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descriptionOù est Aranwë Nalwë? EmptyOù est Aranwë Nalwë?

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Juin de l’an 1762

Ce n’était pas par bonté que Kälyna se trouvait face à ces cavernes dont les propriétaires étaient ces aimables chanteurs. Ou peut-être que ce l’était, en fait? Était-ce que pensées pleines de préjugées que de croire que cette dame à la peau blanche et aux motifs sombres, au visage dénotant un grand sérieux et dont le titre de prêtresse du Tyran Blanc lui collait toujours à la peau n’était pas capable de gentillesse et désirait seulement le chaos? Pourtant, l’elfette montait tranquillement les escaliers du domaine sans porter une attention particulière aux visiteurs qui en descendaient. Elle laissa son fouet et ses griffes à l’entrée comme le voulait la règle de bienséance chez ces pacifiques. Ce geste était fait pour sa signification : « quiconque entre dans le Domaine, laisse derrière lui ses armes. Aucune violence à l’intérieur. » Bien sûr, il serait facile de s’y dérocher. Si Sombréclat voulait détruire la paix de ces lieux, elle n’aurait pas besoin d’un fouet ni de griffes. Tout comme l’humain qu’elle venait de croiser au tournant d’une galerie et qui la dévisagea un instant avant de poursuivre son chemin. S’il désirait créer du chaos, le mercenaire n’avait pas besoin de son épée.

Les pas de l’elfette la menèrent jusqu’au grand lac. Elle s’y arrêta un moment et sortit de sa poche une petite boule de poil. L’animal, un jeune écureuil, avait la grosseur de sa paume. Elle le déposa au sol pour qu’il puisse se dégourdir les pattes, boire de l’eau ou peu importe ce qui lui traversait l’esprit. Calmement, l’or balaya l’endroit. Elle cherchait quelque chose… quelqu’un?

À une autre époque, un petit elfe à la chevelure blonde serait venu à elle presqu’immédiatement après qu’elle soit entrée. Mais sur Tiamaranta, c’était différent. Il n’y avait pas ce Chanteciel pour détecter son chant-nom parmi tous les autres. Cela lui aurait sauvé bien du temps.

« Pardonnez-moi. »

Ces deux mots franchirent ses lèvres noires à l’attention d’un individu à l’apparence humaine.

« Sauriez-vous où je peux trouver… Aranwë Nalwë? »

L’hésitation s’était marqué sur ce nom. Toujours étrange et pénible que de prononcer ce nom empli de souvenirs.

descriptionOù est Aranwë Nalwë? EmptyRe: Où est Aranwë Nalwë?

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Il avait l'air humain, et il avait l'air baptistrel. Son psaltérion était posé sur ses genoux. Il en avait usé avant de se retourner, à la recherche de l'écureuil qu'il avait cru voir passer. Néthéril n'accueillait pas de créature commune avec le vieux continent. Ce petit animal aurait été fascinant à étudier, tant pour ses différences que pour sa ressemblance avec ceux déjà connus. Il aurait pu témoigner d'un lien avec leur terre d'origine... Valmys ne songea pas à la probabilité qu'il soit l'ami de quelqu'un, et qu'il ait voyagé en bateau. Son esprit était, pour une fois, aux songes et à l'émerveillement, il voulait le laisser aller en ce sens.

Il avait l'air humble, ce petit être. Ses habits étaient tous neufs, mais il n'avait pas pris le soin de les faire beaux, de mêler l'utile à l'art. Ils étaient bruns et simples. Il ne voulait pas attirer l'attention sur son corps, surtout pas. Assis sur la terre humide des pluies qui revenaient, il savait qu'il se salissait, mais estimait cela moins important que le contact chaud du sol. Il lui avait manqué, durant son séjour en mer. Il l'aidait à ré-apprivoiser l'eau, comme un encouragement discret alors qu'il s'efforçait de rester près du lac, d'affronter ses dernières peurs. Cela marchait plutôt bien. Avec l'aide de la musique, il se sentait mieux, déjà. Il le fallait: ni le lac ni le Domaine n'avaient prévu de bouger. Lui, en revanche... Il s'imaginait mal sédentaire pour le reste de sa potentiellement courte vie. Il avait repris à marcher, re-forgeait ses muscles, songeait aux îles qu'il n'avait encore explorées, et à celle qu'il aurait dû explorer. Il devait y aller... Mais le bateau n'était plus une solution envisageable. Pas avant quelques siècles.

Il avait l'air innocent, aussi. L'application qu'il mettait à apprivoiser le lac avait peint un air serein sur son visage. La panique y passa comme une ombre lorsque, avec un sursaut, il réalisa la présence près de lui. Absorbé par son écureuil, il n'avait pas pensé que ce chant-nom là venait vers lui en particulier. Il avait eu une très brève ébauche de mouvement, pour se recroqueviller, il se retint à temps. Il lui fallait perdre cette habitude. Ici, nul ne le molesterait, et il gagnait bien plus à ne pas se protéger.

Son regard brun se leva vers la dame qui était venue à lui. Il peina à croire ce que les connaissances en lui disaient. Les marquages, sur son visage... La prêtresse du Tyran. Celui à qui il devait, indirectement, plusieurs mois passés alités... Et, en même temps, plusieurs décennies de connaissances ingérées. Sans savoir pouvoir ni comment, Valmys avait la sensation qu'il devait être bon envers elle. Qu'avait bien pu lui chanter ce Cawr...

"- Aranwë..." répéta songeusement Valmys. Ca ne lui disait fichtrement rien. C'était un nom elfique. Les elfes avaient souvent des noms avec ces consonances-là. "Je suis désolé, je ne suis revenu au Domaine que depuis peu de temps, je ne suis pas encore sûr de tous les noms... Peut-être puis-je vous aider. Pourriez-vous me décrire cette personne ?" Il avait essayé de parler le plus aimablement et doucement possible. Ces derniers jours lui avaient appris à au moins faire semblant d'être à son aise. Il ne voulait surtout pas froisser cette dame.

descriptionOù est Aranwë Nalwë? EmptyRe: Où est Aranwë Nalwë?

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L’or avait complètement recouvert le jeune elfe que Kälyna croyait humain. Sans être arrogant ni provocateur, il était froid et luisait d’un grand sérieux. Nul besoin d’être devin pour deviner qu’il ne fallait pas faire preuve d’insolence envers cette dame qui s’impatientait déjà face à l’inaction de son interlocuteur. Comme pour le signaler, ses bras se croisèrent sur son corset bleu lagon.

« Aranwë Nalwë. »

Sombréclat avait complété le nom prononcé par l’apprenti-baptistrel. Ce n’était pas n’importe qui qu’elle recherchait et qui sait combien d’autres Aranwë existait-il en ces lieux. Ce n’était pas le nom elfique le plus unique au monde. Mais cela, probablement qu’il était normal pour lui de ne pas le savoir. Heureusement pour Valmys, elle ne pensait pas moins de lui parce qu’il n’avait pas les oreilles pointues. Même que de ne pas être de son peuple natal pouvait lui accorder des points gratuits de sympathie.

« Bien sûr. Il s’agit d’un petit bambin de presque deux hivers. Aranwë Nalwë a la chevelure noire comme la mienne et les yeux presque aussi dorés. Ils sont plutôt ocres. »

Voilà à quoi se résumait la description de son petit-fils et c’était tout ce qu’elle pouvait dire sur lui. Quoi dire d’autre à propos d’un bébé qu’elle connaissait à peine, qui ne pouvait parler correctement et qui faisait certainement que brailler la majeure partie de son temps?

« Cela vous dit-il quelque chose? J’ai confié ce gamin à l’Ordre baptistral. »

S’il lui arrivait quoi que ce soit, sa colère serait terrible. Mais celle-ci dormait paisiblement, nul inquiétude ne venait troubler son âme. Ce n’était pas pour rien qu’elle avait confié cet enfant au groupe de gens les plus pacifiques qui existent. Son analyse lui avait indiqué qu’Aranwë ne pouvait être en meilleurs mains qu’auprès de ces incroyables soigneurs.

« Si vous ne savez pas qui il est ni à quel endroit il se trouve, peut-être auriez-vous une idée où les probabilités sont les plus élevées de le retrouver? Saurez-vous m’y emmener? Je ne suis point familière avec cet endroit. Cependant, je comprendrais si vous préférez rester ici à jouer tranquillement du psaltérion. »

Si l’elfe désirait s’échapper de cette situation, c’était l’opportunité à saisir puisque la dame le lui offrait. Pendant qu’elle attendait sa réponse, une petite créature poilue était revenue avec le poil quelque peu mouillé et grimpait désormais la longue robe de jais de l’ancienne prêtresse.

descriptionOù est Aranwë Nalwë? EmptyRe: Où est Aranwë Nalwë?

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La Dame semblait patiente, Valmys lui en était reconnaissant, peut-être plus que nécessaire. Il parut surpris à la description. Un bébé, au Domaine ? Son regard brun s'arrondit un peu. Oh, oui, il y en avait bien un, et il voyait même duquel il s'agissait. Le brave bambin était toujours au bras d'une Enwr assez âgée, mais ravie de l'avoir à ses côtés. L'esprit toujours préoccupé de l'elfe aux traits humains n'avait jamais trop songé à cet être, l'attribuant tout naturellement à celle qui s'en occupait. Désormais, il faisait des liens. Leur peu de ressemblance physique, les points communs avec la prêtresse face à lui...

Il n'était plus le seul enfant légué au Domaine. Oh, il l'avait toujours su, mais sans vraiment le réaliser, n'ayant jamais pris le temps de trop se mêler aux siens. Mais plus encore, il découvrait que parfois, les Mères revenaient. De la surprise, son regard passa à une sorte d'admiration, laquelle jeta un nuage de paillettes et d'étoiles dans ses yeux, alors qu'il observait la Dame. Elle était fabuleuse. Aranwë avait une chance qu'il n'imaginait sans doute pas. Cette chance avait les traits de Kälyna.

Après un bref instant à observer la prêtresse, bouche entr'ouverte et regard émerveillé, Valmys se souvint qu'il était socialement mieux vu de répondre aux gens. Bon gré mal gré, l'Enwr reprit en main ses pensées, balbutiant:

"- Euhm, oui, je... Je pense savoir où nous pouvons le trouver. Il est sans doute auprès de l'Enwr qui veille le plus sur lui. Si vous acceptez de me suivre..."

Il s'était redressé, ramenant son instrument dans son étui, offrant un sourire à Kälyna. Il n'était pas aussi franc qu'il aurait voulu le faire -c'était encore difficile, pour lui.

Comme convenu, il la guida, vers le bâtiment principal des baptistrels. Moult chants et mélodies en émanaient, baignés de l'odeur de la pluie et de la chlorophylle. Leur chemin croisa celui d'autres apprentis, que Valmys questionna au sujet de l'Enwr qu'il cherchait. Il obtint finalement qu'elle était dans ses appartements. Ils se trouvaient un peu plus loin, dans un bâtiment à part, une sorte de petite tour ronde où le lierre se mêlait aux statues. Ce chemin offrit à Valmys l'occasion de questionner, maladroitement, la Dame sur son compagnon écureuil, pour en apprendre plus sur lui. Une partie de lui s'y intéressait vraiment. L'autre partie ne pensait qu'à une chose: la chance qu'avait Aranwë, la personne exceptionnelle qu'était Kälyna.

Les appartements dans lesquels ils s'avancèrent n'étaient pas les plus spacieux. L'Enwr qui vivait ici y avait entassé dessins et sculptures. Elle vint les accueillir, quittant son écritoire et ses enluminures. Elle était aussi heureuse qu'inquiète de voir se présenter Kälyna, mais fit de son mieux pour que la Dame ne vit de cela que ce qui lui serait plaisant de voir. Elle les guida jusqu'à sa chambre, qu'elle partageait avec le bambin. Il dormait dans un lit composé de tant de tissus qu'il en ressemblait presque à un nid. Le petit être était l'apaisement dans un corps d'elfe.

L'Enwr qui veillait habituellement sur le petit prit le soin de chuchoter à Kälyna tout ce qu'elle aurait pu vouloir savoir sur lui. Combien il mangeait bien, combien sa santé était bonne, le petit caractère qu'il avait, ses arts préférés, combien il était adorable auprès des autres êtres qui peuplaient le Domaine, ses premières bêtises... Petit à petit, son inquiétude s'effaça, et sa voix trahissait son attachement au petit être. Elle avait toujours voulu un petit, sans pouvoir en avoir. Aranwë était le soleil de ses nuits, et elle faisait de son mieux pour qu'il puisse rayonner autant que cela lui était possible.

Valmys s'était installé légèrement en retrait, sur une chaise opportune. Les bras croisés devant son ventre, comme si ce dernier lui faisait mal, il contemplait le sol. Du coin des lèvres, il esquissait un sourire entre l'émotion et la tristesse, de temps à autre. Il ne pouvait s'empêcher d'imaginer ce que cela aurait été, si sa mère était venue le voir. Deocyne aurait raconté combien il marchait bien, combien les gens qu'ils croisaient s'émerveillaient de sa voix, et elle aurait peut-être fini par se montrer fière de lui. Si elle lui avait laissé juste une chance, juste la possibilité de la rendre fière, malgré ses oreilles rondes...

L'Enwr qui contait à Kälyna la journée d'Aranwë acheva son histoire. Elle eut un coup d'oeil en arrière, vers son confrère de l'Ordre, à la mine mélancolique.

"- Valmys ?"

Comment avait-elle réussi à retenir son prénom alors que lui-même l'appelait mentalement "peau-pâle-et-menton-pointu" ? Ah, oui. Elle n'avait eu qu'un nouveau prénom à retenir, à son arrivée. Lui, il avait brusquement eu tout un Domaine à apprendre. Il força à nouveau son sourire.

"- Je me disais qu'Aranwë avait énormément de chance de vous avoir."

Vous. Au pluriel. Elle, et Kälyna. Il avait sa mère de sang et sa mère de coeur. Que pouvait-on demander de plus ?

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Kälyna attendait presqu’impatiemment la réponse du jeune humain qu’elle avait apostrophé pour connaître l’emplacement de son petit-fils. Heureusement, son attention fut momentanément attiré par le petit écureuil qui avait su grimper sa robe jusqu’à sa taille. Sa main blanche se porta en sa direction et elle le recueillit pour ensuite le déposer dans le capuchon de sa cape. Lorsque son attention revint sur Valmys, elle reconnut une lueur briller dans son regard sans autant en saisir l’admiration. Non, impossible qu’on puisse la trouver fabuleuse. Son esprit mit simplement cette réaction sur le compte du charme du petit animal.

« Parfait. Conduisez-moi, je vous prie. »

La prêtresse lui accorda volontiers tout le temps nécessaire pour qu’il puisse protéger son instrument de musique dans son étui. Il ne sut trouver de sourire en guise de réponse au sien, mais ses traits s’étaient quelque peu adoucis. Enfin, pas toujours évident à remarquer derrière son maquillage funeste.

Quelques secondes plus tard, le supposé humain et la supposée mère marchaient côte à côte dans les dédales du Domaine. Si Valmys savait où il s’en allait, cela paraissait être réellement un labyrinthe pour Kälyna. Pas qu’elle se perdrait puisqu’elle saurait retrouver le lac et la sortie sans difficulté, mais elle n’avait concrètement aucune idée de ce quoi qu’était quoi. C’est sans pensées paranoïaques qu’elle se laissa guider ou presque… Oui, l’idée qu’on la mène à un piège lui avait traversé l’esprit. Toutefois, elle avait rejeté cette idée. Qu’on la félicite !

La dame blanche laissa l’Enwr être le maître des discussions avec les gens qu’ils croisaient. Elle resta en retrait, silencieuse et observatrice à ce qui l’entourait. Elle reconnaissait quelques visages des quelques fois où elle était allée au Domaine sur Ambarhùna, mais ils n’étaient pas ses amis. Leur chemin en direction d’une petite tour se poursuivit où Valmys se permit la discussion. Comme quoi il fallait bien être un Enwr pour se sentir suffisamment confortable pour jaser de son écureuil.

« Tu aimes les écureuils, j’ai l’impression? »

L’ombre d’un sourire était apparu à ses lèvres ténébreuses. Sa main avait pris l’écureuil pour le déposer délicatement dans les mains de l’humelfe.

« Cette petite créature m’a acceptée comme compagnon après que je l’aie trouvée dans la cale du bateau m’ayant permis d’arriver à Tiamaranta. Il n’était alors qu’un petit bébé. Sa génitrice croyait que c’était une bonne idée que de faire son nid dans le bateau. Je peux vous confier que c’était une très mauvaise idée et qu’il est le dernier survivant de sa famille… »

L’écureuil venait à peine d’ouvrir ses yeux lorsque Kälyna l’avait trouvé. Ses frères et sœurs avaient déjà succombé à la mort de leur mère. De quoi était-elle décédée précisément? Rien de certain : le manque de nourriture, une mise à bas difficile, le mal de mer ou quoi d’autre…?

Valmys avait encore l’animal entre ses mains lorsqu’ils franchirent la porte de la nourrice d’Aranwë. Son visage était redevenu sévère tandis qu’elle balayait l’endroit où vivait son petit-fils et elle fit finalement un signe de tête à la dame. Un peu de respect tout de même pour la personne qui s’en occupait, même si son cœur ne lui portait aucune affection. Elle suivit la dame jusqu’à la chambre où Nalwë dormait tranquillement.

« Vous faites du bon travail. »

L’incompétence était un défaut que Sombréclat détestait plus que tout. Mais elle devait avouer que cette Emely’naë, car telle fut le nom qu’elle lui donna, prenait à cœur la tâche qui lui avait été confiée. Aranwë était entre de bonnes mains, bien meilleures que pouvaient être les siennes. Si c’était faux, c’était en tout cas ce que l’elfette croyait profondément.

« Je suis d’accord avec ce jeune homme. »

Autant la perplexité dans son regard quant à l’appellation de Valmys que le soulagement apparurent dans le regard de l’elfette. Il s’avérait que l’ancienne prêtresse du Tyran n’était pas là pour la torturer ou lui retirer la garde du bambin.  

De son pas gracieux, la Vallaël s’approcha du petit et s’assit près de lui. Lorsqu’elle toucha son bras, elle eut droit à des gémissements. L’enfant leva ses paupières qu’il referma rapidement avant de resombrer dans les ténèbres du sommeil. Des mains blanches vinrent lui glisser autour du poignet un bracelet formé par de petites chaînes tressées où étaient entremêlées des roses de rubis, bracelet qu’elle ajusta à sa taille.

« Un cadeau de sa mère. »

C’était presqu’un murmure qui termina sur une note triste. Elle faisait référence à la défunte Mëryl, bien sûr. C’était le bracelet qu’elle lui avait offert, jadis, mais qui ne lui servirait plus jamais.

descriptionOù est Aranwë Nalwë? EmptyRe: Où est Aranwë Nalwë?

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Valmys avait bien saisi que Kälyna n'avait pas reçu son compliment, ne l'octroyant qu'à peau-pâle-menton-pointu. Cela le chagrina un peu, mais le spectacle du soulagement de la mère adoptive, très vite camouflé sitôt que Sombréclat se tourna en sa direction, l'occupa et força à nouveau son sourire. Emely'naë avait-elle vraiment cru qu'il y avait quoi que ce soit que l'on puisse lui reprocher, quand tout en elle, et tout le petit être, témoignaient d'un traitement rare aux enfants de ce monde ?

L'elfe aux traits humains se raidit au oyant le début de gémissement du petit être. Il n'avait rien contre les enfants -si ce n'était sa jalousie-, mais les préférait souvent baillonnés, ou muets. Deux conditionnés qui n'étaient, hélas, que rarement remplies. Par chance, les bébés elfes étaient souvent plus discrets que les humains. Celui-là ne dérogeait pas l'idée reçue. Il offrit tout juste la couleur de ses yeux, avant de préférer à la compagnie qui lui était offerte celle du monde des songes.

Dommage pour lui. Il ne profiterait de la vue du présent qui lui était remis. Peut-être que, même éveillé, il aurait oublié... Valmys ne pouvait savoir, n'ayant pas connu ces années à l'image des siens.Tout juste pouvait-il s'émouvoir, baisser un peu les yeux pour n'observer qu'à moitié la scène, et espérer ne pas se laisser submerger par les émotions, notamment l'envie qu'il s'était tant évertué à enterrer en tant d'années. Mais qu'y pouvait-il, quand l'univers entier s'échinait à le narguer ?
Au moins était-il heureux pour le petit, et ne voulait lui retirer ce qui lui était apporté. Non, pas la bague. Plutôt le retour de sa mère, et le don de cette dernière. Don de temps, d'attention. Il avait le droit à cela. Ils avaient tous le droit à cela. Valmys avait dû perdre ce droit à un moment... Les malheurs du passé étaient-ils influencés par les méfaits du futur ? Peut-être. Peut-être que c'était de sa faute, et qu'il l'avait mérité. Qu'il pourrait juste admirer ce qu'allait faire Aranwë. Peut-être...

Se redressant, Valmys s'approcha légèrement de la scène, sans oser encore rejoindre la prêtresse blanche. A mi-voix, il se permit:

"- Il m'est avis que ce n'est pas là le seul cadeau que vous lui apportez."

Simple avis, accompagné d'un sourire qu'il se forçait à avoir pour signifier son admiration à la dame. Simple avis, mais subtilement témoin de sa méprise quant à la mère du petit être. Il était trop jeune et trop tôt pour l'affirmer encore totalement. Une fluctuation dans la magie ambiante lui apporta une information supplémentaire. Il pencha légèrement la tête.

"- Quel est le pouvoir de ce bijou ?"

Mieux valait pour eux le savoir, et plus tard le transmettre au petit s'il le souhaitait. Ledit pouvoir comprenait sans doute sa propre part de signification. Baissant à nouveau la tête, par respect cette fois, Valmys ajouta:

"- Si nul avant moi ne vous le proposât, voyez-vous désormais invitée au Domaine. Puissiez-vous y séjourner aussi longtemps que cela vous siéra. Si quelque chose venait à vous manquer, n'hésitez pas à me faire mander."

Il ferait de son mieux, dans la mesure de ses moyens. Il ignorait totalement si de telles invitations étaient de mises, si les maitres y voyaient quelque inconvénient, partant du principe que sa seule éducation suffisait à deviner les préférences de ces derniers. Tant que la Dame se montrait pacifique, que pourraient-ils lui reprocher ? Valmys s'apprêtait à veiller sur elle comme il eut aimé veiller sur une autre elfe, qui par le sang lui était liée. Secrètement, il caressait l'espoir que son séjour se fit plus long que prévu, ou s'acheva sur de plus forts liens avec l'être qu'elle avait jadis voulu laisser ici. Peut-être qu'apprendre à le connaître l'aiderait, peut-être qu'elle s'y attacherait... Puisqu'elle semblait dôtée d'instinct maternel.

descriptionOù est Aranwë Nalwë? EmptyRe: Où est Aranwë Nalwë?

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Le petit avait désormais un joli bracelet qui trônait à son poignet, mais il n’en saisirait probablement jamais l’ampleur du geste et de sa signification. L’or cessa de couvrir l’enfant paisiblement assoupi pour l’offrir au supposé humain qui l’avait presque rejointe. Les membres de l’Ordre baptistral étaient toujours aussi étranges à ses yeux. Ils étaient les seuls, hormis quelques exceptions, à être en mesure de ne pas frustrer inutilement la dame blanche et encore plus surprenamment, à la complimenter. Elle avait saisi derrière ses mots qu’il y avait louanges et plus encore… Difficile de mettre précisément le doigt dessus. Était-ce de l’envie qu’elle percevait derrière son sourire?

« Ce bijou est précieux. Assurez-vous qu’Aranwë ne le perde pas, chère gardienne. »

Elle ignorait le nom d’Emely’naë puisqu’elle ne s’était pas présentée, mais cela lui importait peu en réalité. Sombréclat lui avait offert un surnom puisqu’elle considérait que l’Enwr en était digne. Tout un hommage de la part de l’ancienne prêtresse, n’est-ce pas? Que la tête ne lui enfle pas trop, car il était facile de la décevoir par la suite.

L’humain avait demandé quel pouvoir recelait le bijou, mais la dame blanche resta plutôt silencieuse à ce sujet. Qu’Aranwë ne le perde pas, c’est tout ce qu’elle désirait. Ensuite, elle croyait qu’il valait mieux que les gens ne sachent pas que l’objet fleuri permettait d’avoir un contact avec la hors-la-loi qu’elle était. Déjà, si les gens savaient qu’elle avait laissé son petit-fils ici, qu’arriverait-il? Rien… Les probabilités voulaient que le petit elfe grandisse dans ce tout ce qu’il y a de plus normal, mais les ombres de la paranoïa tenaillaient la sorcière. Tout comme elle avait eu peur pour Mëryl, elle avait peur que des individus mal intentionnés se servent de ses proches pour lui faire du mal et leur faire du mal.

« Je vous en remercie, jeune homme. Auriez-vous l’amabilité de continuer d’être mon guide en ces lieux? »

Elle s’était retournée une dernière fois vers la vieille dame pour la saluer convenablement de façon elfique. Elle laissa ensuite l’Enwr franchir en premier la porte et elle la referma derrière elle.

« Si cela peut rester entre nous, je consens à vous dire le pouvoir du bracelet que j’ai offert à Aranwë. Lorsqu’il sera en âge de l’utiliser convenablement, vous pourrez le lui dire. Allons d’abord à un endroit où il n’y a pas d’oreilles. »

L’elfette s’éloignait de la chambre d’Emely’naë aux côtés de Valmys. Elle reprit entre ses mains le petit écureuil alerte.

« Vous étiez sérieux lorsque vous m’avez invitée à rester ici? Ma réputation me précède, je ne suis pas très aimée. Vous savez qui je suis, n’est-ce pas? Kälyna Vallaël, ancienne prêtresse du Tyran Blanc, renégate et ennemie publique des trois peuples. »

Il avait semé le doute dans son esprit par sa gentillesse.

« Vous rencontrer m’a été agréable. Vous me faites penser à quelqu’un. Puis-je vous demander votre nom? »

descriptionOù est Aranwë Nalwë? EmptyRe: Où est Aranwë Nalwë?

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L'Enwr avait opiné du chef en réponse à la demande d'un lieu plus isolé. Cela lui convenait aussi. Il se sentait l'humeur sensible, et n'avait que peu l'envie de partager cette dernière avec plus de personnes que nécessaires. Ses pas prirent les devants, guidant la prêtresse pâle dans les escaliers en colimaçon de la tour, jusqu'à une petite trappe s'ouvrant sur le toit.
Un faible sourire passa sur les lèvres de Valmys en entendant les questions de son aînée. Il la comprenait plus qu'il ne l'aurait souhaité. C'était toujours surprenant de retrouver l'amour après la haine, la paix après le conflit. C'était toujours difficile d'admettre et accepter que le monde puisse être un peu plus doux. Le retour au Domaine avait été difficile à appréhender pour lui déjà qui avait pu le connaître. Valmys ignorait ce qui constituait l'existence de Sombréclat, ignorait si elle avait déjà connu ce parfum particulier qui émanait du lieu de vie des baptistrels. Les elfes pouvaient parfois être plus cruels que ce que les légendes indiquaient à leur sujet. Avait-elle déjà connu le confort douillet de la sécurité, lorsqu'autrui ne pouvait être que bienveillance ? Trouverait-elle un écho à son passé, en serait-elle nostalgique, si elle restait trop longtemps ici ? Valmys ignorait comment se faisait une rédemption, ignorait encore ce qui pouvait apaiser la prêtresse blanche... Si seulement la rédemption était son ambition. Peut-être n'avait-elle nullement besoin de réconfort face à la haine que pouvaient désormais avoir les peuples face à ceux qui avaient servi le Blanc. Peut-être ne voulait-elle que la vengeance, et profitait d'un peu de confort avant de retourner verser le sang.
Peut-être. Mais ce n'était pas ce qu'indiquait en lui l'intuition laissée par les chants inconscients de Dawan. Valmys ne l'avait pas assez connu pour s'imaginer que ce jugement puisse être biaisé de l'amour inconditionnel que le Cawr avait voué à tout ce qui vivait. Il lui faisait confiance. Il lui faisait d'autant plus confiance que, si Sombréclat pouvait le blesser, elle ne semblait pas encline à le blesser de la façon qui avait failli le tuer, celle employée par les pirates. Elle avait l'allure d'une femme d'honneur.

"- Le Domaine se veut neutre politiquement."

Rappela-t-il, en ouvrant la trappe au-dessus d'eux, déversant la lumière de l'extérieur sur les escaliers. Ils retrouvèrent l'air "libre" de la grotte. Le toit de la petite tour était bordé d'une rampe finement stylisée, d'une structure en forme de toit où s'enroulaient des plantes grimpantes. Ils avaient une vue fort agréable sur le lac et, surtout, ici, personne ne pouvait les entendra. Valmys referma derrière la prêtresse blanche.
Le Domaine était neutre, et l'avis des autres peuples sur un individu ne l'intéressait pas. Les baptistrels suivaient leurs propres ambitions, mais ne les imposaient pas. Le lieu dans lequel ils se trouvaient était comme un sanctuaire de paix, et cette dernière y était l'une des rares véritables lois à ne pas enfreindre. En pénétrant ici, Kälyna le savait. À partir de là... Valmys n'était-il pas libre d'inviter ses amis, si peu raccords avec ses idées qu'ils soient ? Il l'espérait. Sans quoi il allait se faire taper sur les doigts. Le jeune elfe aux traits humains se rapprocha de la rambarde, s'y appuyant. Il était toujours un peu plus faible qu'avant.

"- Je me nomme Valmys Neolenn. Sans doute ne me connaissez-vous pas... L'un de vos Hommes m'a connu, néanmoins." Il eut un fin sourire, un peu joueur. "Un poison de la Théocratie manqua m'ôter la vie." Alors ce sourire, et cette invitation, devaient paraitre plus étranges encore à Kälyna, d'autant plus alors qu'elle avait face à elle quelqu'un qui ne pouvait profiter de son sommeil pour la sacrifier sur l'autel rouge de la vengeance. Cette idée amusait Valmys. Il se voyait, à sa place, et savait qu'il allait lui apporter quelque chose que peu en ce monde devaient sans doute lui offrir. Il aimait faire des cadeaux, et bien les faire. Il retrouvait plus ou moins ce plaisir, lui qui n'avait pas vraiment pu offrir ces derniers temps. "Cet événement me permit de devenir l'élève de Dawan Sywel. Il veilla sur moi durant ma convalescence, et prit grand soin de me transmettre tout ce qu'il lui était possible de m'enseigner. Vous fûtes un de ces savoirs. Il me parla de vous en de tendres termes."

Valmys avait naturellement déduit que le nom devait être évocateur pour la prêtresse. Il espérait que l'affection de Dawan soit réciproque, sans quoi... Il ne savait pas. Il l'espérait juste. De toutes façons, Dawan n'était plus là pour en profiter. Lui, il l'était.. Et sans le comprendre ni le réaliser, il cherchait à récupérer l'affection que Dawan avait pu connaître, celle qu'Aranwë connaissait également, puisque Kälyna semblait savoir la dispenser.

"- Aujourd'hui vous ne m'avez donné de raison de mettre en doute ses paroles. Vos gestes envers Aranwë, si je ne puis plus les connaître de ma propre mère, je doute sincèrement les avoir un jour connus. Très tôt je fus confié à un membre de l'Ordre. Je ne saurai vous décrire ne serait-ce que la couleur de peau de ma mère."

Il ne cherchait pas sa pitié. Il lui expliquait juste pourquoi elle était invitée. Le fait que de telles paroles puissent éventuellement servir à convaincre de revenir régulièrement s'occuper d'Aranwë n'était qu'un détail, un dommage collatéral.

"- Si vous venez en paix, si vous venez pour un enfant... Qui serais-je pour vous empêcher de rester ? Comment pourrais-je seulement regarder Aranwë en face lorsqu'il sera grand ?"

Il souriait, à nouveau, de façon plus douce. Son regard était humide d'émotion, mais il ne pleurait pas. Il était surtout ému. Il avait peur, également. Il s'était beaucoup découvert, il n'en avait plus l'habitude. Il avait peur, malgré lui, que cela ne soit à nouveau qu'une porte ouverte à une blessure.

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Enfin, un peu de tranquillité. Kälyna ne détestait pas de s’être éloignée de tous ces Enwrs, Cawrs et voyageurs, gens qu’elle aurait pu croiser, pour se retrouver en tête à tête avec l’humelfe. Elle le suivit et se hissa à travers la trappe qui la mena au toit. Elle eut un moment d’hésitation, un moment où son cœur s’affola. L’avait-il remarqué malgré son visage impassible? Et si c’était un piège…? Car oui, cette fameuse question à laquelle l’ancienne prêtresse était souvent confrontée était revenue la hanter. Toutefois, elle vint trouver place aux côtés du dénommé Valmys Neoleen.

« Un Chanteciel m’a jadis répondu la même chose que vous. »

Elle ne se rappelait plus les mots exacts que Dawan avait employés, mais la signification était identique. Qu’elle soit hors-la-loi, ennemie public ou une elfette recherchée, ici au domaine, cela n’avait pas la moindre importance. Il suffisait simplement qu’elle suive leurs règles et c’était tout. Ce n’était pas bien difficile lorsque son but n’était pas de semer le chaos et la désharmonie.

« Ce ne sont pas tous les membres de l’Ordre qui m’apprécient cependant, mais jusqu’à présent j’ai toujours respecté ce pacte de non-agression. Je ne suis pas ici pour faire la guerre. Je ne veux pas que vous ayez des ennuis non plus, vous savez. »

Elle l’appréciait bien. Voilà. Elle n’allait pas le lui dire à voix haute, cependant, ça ne lui ressemblerait pas! Son regard s’assombrit, l’or devint plus doux tandis qu’il se nommait et qu’il racontait un brin de son passé. Sombréclat aurait dû y penser : les probabilités qu’elle ait influencé négativement sa vie étaient très élevées. Mais était-ce de sa faute si « l’un de ses hommes » l’avait empoisonné?

« Je n’ai jamais demandé à ce qu’on empoisonne un dénommé Valmys Neolenn. »

Que de piètres excuses, n’est-ce pas? Si seulement son regard pouvait parler pour elle, cela serait plus simple. Grande oratrice qu’elle était et pourtant les mots semblaient trop souvent lui échapper.

« Au nom du Blanc, j’ai fait des choses horribles, bien cruelles, je le reconnais. Et en mon nom, nombreux sont ceux qui ont imité mes gestes et ont semé l’effroi. Vous n’êtes pas le seul dont j’ai affecté la vie, directement ou indirectement. Je ne peux changer votre passé, mais peut-être puis-je embellir votre futur. Vous n’êtes pas mon ennemi, Valmys. »

Ses mots avaient été prononcés avec une touche de douceur. Aucun sourire, mais son regard avait brillé sous le nom évoqué du petit baptistrel.

« Tout comme votre ancien maître ne l’était pas. En réalité, Dawan Sywel fut mon premier ami. Il n’aurait pas pu parler en d’autres termes que bienveillants, il avait le don de ne voir que le bon chez les gens. Je ne sais pas ce qu’il a trouvé chez moi… »

Pourquoi lui disait-elle tout cela? Sûrement parce que cet humain lui faisait penser à cette Lumière Céleste. Tel maître, tel apprenti? Vrai qu’il avait été son premier ami. Même si elle ne lui avait jamais dit de vive voix, il l’avait ressenti, n’est-ce pas? Mais aujourd’hui, il n’était plus qu’un souvenir.

La discussion avait poursuivi. La dame blanche ne l’avait pas interrompu et elle n’avait pas essayé de le dissuader. Il croyait, comme son maître, qu’elle était une « bonne » personne.

« Vous avez beaucoup souffert. »

Elle, capable d’empathie?! Et plus encore… Car se rapprochant de Valmys, elle entoura doucement ses bras immaculés autour de son petit corps et le serra contre elle.

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Valmys avait toujours été relativement expressif. Il était rare de ne pouvoir lire ou deviner ses émotions. Il offrit un signe de tête à la prêtresse blanche lorsqu'elle lui expliqua qu'elle ne voulait pas qu'il ait d'ennuis. Il la croyait. Ce n'était pas un sujet qui l'inquiétait. Une mère telle qu'elle ne pouvait être de mauvais augure, d'autant plus après ce que le chanteciel lui avait dit d'elle. Réalisant cela, Valmys dut s'avouer surpris de lui-même. Etait-il en train de faire confiance à une inconnue, de façon tout à fait arbitraire ? Woh. C'était... Un peu étrange, après les derniers jours qu'il avait connu. Un peu déstabilisant. Une partie de lui eut envie de la craindre tout de même, par habitude, parce qu'au fond il était rassurant de craindre les gens. C'était comme si la peur allait le protéger au moment adéquat. Difficile néanmoins de ressentir une peur sincère, avec le souvenir d'un Dawan serein et confiant en tête. Les Cawrs ne mentaient pas.

Un autre léger mouvement de tête et de main indiqua à Kälyna de ne pas s'inquiéter: il s'imaginait bien qu'elle n'avait pu le viser personnellement, et il ne lui en tenait pas rigueur. Il comprenait, par ailleurs, son désir de rédemption. C'était à son honneur, et cela ne faisait que confirmer son a priori la concernant. Bien des questions demeuraient en suspens pour le petit humelfe: pourquoi s'être jadis mise au service du Blanc, qu'est-ce donc qui avait orienté son avis... Il était néanmoins trop tôt pour la questionner ainsi. Si elle désirait l'évoquer, Valmys écouterait. Mais ç'aurait été bien inquisiteur et fort peu adapté de sa part de demander tout cela, de force, comme on demande de rendre des comptes. Ce n'était pas non plus accordé à son état d'esprit, où la prudence se battait avec la confiance.

Il imagina fort bien, en revanche, l'histoire qui se cachait derrière le "premier ami" de la prêtresse blanche. De l'amour on disait bien des choses, oubliant parfois combien l'amitié pouvait embraser les sentiments de pareille façon, combien elle pouvait changer les destins, et donner de nouvelles nuances à la peinture du monde. À travers le regard d'un Chanteciel, il était aisé de se voir différemment, de découvrir de nouvelles conséquences à ses actes. Etait-ce Dawan qui avait poussé Kälyna à se détourner du défunt tyran, volontairement ou non ? Le Cawr n'avait rien évoqué de cela à son patient. Il était assez spécial pour qu'il soit possible de s'interroger à savoir s'il avait eu conscience de ses actes ou non. Un coup de génie était autant possible qu'un coup de chance.
Valmys partageait une interrogation en commun avec la prêtresse: pourquoi eux ? Pourquoi avoir choisi d'offrir son amitié à Kälyna, pourquoi avoir choisi de confier tout son savoir à un Enwr qu'il n'avait pas connu avant ?
L'interrogation n'aurait sans doute jamais de réponse.

L'allusion à sa souffrance appela divers écho en Valmys. Il se demanda sincèrement si c'était aussi flagrant, si tout le monde arrivait désormais à lire son chant-nom. Il lui semblait également que les gens qui l'entouraient ressentaient davantage sa souffrance que lui, avec les multiples barrières mentales qu'il érigeait pour s'en protéger. Peut-être laissait-il des traces dont il n'avait consciences, qui révélaient bien trop. Il avait parlé de sa mère à Kälyna, mais... Est-ce que cela lui avait tout dévoilé ? Les morts, les pirates...?

Son coeur s'emballa brusquement en sentant des bras autour de lui. Danger. Pirates. Souffrances. Il falait fuir, et se terrer dans un coin. Non... S'il fuyait, il allait lui faire du mal, comme il l'avait fait jadis avec Ilyanth. Sa prudence lui murmurait que ce n'était pas une bonne idée de repousser une prêtresse qui avait tant oeuvré à apaiser sa cruauté. Mais alors, que devait-il faire ? Rester là, et devenir son jouet ?
Etrangement, cette idée sonnait bizarre. Peut-être était-ce parce que moins de femmes l'avaient malmené ainsi peut-être était-ce parce que les soins de ses camarades baptistrels commençaient à faire leur effet. Peut-être était-ce parce que Kälyna était une mère, et que les mères ne feraient jamais de mal à leurs petits. Une pensée fulgurante traversa son esprit: et s'il devait agir comme s'il était son petit, pour survivre ?

C'est que... Il avait toujours peur. Ses bras avaient toujours peur de ce genre de gestes. Et il ne savait pas vraiment comment faire. après un instant d'hésitation, il se décida, néanmoins. Maladroitement, tremblant, il rendit à Kälyna son étreinte, essaya de poser sa tête sur son épaule. Lorsque ce bref câlin s'acheva, lorsque Valmys s'écarta, il se surprit à reprendre -discrètement- son souffle, et à se trouver tout déstabilisé, ignorant le temps qui avait passé. Un coup d'oeil autour de lui indiqua que le soleil n'avait pas tant bougé.
Ses joues lui parurent plus chaudes, il les devina assombries de rose. Il avait le sentiment que la prêtresse blanche avait tout deviné de lui, et cela le gênait. Elle avait deviné sa souffrance, et il lui était évident que sa maladresse en matière de câlins en dévoilait trop sur celle qu'il voulait taire. L'Enwr détourna le regard.

"- Puisse cet archipel nous offrir un meilleur avenir."

Pour le moment, rien n'avait prouvé une quelconque volonté de ces terres à oeuvrer dans le sens de Valmys. Kälyna avait peut-être eu plus de chance. Il l'espérait, pour elle. Mais la force qu'elle dégageait n'avait rien à voir avec la blessure qui handicapait Valmys. À moins que... Et si ce n'était qu'une question de caractère ? Et s'il n'était que faible, et trop sensible, comme cela lui avait plusieurs fois été reproché ? En tout cas, pour lui, une chose était claire, désormais: il avait vraiment une tête de peluche et, de là, il était naturel que les gens cherchent à le câliner. Il allait devoir se pencher sur le sujet.
Il songerait plus tard à ces reproches qu'il avait à se faire. L'heure était venue de changer de sujet. Il ne serait pas dit qu'il avait offert une mauvaise compagnie à son invitée ! Essayant de reprendre un peu de consistance, Valmys força un sourire sur ses lèvres.

"- Si vous désirez vous reposer, je puis vous proposer quelques appartements. Sans cela... Y a-t-il un art que vous souhaiteriez pratiquer ?"

Oui, le bracelet d'Aranwë lui était totalement sorti de l'esprit. Mais puisqu'ils parlaient de repos... Autant Valmys ne s'inquiétait pas de l'écureuil qui accompagnait son invitée, autant il y avait un autre point à prendre en considération. Un point qu'une petite voix dans sa mémoire lui murmurait.

"- ...Votre ami de grenat est-il venu avec vous ?"

Dans sa voix transparaissait une bribe d'inquiétude. Point de peur, non. Plutôt la crainte d'avoir manqué à son devoir en ne considérant que la bipède seule, et éloignant son ami. Ce n'était pas là ce qu'il souhaitait. Tant qu'à inviter l'ancienne prêtresse du tyran, autant en profiter et inviter également le colérique. Au moins, si les maîtres se décidaient à lui tirer les oreilles pour son initiative, ils auraient une raison supplémentaire de le faire.
Mais n'avaient-ils pas jadis invité Verith ici ?

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Mais qu’est-ce qui lui était passé par la tête? La dame blanche au terrible passé câlinait un jeune homme qu’elle ne connaissait à peine. Était-ce réellement la fameuse hors-la-loi qui se cachait derrière ce masque blanc? C’était certainement une ruse. Elle mettrait ses mains autour du cou de l’humelfe afin de le lui casser, c’était ça le plan, n’est-ce pas? Non… L’étreinte était réelle, bien que maladroitement exécuté. La maladresse venait des deux parties, alors on pourrait dire que ça allait. Est-ce que c’est cela qui arrive lorsqu’on se sent seul au monde, on se met à câliner le premier venu? Mais Valmys n’était pas n’importe qui. Non, Kälyna n’enlacerait pas n’importe qui. Le comble aurait été que l’Enwr ne le lui rende pas. Comment Sombréclat aurait réagi s’il avait refusé son geste se voulant chaleureux? Elle aurait sorti la carte de l’indifférence tandis que son cœur aurait hurlé dans le plus grand silence.

L’étreinte n’avait duré que quelques secondes. La mère le relâcha doucement, le couvrant toujours de son or. Ils n’avaient pas besoin d’évoquer ce moment. Ils n’avaient pas à en parler. Personne n’avait à le savoir. C’était tout aussi déstabilisant pour elle que pour l’humelfe. Qu’est-ce qui lui avait pris? Elle avait ressenti sa souffrance… Ou était-ce la sienne qu’elle avait voulu apaiser? Égoïstement… Celle d’une mère qui désirait son enfant.

« Espérons-le… »

Le ton employé était dénué de joie comme si l’avenir était de mauvais présage. Pour qui? Pour elle, pour les Elysiens? Quel secret cachait la prêtresse?

Elle replaça une mèche de sa chevelure ténébreuse et se permit de se perdre dans le ciel. Là-haut, sur le toit, la vue était magnifique.

« Non, je suis venue seule. Le Feu de l’Ire est occupé. Il vole là où la liberté le mène. »

Comprendre par ses paroles que Kälyna n’était pas avec Verith et qu’elle ignorait précisément où il se trouvait. C’était probablement mieux ainsi que de subir le courroux du rouge. En effet, ce dernier tenait pour responsable les Baptistrels quant à ce que les Dieux lui avaient fait. C’était un peu saugrenu quand on y pense, surtout que c’était grâce à ces derniers qu’il avait perdu la malédiction de Feu. Or, il était bien difficile de le faire changer d’avis… Et l’elfe ne gagnerait rien à s’y essayer. Que faisait le Rouge? Il devait être auprès de sa famille ou être en train de préparer une expédition périlleuse. Cette dernière option était la plus probable.

« Je ne suis pas fatiguée. L’êtes-vous? »

Kälyna avait à nouveau offert son or au jeune homme qu’elle croyait humain. Elle revenait sur un point qu’il avait mentionné plus tôt. Elle ne l’avait pas complètement ignoré.

« De quel art parlez-vous? »

Il ne s’agissait pas de l’art de tuer, de torturer ou de vénérer, ça c’était certain. De la musique, peut-être? C’était normalement la spécialité de l’ordre baptistrel. Mais peut-être désirait-il sortir de l’ordinaire?

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"Espérons-le". Le ton dénué de joie de Kälyna ramena un souvenir à la mémoire de Valmys. Un souvenir qui n'avait rien pour embellir l'humeur. Dawan avait toujours essayé de ne pas faire subir à son héritier le chagrin qui le poussait peu à peu vers l'inévitable, veillant à lui transmettre le savoir et la connaissance avant toute autre chose, avant toute impression personnelle. Mais l'Enwr se souvenait parfaitement de l'air lointain du chanteciel, de cette absence d'expression et de cette distance, lorsqu'il avait détourné le regard en lui parlant du Contrat Originel. Sa voix avait été pâle, vide d'intonation. Des regrets ? Peut-être. Des regrets qui s'étalaient sur des milliers d'années, alors, et qui se tournaient vers les étoiles en réclamant leur pardon.

Kälyna détourna les pensées de Valmys en répondant à sa question quant au fils écarlate du ciel.Un vague signe de tête approuva ladite réponse, assorti d'un sourire tendre. Dans les faits, l'elfe aux oreilles arrondies regrettait de ne pouvoir rencontrer ce dragon. Avec tout son respect pour ces êtres, il aurait aimé pouvoir lui offrir comme il offrait à la dame qui l'accompagnait. Si l'Ire de Verith était connue, il était néanmoins difficile pour ce grand enfant qu'était Valmys de la concevoir pleinement. Il s'imaginait naïvement que, ne le connaissant pas, le dragon lui laisserait une chance de sympathiser. Et lui, il ne demandait que cela: couvrir un être supérieur de son adoration, et présenter son amitié. Avec des créatures non-humaines, il avait toujours ce désir mêlé du souci de ne pas forcer les choses. Avec des créatures supérieures, il en allait de même.

Valmys secoua négativement la tête lorsqu'il fut question de fatigue. Il s'était précédemment reposé. S'il ne pouvait prétendre être aussi frais qu'à l'aube, il lui restait néanmoins des forces et, surtout, la volonté de les dépenser. Auprès de Kälyna, il n'avait pas tant peur. Si elle venait à porter la main sur lui, il savait qu'il s'en sortirait, qu'elle ne lui ferait nul mal qu'il ne puisse soigner. Il voulait profiter de ce sentiment.

"- De l'art qui vous conviendra. Y compris ceux que nous n'avons pas coutume de nommer ainsi. Nous disposons de matériel, de place..." De professeurs, aussi. Mais Valmys doutait que la prêtresse blanche désirât en voir un si tôt. Lui ? Il pourrait l'aiguiller dans deux ou trois domaines. Pas tous. "Bien entendu, nous pouvons surtout vous proposer de la musique. Nous avons aussi de quoi peindre, sculpter..." Et ce, sans crainte d'empiéter sur le matériel des baptistrels qui avaient la sculpture en grand amour. Ces derniers avaient l'ensemble du Domaine comme terrain de jeu pour leurs talents. "...Incluant la poterie également." Ils avaient aussi l'écriture, qu'il n'évoqua pas, étant moins amusante à deux, la plupart du temps. Il ignorait encore l'existence de jeux d'écriture. "Nous avons de quoi cuisiner, aussi. De quoi coudre et broder." Même si sa tenue actuelle laissait -volontairement- à désirer. "Je pense pouvoir aller vers chacune de ces activités, avec plaisir. Sentez-vous libre de votre choix." Il lui offrit un nouveau sourire, plus sincère que ceux qu'il avait pu avoir précédemment, prêt à l'emmener sur le chemin qu'elle aurait élu.

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Quel art convenait-il à l’ancienne prêtresse du Tyran Blanc? Bonne question. Qu’avait-elle envie, en fait? Le jeune Valmys lui offrait la liberté, c’était un beau cadeau que ce dernier. Les Baptistrels et leurs élèves étaient chanceux. Ils avaient la tranquillité d’esprit et la paix afin de choisir en toute quiétude ce qu’ils désiraient faire. Personne ne les détestait. Personne n’arriverait ici dans le but ultime de les tuer ou pire, de les transformer en ce qu’ils ne sont pas : de vilaines personnes. Kälyna ne s’entendait pas avec tous les Baptistrels. L’épouse de l’Empereur Elfique en était la preuve, mais sa hargne envers ce dernier devait être également en cause. Or, elle ne pouvait pas dire qu’elle détestait l’enfant du Vent pour autant.  

« J’aime cet endroit. »

C’était presque un murmure. Parlait-elle de l’ensemble du domaine baptistral ou seulement de cet endroit qui leur permettait d’être à l’air libre de la grotte? En vérité, c’était les deux.

« Cela fait bien longtemps… »

Trop longtemps. Quand était la dernière fois? Elle ne pouvait même plus se rappeler. Sa main blanche sortit de son sac un instrument de musique : une lyre. Ses doigts caressèrent les cordes qui émirent une plainte. Elle se rappelait maintenant. La dernière fois qu’elle y avait touchée, c’était pour faire un chant en l’honneur du Blanc.

Assise sur le sol, aujourd’hui, elle ne chantait pas pour accompagner les notes qui dansaient sous ses doigts. Elle s’arrêta un instant et invita son ami rongeur à se servir de sa main pour descendre puis lui offrit quelques noix ainsi que quelques baies.

« Désirez-vous m’accompagner? »

La voix avait été douce toute comme l’or qui s’était posé sur l’humelfe. Son attention se reporta sur ses doigts qui regagnaient peu à peu l’habitude de la musique. Son esprit se perdit ensuite dans la musique.

Oui, c’était un bel endroit. En cet instant, la magicienne avait décidé qu’elle en ferait son sanctuaire, l’endroit où elle pourrait retourner en toute sécurité en théorie. Ils n’avaient pas besoin de le savoir. Ou le savaient-ils déjà à travers la magie des chants-noms et des vibrations?

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Il avait songé à l’entraîner en un lieu de meilleure acoustique, où elle pourrait trouver à sa guise les outils de son inspiration. Le Domaine avait, bien sûr, de ces pièces vouées à l'étude de la musique, dont certaines comprenant divers instruments sans propriétaires autres que l'intégralité des membres de l'Ordre. De toute évidence, la dame de noir, et blanc et d'ambre, n'avait nul besoin d'autant. Leur perchoir improvisé suffisait. Aranwë percevrait-il leur musique, alors ? Les mots énigmatiques de la jeune femme, ainsi que la présence opportune de sa lyre, firent se questionner l'Enwr songeur sur le lien qu'elle entretenait, ou avait pu entretenir, avec les siens, et avec la musique. Il s'imagina qu'elle avait pu caresser le rêve de les rejoindre, d'offrir son existence à cette belle vanité, avant que son chemin ne l’entraîne au sein d'autres nécessités. Parfois, les êtres n'avaient pas le choix, ou si peu... Regrettait-elle ? Si devenir maître était réservé à quelques rares et chanceuses personnes, l'étude et l'appréciation de la musique était bien plus abordable. La musique ne la jugerait pas sur ses actes passés, ne lui tournerait pas le dos pour le sang versé, pour la haine qui pouvait entourer son nom. Elle était une amie fidèle, sans doute plus sage que tous les Cawrs unis.

Valmys s'assit par terre, au niveau de leur ami rongeur. Il doutait que la Dame concéda à cesser ses pérégrinations pour se poser quelques temps au Domaine, auprès d'Aranwë et d ela musique. L'aventure était une drogue douce et dangereuse, les obligations étaient un tourbillon plus ou moins illusoire dont il était parfois complexe de se dépêtrer. Chaque bipède avait sa façon d'aborder tout cela, et de le vivre. Quelque voix de l'instinct murmura à Valmys qu'il était vain d'espérer par les mots convaincre Kälyna de chercher son repentir en ces terres. D'autant plus qu'il ignorait la nature de ses objectifs. Une admiration secrète néanmoins l'incitait à croire que l'amie d'un dragon, d'un grand dragon, ne pouvait préférer d'inintéressants et bas objectifs à la musique, et au façonnement d'un futur adulte.
Etrange. Habituellement, Valmys n'avait pas tant d'indulgence envers les très jeunes personnes. Plus le temps passait, plus Aranwë trouvait son affection, et sa tendresse. L'enfant allait grandir, et lui, il avait hâte de pouvoir tenir une conversation avec lui, et pouvoir l'épauler lors de ses épreuves. Comme lui avait été épaulé, comme il aurait souhaité être épaulé. C'était comme une mission évidente, que nulle ne lui avait donné, sinon son instinct de créature vivante de ce monde. Il le ferait... Il l'espérait. Si l'avenir lui offrait le temps de vivre un peu plus.

Le psaltérion rejoignit les genoux de l'humelfe. C'était un bel instrument de bois, dont les cordes, pincées, de tailles croissantes, s'alignaient sur un plat panneau de bois, au-dessus d'une caisse de résonance. Il était moins commun que les lyres, les luths et mandolines, les flûtes et pipeaux, qui étaient pourtant davantage des instruments propices aux voyages. Valmys aimait beaucoup sa seconde voix. Elle lui ressemblait un peu, avec son apparence particulière, et ces regards plein de questions qui se posaient sur elle à la première vue. Habituellement, les psaltérions étaient assez grands. Certains modèles, bien plus petits, s'adaptaient aux voyages. Celui de Valmys se trouvait à mi-chemin entre les deux. Il n'avait jamais su expliquer pourquoi. Il se sentait bien ainsi. Le lien qui unissait un baptistrel à son instrument créait le confort qu'il pouvait manquer à le transporter.

Valmys avait répondu à l'affirmative à Kälyna. Il n'allait pas la laisser jouer seule, tout de même ! C'aurait été l'abandonner. Il y avait bien assez de gens abandonnés sur ces nouvelles terres. Il la laissa néanmoins commencer les premières notes, prêt à la suivre.
L'Enwr ouvrit ses oreilles et son coeur, cherchant à travers la musique de Kälyna les émotions qui la traversaient. Il crut percevoir de la nostalgie, sans être sûr qu'elle venait d'elle ou de lui. Indécis, il finit par l'imiter, joignant sa musique à la sienne dans une simple copie, avant d'en faire un accompagnement plus personnel. L’enchaînement était particulier: il n'accéléra le rythme ni ne le marqua davantage. Le psaltérion suivait la douceur de la lyre, suivait la même délicatesse et sérénité. Valmys comprenait la peine, et le repos qu'elle venait chercher. De timides notes plus aiguës, comme des éclats de jour, apparurent néanmoins ici et là, comme des mains tendues vers une musique plus gaie. L'Enwr ne connaissait pas encore cette musique. Mais il espérait que Kälyna la jouerait un jour.

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