Début Décembre 1764
Belethar observa attentivement l’œuf de dragon en face de lui, ainsi que sa bague. Voilà quelques semaines déjà que le baptistrel était rentré au Domaine, avec cet œuf, et l’occasion unique d’accomplir le serment de sa famille, fardeau que les Espérancieux portaient depuis bien des générations maintenant.
Izeli, le dragon qui était à l’intérieur, était loin d’être un naïf sur l’existence qui l’entourait, et bien au contraire avait des idées bien précises sur la façon dont il voulait voir le monde qui l’encerclait pour la première fois. Ceci faisant qu’il avait conduit le gardien des baptistrels et Judith, sa protectrice, à se creuser les méninges : un dragon lié qui voulait naître libre. Voilà un épineux problème.
Mais ainsi était la vie et Belethar avait investigué plusieurs solutions : de son côté, d’abord, en analysant les possibilités notamment à l’aide des pouvoirs baptistraux, mais il fit rapidement le tour de la question : d’utiliser le chant-nom, il n’en était pas question, et il n’existait point de chants si puissants qu’ils pouvaient modifier la nature d’un lien. Et de toute façon, écarter le lien qui forgeait Izeli de cette façon aurait été profondément contre-nature, et contraire aux enseignements de son ordre, aussi Belethar s’y refusa.
Cela avait pris quelques temps de recherche au baptistrel d’accomplir tout cela, sous l’œil vigilant d’Izeli, et un tantinet impatient parfois. Mais l’Espérancieux n’oubliait pas, pas plus qu’il n’était un laxiste : il devait accomplir son serment, accomplir la destinée de son très vieil ancêtre. Belethar avait glissé de nombreux coups d’œil à Pupillam ces derniers temps : il y avait quelque chose d’hautement symbolique là-dedans. Déjà, se faire confier par une mission par un dragon était un honneur suffisant pour être respecté à la lettre, mais en plus quand il avait appris que celui-ci était lié à sa famille : voilà quelque chose qui l’émulait grandement.
Une fois qu’il eut épuisé toutes les possibilités envisageables de son propre côté, le gardien de l’ordre se creusa les méninges, et un beau soir alors qu’il prenait son bain, il eut l’idée de contacter des dragonniers : eux peut-être, savaient comment le lien fonctionnait en détail, et si l’on pouvait détourner cette règle sans que cela n’engendre de conséquence grave.
Or des dragonniers, il n’en existait plus tellement. Aldaron, et Nathaniel, que Belethar connaissaient tous les deux. Il avait déjà collaboré avec les deux, et s’il n’avait rien de particulier contre les deux hommes, son choix se pencha plus sur le Prince Noir. Bien qu’il fut un homme puissant, l’Espérancieux pensa en son for intérieur que le Roi des Pirates ne s’intéressait pas vraiment à ce genre de choses, compte tenu de ses préoccupations beaucoup plus pragmatiques à faire prospérer sa population.
Ainsi donc, Belethar pris contact avec Nyn-Tiamat, et eut le grand déplaisir d’apprendre que le Prince Noir était porté disparu : on avait aperçu sa dragonne, mais pas le Prince Noir, dont les on-dit qui courraient disait qu’il « avait subi de graves blessures » de son altercation avec Rog. Voilà donc que le baptistrel était bien embêté, la seule corde à son arc qui lui restait manquant à l’appel. S’il fut d’abord tenté d’aller le voir en personne, pour éventuellement l’aider à se remettre, Belethar s’y ravisa à deux fois, sachant à quel point la forêt de Licorock pouvait être inhospitalière pour ceux qui n’étaient pas les bienvenues. Des dires qu’il avait entendu par son presque-frère notamment, il ne tenait pas à risquer sa vie, quand bien même fut-il ici pour sauver la vie d’un de ses anciens amis. Et au fond de lui, Belethar espérait qu’Aldaron allait s’en sortir par lui-même.
« Patience Izeli. Le destin semble nous écarter temporairement de mes amis, mais je garde la foi que le vent finira par tourner », avait-il confié à voix haute à l’œuf, qu’il passait voir très régulièrement au Domaine, pour s’assurer qu’il allait bien et qu’il ne manquât de rien. Après tout, la légende de la bague disait que tant que les dragons étaient proches des Espérancieux, ils ne pouvaient rien leur arriver : Izeli avec lui, Belethar ne craignait en principe pas grand-chose.
La nouvelle finit par tomber quelques jours plus tard, où on apprit que le Prince Noir était bel et bien vivant ! Il semblait en bonne santé, et disait-on « sur le dos d’une licorne », quand il avait réapparu. Une bonne chose pour lui, tout comme Belethar, qui ne perdit pas un instant de plus pour demander audience, et se diriger à toute vitesse vers Nyn-Tiamat grâce à la bénédiction de son esprit-lié.
La population de Cendre-Terre sur le port avait d’ailleurs été surprise de voir Belethar débarquer ainsi, sautant sur un quai et glissant quelque peu sur la glace environnante avant de se redresser : en tout cas, quelques personnes l’avaient interrogé, et ainsi il avait pu parler de sa bénédiction si particulière de l’esprit-lié du pingouin. Bien sûr, Belethar pouvait se déplacer par bateau, surtout avec son fier navire qui était en sa possession, mais situation urgente réclamait moyens urgents.
Ainsi donc, Belethar trouva donc un Prince Noir presque « flambant-neuf », bien qu’encore secoué par ce qu’il avait vu à la forêt de Licorock. Cela dit, ils n’eurent pas tant de temps pour échanger plus que cela : lui-même était pris dans des affaires politiques de la plus haute importance. Ainsi L’Espérancieux lui expliqua tout juste son problème, et le Prince Noir affirma qu’il put faire quelque chose pour lui, et ils en restèrent là. Ce dernier passerait voir le baptistrel une fois que la situation à Nyn-Tiamat serait plus apaisé, et ils pourraient en discuter plus amplement alors.
Belethar reparti avec un sourire, et annonça la bonne nouvelle à Izeli … Bon bien sûr, ce n’était pas une solution pour tout de suite, mais ils touchaient au but !
« Nous touchons au but. Plus que quelques jours qui viendront mettre fin à des siècles d’attente ». Avait alors dit Belethar.
Aujourd’hui, c’était le grand jour. Aldaron avait annoncé sa venue au Domaine Baptistral, et Belethar s’était mis en grande pompe pour l’accueillir : dans ses appartements personnels, où l’œuf trônait sur un doux coussin blanc, sur un petit meuble qui semblait presque prévu à cet effet, se dressant comme un autel à côté de son bureau.
Un Enwr signifia à Belethar que le Prince Noir était arrivé, et le baptistrel intima au disciple d’accompagner le dragonnier jusqu’à lui : Belethar ne tenait pas spécialement à trimballer l’œuf d’Izeli au sein du domaine. Bien qu’il avait une entière confiance en tout le monde ici, il voulait éviter les mouvements de foule, pour ne pas brusquer le jeune dragonnet. Belethar confia d’ailleurs à l’œuf :
« Tu vois, le grand jour est arrivé ! Aujourd’hui, je suis sûr que notre ami trouvera une bonne idée pour te faire sortir d’ici, avec toute ta liberté. Lui, c’est un Lié, à une grande dragonne blanche, qui a éclos il y a peu de temps également. Peut-être pourriez vous bien vous entendre, qui sait ? »
Se disant, Belethar eut un petit pincement au cœur, et d’autres questions : c’est qu’il s’était habitué à la présence de son allié draconique, ces derniers jours. Mais il était dans l’ordre des choses qu’il éclot et retrouve sa liberté, surtout que lui le souhaitait plus que tout.
Cela étant une petite question trotta dans l’esprit du Gardien qu’il évoqua à Izeli :
« Je ne t’ai jamais demandé mais … Quand tu auras éclos, souhaites-tu que je fasse venir d’autres dragons qui pourront t’aider à je ne sais pas … Chasser, voler, ce genre de choses ? J’ignore si ta puissante espèce à besoin d’un enseignement prodigué par des pairs, même basique. Et je ne voudrais pas trop te brusquer. »
Se faisant, Belethar prépara quelques détails, pour la venue du Prince Noir : aménageant quelques peu ses appartements avec deux fauteuils, ainsi que des boissons et de quoi manger, il fit en sorte que tout soit prêt pour l’arrivée du potentiel sauveur de la situation …
Belethar observa attentivement l’œuf de dragon en face de lui, ainsi que sa bague. Voilà quelques semaines déjà que le baptistrel était rentré au Domaine, avec cet œuf, et l’occasion unique d’accomplir le serment de sa famille, fardeau que les Espérancieux portaient depuis bien des générations maintenant.
Izeli, le dragon qui était à l’intérieur, était loin d’être un naïf sur l’existence qui l’entourait, et bien au contraire avait des idées bien précises sur la façon dont il voulait voir le monde qui l’encerclait pour la première fois. Ceci faisant qu’il avait conduit le gardien des baptistrels et Judith, sa protectrice, à se creuser les méninges : un dragon lié qui voulait naître libre. Voilà un épineux problème.
Mais ainsi était la vie et Belethar avait investigué plusieurs solutions : de son côté, d’abord, en analysant les possibilités notamment à l’aide des pouvoirs baptistraux, mais il fit rapidement le tour de la question : d’utiliser le chant-nom, il n’en était pas question, et il n’existait point de chants si puissants qu’ils pouvaient modifier la nature d’un lien. Et de toute façon, écarter le lien qui forgeait Izeli de cette façon aurait été profondément contre-nature, et contraire aux enseignements de son ordre, aussi Belethar s’y refusa.
Cela avait pris quelques temps de recherche au baptistrel d’accomplir tout cela, sous l’œil vigilant d’Izeli, et un tantinet impatient parfois. Mais l’Espérancieux n’oubliait pas, pas plus qu’il n’était un laxiste : il devait accomplir son serment, accomplir la destinée de son très vieil ancêtre. Belethar avait glissé de nombreux coups d’œil à Pupillam ces derniers temps : il y avait quelque chose d’hautement symbolique là-dedans. Déjà, se faire confier par une mission par un dragon était un honneur suffisant pour être respecté à la lettre, mais en plus quand il avait appris que celui-ci était lié à sa famille : voilà quelque chose qui l’émulait grandement.
Une fois qu’il eut épuisé toutes les possibilités envisageables de son propre côté, le gardien de l’ordre se creusa les méninges, et un beau soir alors qu’il prenait son bain, il eut l’idée de contacter des dragonniers : eux peut-être, savaient comment le lien fonctionnait en détail, et si l’on pouvait détourner cette règle sans que cela n’engendre de conséquence grave.
Or des dragonniers, il n’en existait plus tellement. Aldaron, et Nathaniel, que Belethar connaissaient tous les deux. Il avait déjà collaboré avec les deux, et s’il n’avait rien de particulier contre les deux hommes, son choix se pencha plus sur le Prince Noir. Bien qu’il fut un homme puissant, l’Espérancieux pensa en son for intérieur que le Roi des Pirates ne s’intéressait pas vraiment à ce genre de choses, compte tenu de ses préoccupations beaucoup plus pragmatiques à faire prospérer sa population.
Ainsi donc, Belethar pris contact avec Nyn-Tiamat, et eut le grand déplaisir d’apprendre que le Prince Noir était porté disparu : on avait aperçu sa dragonne, mais pas le Prince Noir, dont les on-dit qui courraient disait qu’il « avait subi de graves blessures » de son altercation avec Rog. Voilà donc que le baptistrel était bien embêté, la seule corde à son arc qui lui restait manquant à l’appel. S’il fut d’abord tenté d’aller le voir en personne, pour éventuellement l’aider à se remettre, Belethar s’y ravisa à deux fois, sachant à quel point la forêt de Licorock pouvait être inhospitalière pour ceux qui n’étaient pas les bienvenues. Des dires qu’il avait entendu par son presque-frère notamment, il ne tenait pas à risquer sa vie, quand bien même fut-il ici pour sauver la vie d’un de ses anciens amis. Et au fond de lui, Belethar espérait qu’Aldaron allait s’en sortir par lui-même.
« Patience Izeli. Le destin semble nous écarter temporairement de mes amis, mais je garde la foi que le vent finira par tourner », avait-il confié à voix haute à l’œuf, qu’il passait voir très régulièrement au Domaine, pour s’assurer qu’il allait bien et qu’il ne manquât de rien. Après tout, la légende de la bague disait que tant que les dragons étaient proches des Espérancieux, ils ne pouvaient rien leur arriver : Izeli avec lui, Belethar ne craignait en principe pas grand-chose.
La nouvelle finit par tomber quelques jours plus tard, où on apprit que le Prince Noir était bel et bien vivant ! Il semblait en bonne santé, et disait-on « sur le dos d’une licorne », quand il avait réapparu. Une bonne chose pour lui, tout comme Belethar, qui ne perdit pas un instant de plus pour demander audience, et se diriger à toute vitesse vers Nyn-Tiamat grâce à la bénédiction de son esprit-lié.
La population de Cendre-Terre sur le port avait d’ailleurs été surprise de voir Belethar débarquer ainsi, sautant sur un quai et glissant quelque peu sur la glace environnante avant de se redresser : en tout cas, quelques personnes l’avaient interrogé, et ainsi il avait pu parler de sa bénédiction si particulière de l’esprit-lié du pingouin. Bien sûr, Belethar pouvait se déplacer par bateau, surtout avec son fier navire qui était en sa possession, mais situation urgente réclamait moyens urgents.
Ainsi donc, Belethar trouva donc un Prince Noir presque « flambant-neuf », bien qu’encore secoué par ce qu’il avait vu à la forêt de Licorock. Cela dit, ils n’eurent pas tant de temps pour échanger plus que cela : lui-même était pris dans des affaires politiques de la plus haute importance. Ainsi L’Espérancieux lui expliqua tout juste son problème, et le Prince Noir affirma qu’il put faire quelque chose pour lui, et ils en restèrent là. Ce dernier passerait voir le baptistrel une fois que la situation à Nyn-Tiamat serait plus apaisé, et ils pourraient en discuter plus amplement alors.
Belethar reparti avec un sourire, et annonça la bonne nouvelle à Izeli … Bon bien sûr, ce n’était pas une solution pour tout de suite, mais ils touchaient au but !
« Nous touchons au but. Plus que quelques jours qui viendront mettre fin à des siècles d’attente ». Avait alors dit Belethar.
Aujourd’hui, c’était le grand jour. Aldaron avait annoncé sa venue au Domaine Baptistral, et Belethar s’était mis en grande pompe pour l’accueillir : dans ses appartements personnels, où l’œuf trônait sur un doux coussin blanc, sur un petit meuble qui semblait presque prévu à cet effet, se dressant comme un autel à côté de son bureau.
Un Enwr signifia à Belethar que le Prince Noir était arrivé, et le baptistrel intima au disciple d’accompagner le dragonnier jusqu’à lui : Belethar ne tenait pas spécialement à trimballer l’œuf d’Izeli au sein du domaine. Bien qu’il avait une entière confiance en tout le monde ici, il voulait éviter les mouvements de foule, pour ne pas brusquer le jeune dragonnet. Belethar confia d’ailleurs à l’œuf :
« Tu vois, le grand jour est arrivé ! Aujourd’hui, je suis sûr que notre ami trouvera une bonne idée pour te faire sortir d’ici, avec toute ta liberté. Lui, c’est un Lié, à une grande dragonne blanche, qui a éclos il y a peu de temps également. Peut-être pourriez vous bien vous entendre, qui sait ? »
Se disant, Belethar eut un petit pincement au cœur, et d’autres questions : c’est qu’il s’était habitué à la présence de son allié draconique, ces derniers jours. Mais il était dans l’ordre des choses qu’il éclot et retrouve sa liberté, surtout que lui le souhaitait plus que tout.
Cela étant une petite question trotta dans l’esprit du Gardien qu’il évoqua à Izeli :
« Je ne t’ai jamais demandé mais … Quand tu auras éclos, souhaites-tu que je fasse venir d’autres dragons qui pourront t’aider à je ne sais pas … Chasser, voler, ce genre de choses ? J’ignore si ta puissante espèce à besoin d’un enseignement prodigué par des pairs, même basique. Et je ne voudrais pas trop te brusquer. »
Se faisant, Belethar prépara quelques détails, pour la venue du Prince Noir : aménageant quelques peu ses appartements avec deux fauteuils, ainsi que des boissons et de quoi manger, il fit en sorte que tout soit prêt pour l’arrivée du potentiel sauveur de la situation …