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Début Novembre 1764

Encore une fois, Léon était persuadé d’être une évidence, le petit point de lumière au milieu de la pièce sombre, la cicatrice au milieu du visage. N’était il pas debout, là où nul objet ne venait le masquer ? Ne chantonnait-il pas, ouvertement ? Il aurait fallu être aveugle et sourd pour ne pas le percevoir.
Encore une fois, déformation professionnelle oblige, il n’était pas si évident que cela à trouver. Certes, peu d’objets venaient troubler la vue, mais le soleil d’une nuit tombante projetait dans la pièce des ombres immenses et profondes dans lesquelles il s’était naturellement blotti. Certes, il chantonnait, mais si bas, sur un rythme si proche de celui qui l’entourait, qu’il aurait tout aussi bien pu être un chant venu de l’extérieur. Au Domaine, il n’était pas anormal d’entendre des chants, à toute heure, à toute humeur.

Par chance, cette fois-ci, il n’avait pas spécifiquement besoin de se faire remarquer. Belethar lui avait donné rendez-vous plus ou moins vers cette heure-ci et, dans toute son humanité, le ChanteVide avait eu le bon goût d’avoir une ouïe assez fine pour repérer les chants-noms. Un vrai drame pour les parties de cache-cache, un vrai drame pour un espion. De ce fait, il était de fort bon aloi que les baptistrels soient apolitiques, sans quoi Léon n’aurait sans doute jamais pu revoir son ami d’enfance. Sur un plan plus personnel, se faire accepter en ses lieux malgré ses mensonges et ses meurtres était un véritable soulagement. Oh, il n’avait pas de mauvaises intentions envers le Domaine. Mais n’importe qui pouvait, découvrant son ancien ami sous un aspect plus écarlate, estimer ne pas vouloir le revoir.
Belethar l’avait accepté pour ce qu’il était. Bien des doutes et des craintes étaient parties à ce moment-là. Léon était venu jusqu’à Néthéril spécifiquement pour lui. Même si, maintenant qu’il était présent… Il n’allait pas cracher sur quelques virées dans les bibliothèques, ou quelques représentations d’Enwrs et Cawrs. Il restait un amateur d’art. Trouver un endroit qui cristallisait ainsi une de ses passions avait pour mérite de faire brûler cette dernière. Il avait bu les poèmes avec la même soif inétanchable d’un nouveau-né, avait dévoré les romans en louant sa condition qui lui évitait de se voir couper dans un chapitre par le besoin de dormir. Il avait trouvé dans les baptistrels des interlocuteurs pertinents avec qui échanger sur ces sujets, et les baptistrels avaient assurément trouvé en lui l’interlocuteur le plus enjoué qui soit. Pour sa défense, ses virées en Nyn-Tiamat se paraient plus souvent du sceau du devoir et de la nécessité que des plaisirs de l’esprit. En Calastin, son seul véritable interlocuteur sur le sujet était Ilhan. Il avait bien tenté de parler d’arts à Claudius, mais il était bien évident que cet ami-là favorisait l’art des baffes et des champs de bataille.

À y penser, n’était-ce pas cocasse, au fond, que sa place en ces lieux posât moins de problèmes qu’au sein d’autres humains ? Chaque fois qu’il re-pensait à Délimar, son petit coeur mort se serrait un peu. La cité gardait jalousement en elle les Almaréens, dévots de Néant… Ainsi que les Glacernois, qui appréciaient sans doute assez les vampires pour s’en faire de charmants tapis de bain. La fortune avait permis à Léon de pouvoir contacter Naal du Néant, dans une correspondance pleine de ferveur. Mais se mêler à ceux qui partageaient cet aspect de sa vie lui était encore interdit. Il ne pouvait que chercher autour de lui les quelques adeptes de Néant qui parcouraient le reste de l’archipel.
Belethar en était devenu un. Une histoire rocambolesque, mais bienvenue. Une raison de plus pour Léon de se sentir bien en ces lieux. Il prenait ce que ce monde avait à lui offrir. Le résultat était là, un vampire au coeur relativement léger, prompt à meumeuner un petit air encore récent dans sa mémoire.
Le temps se faisait long. Belethar avait dû avoir quelque contretemps. Rien d’inquiétant, assurément, sans quoi la nouvelle aurait traversé le Domaine. Soit ! Le temps à perdre n’était jamais du temps perdu. Les bras ballants, Léon commença à errer dans la chambre de son ami, sachant que ce dernier l’aurait sans doute convié à faire comme chez lui. Le regard perçant et avisé de son esprit-Lié orienta son attention sur quelques objets un peu brillants. La lèvre mordue, Léon se les appropria. Belethar savait ses tendances, et Léon l’avait convié à lui demander de rendre toutes ses affaires en fin de ses jours. Il ne pouvait s’empêcher de dérober, mais rien ne le forçait à ne pas rendre les affaires. Il vérifiait juste que ce ne soit rien d’intime ou de révélateur. Pas question de mettre son ami mal à l’aise.

Mais à l’origine, il ne venait pas pour trouver du Brillant. Pour passer le temps, rien ne valait un bon bouquin, si possible poussiéreux, si possible en vers. Tandis qu’il considérait ses choix, une forme pour le moins surprenante apparut à Léon. Son chantonnement s’éteignit, ses mouvements se stoppèrent.
Par l’Unique, Belethar lui avait caché ceci ! Ou peut-être n’avait-il juste pas eu le temps de lui en parler. Léon n’était là que depuis peu de temps, ils avaient eu beaucoup à se dire, et Belethar était un homme aux fonctions prenantes…N’est-ce pas ? Ce ne pouvait être un manque de confiance de son camarade. De toutes façons, Léon pouvait difficilement faire quoi que ce soit en ces lieux où le meurtre était immédiatement su. A moins d’embarquer cet oeuf au loin avant. Mais autant directement faire une croix sur toute amitié avec Belethar et le Domaine. Léon n’était pas prêt à cela, mais Belethar, le savait-il ?

Lentement, silencieusement, Léon s’approcha de cet oeuf. Quelque chose s’était pincé, en lui. Non, il n’allait rien en faire, mais pourtant, pourtant… Lui qui rêvait de laisser sa trace dans l’histoire, lui qui rêvait d’une reconnaissance en Almara, savait que ç’aurait été là le geste qui lui aurait apporté ce qu’il désirait. Un geste cohérent avec ses idéaux… Incohérent son respect de l’amitié. Pourquoi fallait-il que tout soit toujours complexe, que tout soit toujours dilemme ? L’oeuf n’aurait-il pas pu être blotti dans un coin de Keet-Tiamat, en attente d’un pillard ? N’aurait-il pas pu se trouver en Calastin, où Léon aurait pu le tuer et s’en sortir ? Qu’allait penser Naal de lui, s’il apprenait qu’il avait croisé cet oeuf sans rien y faire ? Peut-être comprendrait-il, si Léon appelait aux sentiments. Peut-être le trouverait-il égoïste. Léon se trouvait égoïste. Et couard. De quoi lui laisser un goût âpre dans la bouche.
Un bref froncement de sourcils assombrit son expression. Quid de Belethar ? Le Cawr avait également Naal en amitié, avait sans doute entendu également le vieil homme maudir le Lien. Pourtant, il avait amené cet oeuf ici, où nul ne viendrait l’empêcher d’éclore. Ses devoirs de baptistrel passaient donc avant ses devoirs envers l’humanité. Soit. Voilà qui était un peu décevant. Devant ce pauvre objet immobile, Léon se surprit à ressentir, de nouveau, comme un élan de solitude. Il n’y aurait personne pour le comprendre, ni Belethar ni Naal. Ni lui-même.

Un lourd soupir lui échappa, déjà déçu et dépité. Sa main se dirigea vers la poche de son manteau qui, normalement, contenait ses dagues. Elles n’y étaient pas. “Idiot”, songea Léon à sa propre encontre, en se souvenant que toutes les armes étaient défaites de leur propriétaire à l’entrée du Domaine. Non pas qu’il allait en faire quoi que ce soit, mais… Il aurait juste aimé voir quel sentiment cela pouvait procurer, de tenir une lame si proche d’un dragon.
Mais qui avait besoin d’armes ? Les vampires n’étaient-ils pas des armes en eux-mêmes ? En tout cas, il était souvent dit que la force vampirique était incroyable. Cependant, Léon ne l’avait jamais vraiment expérimenté par lui-même. La force, ce n’était pas son truc. Aurait-il eu suffisamment de force pour briser un oeuf, s’il l’avait voulu ? La seule référence qu’il avait était l’histoire selon laquelle l’oeuf de Nahui avait dû s’ouvrir avec une lame d’énergie. Celui-ci avait l’air plus fragile… À quel point ? Pouvait-on se sentir tout aussi puissant rien qu’en le tenant dans ses mains sans le briser ?
Afin de tester ce point, Léon fit ce qu’il avait de plus délicat à faire : toquer à la coquille de l’oeuf, d’abord délicatement puis, petit à petit, plus fort.

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Izeli regarde le bipède qui lui fait face avec dédain, n'y prêtant attention que de part la menace qu'il semble représenter malgré son status de bipède. Tournant doucement autour, il laissa un grondement raisonner dans sa gorge juste avant de se jeter sur le bipède. Le combat qui suivis ne se termina cependant pas, laissant place à un paysage défilant à toute vitesse en dessous de lui. Un sentiment de calme remplaça l'adrénaline de l'action précédente, alors que le vent lui gonfle les ailes et lui caresse le visage. Puis le paysage se brouilla de nouveau, laissant place à une autre scène de vie... Puis une autre, et une autre... Des rêves qu'il a déjà fait de nombreuses fois, et parfois une nouvelle expérience à ajouter à ses rêves, venant d'au delà de son propre esprit pour s'y encrer sans demander permission.

Comme à son habitude, Izeli est endormis, à l’abri dans sa prison protectrice dont la coquille bleuté repose sur un large coussin blanc. Un coussin sur lequel le dragonnet à naitre passe le plus claire de son temps à dormir, à rêver... À attendre. Pour ceux qui auraient déjà vu un œuf de dragon, il peut sembler clair que la coquille de cet œuf est ancienne, lissée par le temps et les éléments malgré la robustesse de sa structure. Pourtant, alors que Léon commence à tapoter de plus en plus fort sur cette surface, il est tout de suite évident que l’œuf est toujours terriblement solide.

Il faut un certain temps pour que la petite créature à l’intérieur de la prison bleutée ne se réveille, se demandant d’où viens ce bruit répétitif. Est-il de nouveau déplacé quelque part ? Non, il n'y a pas de mouvement et il semble toujours être au même endroit... Quelqu'un serait il juste... En train de taper à sa coquille ? Intrigué, il laisse son esprit s'étendre hors de sa coquille, rencontrant celui d'un inconnu tout contre son œuf. Il se demanda un bref instant comment réagir, se demandant ce qu'il peut bien se passer pour qu'on tente de le réveiller de pareille façon. Tout semble calme, ce n'est donc probablement pas une urgence dans le domaine... Qui est donc cet étrange individu qui le tire de son sommeil de façon aussi insistante ?

Ne détéctant aucune urgeance, Izeli décida d'entrer en contacte avec cet inconnu de façon douce, laissant leurs esprits se mêler pour pouvoir communiquer.

" Je vous proposerais bien de rentrer, mais j'ai peur d'être déjà quelque peut à l'étroit même en étant seul, je n'ai guerre de place pour un invité... Mais je suis sur que Belethar ou Judith seront ravis de vous offrir le thé et de quoi manger quand ils reviendront. Il est rare que les deux soient absents en même temps pour longtemps. "

Bien qu'elle appartienne à un dragon encore à naitre, encore minuscule, la voix qui raisonne dans la tête de Léon est grave et profonde, comme si elle appartenait à un dragon ancien caché quelque part et non à la relativement chétive créature qui se cache sous cette coquille usée par le temps. Après avoir simulé le son d'un soupire et d'un bâillement dans l'esprit de l'inconnu, il reprends doucement sur le même ton.

" Mais si vous frappez ainsi à ma porte... Je suppose que vous avez quelque questions à me poser ? Surement quelqu'un invité ou vivant au domaine ne s'amuserait pas à cogner ma prison sans raison ? Qu'est ce qui vous amène aujourd'hui auprès de moi ? "

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Léon eut un mouvement vif vers l’arrière. Une esquive stupide face à une surprise qui n’avait rien de physique. Pour sa défense, la peur soudaine d’être pris la main dans le sac était venue avant toute réflexion. De même, la sensation d’un esprit contre le sien n’était pas habituelle… Pour ne pas dire qu’il s’agissait là de sa première fois. Un contact si fort, si prenant, qu’il y avait de quoi en rester bouche bée, stupéfait - pétrifié.

Il lui fallut un moment pour reprendre ses esprits et réarranger ses pensées dans un sens convenable. Tout de même, il n’allait pas se laisser impressionner par un être encore dans un oeuf, sans doute incapable de bouger la moindre griffe ! Naal se serait sans doute moqué de lui. Léon réalisa qu’il avait peut-être posé trop peu de questions au sujet des dragons. Encore une erreur qui faisait honte à son cerveau. S’il lui avait été donné n’importe quelle mission relative à la neutralisation d’un bipède, il aurait pris le soin de se renseigner sur ses habitudes, ses faiblesses et ses forces, tous ces éléments qui vous permettent de dresser un tableau assez précis pour vous permettre de deviner où et comment frapper. Pourquoi n’avait-il pas posé les mêmes questions vis-à-vis des dragons ?
Brièvement, il revit en sa mémoire ses discussions avec Naal, les pamphlets à l’égard des dragons. Leurs épistoles n’avaient guère eu de buts si pragmatiques, à l’époque. Pour Léon, il avait surtout été question de se faire reconnaître et accepter malgré sa nature, pas d’élaborer un plan dracocide. Aldaron, éventuellement, aurait pu le renseigner sur les dragons. Mais les Liés étaient télépathes. Léon n’avait aucune envie de découvrir à quel point s’étendait cette télépathie, si à travers un “comment vont les ailes de Nahui ?” il risquait une mise à mort immédiate. Oh, son cher patron lui aurait sans doute accordé une seconde chance… Leur amitié avait néanmoins assez de valeur pour que l’espion se refusât à la compromettre.
Restait Claudius. Son patron officiel, assassin de Cynoë. Peut-être aurait-il pu lui en toucher deux mots sans que cela ne levât ni soupçon ni inimitié. Une idée à creuser… A un autre moment.

Pour l’instant, le vampire était là, avec l’air bête, le regard rond, devant un pauvre oeuf qui venait de parler dans sa tête, dont il ne savait rien. Ses muscles se détendirent de nouveau, constatant que la voix mentale était bien le seul affront que la petite chose pouvait faire. Les rouages de son cerveau s’activèrent de nouveau. Il n’avait jamais entendu parler d’attaque qui passa par l’esprit, ignorait si les dragons pouvaient lire les pensées ou seulement les transmettre. Dans le doute, mieux valait parler à voix haute. Mieux valait également se montrer un minimum courtois, pour peu que cette notion ait de la valeur dans un regard draconique, et se donner un maximum de chances s’il voulait… S’il voulait… Bonne question, tiens. Que voulait-il ? Il avait juste voulu tâter de la coquille, trouver la sensation qui s’en détachait. S’il avait été déçu, ladite coquille se trouvant trop solide pour apporter quelque satisfaction, il se trouvait désormais pris au dépourvu devant une opportunité inattendue. Pouvait-il extirper des informations de cette chose ? Des informations utiles à Aldaron, Claudius, Naal… Ou lui-même ?

“- Je ne m’attendais pas à vous déranger.” Cela pouvait tenir lieu d’excuse, mais il aurait été malvenu de marmonner un “navré” au sein du Domaine. Les maîtres lui en auraient voulu. ”Je suis un invité de Belethar au Domaine.” L’envie de demander un nom au dragon lui chatouillait la langue. Ç’aurait été prendre le risque de subir la même question en retour. Léon n’avait pas envie de donner quelque chose d’aussi précieux pour une information qu’il pouvait récupérer d’une tierce personne. Mais cela rendait la conversation encore un poil plus subtile, mêlant les difficultés d’une parole prononcée au Domaine avec celles d’un interlocuteur ni nommé ni genré. Les mots de Léon étaient donc lents, pesés, mais il essayait tout de même d’y instiller son habituelle pointe de jovialité. ”Il ne m’a pas encore parlé de vous. Je ne savais pas même que l’être présent dans cet oeuf était déjà… Apte à communiquer. Mes connaissances en matière de dragons sont limités. Vous… Êtes en attente d’un Lien, n’est-ce pas ?”

En prononçant ces mots, une pensée glaça son propre sang. Se pouvait-il que cet oeuf vienne de s’éveiller, pour lui ? Par l’Unique, ç’aurait été d’une horreur innommable. Sans doute aurait-il pu et dû alors le tuer, mais Léon savait ce qu’il advenait des âmes qui perdaient leur Lié. Il aurait dû prestement retrouver Aldaron… S’il en avait eu alors la force. Léon se savait prompt à tenir face à une torture venue de l’extérieur - mais une torture de son propre esprit ? Il ignorait totalement ce qu’il aurait pu faire face à cela.
Il secoua la tête, comme pour chasser de si vilaines pensées. Ils n’étaient pas Liés. C’était impossible, parce que cela aurait impliqué une place dans l’Histoire qui ne lui avait jamais été donnée si facilement. Sa place, s’il venait à en avoir une un jour, il se l’arracherait, depuis les ombres, car c’était là ce qui se devait d’être. En tout cas, c’était ce dont il se convainquait pour l’heure, afin de laisser à ses pensées le temps de se focaliser sur le présent. ”J’imagine que votre situation doit être bien ennuyeuse. Belethar et Judith n’ont-ils jamais essayé de percer votre oeuf pour au moins partager leur thé avec vous ?”

La question se faisait passer pour anodine. Dans une situation normale, elle impliquait la plus vague question du “que faites-vous de vos journées, que font Belethar et Judith à vos côtés”. Dans le cas présent, elle s’étendait plus encore. Léon voulait s’essayer à un exercice de communication phatique en apparence, pour tirer de leur entrevue le plus d’informations possibles. Izeli en laisserait assurément passer, qu’il s’en rendisse compte ou non. Qui prendrait soin de cacher ce qui à ses propres yeux était une évidence ?

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Une sensation étrange se fait sentir dans l'esprit de cet inconnu. Un trouble qu'il n'a jamais sentis venir de son "entourage". De la peur ? De la confusion ? Difficile à dire précisément sans avoir connu cette personne un peu plus longtemps... Le jeune dragon s'amusa de ces étranges sentiments qu'il ressentait chez son interlocuteur, se disant que ce dernier paniquais juste à l'idée de parler à un dragon. Il avait entendu mainte fois que ce genre d'évènement restais très rare pour la grande majorité des bipèdes. Pour lui même aussi hélas... Sentir l'esprit d'un membre de sa propre race n'est que trop rare... Quand il pourra se mouvoir de ses propre moyens, il faudra qu'il travail à remédier cela.

”J’imagine que votre situation doit être bien ennuyeuse. Belethar et Judith n’ont-ils jamais essayé de percer votre oeuf pour au moins partager leur thé avec vous ?”

Le jeune dragon laisse raisonner ce qui ressemble fortement à un rire dans l'esprit de son interlocuteur. Non pas que cela soit son rire naturel, mais il a largement eu le temps de comprendre ce que peut signifier ce son et comment le reproduire dans ses pensées. Même s'il trouve qu'un partage brute des émotions reste plus efficace, il sait que le rire est aussi un moyen détourné de détendre ou de dévier une conversation ou de réconforter quelqu'un, entre autre choses.

" Oui, je suis apte à la communication. Probablement depuis très, très longtemps avant votre naissance, cher invité. Et, en effet, je suis dans l'attente d'un lien... Et à ce sujet, j'ai une bien mauvaise nouvelle pour vous, j'en ai peur. "

Après tout, tellement de monde était jadis venu toucher sa coquille dans l'espoir d'être l'élu, il était tout à fait raisonnable de penser que cet être aussi avait touché sa coquille dans l'espoir de devenir lié. Quelque secondes s'écoulent avant qu'il ne reprène, cherchant comment annoncer une mauvaise nouvelle dont il n'a lui même que faire sans paraitre rude.

" Un être a en effet été élu par cette magie étrange et puissante, mais... Vous n'êtes nullement l'être élu par cette magie. Et si cela avait été le cas, vous auriez été tenu loin de moi, car je n'ai nullement l'intention de laisser mon destin entre les griffes de celui qui a décidé que je serait lié à un autre être. Mon âme m'appartiens, de même que ma destinée. Je naitrais libre, ou je ne naitrais pas. Ou en l’occurrence, je n'éclorais pas... Même si je doit attendre un autre millénaire dans cette prison protectrice. Quand à une tasse de thé... "

Le jeune et pourtant très ancien dragon réfléchis une seconde à cette question étrange avant de répondre, comme si c'était l'évidence même.

" Pourquoi percer un trou dans ma coquille ? Il est bien plus simple pour eux de profiter de leur breuvage puis de m'en partager les souvenirs, non? Peut être pourrez vous également me partager quelque souvenirs si vous le souhaitez ? La vie est bien calme ici et je ne voyage... Pas beaucoup. De nouvelle découvertes sont toujours les bienvenues. Dans tout les cas, vous pouvez respirer un bon coup et calmer vos pensées. Je n'ai pas mal pris le fait d'être ainsi réveillé, et je n'ai aucunement l'intention de vous sauter dessus. "

Espérant détendre un peu l'atmosphère avec ses blagues et étrangetés, le dragonnet est bien loin de se douter des véritables raisons du malaise qu'il ressent chez son interlocuteur, ou même de la nature véritable de ses pensées.

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La peur que Léon avait tenté de chasser, en abordant de plus légers sujets, revint de plus belle à l’annonce d’une terrible nouvelle. Si son palpitant avait palpiter, ç’aurait été le moment précis pour lui de cesser. L’image d’un Lien, malédiction bien pire que le vampirisme, se dessinait lentement devant ses yeux, dans toutes ses nuances de sang et de larmes. Il n’était pas prêt pour tout cela. Ce n’était pas un simple manque d’envie, c’était une terreur profonde, qui venait saisir ses instincts les plus primitifs pour leur ordonner de fuir. Jadis, Léon s’était regardé droit dans les yeux, dans un miroir, et s’était promis qu’un jour il mènerait son propre combat. Un combat avec de l’impact, un combat pour donner de la contenance à un nom encore creux. Ce n’était pas ce combat-là qu’il voulait. Être Lié ne lui aurait rien apporté, ni satisfaction, ni celle douce sensation du devoir accompli. Une part de lui, tout au fond, savait qu’il n’avait pas même encore l’esprit apte à survivre à tout cela.

La nouvelle vint enfin. Si stupidement bonne que la peur de Léon se mua abruptement en colère. Fieffé dragon ! Encore dans l’oeuf, déjà prompt à la mesquinerie. Faire monter ainsi la tension, pour le plaisir de voir chez l’autre des émotions qui lui étaient douloureuses… Cela avait un nom et ce nom était “sadisme”. Un argument qui jouait énormément en la défaveur de celui qui avait été haï avait même d’être connu. Dans un geste qui ne visait qu’à soulager ses nerfs, Léon leva brutalement la main, comme pour enfin détruire l’oeuf d’un coup bien mérité, avant de stopper son geste avec une sorte de soupir grommelé. Non, il ne pouvait pas faire cela, pas ici, pas maintenant. Dans un autre lieu, à un autre moment, ce dragonnet aurait sans doute eu le mérite de trouver où se cachaient les motivations meurtrières du vampire. Pour l’heure, il trouvait son salut, car la suite de ses explications était exactement ce que Léon avait besoin d’entendre. Les mots calmaient sa colère - ou du moins, la contenaient dans un écrin d’intérêt.

Contre-coup de l’impulsion, les muscles de Léon lui suggérèrent une pause physique pour compenser l’effort psychologique. Le vampire accepta, s’asseyant à même le sol, non-loin de l’oeuf, dévisageant ce dernier comme si la coquille avait soudainement pu lui susurrer quoi faire. Faute de mieux, il singea la plus anodine et évidente des conversations.

“- J’ignore quels souvenirs pourraient vous intéresser.” Étaient-ils seulement des éléments qu’il pouvait présenter à un dragon sans que ce soit une faiblesse présentée à l’ennemi ? Un bon souvenir lui indiquerait ce qu’il chérissait. Un mauvais souvenir lui indiquerait ses peurs. Un souvenir victorieux indiquerait ses forces. Si Izeli n’était, pour l’heure, pas un de ces vaillants pro-Liens, il n’en demeurait pas moins un membre d’une espèce qui, à tout moment, pouvait décider que les bipèdes se devaient de disparaitre dans les flammes. “...Et je reste persuadé que nul souvenir ne vaut les réelles sensations. Je pourrais boire un thé à l’instant et essayer de vous en communiquer les saveurs dans le même temps, mais ce que vous parviendriez à saisir… Serait-ce une part de mon esprit que vous observeriez, ou un fragment d’attention porté à la vôtre ? Dans tous les cas… Je doute que l’esprit soit suffisant. Il me semble que ce que mon corps perçoit, mon esprit n’en caresse jamais que la surface. Je pourrais boire un même sang plusieurs fois et à chaque fois en découvrir un nouvel aspect. Les réactions de votre corps aux souvenirs qui se créent, les émotions qui naissent des sensations… Toutes ces choses-là me sont bien trop belles pour que je puisse prétendre à vous les retranscrire à leur juste valeur.”

Est-ce qu’il s’était laissé emporter ? Totalement. Révérer le Néant n’était pas que haine envers les dragons. Il y avait beaucoup d’adoration et il était bien simple pour Léon de se rappeler également cette adulation. Paradoxalement, il se trouvait à encourager cet oeuf à éclore sans même l’avoir réalisé. Si la question lui avait été posée, peut-être aurait-il prétendu que cela n’avait pour but que de mettre fin au statu quo et pouvoir avancer vers le destin qui l’attendait.
Ç’aurait été un mensonge. À cet instant, Léon n’avait le coeur qu’aux sermons de Naal. L’amour qui en découlait aveuglait les autres considérations, temporairement.

Quand cet instant pris fin, Léon réalisa ce qu’il venait de dire et, comme honteux, fit prendre une tournure plus légère à la discussion, sa voix retrouvant un rythme plus enjouée là où elle s’était précédemment faite lente et songeuse :

“- …Cela vous viendra sans doute en temps et en heure ! Et fort heureusement, sans moi. N’y voyez pas d’offense, mais je tiens à ma liberté également. J’ai vécu assez longtemps pour connaître les ravages du Lien, et je ne puis que vous le déconseiller. Ceci dit, puisqu’en attendant nous sommes tous deux en recherche de moyen de tordre le cour du temps… Allons donc pour des souvenirs, si parcellaires puissent-ils être !”

Pouvait-il jouer une carte dans l’esprit soi-disant ancien de ce dragon, éventuellement impacter ses futures décisions, sans pour autant se découvrir ? Pouvait-il l’attacher à sa liberté, le convaincre de l’importance des bipèdes, et garder ses secrets ?

“- S’il vous fallait une autorisation pour scruter mon esprit, considérez que vous l’avez, au moins pour un instant. Voyons… Tant qu’à être ici, je pourrais essayer de vous montrer quelques choses que Belethar ne vous a jamais montrées.”

Pourtant, sans même y réfléchir, ses premières pensées partirent vers un recueil de poésie. Un gros recueil de poésie. Spécial en ceci que c’était Ilhan qui lui avait offert. Techniquement, Belethar n’avait jamais lu ce recueil. Dans les faits, Belethar avait dû, lui aussi, ressentir ces émotions fabuleuses lors d’une belle et plaisante lecture. Le moment mirifique où les mots coulent avec le naturel d’un fleuve, tandis qu’un nouveau monde se forme par-delà les yeux du lecteur.

“- Oh, euh… Poésie. J’imagine que cela, vous avez dû le connaître. Belethar vous a sans doute parlé de l’écriture… Mais voyons donc, qu’a-t-il pu ne pas dire ?” Se grattant le menton, sans qu’aucun son de barbe n’en vint, Léon passa en revue sa propre mémoire. Les images défilèrent à toute allure, floues. Le vampire chercha volontairement à esquiver ceux qui lui étaient les plus précieux, ne laissant entrevoir que quelques bouts de feuillages ici et là, quelques repères sombres, quelques odeurs âcres ou métalliques. Les images s’écoulèrent, les principales masquées de pudeur, les souvenirs plus triviaux masqués par une réflexion croissante, celle selon laquelle l’oeuf ne serait intéressé par de telles banalités. Finalement, il demanda : “Si vous êtes plus vieux que moi, sans doute devez-vous avoir déjà entr’aperçu quelques très anciennes mémoires. Il est probablement inutile que je cherche à vous parler d’histoire… Mais de ce que vous savez des bipèdes et de leurs arts, y en a-t-il un qui vous plait particulièrement ? Je peux également vous montrer une chasse de jeune vampire, mais je crains que le premier dragon venu vous apporte un souvenir similaire - et que nos techniques soient bien trop différentes pour que vous ayez quoi que ce soit à apprendre de moi…”

D’autant plus que, désormais, il ne chassait plus vraiment. En bon vampire poli et bien éduqué, il demandait gentiment le consentement avant de mordre qui que ce soit, cherchant à ce que chacun y trouvât, d’une façon ou d’une autre, son compte…
Dans tous les cas, il attendait un premier geste de l’oeuf. Information contre information. Cela ressemblait à une déformation professionnelle mais, dans les faits, c’était également un moyen pour Léon d’apaiser les émotions qui, actuellement, l’empêchait de s’ouvrir à celui qui ne représentait encore, malgré ses efforts, qu’un danger en devenir.

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