Novembre, après la catastrophe de Cordont
C’était une réelle chance que le voyage par mer jusqu’à Cordont soit bien plus prompt que de s’envoyer les routes terrestres jusqu’à la ville du Traité. Une chance pour leur capitaine et son équipage, en premier lieu, et une chance pour lui également, ensuite. Il aurait eu bien du mal à s’en sortir, cette fois, s’il avait été contraint de répondre de la mort de plusieurs dizaines de personne, avec pour seul élément de défense que le navire n’avançait pas assez vite à son goût. C’était peu et surtout, ce n’était guère recevable devant un tribunal un tant soit peu compétent. Pourtant, il n’aurait pu être davantage dans son bon droit quand on savait l’absurdité de la situation… Il était dit, quelque part, que le monde devait absolument lui en vouloir. Il était le garde du corps personnel d’Aldaron depuis plusieurs mois, et rien ne s’était passé, et il suffisait que cette triple-buse d’elfe le quitte pour un seul évènement, et bien entendu, c’était en cette unique occasion qu’il aurait eu besoin de lui, comme de par hasard ! En sus de quoi, pour améliorer encore son humeur, il n’avait pas été mis directement au courant par le premier concerné, trop occupé à s’envoyer la gastronomie politique dans le gosier. Joie et Bonheur. Oh il allait lui devoir de très bonnes explications, le Bourgmestre, quand il aurait mis la main dessus. Avoir été séparé de lui pendant plusieurs jours s’était avéré être une torture, faisant tomber un voile terne sur tout ce à quoi il se consacrait, mais entendre qu’Aldaron avait failli mourir dans la catastrophe qui avait frappé la ville lui avait retourné tripes et cœur. Dès cet instant, rester sur place n’était plus une option et puisque Purnendu venait également, comme guérisseur, alors il ne pouvait que l’accompagner. La tension l’avait maintenu alerte et acide pendant une grande partie de la traversée et c’était seulement à présent, en posant le pied à terre, qu’il commençait à se sentir mieux. L’elfe n’était pas loin, quelque part près de ces ruines. Il allait le trouver et le récupérer.
Attendus par les soldats de l’Alliance déjà sur place, les passagers du navire furent conduits jusqu’à ceux qui demeuraient là depuis la chute de la ville. Mais une fois dans le camp installé ? Ils étaient laissés à eux-mêmes, dans un ensemble disparate. Purnendu seul, ainsi que quelques individus choisis, étaient dirigés là où ils seraient les plus utiles. Lui-même n’en étant pas, Ivanyr se retrouva à observer les lieux un moment, pour se donner assez de temps et reprendre le contrôle de l’ire qui l’avait accompagné depuis le départ de la Revenante. Elle ne lui servait à rien, bien qu’elle puisse constituer un exutoire à ce qu’il ressentait. Progressivement, la colère se trouva nuancée, par le malaise, par la tristesse… le vampire avait l’impression d’un creux, en ce lieu, d’un écho désagréable qui lui rappelait avec clarté le village ravagé des Graarh, sur Nyn-Tiamat. Ici aussi, la tragédie avait frappé. Tout ça pendant que les politiques se font la guerre, en prenant tout ça comme simple prétexte Pour tout l’amour qu’il éprouvait envers Aldaron, la constatation lui laissait un goût de bile dans la bouche. Il n’aimait pas voir l’évidence de la manœuvre et constater son efficacité, était-il mauvais joueur pour autant ? Avec distance, il se demanda ce qu’Achroma aurait fait s’il avait été à sa place. L’ancien était un politicien lui-aussi, il aurait su tirer son épingle du jeu. Lui n’avait pas la patience ou l’appétence de le faire. Il aurait préféré renvoyer tout ce beau monde à ses pénates, au risque d’en froisser plus d’un. En sommes, sans doute aurait-il préféré être plus candide, quitte à être manipulé sans s’en rendre compte. Soupirant sous cette pensée, il se déplaça rapidement pour s’assurer que Purnendu était installé avec tout ce qui lui fallait, puis il s’informa sur les derniers évènements que leur voyage leur avait fait manquer. Une fois qu’il fut assuré de ne pas être en défaut de la moindre information, le vampire se mit en quête du Bourgmestre.
Et évidemment, pas de Bourgmestre en vue. Impossible de mettre la main dessus, et le seul qui aurait éventuellement pu le renseigner lui offrait un mielleux et insupportable ‘il est occupé à plus urgent qu’à perdre son temps avec les petites gens’. Par les déesses, qu’il avait envie de lui faire ravaler son air dédaigneux… Mais encore une fois, sa défense au tribunal serait définitivement bien maigre si l’on s’en tenait aux lois établies. Si cela continuait comme ça, il allait très sérieusement envisager d’aller élever des chèvres dans un bourg de campagne perdu en plein cœur de Calastin. Puis, subitement, alors qu’il s’écartait en fulminant, son regard fut attiré par une silhouette qui trouva sa place dans sa mémoire. Et qu’il était agréable de se souvenir ! Ce devait être l’elfe dont son elfe personnel lui avait parlé… « Hey… oh… C’EST HAUT !!!!! » Se prenant les pieds dans son accent, il ravala le juron fielleux qui lui venait et s’approcha à grandes enjambées de l’infortuné qu’il venait d’interpeler en faisant se sursauter tout son voisinage immédiat. Se plantant devant le chevalier, il décocha immédiatement, en se passant de toute forme de préambule. « Bonjour. Où est Aldaron ? » Il y eut un blanc, puis il ferma les yeux en inspirant lentement et profondément pour retrouver un peu de courtoisie. « Vous êtes son ami si je ne me trompe pas ? Il va bien ? Il n’a rien ? Où est-il maintenant ? Est-ce qu’on le surveille bien ? » Il essayait de son mieux de ne pas avoir l’air d’un tribunal inquisiteur devant l’elfe, mais la simple idée qu’Aldaron soit blessé ou soit sur le point de faire s’effondrer une autre ville donnait des palpitations à son cœur mort. « Je savais que j’aurai dû l’accompagner… C’est la dernière fois que je me laisse convaincre de rester en arrière… »
Attendus par les soldats de l’Alliance déjà sur place, les passagers du navire furent conduits jusqu’à ceux qui demeuraient là depuis la chute de la ville. Mais une fois dans le camp installé ? Ils étaient laissés à eux-mêmes, dans un ensemble disparate. Purnendu seul, ainsi que quelques individus choisis, étaient dirigés là où ils seraient les plus utiles. Lui-même n’en étant pas, Ivanyr se retrouva à observer les lieux un moment, pour se donner assez de temps et reprendre le contrôle de l’ire qui l’avait accompagné depuis le départ de la Revenante. Elle ne lui servait à rien, bien qu’elle puisse constituer un exutoire à ce qu’il ressentait. Progressivement, la colère se trouva nuancée, par le malaise, par la tristesse… le vampire avait l’impression d’un creux, en ce lieu, d’un écho désagréable qui lui rappelait avec clarté le village ravagé des Graarh, sur Nyn-Tiamat. Ici aussi, la tragédie avait frappé. Tout ça pendant que les politiques se font la guerre, en prenant tout ça comme simple prétexte Pour tout l’amour qu’il éprouvait envers Aldaron, la constatation lui laissait un goût de bile dans la bouche. Il n’aimait pas voir l’évidence de la manœuvre et constater son efficacité, était-il mauvais joueur pour autant ? Avec distance, il se demanda ce qu’Achroma aurait fait s’il avait été à sa place. L’ancien était un politicien lui-aussi, il aurait su tirer son épingle du jeu. Lui n’avait pas la patience ou l’appétence de le faire. Il aurait préféré renvoyer tout ce beau monde à ses pénates, au risque d’en froisser plus d’un. En sommes, sans doute aurait-il préféré être plus candide, quitte à être manipulé sans s’en rendre compte. Soupirant sous cette pensée, il se déplaça rapidement pour s’assurer que Purnendu était installé avec tout ce qui lui fallait, puis il s’informa sur les derniers évènements que leur voyage leur avait fait manquer. Une fois qu’il fut assuré de ne pas être en défaut de la moindre information, le vampire se mit en quête du Bourgmestre.
Et évidemment, pas de Bourgmestre en vue. Impossible de mettre la main dessus, et le seul qui aurait éventuellement pu le renseigner lui offrait un mielleux et insupportable ‘il est occupé à plus urgent qu’à perdre son temps avec les petites gens’. Par les déesses, qu’il avait envie de lui faire ravaler son air dédaigneux… Mais encore une fois, sa défense au tribunal serait définitivement bien maigre si l’on s’en tenait aux lois établies. Si cela continuait comme ça, il allait très sérieusement envisager d’aller élever des chèvres dans un bourg de campagne perdu en plein cœur de Calastin. Puis, subitement, alors qu’il s’écartait en fulminant, son regard fut attiré par une silhouette qui trouva sa place dans sa mémoire. Et qu’il était agréable de se souvenir ! Ce devait être l’elfe dont son elfe personnel lui avait parlé… « Hey… oh… C’EST HAUT !!!!! » Se prenant les pieds dans son accent, il ravala le juron fielleux qui lui venait et s’approcha à grandes enjambées de l’infortuné qu’il venait d’interpeler en faisant se sursauter tout son voisinage immédiat. Se plantant devant le chevalier, il décocha immédiatement, en se passant de toute forme de préambule. « Bonjour. Où est Aldaron ? » Il y eut un blanc, puis il ferma les yeux en inspirant lentement et profondément pour retrouver un peu de courtoisie. « Vous êtes son ami si je ne me trompe pas ? Il va bien ? Il n’a rien ? Où est-il maintenant ? Est-ce qu’on le surveille bien ? » Il essayait de son mieux de ne pas avoir l’air d’un tribunal inquisiteur devant l’elfe, mais la simple idée qu’Aldaron soit blessé ou soit sur le point de faire s’effondrer une autre ville donnait des palpitations à son cœur mort. « Je savais que j’aurai dû l’accompagner… C’est la dernière fois que je me laisse convaincre de rester en arrière… »