emploie pas de glyphe, ce qui est le but."

Elle avait beaucoup parlé, mais en même temps il y avait bien trop à dire sur la magie, une dragonne plus que quiconque devait le comprendre. "Peut-être pourriez-vous me faire profiter de votre sagesse en la matière et de votre perspective unique d'être bénie par la magie, si bien entendu vous acceptez de m'en faire l'immense honneur."

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Shyven eut un rire tendre en constatant la réaction de l’elfe qui ne s’était même pas aperçue de la présence de la dragonne. L’elfe finit par la trouver derrière elle avec une surprise très … Marquée. C’est qu’elle devait vraiment être concentrée dans ses activités nocturnes pour ne même pas se rendre compte qu’un dragon était derrière elle ! Ce n’était pas que Shyven n'appréciait pas que l’on l’honore de sa présence quelque part – encore que –, mais tout de même : il était difficile d’ignorer la présence d’un dragon, tant sur le plan physique que spirituel !

Mais il fallait croire que l’elfe en face d’elle en était capable, ce qui eut pour le don d’intriguer Shyven : elle devait mine de rien effectivement avoir beaucoup de ressources, car il n’était pas donner à tout le monde de faire fi de cette présence draconique.

Toujours est-il que celle qui se présenta sous le nom de Nayrae Si… Syri… Scusi … Nayrae (pourquoi diantre les bipèdes-à-oreilles-pointues avaient-ils des noms aussi compliqués ?), fut rapidement mise en confiance par la dragonne, qui transmis mentalement à l’elfe des ondes rassurantes : qu’elle soit honorée de sa présence, c’était quelque chose qui faisait plaisir à l’Opale, mais point qu’elle ne se mette à s’excuser ni à se sentir mal de ne pas l’avoir repéré plus tôt ! Des moments d’inattention arrivaient, même si celui-ci l’avait surpris toutes deux.

Fort heureusement, l’elfe n’en fit rien de tout cela, et embraya directement plutôt sur les réponses aux questions qu’avait posée Shyven, intriguée par ces petits objets bipédiques :

« Pour vous répondre, mes "breitha" sont à la fois des armes et à la fois autre chose. Il s'agit d'abord d'une expérience de pensée couplé à ma piété. Ma magie est presque exclusivement élémentaire, cela m'offre une myriade de possibilités dont la limite sont celles de mon esprit et de la création divine. Je veux montrer la beauté des éléments lorsqu'ils s'associent ensemble, comme la beauté des déesses unies main dans la main. Et... je trouve qu'une explosion est une manière intéressante de représenter cela... »

La dragonne arqua sa tête, amusée. Cette Nayrae devenait de plus en plus intéressante, ou du moins le contexte de leur rencontre était intéressant. D’aussi loin que la dragonne se souvenait, elle n’avait jamais vraiment croisé de bipèdes qui rythmaient leurs journées par des actions religieuses. Oh bien sûr, certains faisaient des prières aux Déesses, à Néant, ou aux Huit dans son ensemble, mais la dragonne n’avait jamais assisté à des « cérémonies » religieuses, ou même des rituels. Peut-être aussi parce que cette pratique se perdait depuis que l’influence des divins avait quitté ce monde. Toujours est-il que Shyven fut encore plus curieuse d’avoir rencontré quelqu’un de pieux, et qui plus était, vivait sa religion à ce point. Mais elle laissa plutôt l’elfe s’exprimer entièrement sur le sujet de ses bombes avant de rebondir sur ce point.

Nayrae confirma l’hypothétique pouvoir destructeur de ses objets, et affirma à la dragonne que ses travaux seraient confiés au Conseil par la suite. Shyven fit une petite moue, mais ne sembla pas plus s’en inquiéter que cela : elle faisait confiance aux bipèdes pour inventer des engins encore plus destructeurs que ceux-ci, et si ces instruments devaient être utilisés pour la guerre, alors ainsi soit-il. Les guerres faisaient partie des cycles de l’Ordre et du Chaos. Nayrae y jouait sa part, tout comme tous les autres êtres foulant cette terre.

Shyven écouta par la suite attentivement les explications de l’elfe concernant le fonctionnement de sa « breitha », tout autant que du nom aux sonorités elfiques que la solaire lui donnait. La dragonne y fut particulièrement réceptive, mais aussi elle nota peut-être une ou deux choses qui ne paraissait pas très intuitive à l’esprit de la dragonne. Aussi, quand Nayrae termina finalement sa démonstration et qu’elle demanda son avis à Shyven, celle-ci lui répondit d’un ton tout naturel :

« Si vous cherchez à ne pas utiliser de glyphe, alors effectivement, conserver la foudre est quelque chose d’ardu. » Shyven gratta un bout de terre, comme réfléchissant. Elle leva le bout de son nez, vers le ciel et commenta :

« Des membres de ma famille peuvent faire tomber la foudre naturellement. C’est un don que nous avons. » Shyven pensa évidemment là à sa grand-mère et sa mère, deux personnes chères à ses yeux qui possédaient effectivement le don de l’Orage. « Mais finalement, si au-delà de la conserver par des processus complexes, que diriez-vous de … Produire cette foudre, naturellement ? Car tous les ingrédients sont dans la nature pour le faire, il suffit de manier quelque peu les éléments pour la provoquer. Ce que vos petites Breitha ont l’air de faire avec brio. »

Shyven s’arrêta un instant dans sa démonstration, pour être sûr que Nayrae comprenne bien là où la dragonne voulait en venir. Elle comprenait le cheminement de pensée de l’elfe, mais peut-être était-elle trop complexe, et qu’elle devait se rapprocher un peu plus … De la nature des choses. La dragonne continua son explication :

« Peu de choses sont sûres en notre monde, mais ce qu’il y a de sûr, c’est que les quatre éléments nous entourent et sont des composantes constituant la Nature. J’imagine que je ne vous apprendrais pas grand-chose en vous disant que la foudre est provoquée par un subtil mélange d’eau et d’air. Mais pour qui ne vole pas, la difficulté est peut-être de comprendre pourquoi la foudre se créer. »

Plutôt que d’essayer de l’induire par mille mots, Shyven ferma les yeux, et se permis de transmettre des souvenirs, des sensations à Nayrae, lui permettant de comprendre où voulait en venir la dragonne d’Opale. Ces vols que la dragonne avait fait sous des temps pluvieux, ces fois où elles s’étaient rapprochés des nuages où se chargeaient les éclairs, et toutes les réactions élémentaires qui allaient avec : les gouttes d’eaux qui se congelaient, d’autres formant des cristaux emportés par le vent au sein des nuages … Jusqu’à ce que l’air isolant les deux ne tiennent plus qu’à un fil et ne fassent entrer en réaction l’ensemble, créant ce qui les préoccupaient toutes les deux : la foudre.

« Ces éléments nous entourent, Nayrae, tout comme les Déesses. Et tout comme les déesses se sont unies en certains moments de notre histoire, vous pouvez unir ces éléments, en les manipulant via vos créations pour créer quelque chose … D’étonnant. Je suis sûr que votre Intelligence et votre Foi vous souffleront des bonnes idées. »

Shyven ponctua sa petite explication par un sourire. Voilà qui impressionnerait sûrement l’elfe, et lui donnerait peut-être du grain à moudre pour l’avenir. D’autant que la pratique serait sûrement beaucoup plus économe en énergie, pour un bipède qui n’avait pas autant de ressources qu’un dragon.

« Avez-vous un élément préféré ? » Demanda innocemment Shyven. « Est-ce que tout ceci est une forme de prière, un rituel pour vous ? Comment vivez-vous votre culte aux Déesses ? »

La dragonne était curieuse d’en apprendre un peu plus sur ces bipèdes pieux, pour une fois qu’elle en rencontrait un, ce n’était pas tous les jours, alors elle n’allait pas la laisser partir comme ça !

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La bonté des dragons n'avait pas d'égale et n'était surpassée que par celle des déesses. Shyven l'avait écouté avec attention et venait même lui apporter des conseils pour améliorer ses créations. Sa bonté avait finalement un égal, son intelligence.
Nayrae s'était concentré sur comment conserver et contenir les éléments et la foudre c'était posé comme une impasse jusqu'à maintenant. Même le feu, loué soit Naur, était un élément difficile à conserver de par sa nature éphémère et consommatrice. La solution se trouvait justement d'une certaine manière dans l'éphémèrité comme le suggérait la saurienne. Créer dans le moment présent plutôt que de conserver, elle aurait dû y penser plutôt.

-Comprendre comment la foudre se créer...
répéta-t-elle songeuse. Une part d'elle avait de sortir feuille et crayon afin de noter tout ce que disait la dragonne, mais elle ne voulait pas que cela soit perçu comme un manque de respect. Écouter lui suffisait, car de toute manière elle n'oublierait sa première conversation avec non seulement une dragonne, mais également l'une des fondatrices du conseil.

Et elle était loin de ses surprises..Shyven s'arrêta de lui parler et lui fit... ressentir. Nayrae vit des souvenirs qui n'étaient pas les siens, les vols sous temps pluvieux ou orageux. Une sensation unique dans laquelle elle pouvait sentir toute la puissance de la création des 7, ce chaos divin qui trouvait son équilibre naturellement. C'était tout bonnement magnifique ! Pourtant il y avait derrière son émerveillement une sensation étrange... Face à ses souvenirs ne lui appartenant pas elle ressentait comme une certaine... familiarité ? Cela n'avait pourtant aucun sens, jamais elle n'avait aussi haut dans le ciel, dans le cœur d'une tempête. Alors elle préféra ignorer ce sentiment et se concentrer sur ce qu'elle pouvait voir et ressentir, c'était ça qui était véritablement important.

Ce partage terminé, Shyven reprit la parole. Ses paroles la touchèrent, car elle faisait directement écho à sa foi et à ses motivations au sein du conseil. Les éléments, l'extension des déesses, leur volonté et leur amour, sont en permanence autour d'eux. Aujourd'hui elle savait qu'elle ne pouvait forcer personne à vénérer les 7, mais elle pouvait leur apprendre à respecter leurs œuvres et cadeaux et ainsi les défendre... C'était son devoir en tant qu'adoratrice et aussi la manière de faire témoignage de son amour pour les 7. Shyven flattait également son intelligence et (surtout) sa foi, elle ne savait si avec sa peau dorée on pouvait la voir rougir, mais c'était le cas.

Surtout cela gonflait sa détermination et son ambition, une dragonne lui faisait confiance ! Son ouvrage n'était pas prêt de sortir, car elle avait encore bien des facettes que la magie élémentaire et les déesses avaient encore bien des mystères à explorer. Peut-être même devrait elle faire plusieurs volumes, car une part d'elle sentait que ses recherches n'auraient jamais véritablement de fin.
Puis deux questions furent posées. Son élément préféré et comment vivait-elle sa dévotion. Tout un sujet, toute une histoire !

-Le feu, commença-t-elle, c'est l'élément que je chéris le plus, celui qui me vient le plus naturellement. En même temps cela est aussi lié à ma foi, des 7 déesses celle qui a la plus grande place dans mon cœur est la maîtresse inconditionnelle du feu, Naur. Sa voix laissait transparaître sa passion, c'était presque comme si elle parlait de la femme qu'elle aimait. Et d'une certaine manière... il n'y avait après tout personne dans ce monde qu'elle aimait plus que Naur. Je prie tous les jours, plusieurs fois, au réveil, avant de me coucher... Avant d'utiliser ma magie élémentaire et quand je ressens l'envie tout simplement. La prière devenait très vite une addiction quand la foi avait une aussi importante dans une vie. Le plus souvent je prie en silence, chaque déesse séparément, même si Naur a presque toujours les prières les plus longues, un sourire timide et joueur se dessina sur ses lèvres. Mes prières sont souvent longues, quand la situation me le permet et au contact de l'élément associé à la déesse que je prie, ou parfois c'est une simple phrase. Fut une époque où j'appartenais à un groupe avec je partageais ma foi, nous organisions des célébrations, chansons et danses le tout autour d'un grand feu, cela durait parfois des nuits entières ! Et comme à son habitude sa voix ne cachait rien de ses émotions, la nostalgie ! Elle regrettait beaucoup de choses de sa vie avec les Silciens, mais les célébrations garderaient toujours ce sentiment d'allégresse et de bonheur.

- C'est ainsi que je vis et vivais ma foi,
conclua-t-elle. Elle avait le grand tour, si Shyven lui en demandait plus elle pourrait lui parler de comment elle avait commencé à se tourner vers la foi, de ce qu'elle éprouvait lors des prières... mais elle ne voulait pas noyer la saurienne dans adoration qu'elle ne semblait pas partager spécialement.

-Et vous dragonne Shyven ? Que pensez-vous des dieux ? Des déesses ? Accepteriez-vous de me faire part de vos impressions ou point de vue ? L'avis de la plus bénite des races ne pouvait que l'intéresser, même si elle n'aimerait peut-être pas l'avis de la dragonne rose.

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Shyven s’amusa du fait que la jeune elfe soit tant en transe à chaque fait et geste de la dragonne. Si d’autres bipèdes la respectaient, elle n’eut jamais autant quelqu’un à ce point à son écoute, et presque prêt à la louer pour chacun de ses faits et gestes. Comme quoi, malgré le fait que l’indécence ait gagné le continent de Calastin, les belles valeurs restaient présentes chez certaines personnes ! Car après tout, ainsi devait se comporter les bipèdes avec les dragons ! On leur devait politesse et révérence ! En cela, la solaire marqua des points dans l’esprit de la dragonne : comme quoi, il restait encore des bipèdes civilisés en ce monde.

Toujours est-il que la dragonne écouta attentivement sur ce que Nayrae lui fit savoir, et il semblait comme elle le pressentait qu’effectivement, l’elfe donnait une grande importance à sa religion. Pour la dragonne, cela paraissait un peu abscons, mais touchant : elle trouvât amusant que les bipèdes place tant d’espoirs et d’efforts dans un culte où les principaux acteurs étaient décédés. En vérité, elle était même sûre que cela aurait pu intéresser ses deux oncles Nephilith et Ssaadjith : elle savait que la chose divine les fascinait tous deux. Pas pour les mêmes raisons, mais tout ce que racontait là l’elfe pourrait peut-être nourrir leurs réflexions sur la question. Cette bipède semblait avoir toute sa vie rythmée par son culte, et la croyance dans les déesses …

Alors il y avait peut-être quelque chose à construire autour de cela, pour redonner toute la légitimité du peuple draconique, une préoccupation parmi tant d’autres dans l’esprit fourmillant de Shyven. Mais il fallait faire la chose subtilement. Il n’était pas question d’adopter la mentalité du Tyran Blanc par exemple, qui forçait les peuples à se soumettre à sa toute-puissance et avait guerroyer contre les divins.

Bien au-delà des méthodes rustres du Tyran, Nayrae elle, semblait heureuse de vivre cette vie qu’elle menait : elle vénérait Feu et les autres déesses avec plaisir et en groupe, presque dans une fascination collective. Le fait religieux, et la manière dont la jeune elfe le concevait était quelque chose d’instructif pour la dragonne.

Vint alors une question que lui posa l’elfe sur laquelle la dragonne se pencha :

« Et vous dragonne Shyven ? Que pensez-vous des dieux ? Des déesses ? Accepteriez-vous de me faire part de vos impressions ou point de vue ? »

Shyven eut un petit sourire. Une aubaine que l’elfe pose cette question. Aussi, la saurienne gratta de la terre avec sa patte, comme si elle cherchait ses mots, avant de finalement répondre après quelques instants :

« Il est sûr que nous devons bien des choses aux dieux et déesses. Mais si vous êtes très pieuse et une fidèle parmi les fidèles, vous n’êtes peut-être pas sans savoir que dernièrement, les choses ont changé. » Shyven s’arrêta là un instant, adressant un petit regard à Nayrae : était-elle au fait que les Huit avaient choisi de disparaître à tout jamais ? Quoi qu’il en soit, la dragonne précisa sa pensée quelques instants après : « Le fait divin existe toujours, il nous entoure en ce moment-même, et partout où nous allons, puisque tout ce monde dans lequel nous vivons est leur œuvre. Mais à cause de tout ce qui s’est passé en ce monde, leur influence n’est largement plus la même qu’auparavant. Nous autres dragons, nous sommes un pont parmi d’autres de ce fait divin. Notre présence apporte magie et abondance à l’environnement que nous côtoyons. Cela est un état de fait, et ce qui en découle peut varier d’un dragon à un autre. »

Shyven insista bien sur ces derniers points : que Nayrae prenne les paroles qui allaient suivre de la saurienne comme son avis, qui pouvait diverger en fonction d’à quel membre de son espèce l’elfe s’adressait. Sur cette pensée, elle continua :

« De mon point de vue, ma voie est de veiller à l’Équilibre de ce monde, au sens large. Au-delà des desideratas des uns et des autres, et de ce que le fait divin nous apporte, je suis intimement convaincu que l’Ordre et Chaos régissent notre monde, et les dragons sont peut-être ce qui incarne le mieux cette idée. Notre présence apporte magie et abondance à la nature environnante, mais nous sommes totalement capables de semer la mort et destruction, si tel est notre volonté. »

Shyven s’arrêta là un instant, un sourire pointant sur le bout de ses lèvres : son grand-père Verith par exemple, avait parfaitement compris cet état de fait, et se servait de cette force colossale dont il disposait pour accomplir son œuvre et défendre ses convictions. Elle transmis cette exemple par la pensée à la jeune elfe : les mythes et légendes autour de Verith le précedait, mais il était important qu’elle comprenne à quel point son existence ne pouvait se résumer à quelques dires de taverne. Une fois ceci fait, elle reprit :

« Je ne vais cependant pas vous faire l’injure de vous expliquer que parfois, l’excès d’abondance peut créer des situations déplaisantes, tout autant que l’excès de mort et destruction. Si la Nature reprenait totalement ses droits à un endroit, la zone deviendrait vite inhabitable pour des bipèdes comme vous, car il serait difficile de s’établir dans un endroit infesté de bêtes et de flore dangereuses, et si la terre est désespérément sèche et que toute la flore et la faune est calcinée, alors on ne pourrait tout simplement rien faire non plus. Cet exemple concerne les Dragons particulièrement, mais peut se décliner à de nombreuses échelles. L’utilisation de la Trame, une politique trop autoritaire, notre santé … Dès lors, j’assume que ma fonction est de veiller à l’Équilibre de ce monde. Car ceux qui ont régi ce monde ne peuvent plus le faire. Ce qui explique mon intérêt et mon engagement pour le Conseil des Mages, par exemple. »

Shyven baissa la tête : effectivement, le Conseil était une façon de composer ses idées, et surtout de les transmettre à des bipèdes qui pourraient se faire le relai de cette mentalité qui agissait un peu comme son mantra. Cela aussi, elle le transmit à Nayrae : l’Équilibre, Shyven n’en avait pas l’exclusivité. C’était l’affaire de tous. Du reste, elle conclut finalement :

« Ce n’est pas une insulte que de dire que les dragons ont un esprit supérieur, une volonté et une force que vous bipède, n’aurez jamais individuellement. De fait, il arrive que nous créions des choses qui nous dépassent, qui sont inexplicablement puissantes. Cela a tendance à agacer, spécialement ceux qui habitent sur cette île. La chose divine est complexe, et suscite en nous des vocations diverses. Certains, comme mon grand-père, cherche à expliquer ces magies et manifestations supérieures, pour mieux les éloigner et les combattre, mais il n’est pas le seul exemple qui existe. J’ai tendance à penser que les Dragons Liés mettent cette force surnaturelle tant physique que d’esprit, à disposition de bipèdes qui en valent la peine, par exemple. Le résultat pouvant varier selon chaque bipède choisi. »

Shyven finit sa démonstration par dire :

« En résumé, il existe autant de dragons que de façon dont nous pensons les divins. Mais en cela, nous ne sommes pas si différents : je crois ne pas avoir croiser un bipède me donnant une définition semblable de croyances. Et un Mage tel que vous par exemple, à des pouvoirs surnaturels qui les différencient d’autres bipèdes, et les forcent à peser leurs actions, car votre puissance peut être grande, et vos actions peuvent, et doivent engendrer des choses que vous n'anticipez pas. Je suis sûr que vous avez déjà connu cela, au moins une fois dans votre vie, même si cela était totalement anodin. »

Cette dernière phrase sonnait plus comme une invitation pour Nayrae à prendre la parole, et éventuellement à partager une de ses expériences. Ensuite, Shyven fit :

« Mais je parle et je parle, mais peut-être avez-vous envie de vous dégourdir les jambes et les bras. Vous qui adorez Feu, que diriez-vous d’en voir une de ses manifestations les plus fortes d’entre toutes ? »

Shyven ouvrit grand les yeux soudainement avant d’esquisser un large sourire : le Feu d’un dragon. Elle questionna alors Nayrae :

« Qu’imagineriez-vous, pour rendre hommage à votre déesse favorite, si une telle force était à votre disposition ? »

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Nayrae ne cessait pas d'être émerveillé par cette entrevue nocturne. Elle ne méritait pas le temps que lui accordait la dragonne et encore mois les compliments qu'elle lui adressait, mais elle ne pouvait vraissemblement pas passer à côter d'un tel puit de sagesse. Et pourtant Nayrae avait bientôt près d'un demi-millénaire d'existence, tel était la preuve de la bénédiction divine qu'enveloppait la race draconique.

Elle écoutait donc Shyven qui avait accepté le privilège de répondre à ses interrogations sur sa vision des déesses et de l'oeuvre divine. Comment pouvait-on voir les choses lorsque l'on était au sommet ? Chez les bipèdes le pouvoir rendait arrogant et faisait miroiter une illusion de grandeur. Tous s'accrochaient à des titres, empereur, prince noir, reine, intendante... Tant de mot qui sonnait tous de la même manière pour elle : hubris. Elle-même avait été atteinte par ce sentiment orgueilleux, il fallait parfois bien peu de pouvoir ou d'autorité pour avoir l'impression d'être le centre du monde.

« Il est sûr que nous devons bien des choses aux dieux et déesses. Mais si vous êtes très pieuse et une fidèle parmi les fidèles, vous n’êtes peut-être pas sans savoir que dernièrement, les choses ont changé. »

Elle baissa la tête et souria tristement. Elle comprenait bien entendu ce que sous-entendait Shyven. Les déesses étaient mortes, elle le savait très bien. Elle n'avait pas été présente en ce jour fatidique, mais son cœur avait senti que les paroles qu'on lui avait rapportées étaient vraies. Elle avait pleuré ce jour-là et encore aujourd'hui il lui arrivait de pleurer. La disparation des 7 était un crève-cœur, pourtant dans leurs morts elle y voyait la beauté. Celle du sacrifice et de l'amour, mais également de la confiance. Les déesses avaient confié le monde qu'elle avait créé à leurs enfants, une création à une autre. Comment pouvait-elle cesser de prier et de vénérer les déesses après tout ça ? D'une certaine manière, maintenant qu'elles n'étaient plus la sa dévotion était encore plus importante qu'elle ne l'avait été.

Shyven expliqua très bien l'une de ses raisons, l'œuvre divine perdurait toujours, la fin des dieux n'avaient pas signifier la fin de toute chose. Les dragons étaient effectivement des ponts permettant aux bipèdes d'avoir accès à la magie source de vie, d'une certaine manière les sauriens étaient des avatars de la vie.

La dragonne ne s'arrêta cependant pas là. Elle lui parla cette fois de son rôle à elle en tant que dragonne, celui de gardienne de l'équilibre du monde. Cela ne surprenait pas l'elfe, la création du conseil des mages était un exemple parfait de la volonté de Shyven. Cette dernière voyait dans l'ordre et le chaos comme deux énergies nécessaires et primordiales dont les extrêmes devaient être évités à tous pris, car cela n'apportait qu'un monde ou une vie stérile. Elle associait également dans sa philosophie le cercle vertueux de création et de destruction, concept au cœur même de sa foi. Création et destruction étaient à l'image de Cuil et Fern, des jumelles qui ne pouvaient exister l'une sans l'autre, un exemple même d'équilibre. Naur n'était pas en reste, le feu pouvait être source de vie et de chaleur, mais également de destruction. Pendant longtemps elle et les hauts-dignitaires de son culte avaient cherchés de cette manière à placer Naur comme au-dessus de ses sœurs, mais le monothéisme devait être laissé aux adeptes de néant. C'était dans une logique similaire à celle de Shyven que Nayrae avait repris sa dévotion pour les 7, sans pour autant brider son cœur pour l'amour ardent qu'elle éprouvait pour la déesse des flammes.

-Les mots me manquent pour témoigner à quel point je suis d'accord avec vous, bien que son avis et approbation n'avaient que peu d'importance ou d'intérêt pour un dragon. C'est à mes yeux les plus grands enseignement que nous pouvons tirer par l'étude l'œuvre divine. Ça et que toutes choses avaient une fin, bien entendu. Je ne mettais simplement pas les termes de chaos et d'ordre dans ma pensée, je me concentrais avant tout sur la création et la destruction. Mais vos paroles sont inspirantes, il y a tout aussi bien création et destruction dans le chaos et l'ordre et seul l'équilibre nous permet d'évoluer, sans quoi nous serions enfermés dans un éternel recommencement, nous privant alors de la véritable beauté de l'existence... Vos paroles auraient pu faire l'objet d'un de mes prêches avant la dissolution de mon culte. Et il aurait été bien mieux que ses sermons aveugles...

La suite de la pensée de Shyven restait dans la même logique et elle fit un même un lien avec le... lien. Nayrae n'avait cependant rien à répondre sur ce sujet, le lien était pour elle quelque chose de relativement inconnu, elle n'avait jamais vraiment fréquenté de lié. Cependant elle aimait à croire que son existence devait avoir une raison et que si certains étaient liés de force par le destin, d'autres avaient la possibilité de faire le choix. Ainsi que le disait Shyven, certains dragons pouvaient trouver en certains bipèdes une certaine valeur. Pouvait-on y voir un certain de pont alors pour que les dragons puissent plus facilement transmettre leur sagesse ? Encore fois elle ne saurait le dire et son statut ne lui donnait aucune prétention à donner son avis sur la question.

Le comparatif avec les mages vint cependant la surprendre. Il était vrai qu'elle maniait des pouvoirs puissants et elle était loin d'en avoir encore atteint le plein potentiel. Sa spécialité dans la magie élémentaire lui permettait aisément à sa guise de redessiner des paysages et seul sa foi et son profond respect pour l'oeuvre des 7 lui servait de laisse. Elle prit un moment pour réfléchir à un exemple dans sa vie de mage où ses actions avaient des effets bien plus importants qu'elle ne l'aurait imaginé. Bien entendu, elle aurait pu raconter qu'elle s'était noyé dans l'orgueil le jour où ses pouvoirs étaient apparus, que cela avait contribuer à sa fracture avec la réalité et sa famille... Mais elle se voyait mal s'étaler sur sa vie privée, le sujet aujourd'hui touchait davantage à la philosophie et à la théologie qu'à ses drames personnels.

-Une fois... Comment ça t'elle. Lors d'une célébration religieuse, j'ai voulu mettre ma magie à contribution, j'y voyais un hommage à Naur et également un moyen d'épater mes semblables avec mes nouvelles capacités. J'ai alors amplifié le grand feu que nous avions fait et la tradition voulait que nous dansions et chantions jusqu'à que le feu s'éteigne... naturellement. Je n'avais pas prévu que ma magie alors faire durer la flamme aussi longtemps et nous sommes plusieurs à nous être évanouie de fatigue. C'était ridicule d'une certaine manière, mais elle racontait se souvenir avec un sourire nostalgique. Certes, cette période de sa vie avait été comblée d'erreurs dont elle n'avait pas encore conscience à l'époque, mais tout était si simple et elle n'était pas aussi seule qu'aujourd'hui...

Et peut-être que cette petite histoire alimenta cette idée auprès de la dragonne. Car certes dernière lui propose de se dégourdir les membres, Nayrae imaginait bien là ou elle voulait en venir et lorsqu'elle lui proposa de voir la plus puissante manifestation de sa déesse tant adorée, sa pensée se confirma.

-Ce que je ferais ? Je danserais comme je le faisais à l'époque, jusqu'à l'épuisement, tant que votre flamme continuera d'éclairer la nuit... Peut-être m'oserais-je même à quelques prières issues de mon cœur ! L'excitation était impossible à dissimuler. Ce serait un immense honneur pour moi que de vous avoir comme témoin de ma performance et un honneur encore plus grand que d'avoir la pureté de votre flamme comme icône de ma ferveur. Elle s'agenouilla alors, front contre sol, car elle ne voyait nul autre manière pour répondre à la proposition d'une dragonne.

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