6 juillet
Un dernier faisceau de lumière baignait le bureau d'une lueur écarlate. Il soulignait délicatement le bois vernis du pupitre auquel était accoudé la jeune conseillère. Elle dégagea une mèche brune pour la ranger tranquillement avec les autres qui roussissaient au soleil. Son doigt s'arrêta sur une ligne passablement raturée de la missive qu'elle lisait et relisait sans vraiment en comprendre le sens. Avec un soupir elle se laissa aller sur le dossier de sa chaise et rejeta sa tête en arrière pour refermer lentement ses paupière sur les yeux fatigués par une journée de travail éreintante. Caladon avait beau se porter à merveille, comme toutes les villes au sein de ces nouvelles terres, tout y était à refaire. Et en mieux si possible. Alors la jeune Ostiz faisait de son mieux pour honorer son poste dans l'espoir de faire rougir de jalousie ses prédécesseurs. Néanmoins elle n'en restait qu'une jeune femme de 23 ans, e qui n'était rien comparé aux centenaire du Bourgmestre. Elle se demandait des fois si sa course au pouvoir n'était pas vaine quand elle faisait face à des ennemis capable d'ignorer son existence ne représentant qu'un grain de poussière dans celle de l'univers. Un sourire fendit ses lèvres à cette pensée. Elle était vraiment fatiguée.
Rebouchant son encrier soigneusement, son attention se porta sur la porte menant au bureau adjacent. Cela ne faisait pas quelques mois qu'elle travaillait dans ce bureau mais jamais elle n'avait ne serait ce entrouvert cette porte. Dissimulée dans un coin de la pièce, elle semblait ne servir qu'au extrêmes urgences, comme un passage dérobé vers de vieux sous terrains. Pourtant elle savait pertinemment ce qu'elle apercevrait si elle soulevait le loquet. Un autre bureau, surement identique au sien, à quelques détails près, puisqu'il appartenait à une personne occupant la même fonction qu'elle. Quelque part la demoiselle n'aimait pas l'idée de ne pas être unique. Aussi, si elle ne prenait pas ses coéquipiers pour des rivaux, elle avait tendance à les ignorer. Néanmoins depuis qu'elle était arrivée à Caladon elle sentait la solitude peser sur son coeur. Après la fuite des terres de leurs ancêtres, elle avait bien vu que les amitiés qu'elle avait soit disant liées avec les nobliaux étaient futiles et superficielles. Elle avait tenté de se recentrer sur ce qui lui restait mais comme tout un chacun ici bas, il ne persistait plus grand chose à part son nom et son ambition. Loin de sa famille, de son amant, seul le Bourgmestre lui portait le réconfort qui lui nécessitait. Elle ne voyait pas d'un bon oeil non plus qu'une autre soit sa protégée.
Elle l'avait déjà vu, cette crinière cuivrée, au détour d'une réunion ou d'un discours. Il lui avait semblé en dégager une légèreté et une grâce infime qu'elle avait surement jalousement observé. La demoiselle reposa le dossier qu'elle finissait de trier sans détacher son regard de la cloison qui les séparaient. Elle abandonna la paperasse sur son écritoire et dans un élan de courage s'empressa vers la porte d'un pas décidé. La main sur la poignée Eleonnora se maudit d'être aussi nerveuse pour une simple entrevue, même à but personnel. Ce n'était pourtant pas son genre de se tracasser pour une simple collègue qui, en soit, n'avait rien d'intimidant. Cependant pour une fois elle ne se fichait pas d'avoir l'air trop sèche ou trop hautaine. Pour une fois, elle voulait faire bonne impression auprès d'une collègue. Était-ce symptomatique de sa solitude ou bien juste un changement qui s’opérait en elle depuis son arrivée? Elle ne s'en alarma pas, se disant que ceci était bien volontaire, que si elle devait reconstruire sa vie ici, elle le ferait mais en meilleur. Elle vérifia alors que sa coiffure, bien tressée ne soit pas trop débraillée, et que son corset fut bien serré sans entacher aux plis de sa robe de satin.
Trois coup sec résonnèrent et elle ouvrit la porte avec un sourire avenant. Sérieusement penchée sur son secrétaire, son aînée ne semblait pas avoir fini sa journée. Des piles de paperasses et de dossiers s'y empilaient de la même manière que sur le sien. Elle ne fut pas surprise de rencontrer une personne sérieuse à la tâche; Le Bourgmestre ne s'entourait pas de bons à rien de toute façon. Elle attendit que son hôte lève les yeux de sa lecture pour la saluer proprement d'une légère révérence.
« Bonsoir Dame Falkire! » Sans réellement avoir été invitée, la jeune femme prit la liberté de s'avancer vers son interlocutrice.
« Je ne vais pas m'excuser de venir vous déranger, car c'est bien mon but...Mais regardez, le soleil se couche déjà, peut être devriez vous poser votre plume pour aujourd'hui, qu'en pensez vous? Oh, n'allez pas me prendre pour une fanfaronne qui dénigre son travail, loin de là! Je ne fais que penser à votre bien être... »Elle eu un sourire gêné, priant pour ne pas avoir fait trop mauvaise impression. Elle avait beau maîtriser la diplomatie, l'art de la rhétorique, lorsque cela en venait au domaine de l'intimité elle était vite perdue.
« Je ne crois pas m'être présentée à vous personnellement; Eleonnora Ostiz, fille de Crissolorio Ostiz, votre collègue au siège du conseil de la ville de Caladon. Enchantée de faire affaire avec vous.» Encore une révérence.
En y réfléchissant bien, elle n'avait jamais appercu, voir même entendu parler d'elle avant son entrée au conseil...comment une personne aussi mystérieuse avait-elle pu intégrer l'équipe d'un personnage aussi important qu'Aldaron? « Nous ne nous sommes jamais rencontrée, n'est ce pas? Il ne me semble pas vous avoir déjà vue...Vous débutez dans le milieux de la politique peut-être? » Elle eu une expression tintée de doute. Etait-elle une intime de l'elfe? Il était fréquent dans la politique de s'entourer de ses proches. Mais alors quelle relation entretenait-elle avec lui? Elle s'interdit de continuer à faire des conclusion hâtive, sans quoi elle serait déjà ennemie avec sa collègue avant qu'elle ne prononce un mot.[
Dernière édition par Eleonnora Ostiz le Jeu 5 Avr 2018 - 0:15, édité 4 fois