Kälyna attendait presqu’impatiemment la réponse du jeune humain qu’elle avait apostrophé pour connaître l’emplacement de son petit-fils. Heureusement, son attention fut momentanément attiré par le petit écureuil qui avait su grimper sa robe jusqu’à sa taille. Sa main blanche se porta en sa direction et elle le recueillit pour ensuite le déposer dans le capuchon de sa cape. Lorsque son attention revint sur Valmys, elle reconnut une lueur briller dans son regard sans autant en saisir l’admiration. Non, impossible qu’on puisse la trouver fabuleuse. Son esprit mit simplement cette réaction sur le compte du charme du petit animal.
« Parfait. Conduisez-moi, je vous prie. »
La prêtresse lui accorda volontiers tout le temps nécessaire pour qu’il puisse protéger son instrument de musique dans son étui. Il ne sut trouver de sourire en guise de réponse au sien, mais ses traits s’étaient quelque peu adoucis. Enfin, pas toujours évident à remarquer derrière son maquillage funeste.
Quelques secondes plus tard, le supposé humain et la supposée mère marchaient côte à côte dans les dédales du Domaine. Si Valmys savait où il s’en allait, cela paraissait être réellement un labyrinthe pour Kälyna. Pas qu’elle se perdrait puisqu’elle saurait retrouver le lac et la sortie sans difficulté, mais elle n’avait concrètement aucune idée de ce quoi qu’était quoi. C’est sans pensées paranoïaques qu’elle se laissa guider ou presque… Oui, l’idée qu’on la mène à un piège lui avait traversé l’esprit. Toutefois, elle avait rejeté cette idée. Qu’on la félicite !
La dame blanche laissa l’Enwr être le maître des discussions avec les gens qu’ils croisaient. Elle resta en retrait, silencieuse et observatrice à ce qui l’entourait. Elle reconnaissait quelques visages des quelques fois où elle était allée au Domaine sur Ambarhùna, mais ils n’étaient pas ses amis. Leur chemin en direction d’une petite tour se poursuivit où Valmys se permit la discussion. Comme quoi il fallait bien être un Enwr pour se sentir suffisamment confortable pour jaser de son écureuil.
« Tu aimes les écureuils, j’ai l’impression? »
L’ombre d’un sourire était apparu à ses lèvres ténébreuses. Sa main avait pris l’écureuil pour le déposer délicatement dans les mains de l’humelfe.
« Cette petite créature m’a acceptée comme compagnon après que je l’aie trouvée dans la cale du bateau m’ayant permis d’arriver à Tiamaranta. Il n’était alors qu’un petit bébé. Sa génitrice croyait que c’était une bonne idée que de faire son nid dans le bateau. Je peux vous confier que c’était une très mauvaise idée et qu’il est le dernier survivant de sa famille… »
L’écureuil venait à peine d’ouvrir ses yeux lorsque Kälyna l’avait trouvé. Ses frères et sœurs avaient déjà succombé à la mort de leur mère. De quoi était-elle décédée précisément? Rien de certain : le manque de nourriture, une mise à bas difficile, le mal de mer ou quoi d’autre…?
Valmys avait encore l’animal entre ses mains lorsqu’ils franchirent la porte de la nourrice d’Aranwë. Son visage était redevenu sévère tandis qu’elle balayait l’endroit où vivait son petit-fils et elle fit finalement un signe de tête à la dame. Un peu de respect tout de même pour la personne qui s’en occupait, même si son cœur ne lui portait aucune affection. Elle suivit la dame jusqu’à la chambre où Nalwë dormait tranquillement.
« Vous faites du bon travail. »
L’incompétence était un défaut que Sombréclat détestait plus que tout. Mais elle devait avouer que cette Emely’naë, car telle fut le nom qu’elle lui donna, prenait à cœur la tâche qui lui avait été confiée. Aranwë était entre de bonnes mains, bien meilleures que pouvaient être les siennes. Si c’était faux, c’était en tout cas ce que l’elfette croyait profondément.
« Je suis d’accord avec ce jeune homme. »
Autant la perplexité dans son regard quant à l’appellation de Valmys que le soulagement apparurent dans le regard de l’elfette. Il s’avérait que l’ancienne prêtresse du Tyran n’était pas là pour la torturer ou lui retirer la garde du bambin.
De son pas gracieux, la Vallaël s’approcha du petit et s’assit près de lui. Lorsqu’elle toucha son bras, elle eut droit à des gémissements. L’enfant leva ses paupières qu’il referma rapidement avant de resombrer dans les ténèbres du sommeil. Des mains blanches vinrent lui glisser autour du poignet un bracelet formé par de petites chaînes tressées où étaient entremêlées des roses de rubis, bracelet qu’elle ajusta à sa taille.
« Un cadeau de sa mère. »
C’était presqu’un murmure qui termina sur une note triste. Elle faisait référence à la défunte Mëryl, bien sûr. C’était le bracelet qu’elle lui avait offert, jadis, mais qui ne lui servirait plus jamais.