12 novembre 1764
Cela avait été long, pour lui, qui savait pourquoi il était dans cette forêt et dans quel état il se trouvait, jour après jour. Cela avait du être encore plus long, pour ceux qui l’attendaient et qui espéraient un retour prompt. Egoïstement, Aldaron avait pris ce temps là pour lui. Si la mortelle blessure que lui avait infligé l’Esprit-Lié réclamait ce repos, c’était surtout la mort de quatre de ses enfants qu’il avait eu besoin de pleurer. S’éloigner du Pouvoir avait été nécessaire, même si cela avait profité à leurs ennemis graärh qui, mécontents, avaient entamé des représailles en attaquant leurs villes. Aldaron frapperait en retour, avec plus de force et de fermeté que ces boucheries hasardeuses. Il ne laisserait pas son peuple se faire massacrer, tout comme il ne les enverrait pas au massacre.
Il avait appris à faire la guerre autrement que par des champs de bataille dévastateurs. Il y avait eu la guerre financière qui avait poussé Sélénia à la famine. Pour les graärh, il combattrait Illidim en duel. Il n’avait aucune peur à ce sujet. Si son heure devait venir, elle viendrait. Mais il ferait ce qui devrait être fait et cela impliquait une seconde absence incertaine. A peine retrouverait-il les siens qu’il devrait leur dire qu’il repartirait. Avec les Couronnes de Cendres proches d’un assaut, il ne pouvait pas se permettre de perdre du temps à éliminer ce second ennemi. Ces graärh revenus du passé seraient déjà bien assez colossaux à combattre.
L’immaculé sortait enfin de la forêt. Il s’était habitué à la protection de ces arbres dont il devrait à présent se passer. Il était guéri et pouvait la quitter, mais une part de lui s’y était habitué. Il chevauchait la licorne qui faisait maintenant partie de lui. Licorok s’était étendue, depuis quelques semaines, tant au nord qu’au sud et à l’est, formant une barrière que les graärh ne pourraient bientôt plus éviter, une barrière infranchissable où les Licornes étaient les gardiennent. Le temps des graärh sur Nyn-Tiamat serait bientôt révolue.
Il y eut de cri, lorsqu’il revint, de surprise, de joie et d’allégresse. Certain s’en allait même à l’appelait l’Immortel. Il de la Triade du marché Noir, il était le dernier. De Morneflamme, il était le survivant. Des siens, il était celui qui restait, à travers les âges et les dangers. Des chimères, du Tyran Blanc et maintenant même un Esprit-Lié ne semblaient pouvoir avoir raison de sa vie. Il était cette immortelle figure parmi les siens galvanisés par son retour. Le peuple Erlië s’agglutinait pour l’acclamer et voir de leur propre yeux qu’il était bel et bien de retour. Il était en vie. S’il avait parlé à son peuple, pour les rassurer, à ses généraux, pour les remercier d’avoir maintenu l’ordre en son absence, il avait aussi noté la présence de cette petite tête qui regardait par la fenêtre de chez lui, probablement maintenu à l’intérieur de la maison par les ordres de Mme Doubtfire.
Retrouver ces petits, c’était une attente pour lui, si bien qu’il ne tarda pas à se défaire de ses obligations, pour le moment, afin de rentrer chez lui. Il ferma la porte et déjà il entendait les petits pas d’Ulmo se précipiter. Il se préparait à la réceptionner incessamment sous peur. Son cœur battait. C’était sa famille qui le faisait battre.