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descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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Début Juin

Les étoiles s'éparpillaient sur un ciel d'encre et de cobalt. Les accès au ciel du Domaine laissaient également entrevoir les nuages, lesquels rappelaient la saison des pluies passées. Juin avançait, de son pas serein, sur les terres de l'été.

Valmys avait un souvenir très distinct de sa dernière venue en ces lieux. Il se souvenait très bien du sentiment grisant d'être chez lui, en un lieu où sa place était évidente dans sa logique et son aura de sécurité. Ç'avait été le sentiment le plus naturel du monde. Ne pas le ressentir à nouveau était comme le symptôme d'une maladie. Il lui semblait que quelque barrière invisible l'empêchait de se croire hors de danger, ou qu'il aille.
Par les bons soins des autres membres de l'Ordre, l'elfe aux oreilles arrondies avait retrouvé quelques forces. Son endurance d'antan ne lui était pas revenue, loin s'en fallait. Mais il pouvait à nouveau marcher sans finir par s'effondrer. Il considérait cela comme un progrès.

Sa silhouette malhabile, légèrement vacillante, s'était vêtue d'une étoffe brune grossièrement cousue. Il travaillait encore à se faire des habits, mais se refusait à trop découvrir sa peau à nouveau. Son visage et ses mains étaient à découverts. Sous ses bottes, la végétation et les pierres crissaient ou roulaient, dans le calme relatif de ces heures tardives. Au loin, il y avait le son du lac. Par là-bas, le chant d'oiseaux qu'il n'aurait su identifier. Des insectes, aussi. Il y avait une forte odeur de pierre humide, une forte aura de bipèdes se reposant, ou étudiant. Il y avait une musique, à la flûte, aussi précieuse que le diamant d'eau au creux des dunes.

L'Enwr aurait aimé se mêler aux bipèdes des lieux. Il aurait aimé les prendre dans ses bras et essayer de les faire sourire. Il n'osait. Jamais il n'aurait osé ne serait-ce que penser le mot adéquat. Pourtant, il était présent en lui, aussi sincère que les autres mots qui le formaient. Il avait peur. Peur de tout, mais surtout des bipèdes. Les eaux du lac ne le mettaient pas à l'aise. La présence d'autres êtres l'inquiétait. Il ne parvenait plus à distinguer en eux autre chose qu'une probable agression. Ce n'était pas raisonnable, et il le savait. Il ne le contrôlait pas.

La situation était inconfortable et, surtout exécrable à vivre. Il avait fantasmé son retour en ces lieux. Au final, il ne pouvait le savourer. Il s'était imaginé pouvoir enfin souffler, il n'y arrivait pas totalement. Grande était sa culpabilité lorsque face aux siens, il ne pouvait leur offrir les vibrations emplies d'affection qu'ils méritaient tous.

Dans une tentative de se soigner, Valmys était sorti. Moins de monde, moins d'agitation, il espérait pouvoir s'habituer plus aisément, ré-apprendre à relacher sa vigilance. Le choix de l'heure aurait fait fuir d'autres êtres, ceux qui n'avaient jamais connu le Domaine de nuit. Valmys l'avait connu. Il comptait sur ce souvenir pour l'aider à avancer.
Comme n'importe qui aurait pu le prévoir, cela n'avait pas fonctionné. Comme n'importe qui aurait pu l'imaginer, il s'était retourné sur des bruits à l'existence parfois questionnable, sur des ombres qui parfois ne tenaient qu'aux défauts de sa vision. Il avait essayé de s'assoir un peu, respirer, et se laisser bercer par la musique de cette flûte.

Elle lui avait fait un effet étrange. Elle ne l'avait pas rassuré totalement, elle n'avait pas écarté les ombres, n'avait pas effacé les souvenirs et la fatigue. Mais on aurait dit qu'elle avait suggéré comme une idée, qu'elle avait réussi à s'insinuer comme le lézard dans une fissure du mur d'angoisses du petit elfe. Ce petit lézard s'était ensuite glissé jusque dans son coeur, pour lui murmurer une hypothèse face à laquelle il n'y avait plus de défense. La musique était amicale. Celui qui en jouait ne pouvait être terrifiant. Lui, il saurait le soigner. Il fallait le rejoindre.

Ainsi Valmys avait repris sa route, se laissant guider par la musique. Sa concentration lui donnait l'air un peu hagard, son réflexe de se retourner tous les trois pas lui donnait l'air stupide. Il respirait fort, commençant à fatiguer de son escapade. Il se présenta devantle joueur de flûte, essoufflé, avec la mine perdue du malade qui s'amène à son sauveur.
Il ne pouvait s'empêcher de placer un ultime espoir dans ce concept déraisonné, cette logique fiévreuse. Il ne pouvait empêcher son coeur de s'inquiéter à nouveau devant cet être bipède, elfique, et dôté des meilleurs outils pour le blesser à nouveau. Face à ces volontés contraires, Valmys amassa son courage. L'être pâle face à lui, il croyait le connaître, pour avoir hérité de son prénom par un chanteciel. Il aurait pu l'aborder, directement. Mais qui aurait-il pu prétendre être s'il avait brisé la musique d'un Cawr ?
Lentement, Valmys s'assit, reposant ses membres encore fragiles, s'empêchant par le fait de pouvoir s'enfuir trop vite si l'envie lui prenait. La peur le hantait, encore. Il se la reprochait. Elle ne devait pas être le meilleur des présents à offrir à Amaury, pour ce qui devait être, si ce n'était leur première rencontre, la première où ils pourraient parler ainsi seuls à seuls. Mais puisqu'il n'y avait que lui pour l'aider, et que Valmys savait que partir signifiait tuer l'instant, il ne pouvait protéger le maître de son chant-nom.

Il attendit, sagement, que le chantebrise fasse attention à lui.


Dernière édition par Valmys Neolenn le Lun 30 Oct 2017 - 17:29, édité 1 fois

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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De nombreuses vies avaient été emportées. La vie avait continué. C'était ainsi, comme un cycle éternel, inaliénable, inaltérable. Si difficile à accepter, si complexe de ne pas se révolter. Une fois de plus conflits, guerres, chaos avaient déchiré les êtres vivants, comme si aucune marque du passé, aucune blessure ne pouvait servir de leçon. Pendant si longtemps son cœur avait saigné et pourtant, il n'avait cessé de se démener. Ce n'était pas que la fatigue n'avait aucune emprise sur son corps ou son esprit, ni qu'il cherchait vraiment à fuir toutes ces émotions, toutes ces vibrations qui allaient jusqu'à lui, mais rien qu'un tout autre sentiment, beaucoup plus simple, beaucoup plus pur.
Il voulait aller au-delà de la douleur, de la souffrance ou de la peur pour trouver encore une fois ce qu'il y avait de plus beau en ce monde. Tel un soldat aguerri sur un champ de bataille, il ne redoutait pas ce qu'il avait à traverser, même si une part de lui se demandait toujours s'il y avait bien une victoire possible, si ce n'était pas là qu'une simple trêve de plus. Finalement, il ne cherchait pas de réponse à cette question, l'espoir lui suffisait, telle une force immuable, l'une des rares qu'on ne pouvait lui enlever.

C'était bien cela qui lui avait permis de tenir pendant des décennies, des siècles même et il s'y accrochait à chaque instant où il se sentait au bord d'un gouffre, ébranlé, tourmenté. Il ne pouvait se permettre de céder à ses désespoirs d'antan, pas depuis qu'il était devenu Cawr, pas depuis que leur monde s'était volatilisé et qu'ils avaient dû en construire un nouveau. Il savait qu'il devait aider les siens, guider ses frères pour qu'eux aussi sachent répandre leur savoir, leur amour et leur générosité dans ces nouvelles terres.

Son esprit changeant regrettait quelque peu les si nombreux voyages qui avaient parsemé sa vie. Ici, sur ces terres, il ne connaissait presque rien. Un grand inconnu qu'il pourrait parcourir pendant le reste de sa vie sans jamais être capable d'en connaître le moindre recoin. Pour l'instant cependant, il le remettait chaque jour à plus tard.
Quand les jours étaient ponctués par de nombreuses tâches, la nuit savait lui apporter un réconfort tout particulier. Il aimait se perdre dans ce domaine de paix et de pureté, marchant lentement, silencieux, à l'écoute de ce qu'avaient à lui dire tous les êtres, toutes les choses qu'il trouvait sur son chemin. Puis, quand il se sentait las, il laissait alors filer sa propre voix par l'intermédiaire des notes qui s'échappaient de sa flûte. Lui aussi racontait à ceux qui voulaient bien l'écouter tout ce qu'il pouvait avoir à dire, tout ce qu'il avait envie de communiquer.

Cette nuit-là, au gré des sons, il avait senti une âme perdue à guider. Un frère qu'il fallait aider. Quels étaient ses tourments, quelles étaient ses peines ? Il ne voulait pas analyser ses vibrations, seulement les laisser aller en lui, influer sur la musique que la brise emportait. Il nouait là un premier dialogue, de ceux qu'il préférait. Tout autant que son cœur savait ressentir ce qu'il y avait au fond des autres, il leur envoyait ce qu'il voulait transmettre à sa façon, pour parler directement à leur cœur.

Ses propres angoisses se peignaient en lui avec plus de force que des cris. Il ressentait les ombres rampantes de ses souvenirs, prêtes à dévorer les âmes trop faibles pour les supporter. La détresse, la peur, le traumatisme, c'étaient autant de choses qu'il avait lui-même vécues et qu'il pensait pouvoir comprendre sans jamais tout en savoir. Si quand elles étaient au fond de lui, il cherchait tantôt à les enfouir, tantôt à les accepter, quand elles venaient des autres, il ne voulait que les aider à se sentir mieux.
Sa recherche d'un secours ne pouvait qu'attiser sa bienveillance et elle se transmettait pour le moment par le biais de sa mélodie. Calme et patient, il ne voulait pas l'achever tout de suite, il préférait rester encore sur ce mode de conversation, même si l'autre n'y voyait bien souvent qu'un seul sens. Peut-être pourrait-il parvenir à l'apaiser davantage, à atténuer cette méfiance autant que cette peur qu'il y avait en lui, comme un étau qui l'emprisonnait. Il pouvait lui faire confiance, il pouvait se livrer à lui, son frère.
Au bout d'un moment assez bref, car il ne voulait pas non plus abuser de sa patience, il termina son impromptu pour laisser le silence les nimber tranquillement, tandis qu'il posait l'instrument sur ses genoux et qu'il le gratifiait d'un doux sourire. D'un geste lent, il avança une main vers lui, comme pour l'accueillir.

« Dis-moi ce que ton cœur veut exprimer, je serai là si tu veux enfin guérir… je serai avec toi. » Murmura-t-il, comme le souffle d'une brise apaisante.

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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La musique s'effaça, déposant sur les épaules de Valmys comme un châle, comme un souvenir de sa présence. Quelque bribe de mémoire dans ses émotions, pour l'épauler dans sa quête. Ce n'était pas de trop. Assis sur le sol, l'Enwr avait ramené ses genoux contre son torse, et passé ses bras autour. Désormais, ses poings serraient le tissu de sa tunique, au niveau de ses épaules, comme s'il avait froid. C'était un peu le cas.
Il avait froid de la solitude que son corps et son âme lui imposaient, blessés, craignant encore et toujours les prédateurs. Il avait froid de ses peurs, froid de son reflet dans le miroir, qu'il ne supportait plus. Il avait froid de ne plus se reconnaître. Sa seule source de chaleur, l'idée diffuse que ce n'était qu'un moment à passer, était encore lointaine. Il peinait à la ressentir. Amaury devait savoir comment faire. Amaury était un Cawr, et les Cawrs étaient sages, chacun à leur manière. Amaury connaissait sans doute l'esprit, humain ou elfique, mieux que lui. Il connaissait sans doute l'Enwr mieux que lui-même ne se connaissait. Si ce n'était le cas... Il avait son chant-nom.

Mais Valmys était-il prêt à autoriser le maître à y regarder, alors que lui-même n'osait ? La dernière image supportable qu'il avait à sa mémoire était celle d'hun humain proprement décapité, juste à côté de lui. Le reste nouait ses entrailles, menait son coeur à sa gorge. Son chant-nom offrait tout le détail de ces scènes. Valmys eut comme un frisson, un tremblement. Non, il ne pouvait offrir cela.
Alors quoi, parler ? C'étaient des mots qui ne se disaient pas. Ceux qui n'étaient pas concernés pouvaient le faire, aisément. Lui ne le pouvait pas, ne le pouvait plus. Parce que le mot, prononcé, n'était rien à côté de ce qu'il en avait été réellement, et qu'il craignait qu'ainsi atténuer la réalité ne soit que mensonge. Il ne pouvait pas en parler, parce qu'il n'était pas même sûr de ce qu'il allait dire, pas même sûr de sa culpabilité, ni de sa légitimité à s'en plaindre ainsi. Enfin, il doutait de sa propre capacité à aller au bout de son discours, sachant déjà les émotions qui l'envahissaient lorsqu'il n'en parlait pas.
Poutant...

Pourtant il était venu ici. Pourtant la musique l'avait guidé. Il avait suivi la proposition de venir et de guérir, et savait intrinsèquement que c'était ce qu'il devait faire, la, tout de suite, et en ce lieu. La terre sous lui était comme un contact nécessaire. Même son coeur, tout au fond de lui, savait qu'il devait s'exprimer, que c'était le moment, s'il voulait aller vers la chaleur, la petite lueur tout au loin. Il le devait, il le fallait, il ne savait pas comment, il...

Il éclata en sanglots. De gros sanglots, qui manquèrent de l'étouffer sous leur violence. Nul cri, seul le bruit de sa respiration qui tentait de passer à travers une gorge beaucoup trop nouée, et quelques hoquètements. C'était bien la première chose qu'il avait à dire que tout cela, et il ne l'avait dite à personne, si ce n'était à la nuit et à la solitude. Si elles étaient des compagnies agréables, si elles avaient su le protéger sur le coup, elles n'étaient pas des congénères, n'étaient pas des soeurs de l'Ordre. La culpabilité qu'avait pu ressentir Valmys à ainsi souffrir devant un Cawr s'évapora peu à peu, alors qu'il déversait sa détresse le long de ses joues, le long des bras qui cachaient désormais son visage. Ces larmes-là avaient un autre goût. Comme si elles n'allaient pas revenir dans ses yeux.

Valmys resta un moment qui lui parut une éternité, à crever un abcès plus gros que lui, à tremper ses manches et sa peau. C'est qu'il avait été un véritable barrage, avait retenu jusqu'alors un lac entier de larmes, croyant qu'il n'était nécessaire de les offrir à qui que ce soit, qu'elles partiraient seules. Ce n'était pas le cas. Il le savait, désormais, sa guérison avait la peau et le cheveu pâle, ainsi qu'une flûte. Lorsque sa gorge fut à nouveau utilisable, libérée du lien qui l'avait nouée, Valmys fit sgne à Amaury de s'approcher. Il allait parler. Mais il ne pouvait pas le faire trop fort, il le savait. Sinon sa voix allait se briser.

"- J'étais parti vers Keet-Tiamat, sur les traces de l'Enwr Deocyne. Des pirates ont accosté le bâteau sur lequel j'étais." Il frotta ses yeux, reniffla. Il parlait sans regarder le Cawr. "Mes souvenirs me hantent. C'est comme s'ils m'empêchaient de vivre. Comme s'ils se mettaient toujours entre les êtres que j'aime et moi. Cawr Amaury, j'aime les êtres qui vivent ici, autour de nous. J'aimerais pouvoir les couvrir de cadeaux et d'affection, et j'aimerais savoir recevoir comme il se doit tous ce qu'ils m'offrent. Je... Je n'y parviens pas. Je n'y parviens plus."

Il eut à nouveau une pause, cachant ses yeux. L'émotion était remontée d'un coup. Il parvint à la juguler, en prenant son temps, en respirant longuement, lentement.

"- C'est plus fort que moi. J'ai peur des bipèdes. J'ai peur que l'on me blesse à nouveau. J'ai peur de mon propre reflet. Je sais qu'ici je ne risque rien, mais cela ne suffit pas."

À nouveau, le petit Enwr essuya l'eau qui troublait son regard. Un fantôme de sensation commençait à l'angoisser, au niveau de son cou, au niveau de ses poignets. Sans la présence du Cawr, ces sensations auraient été bien plus fortes. Il joignit les mains devant lui, comme une imploration, toujours sans regarder celui qui devait le sauver.

"- Que dois-je faire ? Que puis-je faire ?"

Y avait-il seulement quelque chose à faire ? Il l'espérait, il croyait. La musique d'Amaury le lui avait suggéré, et son instinct de survie s'y accrochait, follement. Il ne voulait présager de son avenir s'il vivait là ce que le reste de sa vie lui réservait.

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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Effleurer simplement les ombres qui planaient autour du jeune Enwr suffisait à nouer son ventre. Il pouvait ressentir avec la même force toute sa douleur, toute l’ampleur de ses tourments, pas seulement parce qu’il était maître baptistrel, mais aussi par son propre vécu. Ce genre d’horreur, Amaury ne l’aurait souhaité à personne, pas même à ses pires bourreaux, pas même à ceux qu’il ne pouvait pardonner, qu’il ne pouvait revoir. Le monde était parfois si cruel… Pourquoi cet être à la fois si fragile et si merveilleux avait-il dû passer par de si terribles chemins ? Était-ce une nécessité de la vie ? L’ampleur du mal avait quelque chose de terrifiant dans le fait qu’il n’y trouvait aucune explication. L’adversité permettait d’avancer, de se renforcer, mais à quoi servait-elle quand elle devenait destructrice, quand elle réduisait tant de choses à néant ? Cela formait au moins de bons arguments pour lutter contre ce fléau jour après jour…

Le bruit des sanglots avait serré davantage son cœur. C’était une bonne chose pourtant, pleurer était nécessaire, pleurer permettait de se libérer partiellement de ses angoisses, de ses chagrins. Tout naturellement, il aurait bien voulu le prendre dans ses bras et lui apporter davantage de réconfort, mais il sentait bien que ce n’était pas une bonne solution. Valmys n’allait pas accepter ce genre de contact, cela ne ferait qu’empirer les choses et c’était à l’opposé de ce qu’il voulait faire.
S’il pouvait au moins pleurer ici, lorsqu’il était là, alors c’était au moins un peu mieux que de subir totalement. Les tourments de son jeune frère lui rappelaient les siens, quelques siècles plus tôt. Le temps n’y avait pas fait grand-chose, ils arrivaient toujours à mettre son cœur à vif, seulement il lui avait permis de mieux supporter cette douleur, ce vide irremplaçable. Cela faisait assez longtemps qu’il se sentait capable d’avancer, d’être heureux, de vivre et de respirer, même si cette blessure-là ne guérirait jamais.
De cette expérience, il savait qu’il ne pouvait lui faire aucune promesse, qu’il n’allait pas lui mentir, qu’il n’allait pas lui dire que tout irait mieux, que tout s’arrangerait, que tout serait oublié. Doucement, sa voix s’était élevée comme un souffle du vent, contant simplement une berceuse qui accompagnait ses sanglots sans le pousser à s’arrêter.

Le temps passa, mais le temps importait peu. La patience d’Amaury était grande, à l’instar des elfes, il ne se sentait jamais pressé, courait rarement. Comprenant qu’il voulait qu’il se rapproche, le Chantebrise se leva pour faire quelques pas et s’assit à côté de lui, sans toutefois imposer entre eux une distance qui lui paraîtrait inconfortable. Un doux sourire s’étirait sur ses lèvres, amical, bienveillant.
Il l’écouta alors en silence évoquer par bribes ce qu’il avait pu vivre, ce qu’il ressentait, ce qu’il voulait faire et ce qu’il ne parvenait pas à faire. Sa tête était pleine de questions, de chagrins, d’ignorance. Comment savoir dans quelle direction avancer ou que faire pour se reconstruire ? La réponse n’était pas universelle et il avait fallu bien des décennies à Amaury pour en trouver les premières pistes. Les premières années avaient été une torture indicible, il espérait qu’il ne lui faille pas autant de temps.

« On ne se libère pas aisément de son vécu. C’est comme une empreinte qui vient en soi, qui fait désormais partie de soi. Il n’y a pas de remède miracle et un sort de soin n’y fera rien, mais cela ne veut pas dire que l’on ne peut pas lutter. Ton cœur est pur, c’est celui d’un baptistrel et rien ne saura le corrompre. Tant que tu gardes cette volonté d’avancer, de t’en sortir, alors ça ne pourra qu’aller mieux. Tu dois simplement prendre ton temps, faire un pas après l’autre, ne pas essayer de sauter une marche. Tes frères et sœurs aujourd’hui prennent soin de toi, ils t’aident à traverser ces épreuves, car c’est un chemin bien difficile à emprunter lorsqu’on est seul. Tu ne dois pas t’en vouloir de ne pas leur rendre la pareille. Ce n’est pas encore le bon moment, mais il viendra, lorsque comme moi, tu auras réussi à surmonter la douleur et la peine. Toi aussi alors, tu en seras capable. »

Il soupira, doucement. Son regard vide ne pouvait l’atteindre, mais l’expression de son visage semblait lumineuse, rendue pure par sa blancheur immaculée.

« Je connais tes maux, ce ne sont pas exactement les mêmes, bien sûr, tout comme la voie que j’ai empruntée ne sera probablement pas la tienne, mais je peux au moins te partager ce que j’en sais, dans l’espoir de t’aider, ne serait-ce qu’un peu. Sans avoir à lire jusqu’au plus profond de ton cœur, je peux sentir que tu as cet espoir, cette envie de pas te laisser abattre, de t’en sortir et c’est là le meilleur chemin que tu puisses prendre. Tu dois t’y accrocher, te laisser guider par cette intuition, car elle seule saura te donner les vraies réponses pour qu’un jour, tu saches à nouveau sourire et rire, le cœur léger. Cette lumière que tu cherches, elle est en toi, elle le sera toujours. »

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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Valmys ramena ses mains sur ses épaules, poings serrés, comme pour se protéger d'un grand froid. Il avait peur, il avait froid, il avait l'impression qu'un poids trop lourd pour lui pesait sur ses épaules et sur son âme, invisible et intangible. Inconsciemment, il eut souhaité qu'Amaury lui affirma le contraire de ce qui était juste et raisonnable, qu'il connut un remède miracle et secret pour immédiatement ramener son coeur à son état originel, clair et pur comme une première neige. L'annonce avait beau être vraie, elle était dure, et le poids à porter ne s'en trouvait pas amoindri. Son chant-nom accueillait désormais des notes dont il ne pouvait se défaire, qu'il savait sale et disgrâcieuse. Sa mémoire avait des images et des sensations qu'il aurait préféré ne jamais connaître.

Amaury parvint néanmoins à regagner son intérêt, l'éloigner du tourbillon d'ombres dans lequel il menaçait de s'engouffrer, tremblant. Son coeur, pur ? Il n'y croyait pas. Mais les Cawrs ne mentaient pas. Y avait-il donc quelque chose à sauver chez lui ? Valait-il un peu plus que ce que ses souvenirs lui disaient ? L'Enwr revoyait les insultes, les injures, et outrages, et cette expression si paradoxale: "coeur pur". C'était impensable, et pourtant, Valmys avait envie d'y croire. L'image était jolie, enfin flatteuse, et son aura de vérité la rendait plus brillante encore. Brièvement, il chercha en lui ce que pouvait être cette pureté baptistrale. Il la trouva. Un fin sourire, qui demanda bien des efforts à ses zygomatiques affaiblis par le manque d'exercice, passa sur ses lèvres. Les pirates n'avaient pas atteints certains éléments clés de son identité, au coeur de lui-même. Ces éléments le reliaient à son serment, mais aussi au monde qui l'entourait. Ils n'avaient fait naître le mensonge et le chaos en lui, et sa seule envie de devenir à nouveau le camarade jovial qu'il avait pu être, le guérisseur en vadrouille, le déceleur de connaissances, suffisait à l'accrocher à cette idée. Certaines choses ne changeraient jamais, son passé ne pouvait être effacé, et toujours il devrait se méfier des bâteaux. Mais il y avait quelque chose à sauver chez lui, une bribe de futur.

Son regard, embué, chercha celui du Cawr. Il pouvait tout juste commencer à regarder à nouveau autour de lui, et y être sensible. Il se hâtait, de crainte que les images de pirates ne reviennent, encore et toujours, à l'assaut, comme il le préssentait dans le combat qui se menait en lui. Les yeux particuliers d'Amaury parvinrent néanmoins à lui faire penser à autre chose, l'espace d'un instant. L'Enwr dut s'en détacher de force, craignant que le maître le sente et s'en trouvât gêné. Il y avait quelque chose de captivant dans ce regard vide, et une beauté toute particulière sur laquelle Valmys aurait été incapable de mettre des mots. Une partie de sa fascination était sans doute liée à leurs tracas actuelle. L'autre était plus intemporelle.

Les mots du chantebrise s'évanouirent dans le silence, laissant Valmys seul avec ses pensées et émotions. L'Enwr s'en trouva tout mal à l'aise. Le maître avait réveillé quelque chose en lui, quelque chose de vivant qui dansait en lui comme un feu follet. Il n'en avait plus l'habitude, ne savait qu'en faire. Ce n'était plus "normal". Ce qui était normal, c'était la peine, et les pirates. Pourtant, il sentait que ce n'était pas ce qui était à faire. Il avait déjà envie de remercier Amaury pour ce feu follet, et s'excuser, encore, comme pour s'excuser d'exister, dans cet état. Ce n'était pas ce qu'il devait faire non plus. Cela ne ferait sans doute qu'agacer celui qui lui avait bien dit que c'était normal que, pour le moment, il quérisse de l'aide. Une idée, une piste, naquit en son esprit. Il avait besoin d'entendre encore la voix du Cawr pâle.

"- Cawr Amaury... Si cela ne vous ennuie pas, me direz-vous un jour quelle fut votre voie ? Quelles furent vos peines ?" Sa voix était encore murmurée, fragile et hésitante. Il savait qu'il n'allait pas faire du bien au Cawr en ravivant ces souvenirs. Cependant, ledit Cawr avait l'air de s'en être détaché suffisamment. Et lui, il en avait besoin. "Me direz-vous s'il demeure une aide que je puis vous apporter ?" La question était tout autant importante. Le Cawr le sentirait-il ? Valmys avait besoin d'un échange, d'apporter pour pouvoir pleinement recevoir. Il avait besoin d'un maître, d'une personne à laquelle se référer, pour laquelle agir. Il avait besoin d'une raison pour entendre la voix du Cawr, et prendre soin de lui, pour mieux ingérer la lumière qu'il émettait.

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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Les mots étaient apparus naturellement, avaient sonnés sans qu’il ne réfléchisse trop dans sa bouche. Des paroles qu’il trouvait lourdes, chargées d’une vérité difficile, mais pourtant bien réelle et impossible à fuir. Une appréhension s’était alors installée en lui, celle qu’il n’ait pas su trouver les bons mots, ni le guider de la bonne manière. Cependant, il n’avait pu désirer lui dire ce qu’il voulait entendre – des mensonges – son serment l’en empêchait, mais surtout son âme. Au fond de son cœur, il savait pertinemment que cela aurait été une mauvaise manière d’avancer, qu’il n’aurait fait que porter un voile sur ses yeux, sur son être, le pousser à continuer d’abandonner.
Le Chantebrise espérait lui insuffler la force qui avait été la sienne depuis le jour où il avait choisi de se relever de ses malheurs. L’aide apportée par les autres ne pouvait pas faire de mal, mais il savait bien que la plupart des progrès ne pourraient venir que de lui.

Doucement, il avait senti comme une éclaircie se lever au fil de ses paroles. Cette simple sensation avait suffi à le rendre heureux. Rien ne lui semblait plus important que d’aider les autres et il y mettait donc toute son énergie. Pourtant, il ne voulait pas non plus parler pendant des heures entières et sa voix finit par s’éteindre, les laissant chacun dans leurs propres réflexions. Amaury essayait de ne pas écouter trop de vibrations. Comme toujours, il n’aimait pas profiter de cette magie ni de son serment pour s’introduire dans la vie des autres. Il préférait se laisser porter par les notes du monde et y réagir lorsqu’il fallait les adoucir ou les rendre plus belles.
Là, tout proche de l’un de ses frères, il ne pouvait qu’aimer sa mélodie. Les notes discordantes d’un drame indicible ne pouvaient en entacher sa beauté, les valeurs que portait leur ordre étaient trop pures pour cela, inaltérables pour ceux qui étaient destinés à suivre cette voie.

Un simple murmure vint briser leur silence et le ramener au monde réel. Encore faible et blessé, il n’osait pas. Retrouver une certaine assurance serait une épreuve difficile tant il le sentait discret, alors qu’il cherchait à prendre le moins de place possible dans leur univers pourtant si vaste.

« Bien sûr. Seulement je ne te parlerai pas maintenant de mes peines, je ne veux pas alourdir tes tourments avec les miens. »

Amaury ignorait si un jour ses souvenirs deviendraient inoffensifs. Pour les maîtres baptistrels, il fallait bien apprendre à vivre avec les souffrances des uns et des autres puisqu’elles arrivaient jusqu’à eux avec une drôle d’évidence. Ce n’était pas toujours facile, mais cela faisait bien longtemps qu’il n’essayait plus d’effacer cette part de lui. Tel était son Chant-Nom, il ne pouvait l’altérer.

« Ma voie est un peu triste sans doute, elle fut celle de la fuite, de la solitude et de l’exil. Perdu au milieu de l’immensité du désert, ce fut la rigueur de cette vie qui me sauva. J’espère de tout cœur que ton chemin sera plus doux, que le calme et la paix du Domaine te suffiront pour guérir. Parfois pourtant, il est bien plus simple d’avancer lorsque vivre n’est plus qu’une question de survie. »

L’elfe se tut un bref instant pour offrir encore une fois un sourire bienveillant à son interlocuteur.

« Là-bas, j’ai enfin su trouver la sérénité, cette paix reposante qui permit à mon âme agitée de trouver un peu de repos. Le temps m’a ensuite appris à prendre davantage de recul face à mon vécu. Pour ce qu’il reste de mes peines, j’ignore s’il existe vraiment une aide. Il faudrait quelque chose qui puisse combler ce vide qu’il y a dans mon cœur... »

Ces mots à peine avoués, il aurait préféré les faire disparaître. Même un Enwr devait pouvoir sentir ce froid éternel qui demeurait en lui, cette blessure qui ne cicatriserait jamais tout à fait. Ces pensées savaient réveiller quelque chose d’atroce en lui, mais il s’était assez éloigné de son propre enfer pour ne plus y être enchaîné.

« Ne t’en fais pas pour moi, ta simple présence suffit à m’apporter quelques rayons de soleil, quels que soient tes démons. Dis-moi plutôt ce que tu chéris et quelles sont les mélodies qui plaisent à ton cœur. J’aimerais en jouer au moins une pour toi. »

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Valmys avait un instant cru qu'Amaury se tairait totalement, gardant pour lui l'intégralité de ses peines comme un tabou obscur, et la voie de sa salvation comme un précieux secret. Soit. L'Enwr en aurait été un peu chagriné, mais il était prêt à l'accepter et, surtout, à le comprendre... Même si cela ne présageait rien de bon. Est-ce que cela voulait dire que, même sur la meilleure des voies, le ciel restait obscur ?
Comme si le Cawr avait senti l'ébauche de son chagrin, il lui dévoila tout de même quelques fragments de son passé. C'étaient les filaments d'une grande toile, des grains de sables dans les dunes que l'elfe pâle avait sans doute traversé. C'était suffisant. Valmys n'aurait voulu le blesser d'un discours trop élogieux et pointu. Les souvenirs étaient si simples à ramener à la vie quan la douleur les teintait. L'imagination de Valmys dessina le ciel étoilé du désert, comme lui avait pu le connaître, les vagues de sable, la poussière qui suivait les pas des voyageurs, et la silhouette hâlée de blanc du chantebrise. L'elfe aux oreilles arrondies avait déjà traversé le désert, avec l'aide de gens qui en étaient, dans des conditions qui rendaient ce voyage supportable. Il se doutait que cela n'avait pas dû être le cas d'Amaury. La peinture qu'il s'était faite se fit blanche de la lumière du jour, étouffante de chaleur.

Jadis, il aurait sans doute agi comme le Cawr, s'armant de son envie de survivre pour vivre, et inversement. Désormais... Il savait que le laisser dans un environnement trop hostile était prendre le risque de le voir se laisser mourir. Il se voyait très bien accepter une telle situation comme une fatalité, un signe du destin. Peut-être était-ce parce que cela n'était qu'hypothèses. Peut-être aurait-il fallu qu'on le jetât véritablement dans le désert pour qu'il comprenne, pour que sous une peau brûlée de soleil revive l'envie de s'en sortir, forte comme jamais. Il n'en était pas sûr... Revivre auprès des siens était plus simple et attrayant. Surtout: il y avait un début de secours dans ce lieu. Valmys l'avait saisi.

Intrigué, l'Enwr chercha ce que pouvait être cette différence qui faisait qu'Amaury et lui ne s'orientaient pas vers la même lumière, n'étaient pas mus par les mêmes forces. Dans ces questionnements se trouvaient sans doute des clefs aux portes qu'il avait devant lui. Tout songeur, tout laissé à son imagination et ses pensées, il crut saisir un début de réponse dans la suite de l'histoire.

Son regard brun se leva à nouveau vers celui, aveugle, d'Amaury, comme pour lire à travers lui. Les questions se faisaient de plus en plus nombreuses. Le vide dans son coeur ? Etait-ce là une histoire de sentiments ? Ou... D'être cher avec lequel il se serait fâché ? Ou pire: d'être disparu ? Rien qui ne soit rassurant. Rien qui ne puisse vraiment être remplacé, comme condamnant le Cawr à la souffrance. Ce genre de peine, Valmys était né avec. Il avait beau avoir eu un pseudo-père adoptif, cela n'avait empli le vide qu'était l'absence de ses parents. Il avait beau avoir eu quelques bribes d'informations sur eux, il restait un grand vide à cet endroit en lui qui parfois interrogeait le passé. Les vides s'étaient multipliés, récemment. Dire que Valmys avait cru que ce seraient eux qui menaceraient de l'aspirer dans leur Néant affamé ! Il savait désormais qu'il n'en était rien. Ces absences avaient été des comburants à ses voyages, à ses recherches. Ce n'étaient pas elles qui avaient enfoncé son visage sous des flots sombres.

Ils avaient deux tourments différents, deux façons de se plonger dans l'abysse ouvert en leurs âmes. Amaury avait évoqué une première voie pour s'en sortir et, malgré lui, en avait appelée une deuxième aux songes de Valmys. L'Enwr savait comment, lui, se sortait des peines qu'Amaury éprouvait peut-être. Il chercha, un instant, le parallèle qu'il y avait à faire. Comment Amaury, lui, aurait fait, si son tourment avait été le sien ? S'il avait dû fuir les miroirs, et craindre le pire chez ceux qu'il aimait ? C'était difficile à imaginer. Valmys avait beau peu connaître Amaury, il l'appréciait, autant qu'un Enwr peu apprécier un Cawr, de cette affection qui rend les êtres immortels. Son imagination peinait à voir l'immaculé Chantebrise paniquer sous l'effet d'un simple toucher. Il n'aurait pas fui, sans doute. Il n'aurait pas bâti d'inutiles défenses. Il aurait... Il aurait...

Une lueur fugitive traversa le regard du petit elfe aux oreilles rondes, juste avant l'ultime demande du Cawr. Valmys sut assez vite où il voulait en venir. Attraper les éléments qui lui étaient les plus chers, ceux qui ne disparaissaient jamais, pour qu'il s'y accroche. Un faible sourire passa sur ses lèvres. Lui aussi y avait pensé. Concrètement, ces choses-là l'aidaient à survivre. Il devait néanmoins reocnnaître que, dans ses instants les plus tumultueux, ce n'était pas suffisant, et même le meilleur ne laissait qu'un goût fade et vain.
Il allait néanmoins essayer. D'autant plus qu'il espérait attirer le Cawr avec lui de ce côté-là de l'esprit et de la musique.

"- J'aime... Mh. Je ne détestais pas la compagnie des gens. Maintenant... J'aime toujours les autres membres de l'Ordre, même si de façon plus distante. J'aime la compagnie de ceux qui ne sont pas bipèdes, également. J'aime les arts... Tous les arts. Je devrais profiter de mon séjour ici pour enfin m'intéresser à ceux qu'il m'était difficile de pratiquer. Je vous apprécie. J'apprécie beaucoup la neige..."

Son esprit se fit plus lointain, un moment, plongé dans des souvenirs où les flocons dansaient plus ou moins mollement dans les airs.

"- Celle de Nyn-Tiamat avait beau être dangereuse, je ne pouvais m'empêcher de la trouver magnifique. J'aimerais la revoir... Cawr Amaury ? M'offririez-vous de la neige, ici, auprès des miens, par votre musique ?"

Une bribe de malice hantait ses propos. C'était... Incroyable, que cela soit possible. Il n'aurait pas cru pouvoir accompagner Amaury dans ses efforts pour que tous deux aillent mieux. Les faits étaient là, il n'aurait pas su les expliquer, si ce n'était par la finesse d'esprit du Chantebrise.

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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Chacune de ses paroles faisait naître un flot de pensées, associées ou non aux idées qu’il évoquait. Tous deux se laissaient emporter par leurs propres songeries. Ni bonnes ni mauvaises, seul importait ce qu’ils en feraient. Cela faisait longtemps que le cœur d’Amaury avait appris à se reconstruire. Peut-être n’était-il pas encore prêt à aimer, sans doute ne l’était-il pas à pardonner, mais il savait que jour après jour, il avançait sur sa Voie, un chemin qui lui paraissait meilleur. Cette rencontre, si fragile et précieuse à la fois l’incitait encore plus à continuer. Cela lui réchauffait le cœur de pouvoir l’aider et, plus que tout, il éprouvait le désir de le voir évoluer, de découvrir et de comprendre comment il pourrait surmonter le drame qu’il avait vécu, devenir plus fort. Son optimisme le poussait à croire qu’il s’en sortirait, que même si cela prenait un temps infini, il y aurait un jour avec une éclaircie et que celle-ci deviendrait de plus en plus grande. Pour qu’il sourie à nouveau, pour qu’il puisse rire et se sentir léger. Il avait besoin d’avoir cet espoir au fond de son cœur, puisqu’il avait eu une expérience proche et qu’il avait pu constater que tout n’était pas perdu, qu’il restait encore autant de belles choses dans ce monde que de belles personnes.
L'inverse n'aurait été que la marque d'un malaise profond, une preuve qu'il n'avait pas encore guéri suffisamment. Si cela avait été le cas, alors il n'aurait pas été à même de l'aider, ni de le voir avancer. Peut-être encore n'aurait-il fait que voir l'obscurité profonde du monde, reflet de ce regard dont il s'était lui-même privé. Mais le monde n'était pas ainsi, il était doté de mille et une couleurs. C'était ça aussi qui en faisait sa richesse et qui donnait à la vie toute son importance. Encore fallait-il être prêt à accepter toutes ces choses affreuses qui allaient avec… Il fallait comprendre qu'elles étaient nécessaires, cruellement nécessaires…

Le jeune baptistrel répondit à sa question, évoquant tour à tour les idées qui lui venaient en tête. Comme tout être vivant, il y avait bon nombre de choses qu'il aimait et la douleur qu'il avait subie n'avait pas su effacer ça. Il fallait seulement qu'il ne les oublie pas et qu'il s'y accroche.
Amaury ne répondit pas à ses mots pour lui donner son avis, il préférait le laisser réfléchir, l'entendre évoluer au fil des syllabes et des ondes. La neige devint alors un sujet tout particulier. Comme le sable du désert, c'était un élément de la nature qui ne pouvait blesser un cœur. Sa vue pouvait peut-être terrifier, glacer dans le cas où on se serait trouvé acculé, où sa propre vie aurait été en danger, mais le Cawr ne la voyait pas ainsi. Tout comme les grains, les flocons semblaient dégager à la fois quelque chose de pur et de brut. Lui aussi aimait la neige. Il ne pouvait plus en contempler les spectacles magnifiques, mais les souvenirs qu'il en avait lui suffisaient. Il aimait cette sensation de froid, le bruit des pas s'enfonçant dans cette matière si particulière et plus encore, les sentir tomber sur sa peau et fondre avec délicatesse. Le froid mordant d'un hiver et cette blancheur immaculée.

Le Chantebrise se contenta de sourire. « Ferme les yeux. » Dit-il simplement, puis il porta la flûte jusqu'à sa bouche, son esprit peuplé des flocons de neige, comme s'ils étaient déjà en train de tomber. La mélodie débuta sur quelques notes aiguës, commençant à raconter une histoire.

Le froid semblait descendre doucement sur eux au fil des notes, apportant comme une promesse, celle d'un hiver imaginaire. Lorsqu'il peupla suffisamment leurs pensées, devenant comme une habitude, un brusque changement dans la mélodie annonça une surprise. C'était comme un enfant qui se serait précipité à la fenêtre pour découvrir les premiers flocons qui tombaient. Il y avait comme un émerveillement. Ce n'était pas une magie qui se produisait du bout des doigts ou avec des gestes précis et connus, non… c'était celle de la nature dont les spectacles formaient toujours d'étonnantes découvertes.
Les flocons descendaient dans leur balai désordonné jusque sur le sol. Ils étaient encore minuscules, incapables d'imposer aux surfaces qu'ils rencontraient leur présence. À peine arrivés, ils s'effaçaient immédiatement. Comme s'ils ne voulaient pas gêner, comme par politesse. Pardonnez-moi d'être arrivé ici, voilà, je vous laisse la place. Vous ne m'avez pas vu, je n'ai subsisté qu'un bref instant, minuscule, insignifiant. Mais attendez, voilà que mes frères arrivent, à force de chuter du ciel, ils semblent être devenus plus gros et eux, tranquillement, ils gardent leur forme, ils s'accumulent pour former déjà un très léger duvet.
Les notes, à la fois régulière, à la fois désordonnées, sonnent cette chute. Dans les silences, les flocons atteignent finalement leur destination. Ils se nichent ensemble, doucement, comme s'ils avaient voulu se tenir au chaud, comme des inséparables, avides de se retrouver.

La mélodie sonne plus fort, elle s'accélère. Les flocons semblent être devenus énormes, le vent s'est levé, agitant ces fragiles touches immaculées pour les coller çà et là, recouvrant tout le paysage d'une couleur uniforme. Le vent tourbillonne, levant peu à peu une impressionnante tempête. Tout sera recouvert et rien ne subsistera, rien d'autre que cette neige devenue désormais si grande, si imposante. Elle ne s'excuse plus, elle vient simplement recouvrir encore et encore les couches  précédentes. Elle est tombée sur leurs genoux, elle a envahi leurs cheveux, elle a même réussi à rester sur leurs nez. Ils sont devenus comme des bonhommes de neige. Pas besoin de la tasser ni de la rouler, la neige a suivi leur forme, mais pourrait-on encore comprendre qu'ils sont bien des êtres vivants ? La neige les recouvre et les enveloppe, comme dans une caresse, elle vient geler leurs peines et le vent à son tour balaye tous leurs soucis. Totalement enveloppés dans ce cocon cristallin, ils n'ont pas froid pourtant.

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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Valmys s'exécuta, fermant les yeux, perdant son sourire. Durant le bref instant de silence qui précéda la venue de la musique, le noir autour de lui appela sa solitude, malgré les multiples êtres qui venaient immédiatement lui rappeler ce qu'il faisait, et pourquoi ce poids en lui. Il avait froid, et s'il se redressait trop, ils s'empareraient de lui. Les premières notes vinrent troubler ces images, et les rendre de plus en plus floues, à mesure que son attention se dirigeait vers une fraîcheur toute autre, au goût de nostalgie.

Son esprit vint timidement voir ces flocons qui tombaient. Amaury avait-il pioché dans son chant-nom ? Les échos de la musique en lui rappelaient à Valmys ses propres émotions, la première fois qu'il avait vu de la neige. Le froid était apssé d'handicap à allié, et peu importait que le voyage soit plus complexe. Il se rappelait de son petit nez collé contre une vitre, et de l'excitation qu'il avait eue du mal à contenir, et la mine entre l'attendrissement et la lassitude de son maître.
Les flocons devinrent plus présents, séparés de la distance de verre qui les avaient protégés des jeux du grand enfant. Leur chute était un spectacle captivant, qui valait bien toutes les morsures du froid sur les joues, les côtes, et les doigts. Un ballet qui mêlait une direction commune aux plus aléatoires des trajets. Les sapins devenaient plus fades, leurs ombres s'estompant devant l'assaut lumineux des petits flocons. L'horizon était une étendue immaculée, une invitation à bras ouverts, juste pour eux.

De plus en plus de neige, de plus en plus haute, et de plus en plus de flocons. Que pouvait demander le peuple ? Plein d'autres choses, plus vaines. C'était ce qui s'appelait être adulte. Et l'âge adulte venait beaucoup plus vite, arraché de sa terre, de ses illusions, et de la mort. Leur nouvelle terre est rude, n'a pas la bienveillance maternelle de leur continent maudit. Au milieu des tempêtes de neige, les naufragés arrachaient tout ce qui leur était possible d'obtenir pour survivre. Mage, Valmys n'avait pas le droit de se tourner les pouces, et pas le droit de s'amuser naïvement, sous le regard de son maître. Malgré les communautés qui se formaient, il était seul. Ne parvenant à goûter aux fruits de la chasse, il avait souvent eu faim. Pourtant, ses souvenirs n'étaient pas malheureux. Ils étaient anxieux, mais gardaient de l'espoir. Sans nouvelles de son maître, ce dernier ne pouvait qu'être en vie. La neige et ses tourbillons avaient créé un cocon qui les avait emprisonnés dans le présent. Il l'avait admirée, avant arraché quelques instants avec elle sur son temps de sommeil, et avait partagé avec elle son espoir de revoir les siens.

Bercé par la mélodie et les souvenirs, Valmys avait passé ses bras autour de ses genoux, sur lesquels il avait appuyé sa tête. Les yeux fermés, il commençait doucement à fatiguer. Il suivit la musique, écoutant chaque histoire que le Cawr avait à raconter, sans bouger, son souffle se faisait de plus en plus apaisé. Ses yeux ne se rouvrirent qu'un moment après la fin de la musique. Comme sortant d'un sommeil, d'un rêve, le jeune elfe parut reprendre peu à peu ses marques, se souvenir de l'endroit où il était. Ses songes s'étaient plus ou moins arrêtés à ce Graärh solitaire qu'il avait sauvé. Valmys dévisagea le Cawr dans la pénombre, autant qu'il le pouvait. Lui, comment se sentait-il ? Qu'avaient pu aviver ses propres notes en lui ?

"-...Les voyages et les autres îles, vous appellent-ils, vous aussi ?"

Demanda Valmys, d'une voix aussi déstabilisé qu'un corps qui se serait mis debout trop prestement. De son poignet, il essuya ses yeux, et ses joues humides. Il n'aurait su dire exactement l'effet que lui avait fait la musique. En lui demeurait désormais une étrange impression, comme du vide, ou une absence. L'Enwr n'arrivait pas à mettre le doigt dessus. L'absence du poids qu'il portait ? L'absence de neige ? Le bruit lointain du lac manqua de ramener à lui des souvenirs marins. Il les repoussa, de force, et chercha à pousser le Cawr à parler, pour s'obliger à continuer à penser à autre chose:

"- Avez-vous pu faire la connaissance des Graärhs de cette île ?"

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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De cette neige, à la fois délicate et puissante, si froide, mais fascinante, il gardait de nombreux souvenirs. Enfant, naturellement cet élément l’avait fasciné, il y avait eu tant de jeux, tant de rires, si puissants qu’ils savaient encore résonner jusqu’à ses oreilles. Il restait pourtant cette fragilité dans son cœur, à chaque fois que le visage, la voix, les gestes d’Aneirin apparaissaient dans ses visions. C’était une blessure toujours à vif, toujours trop susceptible de se rouvrir. Cela ne l’empêchait pas d’avancer, les siècles lui avaient permis de guérir assez pour ça, même si la souffrance, elle, ne lui semblait pas moins douloureuse.
Il avait vu la neige au cœur de la forêt, il l’avait sentie s’installer sur le domaine, suivant le gré des hivers successifs. Il l’avait totalement abandonnée lorsqu’il était parti vivre dans le désert. C’était un élément qui lui avait manqué, mais il avait trop apprécié la rigueur du sable, avait choisi de s’y enfoncer plutôt que de faire demi-tour. Après son départ de la cité des elfes, Amaury avait peu à peu réussi à avancer dans sa vie sans s’attarder sur des regrets, le poids de son passé étant déjà un fardeau suffisant à traîner derrière lui.

Il ne s’était jamais vraiment arrêté, suivant le fil d’une mélodie infinie dont il put enfin entendre les notes lorsqu’il devint maître Baptistrel. Les rencontres mêlaient des notes aux siennes, faisant naître une musique toujours singulière, unique. Pourtant, il n’avait jamais peur d’y mêler les propres sons qui s’échappaient de sa flûte, des cordes de sa harpe ou de sa voix. Toutes les mélodies qui gravitaient autour de lui paraissaient belles, inspirantes, entraînantes.
Ainsi, comme toujours, Amaury se laissa emporter par son improvisation, il ne vit pas le temps défiler, plongé au cœur de l’univers qu’il dessinait avec ces sons semblables aux flocons eux-mêmes. Ce n’était plus lui qui choisissait ce qu’il faisait, il se laissait simplement entraîner, comme en transe.

Le silence revint, naturel.
Doucement, la flûte s’éloigna de sa bouche, ses mains descendirent jusqu’à se poser sur ses cuisses. Ses yeux clos restaient plongés dans ce portrait d’hiver. Immobile, il ne se sentait jamais aussi bien que dans ces instants si particuliers. Une bourrasque, les frémissements de l’herbe, le murmure de la terre, les notes mêlées de tous les êtres vivant alentours venaient tinter à ses oreilles sans le perturber.

Et puis il y eut une nouvelle vibration dans la trame. Un éveil. La voix ne le fit pas sursauter, elle le tira délicatement de sa léthargie. Ses yeux s’entrouvrirent légèrement, laissant apercevoir son regard clair, mort, mystérieusement bienveillant.
Les tremblements dans chaque syllabe prononcée, myriades de caractéristiques de la voix du jeune Enwr, se gravaient en lui comme une chose fragile, sensible, précieuse. Il savoura pendant un bref instant la sensation qui l’envahissait, mais sortit totalement de sa torpeur lorsqu’une deuxième question lui fut posée. Un léger sourire vint d’abord éclaircir son visage.

« Ils m’appellent comme un chant exotique auquel je ne puis résister. Ils m’ont toujours appelé… Longtemps j’ai ignoré ces voix, préférant rester avec les miens, effectuer le devoir qu’ils avaient fixé pour moi, tenter de l’accomplir… » Sa voix s’évanouit un instant. « Finalement, je n’ai jamais su prendre cette décision, on l’a faite pour moi et depuis, mes oreilles n’ignorent plus rien de ces appels. Je ne sais jamais où je vais me rendre, mais je fais confiance à ces mélodies, elles ont su guider mon chemin, elles sauront toujours le faire, bien mieux que si je décidais moi-même. »

C’étaient elles qui l’avaient mené dans le désert. C’étaient elles qui lui avait fait vivre des épreuves difficiles, douloureuses, mais dont il était toujours ressorti plus fort, plus sage aussi. Dans ses errances sans doute incompréhensibles aux yeux des autres, il avançait sur la voie de sa propre illumination, calme et serein.

« Je suis resté longtemps pour aider à la reconstruction, mais je pense bientôt reprendre la route. Il y a tant de choses à découvrir sur ce nouveau continent, n’est-ce pas ? »

Tout ici lui avait semblé différent : les sons, l’odeur du vent et de la végétation, le goût des aliments… L’exil les avait poussé à fermer une porte sur un monde plein de douleur pour en ouvrir une nouvelle sur une immensité remplie d’espoir.

« J’en ai rencontré quelques-uns en effet. J’ai tout de suite apprécié ces êtres si proches de la nature. Ils sont très différents de nous, mais je pense que nous avons beaucoup à apprendre d’eux. En tant que Baptistrels, je pense que nous avons les moyens de nous entendre avec la plupart d’entre eux, de réussir à communiquer et à échanger en dissipant toute agressivité. »

Son visage s’orienta finalement dans sa direction, même sans voir, il lui était facile de savoir où il se trouvait.

« En as-tu déjà rencontré ? Saurais-tu me les décrire avec ton cœur ? »

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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Quelque chose émana du Cawr, comme une aura, quand Valmys évoqua les voyages. L'Enwr devina aussitôt qu'il avait visé juste, en parlant de voyages à un Chantebrise. Comme une brise fraîche qui aurait flâné dans la grotte, un courant d'air en été, avec une nuance d'humidité prometteuse. L'elfe aux oreilles arrondies associa cette sensation à l'être aérien qui lui faisait face, sans songer un seul instant que cela puisse venir de lui. L'idée d'avoir réussi à apporter quelque fraîcheur à ce Cawr particulier lui plut, néanmoins, dessinant un sourire forcé sur ses lèvres, un sourire moins forcé à l'intérieur de son torse.

Si leurs histoires étaient différentes, leur étange symétrie permettait à Valmys de comprendre Amaury. Valmys avait grandi en ne connaissant que les voyages. Si le Domaine l'avait attiré, intrigué, il n'y avait jamais séjourné longtemps. Maintenant qu'il en avait l'occasion... Il ressentait cet étrange appel. Ce picotement dans les jambes, ce regard qui se tournait trop souvent vers l'horizon, et cette sensation de tourner en rond. Ne pouvant y répondre à nouveau, il se demandait, naïvement, si ces impressions allaient un jour le quitter, s'il pourrait se contenter d'une vie de sédentaire plus d'une semaine. La réponse, il la savait, mais elle était encore tenue à distance par un océan de craintes. L'avenir était fait de questions sombres aux réponses fragiles. L'Enwr l'évitait en observant plutôt celui du Cawr, comme si sa réalisation de leur commun souhait pouvait lui apporter une quelconque satisfaction. Il y avait tant de choses à découvrir...

"- Peut-être même des choses que vous pouvez découvrir, et qui me sont inaccessibles."

Les chants-noms devaient dévoiler à Amaury bien des aspects de ce nouveau monde qui échappaient au commun des mortels, et même lui dévoiler ce qui était hors de portée des regards pourtant perçants des elfes. Pour autant, contrairement à ce qu'il avait espéré, Valmys ne trouva pas, en sa propre remarque, de satisfaction. Lui aussi voulait tout voir. Accumuler les savoirs de ce monde était une quête qui lui tenait à coeur. Voir de ses propres yeux ce que même leurs légendes n'auraient su inventer était une quête qui coulait dans ses veines.
Le sujet des Graärh vint lui épargner remords et regrets. Du passé il était plus certain. Celui-là avait beau être chaotique, il était plus aisé à évoquer.

"- Je puis y re-penser très fort. J'ignore si cela vous aidera à mieux lire mon chant-nom."

Fermant les yeux, calmant son souffle, Valmys se replongea dans ses souvenirs, tâchant de les revivre avec exactitude. Etrangement, ses souvenirs de Nyn-Tiamat étaient relativement nets. Il se souvenait très bien de l'angoisse qui l'habitait alors, isolé qu'il était, sans nouvelles des gens auxquels il tenait, survivant de façon précaire avec ses compagnons d'infortune, sur une terre d'asile qui n'avait que peu pour les accueillir. Il se souvenait très bien de ce Graärh qu'il avait trouvé, de justesse, ses rayures sombres le trahissant à peine dans la neige. Il se souvenait de la hâte avec laquelle il l'avait soigné, et toute cette magie qu'il avait dépensé dans l'espoir de le sauver de l'hypothermie, de l'anémie, et de plei d'autres choses en "ie" sans doute. Le voir se réveiller avait illuminé ses jours enneigés. Le voir survivre l'avait soulagé comme s'il avait été son propre frère, et l'avait rechargé en espoir. S'il pouvait sauver un Graärh... Alors lui et les autres naufragés pouvaient survivre.
Leurs échanges avaient été parfois maladroit, faute de langage commun, mais ce qui en était sorti restait avait laissé au petit Enwr le goût sucré de l'amitié, ainsi qu'un vif intérêt pour le peuple aux allures félines. Il se souvenait encore de son amère déception en apprenant que les siens cherchaient à les réduire en esclavage. Pourquoi ? Alors qu'ils pouvaient ensemble construire, devaient-ils fatalement s'affronter ? Rien, aucune logique, aucune raison, et nul sentiment, ne justifiait en Valmys un tel sort.
C'était d'autant plus vrai maintenant que lui-même avait failli se trouver esclave. Les souvenirs lui vinrent avant qu'il puisse les affronter. L'Orque le jaugeant. Le marin à côté de lui, décapité. Pour seule défense, il ne trouva que le désir foudroyant que son Cawr, jamais, ne connaisse cela.
Puissent ses voyages l'épargner.

Spoiler :

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Pour toucher, voir et ressentir cet inaccessible, il ne lui suffisait que d’ouvrir son cœur. Ce fut une pensée qu’il voulut prononcer, mais qu’il garda pour lui. Il savait bien que ce serment qui lui avait permis d’ouvrir les portes d’un nouvel univers n’était pas donné à tous. De tous ces apprentis qui foulaient le sol du domaine, il n’y aurait qu’une poignée d’élus. Amaury ne voulait faire miroiter ce destin incertain à aucun d’entre eux. Ce qu’il voulait, c’était… juste lui dire que les vibrations étaient une partie intégrante du monde et que, même sans la capacité de les entendre, il pouvait connaître ces choses qui lui semblaient actuellement impossibles, irréelles. Il fallait qu’il ouvre son cœur. Il fallait qu’il sache comme écouter, comment percevoir et surtout, comment recevoir.
Instinctivement, le Chantebrise savait que ce n’était pas encore le bon moment pour ce genre de conversation. C’était encore trop tôt, il fallait qu’il panse ses blessures, il fallait qu’il soit à nouveau capable de s’ouvrir au monde, sans crainte de recevoir un nouveau coup. Il y en aurait ; mais pourtant, il ne fallait pas les redouter.

« Les vibrations sont comme les nombreux murmures d’une conversation au cœur de la foule. On peut les écouter avec attention, on peut juste les entendre sans y prendre garde. Je préfère les laisser me traverser sans chercher à les arrêter ou à les altérer, sans essayer de comprendre ou d’analyser. C’est un don puissant, je n’ai jamais souhaité l’utiliser pour ma simple curiosité. »

Il sourit. Ses mots étaient doux, bienveillants. Encore imprégnés de sa musique, ils semblaient tomber comme des flocons de neige, avec délicatesse et sans vouloir déranger, glissant comme une légère brise jusqu’à leurs oreilles.

« Si l’on ne me demande pas de l’écouter, je me laisse simplement porter par les notes, comme je pourrais contempler ton visage et ton regard sans pour autant venir sonder tes pensées. »

Naturellement, son visage il ne le contemplait pas, il ne le contemplerait jamais. C’était mieux ainsi. Valmys rayonnait d’une plus belle lumière dans cette obscurité rassurante. S’il ne pouvait ignorer les sons discordants qui émanaient des plus profondes douleurs des hommes, au moins avait-il pu oublier l’expression de la colère, la lueur de la haine, la couleur même du sang.
La neige, puissant allié dans son esprit, venait recouvrir le monde de son voile le plus pur.

Doucement, il se concentra sur les notes qui émanaient de l’Enwr. Comme toujours, il découvrait des sons parfaitement uniques, des sons qui ne reflétaient que lui et qui, même au plus profond de l’obscurité, lui permettraient toujours de le reconnaître parmi tant d’autres. Les notes dessinaient son nom, son histoire, les moindres pans de sa personnalité. Ses notes étaient pleines d’amour, de bienveillance et de compassion. Tapies derrière la douleur criante, l’angoisse hurlante, l’effroi assourdissant, elles sonnaient timidement mais sûrement, dévoilant un être d’une merveilleuse pureté. Les mots malheureusement n’avaient pas assez de saveur pour décrire ce qu’il percevait lorsqu’il écoutait.

Au premier plan, la scène à laquelle il pensait si fort défilait dans sa tête avec une étonnante facilité. Il se sentait touché par sa volonté de sauver à tout prix cet être qu’il avait trouvé enfoui dans la neige. Graärh, homme, fourmi, que n’aurait-il pas donné pour lui permettre de vivre juste un peu plus longtemps ? Ils avaient échangé, à leur manière, tentant de communiquer, de partager. Ensemble, à l’unisson, tous deux se posaient finalement cette même question. Alors pourquoi ? Pourquoi les autres ne voulaient-ils voir qu’intérêt, exploitation, profit sans considération pour le monde dans sa globalité ?

La mélodie se distordit trop brusquement. Valmys était encore trop fragile, les démons qui le hantaient trop puissants, trop présents dans son cœur meurtri.

Répondant à cet appel douloureux par un simple réflexe, Amaury se mit à chanter. Il délaissait la neige pour quelque chose de plus chaud, une flamme inoffensive qui pourrait venir l’envelopper, comme s’il s’était blottit auprès du feu et que celui-ci lui communiquait sa douce chaleur, le berçant peu à peu. Sûrement, de part sa force, il repoussait ces pensées qui venaient le tourmenter, chassait les peurs pour que son cœur arrête de trembler, pour qu’il puisse battre avec ce désir vibrant, celui de vivre, celui d’avancer et de se frayer un chemin parmi les tourments.

Le chant du feu :

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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La chaleur vint comme une main amicale qui se serait posée sur son épaule. Elle tira Valmys de ses songes odieux, aux ombres grouillantes, comme autant de monstres aux gueules dégoulinantes de salive. L'Enwr réalisa ce qu'il venait de faire, et s'en sentit profondément peiné. Il avait dû blesser le Cawr. Se recroquevillant davantage sur lui-même, l'elfe aux oreilles arrondies prit conscience de sa position. Ses doigts s'étaient crispés sur le tissu de sa tunique. Il se protégeait comme il l'avait fait jadis, dans l'espoir que nul ne l'agrippe ou le moleste, abusant de sa faiblesse physique. Cela n'avait pas de sens ici. Mais... Se défaire de sa posture, abandonner la crispation anxieuse de ses muscles, lui demandait un océan d'efforts, quand rester ainsi ne demandait rien de plus que ce qu'un inconscient réflexe pouvait réclamer.

Le chant avait couru en lui comme la rivière dans son lit, emportant dans son sillon les algues noires de ses tourments. Ils lui furent introuvables, un instant. Les souvenirs étaient là, vidés des sentiments qui les accompagnaient. Un grand vide restait alors, qui laissa un instant le petit humelfe sans voix. Ses mains se portèrent à son coeur. Il ne savait que dire, que faire, devant ce gouffre. Etait-ce ainsi qu'il s'était senti, jadis ? Avait-ce été son état naturel ? Qu'avait empli cette place ? Désormais c'était un manque qui vivait là, et il était inconcevable que sa peine puisse être une partie de lui complète. Les enseignements de son Ordre lui auraient affirmés le contraire, mais ses sentiments ne pouvaient les admettre désormais. Pas après tout le mal que lui avaient fait ces souvenirs. Mieux valait pour lui rester seul, plutôt qu'accompagné de ces images aux crocs aiguisés qui brisaient jusqu'au coeur de son âme quand il passait devant le moindre miroir quand il passait trop de temps trop près de congénères. De ces angoisses il ne voulait plus. Ce manque, il allait le transformer, le façonner. C'était plus simple que de façonner une terreur, un fragment abstrait qui brûlait à son contact. Il allait créer un Valmys tout neuf, qui n'aurait plus peur des pirates, et qui ne blesserait plus les Cawrs de ses seules souffrances.

Déstabilisé, mais libéré, Valmys voulut rendre la pareille au Cawr. Que pouvait-il lui offrir ? Nul présent physique lui était plus aisé à obtenir qu'au maître. Nulle magie également, sans doute... Il y avait bien quelque chose. C'était peu. Mais un présent à la hauteur viendrait sans doute en temps et en heure.
Un chant sans paroles, meumeunement grave, fit vibrer la cage thoracique de Valmys, jusqu'à son larynx. Il copiait le chant du maître, autant qu'il le pouvait. Son éducation l'aidait à reproduire les sons, les notes, les intonations. Si les vibrations lui étaient inaccessibles, il s'appropriait cependant tout le reste. C'était un peu sa façon de dire qu'il soutenait les efforts du chantebrise. Un doux sourire passa sur ses lèvres, lorsque son chant s'éteignit. Il murmura à Amaury qu'il souhaitait qu'il écoute à nouveau le souvenir auquel il pensait.

Il voulait lui offrir des images plus plaisantes, maintenant que celles aux reflets douloureux s'étaient faites plus discrètes. Des pans de roches se dessinaient, gris et lumineux de neige. Abruptes, ciselés. Face à eux, le vide, couvert d'une nappe nuageuse. La vallée se devinait. Les autres monts étaient des silhouettes pâles sur un ciel blanc cassé. Le froid était mordant. Les couches successives d'habits ne servaient qu'à encombrer les voyageurs: le froid venait s'insinuer sous le tissu, et s'y tapir, trouvant refuge sous leurs peaux.
Valmys était jeune, alors. Dix ans, peut-être. Cela se voyait surtout à la différence de taille avec son maître, et adulte attitré. Quand il le regardait, c'était en levant la tête. Dans les quelques bribes de souvenir qu'il offrit à Amaury, le maître se tenait légèrement plus loin, l'observant avec une pointe d'attendrissement, et beaucoup de fatigue. Lui, le petit être, avait courru vers ce passage entre deux monts, ce col étroit où ils voulaient passer. Il savait ce qui l'attendait. Un ami fidèle d'Amaury, et un compagnon de jeu.
Là, dans ce passage, le vent s'engouffrait, multipliait sa puissance. Lui, il était un petit être juste assez lesté. Dans un éclat de rire que l'air emporta au loin, il joua à tournoyer sur lui-même, faisant s'enrouler chaotiquement sa cape autour de lui. Ses bras s'étendirent, il laissa les bourrasques supporter son poids dans un sens, dans l'autre, autant qu'elles le pouvaient. Il jeta son sac dans la neige, pour mieux imiter les biches et autres cervidés, bondissant gaiement dans la neige qui le recevait avec douceur, profitant du très bref instant que le vent lui offrait en plus dans les airs comme s'il s'agissait d'une longue heure de vol plané. Il était un oiseau ! Et il pouvait aller super loin ! La gravité n'était plus un souci. Elle ne le serait plus, pour l'éternité ! Ou pour le laps de temps qu'il avait pour jouer. Mais dans le coeur d'un Valmygamin, c'était identique.

Valmys resta quelques instants à profiter de ce souvenir ancien des glaciers qui avaient précédé les volcans du tyran blanc. Les images venaient, revenaient, et la chronologie importait peu. Les sentiments restaient les mêmes, quoi qu'il advienne. Quand son attention revint, lentement, sur le présent, elle se tourna vers le chantebrise, avec un léger sourire qui n'avait pas d'importance. Une inquiétude mêlée de la joie discrète du souvenir l'habitait. Il espérait que le maître saisirait ce qu'il voulait lui offrir. Après tout, n'était-il pas la brise de son présent ? Ne méritait-il pas au moins de profiter de meilleurs instants, lui qui le portait ?

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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Les épreuves passées avaient su affermir son cœur suffisamment pour qu’il ne se laisse pas atteindre de plein fouet par les notes discordantes qui transmettaient la détresse jusqu’au plus profond de lui-même. Il aurait pu hurler, vouloir s’enfuir, couper court à ce contact, mais ça n’aurait pas été être un baptistrel. Il ne pouvait l’abandonner, il voulait rester avec lui, même si cela devait s’accompagner d’une douleur mêlée, terriblement cruelle.
Désireux de lutter contre ce qui amochait le monde, contre ce qui voulait écraser Valmys, contre ce qui l’avait lui-même tant tourmenté, dans les pires moments, les chants étaient devenus depuis longtemps sa délivrance. Ils étaient efficaces contre ce genre de mal. Trop peut-être, ce qui faisait qu’il n’en usait pas systématiquement et encore moins pour lui-même, mais ici, cela lui avait semblait approprié – nécessaire même.

Ensemble, ils pouvaient guérir et avancer. Les notes faisaient fuir les peurs qui tapissaient leurs âmes, qui les terrifiaient et les contraignaient à la tétanie. Les vibrations du jeune Enwr avaient fait remonter en lui des tas de choses qui le bouleversaient, mais il avait appris à être fort, il avait appris à surmonter tout cela.

« Là… tout va bien. Ce n’est pas grave. C’est normal. Les marches sont hautes, difficiles à franchir, mais il ne faut jamais t’en vouloir. Même sans t’en rendre compte, tu as déjà bien avancé. »

Ce n’était que des murmures, des paroles à peine soufflées qui savaient pourtant trouver leur chemin jusqu’aux oreilles de leur destinataire. Les notes de son chant terminé, il avait pensé que ce n’était pas tout à fait suffisant. Il sentait que Valmys s’en voulait de lui avoir infligé ça, mais il ne devait pas penser cela. C’était ça aussi, devenir maître baptistrel. Accepter de tout ressentir, même le pire, accepter d’écouter et d’être là en toutes circonstances.

Un léger sourire vint se dessiner sur ses lèvres. Les paupières closes, il se mit à écouter le chant que lui offrait Valmys, imitation du sien qu’il s’appropriait peu à peu. Le Chantebrise avait tendance à penser qu’il n’y avait pas besoin d’être Cawr pour savoir exprimer les choses de la bonne manière, pour savoir parler à un cœur et l’apaiser.
Il aimait ses notes délicates, le grain de sa voix. C’était un beau chanteur et déjà, il savait trouver au fond de lui les émotions nécessaires à sa mélodie.

Suivant son invitation, il se laissa donc emporter, autant par les notes que par les souvenirs qu’il faisait venir jusqu’à lui par le biais des vibrations. Il lui offrait ses plus belles brises pour lui qui avait si souvent été porté par le vent. Cette attention lui paraissait extrêmement touchante. Au fil des sensations qui défilaient en lui, il avait alors envie de rire et de sourire, de danser en harmonie avec les bourrasques, de se laisser emporter par cette force invisible.
Comme deux enfants, ils pouvaient alors jouer, totalement insouciants.

L’achèvement de cette mélodie unique – joli impromptu – les laissa tous deux silencieux. Amaury écoutait le murmure du vent. Aujourd’hui, il était léger, vraiment très doux.

« Merci. Tu as en toi de merveilleux souvenirs. N’oublie jamais d’écouter ton cœur, pas pour ce qu’il abrite de plus sombre, mais pour tous ces instants fragiles qui portent en eux le secret de ton bonheur. »

Sa main vint ramener derrière son oreille les mèches de cheveux qui s’étaient échappées et qui s’étaient mises à voler sur son visage.

« Sache que tu n’es pas seul Valmys ; tu ne le seras plus jamais. En rejoignant notre Ordre, le cœur de tous les autres baptistrels a toujours été avec toi. Même si tu ne peux pas le sentir, même si tu as du mal à y croire, penses-y lorsque tu seras à nouveau seul ou terrifié, lorsque tu auras besoin d’amour, d’un amour qui soit inconditionnel, éternel. »

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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Le silence revenant, Valmys reprit peu à peu conscience de sa situation, du petit être qu'il était dans l'immense grotte qui faisait résonner sa voix. Il avait chanté un instant de son histoire, de son intimité, juste pour le Cawr. Il aurait dû se sentir mal à ainsi se révéler, lui qui ne souhaitait plus que l'on voie ce qui le composait. Pourtant, devant les Cawrs, ce n'était pas un souci, il le faisait comme par nécessité. Ils étaient désormais ses seuls parents, et ses médecins. Devant Amaury en particulier, la gêne était inhibée par l'effet des chants, lui laissant ce sentiment de vide très particulier... Et l'impression d'être tout petit, avec son souvenir d'argile chôyé comme un diamant.
Il souriait, bêtement, espérant tout aussi bêtement qu'Amaury oublierait ce qu'il venait de faire, ou au moins ne s'en offusquerait pas. Au vu du caractère du chantebrise, c'était peu probable. Au vu de ses nouveaux mécanismes de pensées, cela l'était encore.

Les maître ne mentient pas, et le remerciement le toucha autant qu'il le déstabilisa. Valmys ne sut plus que faire de ses dix doigts, de ses bras, de son regard, de tout ce corps qui l'emcombrait alors qu'il avait besoin de se cacher dans un coin pour digérer les mots qu'on lui offrait. Ils étaient beaux, il n'avait plus l'habitude. Il ne savait plus comment réagir dans ces moments. Désormais, en plus d'être petit, il était pataud, maladroit comme l'éléphant dans le magasin de porcelaine. Pourtant, malgré cela, quelque chose en lui s'était fait léger, incroyablement léger. Ce petit quelque chose était flatté, et heureux d'avoir plu au Cawr. Ce petit quelque chose l'approuvait vigoureusement, et n'attendait qu'à ce qu'on l'écoute davantage. Ce fragment de lumière serra contre son coeur chaque conseil du chantebrise, comme un mantra. Si l'apprenti ne pouvait encore les saisir totalement, viendrait un moment où il le pourrait, et à ce moment-là, ils seraient là. Il saurait qu'il n'était pas seul, et qu'avait lui, il y avait toujours cette grande famille qui l'avait adopté quand sa mère avait détourné son regard de lui. Que dans ses doutes et ses craintes, il y avait des frères et soeurs pour croire en lui à sa place, et pour lesquels se battre.
Ce fut ce fragment de lumière en lui qui répondit à sa place, dans un murmure teinté d'un léger sourire.

"- Merci, Cawr Amaury..."

Le chant qui l'avait soutenu brillait encore dans les vibrations qui le composaient. Nul besoin d'être maître, il le sentait. Combien de temps durerait-il ? Une certitude s'ancra en Valmys: avec ce chant, il pouvait dormir. Sans... Les ténèbres qui le hantaient reviendraient. Là où il y avait eu de la peur se trouvait désormais un appel: il voulait dormir, et en profiter pleinement tant qu'il le pouvait. Sa crainte était désormais de ne pouvoir profiter pleinement du soin que lui avait prodigué le chantebrise.

"- Vous m'avez aidé plus que ce que je pouvais imaginer. Je ne crains plus le sommeil, maintenant..."

Il manquait quelque chose, avant d'aller dormir. Il ne pouvait partir ainsi, il restait une chose à faire, ou à vérifier. Fronçant les sourcils, Valmys chercha ce qu'il avait pu oublier. Ses hypothèses tournaient autour du Cawr pâle devant lui. Il parvint finalement à mettre le doigt sur ce qu'il lui manquait: de quoi apaiser ses inquiétudes quant à lui, et être sûr de s'endormir sans être le seul à avoir le coeur en paix. Valmys tenait à cet être qui le sauvait et, déjà, se sentait l'envie qu'il soit protégé, et que le destin lui soit favorable.

"- Et vous ? Cela ira ?"

descriptionJe voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury] EmptyRe: Je voudrais un bonhomme de neige ! [Amaury]

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