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    10 Octobre 1762

    Était-ce une lubie ? Une toquade ? Un caprice ? Il fallait dire qu'il traversait une période étrange. Lorsqu'il avait écrit cette dernière lettre fatidique à Valmys, à la fin du mois de septembre, il avait retrouvé Achroma, revenu d'entre les morts, et avait pris ses distances, trouvant que leur hyménée se nouait bien trop vite. S'en étaient suivi des réflexions, des remises en question, des axes de vie qu'il voulait travailler. Il avait eu l'impression que rien n'était à sa place et qu'il avait tout à reconstruire, depuis le début. Morneflamme avait pris une très large part dans sa vie, et l'avait orienté vers une solitude dévorante à laquelle il devait mettre fin. Le temps qu'il avait passé avec Valmys au Royaume Elfique lui avait fait un bien fou, après la guerre entre le Nord et le Sud de Calastin. Et maintenant qu'il traversait une nouvelle crise, il avait presque supplié le baptistrel de le rejoindre à Caladon, dans une missive à la fois touchante et réservée. C'était que ce petit être avait marqué son cœur à la manière d'un père et la façon dont ils avaient échangé, pendant quelques mois, par la suite n'avait que trop souligné combien Aldaron manquait d'un enfant et Valmys d'une figure parentale. Leurs mots réciproques avaient semblé s'appeler et au début de l'automne, il avait demandé à Valmys de le rejoindre à Caladon.

    Ce soir, il avait quitté son travail pour s'installer dans un petit bureau personnel, chez lui. La fraîcheur des températures qui retombaient la nuit l'avait poussé à faire allumer un feu de cheminée dont la danse ambrée peignait sur les murs et sur sa peau des mouvements hypnotiques. Le crépitement des flammes étaient une mélodie de fond, apaisante, tandis qu'il rédigeait, sur le parchemin, l'acte qu'il comptait bien signer prochainement. Par cet acte, il reconnaissait Valmys comme son fils et lui offrait son nom, si le baptistrel souhaitait le porter. Peut-être trouverait-il le courage de lui proposer au petit déjeuner, demain... Ou après... Ses domestiques avaient récupéré la boite à musique à sa sortie de bateau dans l'après-midi. Aldaron avait dîné avec lui, pour le retrouver et lui faire part de sa joie de le savoir ici. Il lui avait laissé une grande chambren, choisie avec soin pour correspondre aux affects de son invité, pour qu'il installe ses affaires le temps que lui, retourne travailler.

    Il était très tard ce soir, lorsqu'il finissait sa rédaction. Il roula le parchemin et s'apprêtait à aller dormir lorsqu'en passant devant la chambre du jeune immaculé, il constata que la lumière était toujours allumée. Avait-il peur du noir ou était-il encore éveillé ? Ne trouvait-il pas le sommeil ou l'avait-il attendu ? Il l'avait pourtant prévenu qu'il rentrerait tard et qu'il pouvait dormir ! Curieux, il entrebâilla discrètement et légèrement la porte. Il trouva Valmys installé au petit bureau, une bougie pour veilleuse. Le bourgmestre toqua légèrement à la porte avant de l'ouvrir un peu plus et entrer : « Valmys ? Tu ne dors pas ? La ville est trop bruyante ? » demanda-t-il, à moitié inquiet et le visage fatigué par sa journée de travail. Du moins était-ce ce que le faible éclat de la bougie accentuait par jeux d'ombres. « Tu es bien installé ? La chambre te convient ? » Elle était pourtant orientée jardin pour ne pas qu'il subisse les bruits de la ville et qu'il ait quelque chose de vert à voir au petit matin.

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Le voyage avait été éprouvant. Valmys avait beau se remettre, à son rythme, de ses péripéties maritimes, il restait nerveux à bord d'un bateau. Sur ses gardes, sursautant au moindre imprévu, il s'était beaucoup épuisé à ne rien faire, et avait eu tôt fait de s'efforcer à dormir, à grands coups de somnifères. Mais même son sommeil ne l'avait aidé. Ses rêves avaient été sombres, violents. Peu de temps avait été nécessaire pour qu'il fasse le lien avec ce cristal très particulier qu'il promenait avec lui, qu'il avait cette fois utilisé comme veilleuse, contre lui, pour se rassurer. Sa lumière et ses pulsations lui avaient toujours semblées rassurantes. Admettre un si bel objet responsable de tels songes lui aurait fendu le coeur... Il y tenait, à sa veilleuse !
Pourtant, refaire l'expérience lui avait prouvé que son hypothèse était juste. Dans ses rêves, il était un dragon. La nuit ne donnait aucune couleur à ses écailles -il se savait juste plus sombre que la neige. Grand, il pouvait voir les bipèdes s'enfuir, lorsqu'il les poursuivait. Il pouvait sentir la salive dans sa bouche mêlée à l'excitation de la chasse, et... Etait-ce de la colère ? Difficile pour lui de l'identifier. Sa volonté n'avait suffi pas pour le sortir de ces rêves, lors de l'instant écoeurant où la chair et le sang venaient teinter sa langue.
L'Enwr s'était réveillé en sueur, le coeur au bord des lèvres. Ces goûts-là n'étaient pas pour lui, et la violence qu'ils contenaient n'était faite pour son âme. Fi de la veilleuse pour l'instant, il devait se changer les idées.

Depuis que les veinules étaient apparues sur son visage, les cernes semblaient ne plus vouloir souligner ses yeux. Cela lui convenait à merveille, et lui évitait d'infliger à Aldaron la laideur de l'épuisement de son voyage. En posant enfin le pied à terre, le petit être de musique sentit un profond soulagement l'envahir. Il allait enfin pouvoir respirer ! En apprenant son emploi du temps, l'apprenti baptistrel s'imagina même faire une sieste, bien méritée, dans un vrai lit, avec un endroit où poser sa veilleuse sans craindre qu'elle lui soit dérobée. Néanmoins, les domestiques ne tardèrent pas à aborder un sujet qui bouleversa ce plan. L'anniversaire d'Aldaron ? Demain ? Par les huit ! Au regard rond de Valmys, les employés du bourgmestre purent sourire, devinant aisément qu'ils venaient de délivrer une information qui lui était nouvelle... Et qui le paniquait à nouveau ! Quel ami était-il, pour n'avoir pas demandé plus tôt ? Pour n'avoir pas noté ? Pour n'avoir rien préparé ! Il venait les mains dans les poches ! Timidement, gêné, il demanda à pouvoir s'arrêter à une échope. Une idée lui était vite venue. Tant pis pour le sommeil ! Après tout, avec un peu de théine, l'énergie ne serait plus un souci !
Valmys avait dîné avec son ami, tâchant de lui épargner au mieux sa fatigue et son inquiétude quant au lendemain. Aldaron méritait mieux que cela. Sa boîte à musique tenait à ce que sa compagnie reste agréable.






La tasse de thé était vide depuis longtemps. Le bureau, qui jadis avait été vide et accueillant, était désormais encombré de bouts de tissus bleus, du matériel de couture emprunté aux domestiques, ainsi que de parchemins et matériel d'écriture. Les affaires de Valmys étaient à peine déballées, son sac posé au pied de son lit, sa veilleuse soigneusement installée sur la table de chevet. Le principal cadeau était plié, et déposé sur un coin de bureau. Il venait juste d'en achever couture et broderie. Ses propres habits ne lui avaient pas demandé tant de travail ! L'Enwr en était assez satisfait... Même si ce n'était pas, à son goût, un cadeau à la hauteur de son amitié. Offrir quelque chose à plus riche que soi était toujours complexe et, tout jeune qu'il était, il n'avait encore trouvé de solution à ce problème.
Le nez dans l'odeur fraîche de l'encre, ses doigts barbouillés, il s'appliquait sur l'enluminure qui marquait le début de la lettre qui devait accompagner le cadeau, le dos courbé sur son bureau, dans une attitude sans doute très mauvaise pour sa colone vertébrale. Concentré, chantonnant doucement pour se tenir éveillé autant que pour passer l'énergie du thé quelque part, il entendit tout juste les pas dans le couloir, sans s'en inquiéter. Après tous, quelques personnes étaient passées également...

En revanche, le scribe du jour -enfin, de la nuit- ne s'attendait pas à ce que les pas viennent pour lui. Très brièvement, de possibles identités lui vinrent en tête: Aldaron (impossible, il l'avait convié à dormir), les domestiques (à cette heure-ci ?), les pirates (oh, tout de même !). Cette dernière hypothèse lui injecta une petite dose d'adrénaline, qui retomba au visage amical et inquiet d'Aldaron. Eh mais... Aldaron ?! L'adrénaline revint d'un coup, et l'instinct de Valmys fut juste assez bon pour le pousser à se mettre un peu trop rapidement debout, afin de cacher de sa silhouette le bazar derrière lui. Un manque de politesse certain, ce bazar, dans la chambre impeccable qui lui avait été donnée. Et surtout: pas question qu'Aldaron voie ses cadeaux avant l'heure !

Ironiquement, Valmys se surprit à penser qu'Aldaron avait l'air fatigué. C'était sans compter sur ses propres traits, tirés de fatigue, et... Etait-ce de l'encre qu'il avait sur la joue ? Il offrit au bourgmestre un sourire qui se voulait rassurant. "Je suis très bien installé. C'est pour moi un vrai luxe que tout ceci," répondit-il, peut-être un peu trop hâtivement, mais avec une véritable reconnaissance dans la voix. Il n'avait pu encore en profiter, mais sa seule entrée dans cette chambre lui avait donné les informations nécessaires. Il allait être ici plus que confortablement installé. Jamais il n'avait eu de lit aussi grand et moelleux, douillet. Aldaron avait prit soin de le mettre côté verdure, et il appréciait particulièrement cette attention. Enfin, l'endroit était calme, et juste assez chauffé. Avoir de l'intimité et de l'espace... Il n'y avait été habitué. Même sa chambre au Domaine était relativement étroite.

"- Ne vous inquiétez pas pour moi, mon éveil est volontaire." Non seulement Valmys était incapable de mentir, mais il savait également très mal cacher les choses. La lueur d'amusement mêlée de gêne qui passa dans son regard, et au coin de son sourire, parlait bien plus que lui. "Votre journée s'est bien passée ? Je peux faire quelque chose pour vous ?" C'était un peu sa façon à lui de s'enquérir de ce qui avait pu fatiguer son ami. Outre l'heure tardive, si quoi que ce soit avait pu contrarier Aldaron, et si ce dernier voulait se confier, ou quérir les services qu'un mage pouvait offrir pour l'aider à s'endormir, il était là. Après tout, n'était-ce pas le genre de cadeau que l'on pouvait offrir aux gens riches ?

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    Un sourire amusé et paternel vint marquer son visage fatigué en remarquant Valmys se lever d'un seul coup et cacher ce qu'il était en fait de faire. L'elfe n'était pas stupide et le comportement de l'immaculé était celui qu'il avait vu sur des centaines d'humains lorsqu'ils essayaient de cacher quelque chose. Aldaron eut pitié du serment de vérité du baptistrel et recula sans chercher à voir ce qu'on trafiquait sous son toit. Il dirigeait bien le marché Noir, il voyait souvent tout... Il pouvait bien fermer les yeux pour une fois. Il eut un rire d'amusement et lorsque ses yeux ne purent capter le moindre ersatz de ce que l'Enwr lui préparait, il secoua la tête de gauche à droite. « Je suis navré, je ne pensais pas que tu serais en plein labeur. » Cela faisait bien longtemps qu'on ne lui offrait rien à son anniversaire. Ou presque. Tout simplement parce qu'il y avait vraiment peu de choses que le dirigeant du Marché Noir ne pouvait pas s'offrir. Le voir mettre la main à la pâte rendrait le présent unique au monde, même si l'elfe aurait préféré que son invité ne le paie pas en heures de sommeil.

    Sortant un mouchoir d'un lin délicat, il vint essuyer, d'un geste paternel, l'encre que l'apprenti avait sur la joue : « Tu as l'air d'y mettre beaucoup de cœur pour finir barbouillé ainsi. Je suis touché par ton geste, autant que je suis persuadé que manger sur tes heures de sommeil ne te fera pas du bien. Même si cela est volontaire. » Il le grondait, mais avec douceur, et se prit à penser qu'il prenait déjà son rôle de père très à cœur. « Je te remercie, ma journée s'est ben passé. Comme beaucoup d'autres, elle a été longue et je vais éviter, moi aussi, de grignoter sur mon temps de repos réparateur. Je le fais bien trop souvent. J'étais seulement inquiet de te voir encore debout. » Baissant les yeux sur le parchemin qu'il avait en main, il se demanda si c'était le bon moment pour.... Mais par les huit, ne venait-il pas de dire qu'il valait mieux qu'ils aillent dormir. Il faisait un pire garnement à trouver des prétexte pour refuser d'aller au lit.

    Il eut un sourire en coin avant d'ajouter : « Je ne vais pas pouvoir te border moi-même... » Eu égard de ce qui pourrait traîner à sa vue sur le bureau de l'apprenti : « Mais promets-moi de ne pas veiller trop longtemps, d'accord ? On se voit au petit déjeuner, demain. » Il avait vraiment parlé de le border ? La fatigue... Oui, ça devait être la fatigue. Ou alors, il prenait son rôle de père bien trop à cœur. Il faudrait peut-être qu'il lui annonce tout de même, son comportement allait être étrange à force. Rah, non ! Il avait dit pas ce soir ! « Bonne nuit, Val-fils. » Oui, voilà, il prenait congés, c'était mieux. Et attendez, il avait dit 'Valmys' ou 'Val-fils' ? Avec un peu de chance, l'Enwr n'avait pas entendu la subtile nuance de consonne erronée dans son bafouillage. Il tourna les talons. Allez hop ! Il était temps de dormir. Foutue crise de la quarantaine.

    ---

    La table du petit déjeuner ressemblait, dans son abondance exquise, à celle qu'ils avaient partagée pour la première fois au royaume elfique. Le bourgmestre, installée, préparait une tartine de confiture de fraises, avec soin, et la posait près de la tasse de Valmys lorsque ce dernier entra dans la pièce. C'était une manière de se faire pardonner celle qu'il lui avait dérobée. « Bonjour, viens t'installer. » l'invita-t-il en désignant d'un geste souple et gracieux de la main, une seconde chaise. Il inspecta les traits du visage de l'immaculé pour doser du quota de sommeil que celui-ci s'était offert hier soir.

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Il fallait se rendre à l'évidence: l'effet de surprise tombait à l'eau. Aldaron savait désormais qu'on lui préparait quelque chose. Intérieurement, Valmys se consola en se disant qu'au vu du mouvement de recul du bourgmestre, quelques chances subsistaient pour que ce dernier ne connaisse la nature exacte de ses cadeaux. Au moins pourrait-il tenter de le surprendre ainsi.
De justesse, l'Enwr retint un geste de recul quand une main s'approcha de sa joue. Un instinct, dont il savait le manque de pertinence, lui murmura dans un feulement vicieux que les autres bipèdes n'auraient pas eu cette proximité, qu'ils se seraient contentés de le prévenir de la tache qui le maculait. Il essaya de rejeter cette idée aussi fermement que possible, malgré la légère anxiété qui s'insinuait toujours en lui dans ce genre de conditions. Aldaron était un ami, rien de plus. Avec le temps, peut-être était-ce plutôt lui, l'immaculé, qui avait oublié ce qu'était la proximité entre les êtres. Sous la pseudo-réprimande, il baissa légèrement le nez, s'avouant ainsi coupable, reconnaissant entendre la remarque et son bien-fondé. Par chance, Aldaron ne l'obligea point à y répondre, reprenant la parole. L'idée que le bourgmestre ait pu avoir un doute sur ses activités et avoir voulu les confirmer lui vint, mais il la chassa également. Ce n'était pas dans le caractère qu'il lui connaissait. C'était plutôt quelque chose que lui aurait pu faire: s'il avait su quelqu'un susceptible de lui concocter quelque surprise, il aurait tenté de découvrir quelques indices, juste assez pour se mettre en appétit. Et il savait très bien qu'il s'y serait pris maladroitement et se serait fait prendre.

Il avait vraiment parlé de le border lui-même ? Valmys n'avait jamais été bon pour cacher quoi que ce soit, et sur ses traits passèrent de subtils indices qui témoignaient de son incrédulité quant à une telle idée. Cela le déstabilisa au point où la réplique suivante manqua de totalement lui échapper. Fortuitement, ce qu'il en saisit lui indiqua que ce n'était pas vraiment à prendre en compte. Les incitations au sommeil... Un autre jour, à une autre occasion, il les aurait prises en compte comme de sages conseils d'un elfe plus expérimenté. Cependant, demain était un jour exceptionnel, pour une personne exceptionnelle. Il faisait confiance à son propre organisme, et connaissait ses limites. Pas question de dormir avant d'avoir fini ce qu'il s'était décidé à faire. Aldaron valait que l'on dépensa son énergie pour lui. "Reposez-vous bien également. Puisse la nuit veiller sur vous." Aucune promesse ne lui serait offerte. Le bourgmestre s'en doutait, assurément. Que pouvait-il espérer y faire ? Tous deux étaient probablement assez lucides pour se douter agir selon leurs natures respectives.

La porte se referma derrière Aldaron, et Valmys ne retint pas une expression de franc soulagement. Retournant s'assoir à son bureau, il était troublé. Val-fils ? Oh oui, il avait très bien entendu. S'il n'avait proposé de le border, peut-être que l'ami du bourgmestre aurait pu croire que ses oreilles toutes neuves lui avaient joué un tour. Là, beaucoup d'indices commençaient à s'accumuler. Le fils d'Aldaron lui manquait-il ? A l'aube d'une nouvelle année, il n'était pas rare de repasser en revue son parcours... Avait-il des regrets ? L'elfe aux cheveux blanc était très discret sur sa vie privée et son passé, Valmys ignorait même s'il avait quelque nouvelle de cet enfant qui lui avait valu le fiel de son peuple. Mordillant une de ses plumes de calligraphie, il s'imagina tout ce qu'il aurait pu dire à Aldaron, si seulement ce dernier lui avait ouvert son coeur à ce sujet. Lui, le fils rejeté, il aurait peut-être pu jouer les médiateurs, lui proposer son soutien. Pouvait-il y glisser quelque insinuation dans sa lettre ?
L'écriture prit bien plus de temps que prévu, et les taches d'encre n'en étaient pas la principale raison. Il était bien tard lorsque l'Enwr se glissa dans les draps infiniment doux qui lui avaient été prêtés. Eh mais... Il y avait plusieurs épaisseurs de couverture ?! Dans laquelle était-il censé se mettre ? Par les Huit, il n'avait jamais eu de matelas aussi épais non plus ! Et en plus, tout cela sentait bon la lavande. Allait-il seulement pouvoir dormir dans un autre environnement ? La bougie soufflée, son organisme l'informa très vite que, dans tous les cas, son endormissement ici et maintenant serait immédiat.




Valmys eut un sursaut lorsque la chatoyante petite musique le réveilla. Elle était toute proche, alors qu'il était le seul musicien à sa connaissance à s'être endormi dans sa chambre. Un peu paniqué, il jeta des coups d'oeil hâtifs autour de lui, à la recherche du malheur qui allait encore lui tomber sur le coin du nez. Ah, oui, il était chez Aldaron. Et bien seul. La musique paraissait provenir d'un petit objet bizarre posé sur sa table de chevet. Il brillait, couvert de glyphes, et semblait présenter l'heure. Valmys le prit très délicatement dans ses mains, l'analysant sans vraiment comprendre. Un objet pour l'heure, qui faisait de la musique... Musique qui s'arrêta bientôt. Soit. C'était très étrange, mais au moins cela avait-il eu le mérite de le réveiller à une heure décente. Le soleil était encore ensommeillé lui aussi, et ses rayons venaient paresseusement s'allonger sur le sol de la chambre. A la lueur du jour, il semblait à Valmys qu'il avait laissé beaucoup plus de bazar, bouts de tissus et parchemins, que dans son souvenir. Il les rangerait... Une autre fois. Au moins ce réveil particulier lui fit-il oublier son rêve étrange, où le feu s'était mêlé à la neige.

Lavé, peigné, vêtu des habits qui lui avaient été offerts à Keet-Tiamat, l'Enwr aux veinules cuivrées trottina dans les couloirs. Inutile d'interroger un domestique: il n'avait qu'à suivre la bonne odeur des tartines chaudes ! Grâce à ce raisonnement brillant, il arriva enfin face à la porte de l'antre tant désirée. D'une main, il vérifia que son catogan était bien fait, et bien serré. Sous son bras, son paquetage était prêt. Il se tint droit, noble, poussa la porte, et...
...Soutint le regard des domestiques, surpris de le voir arriver en cuisine. Un peu gêné et bafouillant, Valmys expliqua qu'il cherchait le bourgmestre, tout en s'admonestant mentalement. Avec un peu de chance, une telle intrusion était très mal vue au sein de la haute société, et il commettait un bel impair, alors qu'il n'avait même pas encore salué son ami. Quelle cervelle de moule il faisait !

Rebelotte: dos droit, cheveux bien mis, sourire, et paquetage sans la moindre trace de froissement. Rentrant dans la pièce, Valmys ne put néanmoins empêcher quelque chose de viscéral en lui s'exprimer. Son regard dévia vers la tartine de confiture de fraises avant même de voir quoi que ce soit d'autre. Oh ! Elle était belle. Mais il ne fallait pas trop s'y attacher. Ce n'était pas parce qu'elle était seule et appétante, posée face à une chaise vide, qu'il allait pouvoir se l'approprier ! Aldaron allait peut-être vouloir vérifier s'il s'était amélioré. Ah ! Aldaron ! C'était pour lui qu'il était là !
Avec délicatesse, Valmys déposa son paquetage sur un coin de table libre, et vide de toute miette de pain, près des coudes du maître des lieux. "Bon anniversaire, Aldaron !"
Le tabard était un bel habit, bleu, dont il avait lui-même brodé les bords avec un joli fil doré. Les brodures étaient un curieux mélange d'esthétique humaine et elfique et, ici et là sur les bords de l'habit, elles dessinaient les armoiries de Caladon. Rien de trop gros, voyant ou vulgaire. Le travail était très fin. A vrai dire, Valmys n'avait jamais produit de travail de couture d'une telle qualité. A l'intérieur, au niveau du col, "Aldaron" était également noté, aussi bien calligraphié que cela était possible.
Pour la lettre, le parchemin était spécial, solide, comme fait pour durer. Une enluminure colorée de la lettre "A" débutait une poésie soignée dans la forme et le fond. Valmys lui témoignait son affection, lui avouait qu'il lui était un être cher, lui souhaitait encore de voir des centaines d'autres automnes, et que ces derniers soient aussi prospères qu'il pouvait le souhaiter, afin que ceux qui l'aimaient et qu'il aimaient puissent créer ensemble ces souvenirs ensoleillés dont il savait si bien être l'auteur. Il souhaitait, lui, pouvoir l'épauler dans les épreuves qu'il aurait à endurer. Il souhaitait que les amis d'Aldaron et lui-même puissent toujours lui apporter ce dont il pouvait avoir besoin. Au milieu du parchemin, une pierre spéciale faisait peser son petit poids. Bien reconnaissable, pour ceux qui en avaient déjà usé: une pierre de communication. Un indice tangible de la volonté de Valmys à garder un lien avec cet elfe, même lorsqu'à nouveau la distance les séparerait.

L'Enwr laissa son aîné à ses découvertes, s'asseyant devant sa tartine, essayant de garder l'air le plus naturel possible. Il était à la fois inquiet, excité, et d'humeur relativement joyeuse. Son sourire ne le quitta pas, y comprit quand il jeta presque discrètement quelque regards à la victime de ses présents, cherchant dans les détails de son visage ce qu'il pouvait sincèrement en penser.
Portant la tartine délicieusement sucrée à ses lèvres, Valmys songea qu'au moins il avait vaincu sur un point. Occupé, le bourgmestre ne pouvait lui soustraire son petit déjeuner. Omettant peut-être la politesse, il entama son repas sans attendre la moindre autorisation. Pour son humble défense, il avait peu dormi. Cela commençait doucement à se voir, malgré son immaculation. Peu lui importait, et son attitude ne différait pas de ses habitudes. Il continuait à dépenser autant d'énergie que si sa nuit avait été complète.

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    Le voir arriver avec un présent ne fut pas une surprise, même si elle aurait du, s'il n'avait pas eu la sottise d'entrer dans la chambre de Valmys, hier soir. Au moins ignorait-il son contenu. Il eu un sourire amusé, se détendant de son port royal et habituel, pour s'afficher plus humain et accessible. « Merci, Valmys. » C'était fou, avec un peu de repos, sa langue ne fourchait plus autant. 550 ans. Probablement avait-il passé le cap de la moitié de sa vie. Il avait trouvé les dernières années plus difficile que son innocence des siècles passés. Les dix récentes avaient été pénibles, plus encore qu'il ne l'aurait jamais cru. Et même dans ce havre de paix qu'était l'archipel de Tiamaranta, il doutait que leurs ennuis ne les poursuivent pas un jour, fatalement. Ce n'était qu'une accalmie, avant la tempête. Un temps qu'ils devaient tous savourer à sa juste valeur. Probablement était-ce, entre autres, pourquoi il avait abouti à un tel désir de paternité. Cela faisait quelques temps que la question de son fils biologique la tenaillait. Ne pouvant se résoudre à aller à la rencontre de cet enfant, pour l'heure, il avait préféré donner de cet amour à Valmys, cet immaculé qui avait su attendrir son cœur froid. Ouvrant la lettre, ses prunelles émeraude parcoururent les mots un à un, se délectant la prose lyrique sublime d'un spécialiste des arts. La langue elfique rehaussait la délicatesse et la signification profonde des sentiments qu'il lui exposait si ouvertement. Un fin sourire marqua ses traits. Le marbre de son visage le retranchait dans une réserve régalienne, sans quoi ses yeux se seraient chargés de larmes. Il sentait l'émotion qui étreignait son cœur, ne faisant que le rassurer et l'enjoindre à la démarche d'adoption qu'il comptait présenter au principal intéressé. S'il ne laissa que peu transparaître, dans cette droiture royale, il n'en demeurait pas moins vrai que ses yeux relevés sur le mangeur de tartines étaient pleins de reconnaissance sincère.

    Il reposait délicatement la lettre, comme s'il s'agissait d'un bien précieux. « C'est très beau. » confia-t-il, appréciateur de la syntaxe et du vocabulaire riche. Mais également du contenu même de son propos. Cela était d'autant plus précieux que ceux qui aspiraient à une vocation baptistrale ne pouvaient se perdre en flatteries fallacieuses. Ces mots là étaient vrais. C'était tout ce qui comptait pour lui. La pierre tournait entre ses doigts émaciés d'un rose cendré, alors qu'il semblait perdu dans ses pensées. « Valmys, je me disais que... Tu aurais besoin d'un vrai foyer. Je veux dire... Le Domaine, c'est comme ta famille mais, ça ne la replace pas. Pas complètement. Mes sentiments à ton égard sont paternels et je crois comprendre que tu me considères comme un enfant le ferait avec un père. » Il baissa les yeux sur la lettre, comme pour appuyer la véracité de son propos. « J'ai un fils, au Royaume des Elfes. Mais je l'ai eu bien trop tôt pour avoir été capable de l'assumer sereinement. Aujourd'hui, j'aimerais faire un pas, dans cette direction, dans ta direction. » Il reposait la pierre de communication, sur la table, doucement, lorsqu'il s’aperçut être en train de la serrer un peu trop fort. Il prenait le paquet cadeau, qu'il ouvrait avec cette même grâce noble et maîtrisée, découvrant l'étoffe et son travail. Un sourire vint s'élargir sur ses lèvres, comme s'il fondait d'affection. Il se ramollissait ! Maudit crise de la quarantaine ! Pour autant, il ne cherchait pas à lutter contre ce qui le taraudait. « Cette maison pourrait être aussi la tienne, si tu le souhaites. Ta chambre te serait réservée et tu pourrais... Revenir dormir ici quand tu le voudras. Tu n'auras pas besoin d'accord, ce serait... Aussi chez toi. Et nous nous verrions plus souvent, en plus de pouvoir... Communiquer. » Par cette fameuse pierre, symbole de leur volonté à se rapprocher.

    Il tâcha d'inspirer et se leva lentement, tenant le tabard entre ses doigts, contemplant l'ouvrage, la raison pour laquelle Valmys ne dormait pas hier soir. Il reporta son regard sur l'immaculé, songeur. « J'aimerais ne pas avoir à t'appeler 'fils' uniquement lorsque la langue fourche. Le veux-tu ? »

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Le nez dans sa tartine, les joues gonflées de nourriture stockée, Valmys trouva tout de même le moyen de sourire quand, enfin, Aldaron reposa sa lettre. Cela le soulageait profondément. Il avait mis du coeur dans sa lettre, et de vrais morceaux de sentiments, trop vrais pour qu'il puisse rester de marbre quant à la réaction de son aîné, trop découverts pour qu'il ne craigne pas, irrationnellement, le jugement qui pouvait en découler. Le petit Enwr était également touché du compliment qui lui était fait. Pour des raisons qui lui étaient inconnues, il était persuadé que c'était sincère. Peut-être était-ce parce que le bourgmestre l'avait toujours été avec lui, et n'avait guère montré de tendance à se répandre en vaines flatteries. S'il avait su le faire, et s'il n'avait pas eu du sucre pour occuper ses sens, Valmys aurait assurément rougi.

En voyant Aldaron se saisir de la pierre de communication, l'immaculé s'imagina, naïvement, qu'il allait également faire quelque remarque sur cette dernière. C'était plus ou moins ainsi qu'il s'était psychologiquement préparé: don de cadeaux, puis quelques questions badines sur l'organisation de cette journée, puis du séjour de façon plus générale. Seulement, la conversation prit un tournant qu'il n'avait pas du tout vu venir. De surprise, il posa sa tartine, ses grands yeux d'ambre rivés sur son aîné.
Le bourgmestre savait mieux faire les surprises que lui, c'était sûr. Il savait aussi exactement deviner ce qui pouvait manquer à son coeur. Oh que cela devait lui être utile !

Depuis le début, Valmys aurait dû s'y habituer. Il aurait dû apprendre à ne plus vraiment ressentir la moindre surprise lorsque son ami lisait en lui comme si son chant-nom inscrit sur son front. C'était plus fort que lui, il avait toujours l'impression de vivre dans un monde où son aîné percevait des nuances qui lui étaient inaccessibles, et pourtant bien parlantes. Combien d'indices laissait-il passer sur ses propres pensées ? Est-ce que d'autres qu'Aldaron savaient combien il manquait de ce repère, ce point d'accroche ? Le Domaine était comme sa famille. Mais... Même cette notion ne lui apportait pas ce qu'il avait cherché à travers Deocyne et Dawan, et ne comblait le vide qu'ils avaient laissé. Le Domaine lui offrait des frères et soeurs, et des adultes attentifs et bienveillants. Il n'avait jamais pris le temps d'y tisser un lien précis avec un être, quelqu'un qui serait là, avec lui, pour le soutenir dans ses ennuis, pour lui enseigner les choses de la vie, quelqu'un vers qui aller quand les cauchemars revenaient. Cela lui aurait même paru malvenu de choisir une personne parmi ses chers baptistrels. Et les autres gens ? Quels autres gens ? Les pirates, peut-être ? Il n'avait pas grand-monde. Et personne qui ne le regardait comme Aldaron le faisait. Personne qui n'agissait envers lui comme lui le faisait. Personne pour lui offrir un poney qu'il n'avait pas tenté de voler.

Pourtant, malgré ce manque, et l'évidence que représentait Aldaron, jamais le petit Enwr n'avait fait le lien, ni ne s'était dit que c'était possible. Il n'en avait pas même rêvé. C'était un terrain entièrement neuf et vierge pour son imagination et ses sentiments. Lui, avoir un père ? Maintenant, alors qu'il avait passé ses vingt ans, sa potentielle jeunesse ? C'était...
Génial ?
Par chance, Aldaron évoqua son fils biologique, l'empêchant de bondir immédiatement de joie, et répondant à quelques questions qui l'avaient assailli dans la nuit. Le bourgmestre savait où était son fils. Ce n'était cependant pas vers lui qu'il allait. Pourquoi ? Ce ne pouvait être un manque d'amour. La crainte de sa réaction ? C'était bien plus pertinent, justifié et compréhensible. Sauf que Valmys devinait ce que pouvait ressentir ledit fils. Il fallait le dire à Aldaron...
Pas maintenant. C'était son anniversaire. Et ledit Aldaron faisait pétiller des paillettes dans ses yeux. La chambre avec le matelas épais... Pour lui ? Ici, chez lui ? "Fils", comme nouveau titre ? Valmys imagina un bref instant ce que cela pouvait faire, de se présenter comme le fils adoptif de quelqu'un, et revenir vers ladite personne le soir, lui raconter sa journée, ses progrès. Son petit coeur s'accéléra. Et... Et lui, il pourrait l'appeler "père" ? Il n'avait jamais prononcé ce mot. Jamais pour quelqu'un. Par les Huit ! Ce ne lui était donc pas interdit. En tout cas, si ça lui avait été, les pouvoirs sacrés du bourgmestre levaient désormais l'interdit.

Le silence s'était fait, et Valmys restait planté là, bouche entr'ouverte, regard agrandi et pétillant rivé sur l'elfe face à lui. La réponse était déjà marquée sur ses traits: on aurait dit qu'il venait de trouver ses cadeaux un matin de solstice ou d'anniversaire. C'était bizarre, ce sentiment dans sa poitrine. Léger et plein d'énergie en même temps, brillant comme un soleil, et tout aussi brûlant. C'était... Eh, c'était de la joie, non ? Comment était-il censée l'exprimer, celle-là ? Elle l'emplissait et lui donnait plus de force que le sommeil de ses dix dernières nuits. Est-ce qu'il pouvait bondir ? Est-ce qu'il y avait un mot spécial à prononcer dans ce genre d'instants ? On ne lui avait pas dit. Il ne savait plus. Ses lèvres remuèrent, sans son, avant qu'il ne les close, se reprenne un peu et, avec un sourire en coin, trouve enfin les premiers mots pour se lancer:

"- Je croyais que c'était votre anniversaire, pas le mien."

Abandonnant sa tartine, il se leva, aussi calmement que cela lui était possible. Ses mains tremblaient sous l'émotion qu'il contenait. Il effaça la distance entre eux. Juste à côté de lui, il parut hésiter. Mais il était un immaculé fort, désormais. Il ne cédait plus aux Dona Mihi. Il ne laissait plus les souvenirs se mettre dans son chemin.
Valmys prit son père dans ses bras.
Aux légers spasmes qui agitèrent ses côtés, et à quelques bruits de reniflements, Aldaron n'allait avoir aucune difficulté à deviner que cela arrangeait le petit être qu'il ne puisse voir son visage. Il ne se détacha de lui qu'après un moment, frottant ses yeux pour en retirer l'humidité, et tenter de discerner quelque chose avec eux.

"- Il semblerait que je le veuille." L'Enwr prit une longue inspiration, retrouvant un peu de souffle. Pfiou. Il n'était plus fait pour ce genre de choses. Aldaron avait intérêt à ne pas lui faire le coup tous les matins. "Est-ce qu'être votre fils implique des devoirs spécifiques ? Des conséquences auxquelles je dois m'attendre ? Est-ce que..." Il baissa un peu les yeux, jouant avec ses doigts comme pour occuper ses nerfs, un sourire en coin. "Vous préférez que je vous appelle "père", ou "papa" ?"

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    Cela se sentait, sa joie indicible, son exaltation à la nouvelle, comme une porte qu'Aldaron ouvrait devant lui, donnant sur un paysage inédit, une contrée jusqu'alors inexplorée. Il percevait son bonheur comme si c'était le sien, offrant à son cœur l'inimaginée parenté. Il le vit hésiter, dans le choix de ses mots, le sens de ses paroles, comme s'il était égaré. Mais là où il s'était perdu, l'immaculé ne craignait rien, aussi l'elfe lui laissa tout le loisir d'ordonner les sons qui composeraient son verbe et lorsqu'enfin il s'exprimait, le Bourgmestre lui rendait un doux sourire. Ne savait-il pas que rendre Valmys heureux, c'était se rendre lui-même heureux ? Ne savait-il pas qu'Aldaron avait besoin de ce lien pour cadeau, lui aussi pour renaître de ses cendres, se reforger, plus fort, comme autrefois ? Non, pas comme autrefois. Comme demain. Il voulait être ce qu'il serait à l'aube d'un nouveau jour. Le passé ne devait pas être miré avec mélancolie. Ce qui importait véritablement, c'était ce qu'il adviendrait de lui à l'avenir et il avait envie de se reconstruire. Ivanyr, et maintenant ce petit enwr, lui avaient donné envie de cela.

    L'hésitation fut accueillie avec patience et il referma délicatement ses bras sur son enfant en le sentant venir se loger contre lui. L'une de ses mains, entre ses omoplates soutenait son fils adoptif pour ne pas qu'il tombe si jamais ses jambes lui faisaient défaut, la seconde passait entre les mèches brunes, l'effleurant à peine, mais suffisamment pour lui montrer qu'il était à ses côtés dans ce moment houleux en sentiments. Les sursauts et les spasmes de ses sanglots lui firent remarquer combien il avait touché à juste en cela. Valmys avait terriblement besoin d'un père, de ce lien magnifique et lui... lui il était enfin prêt à tenter l'aventure. Plus tard, peut-être, il parviendrait à renouer avec cet autre fils qui portait ses gênes et son absence gravée dans la peau. Avec la boîte à musique, c'était différent. Il n'avait rien attendu de lui, toutes ces années. C'était plus facile en un sens et ça l'aiderait à ne pas avoir trop de choses à apprendre lorsqu'il irait retrouver la chair de sa chair au royaume elfique.

    Il le laissa s'épancher, pleurer de tout son saoul, en silence, savourant simplement le plaisir qui fourmillait sous sa peau que de l'avoir à ses côtés. Son aura, protectrice, l'enveloppait qu'un cocon de douceur et d'attention, veillant sur lui comme un soldat fidèle au poste. Lorsqu'enfin le petit enwr décida qu'il en avait assez, l'elfe le laissa se détacher et un sourire vint renaître sur ses lèvres après cet instant de songes. « Disons... 'Père' en public. Le reste du temps, c'est à ton bon vouloir, tant que cela a la connotation de notre lien dans ton cœur, cela me sied. » Les apparences protégées lorsqu'on les regarderait, dans l'intimité de leur maison, son fils était seul maître du titre par lequel il souhaitait s'adresser à lui.

    « Tu n'as... Pas vraiment de devoirs spécifiques, excepté probablement de venir voir ton vieux père régulièrement ou au moins de garder contact mais... » Il désigna d'un geste délicat de la main la pierre de communication restée sur la table. « Il me semble que c'était ce que tu espérais de toi-même. Quant aux conséquences... oui, il va y en avoir quelques unes dans la mesure où je ne suis pas l'inconnu de l'archipel. Mon nom est célèbre, mon visage tout autant. Il y a fort à parier qu'on te lie à moi en permanence et qu'on te sache protégé. Plus d'un y repenseront à deux fois avant d'oser te faire quoique ce soit. Je ne suis pas un belliciste mais je n'apprécie vraiment pas qu'on fasse du mal à ceux que j'aime. Cela me rend rancunier et quand on est bourgmestre de Caladon, on a les moyens de faire payer très cher la moindre bavure. » Si un cawr avait été là, il aurait nettement compris combien aucun mensonge ne logeait sans ses mots pour les adoucir ou les tempérer. Il était capable de tant de tortures, Morneflamme lui avait ouvert la voie de l'inimaginable.

    « Voilà qui devrait tenir les pirates en respect, à l'avenir. Mais cela ne sera pas forcément toujours rose. J'ai des ennemis, et quelques uns n'ont pas de scrupules à l'idée de toucher d'autres cibles que moi pour m'atteindre. C'est lâche et pénible... Aussi, j'aimerais que tu m'avises si tu te sens face à un danger qui te surpasse. Si j'ai des hommes près de là où tu te trouves, je te les enverrai rapidement et je... Peux aussi venir moi même avec un arc et des flèches si les mots ne fonctionnement pas. Une fois en transe, je peux faire apparaître un double de moi-même près de toi. C'est presque immédiat, Valmys, ne l'oublie pas. » Son regard était insistant alors qu'il jaugeait de l'idée de continuer : c'était qu'il ne voulait pas l'effrayer : « Il est aussi possible que certaines personnes se montrent plus distantes avec toi, par crainte d'un geste que je pourrai mal prendre. Il t'appartiendra de les rassurer et d'aller vers eux. Ça ne sera pas toujours facile mais je suis certain que tu t'en sortiras. Tu sais te faire aimer. » Et lui-même avait été touché par cet immaculé.

    « Je pense que c'est à peu près tout... Tu seras couvert financièrement par mes soins. S'il te faut quoique ce soit, il te suffira de me le faire savoir ou de demander à mes domestiques. Et... Ah oui... » Il chercha par quel bout entamer son annonce : « Il y a... Quelqu'un dans ma vie. Un homme. » Voilà qui tombait net comme nouvelle et il resta un instant au jauger du moindre préjugé qui se lirait sur ses traits avant de poursuivre : « Un vampire, pour être exact. » Là aussi, ça passait ou ça cassait. Les elfes étaient parfois butés mais Valmys ne lui avait pas donné cette impression. « Cela ne fait que quelques jours vraiment et... Rien n'est officialisé mais j'ai... La sincère sensation qu'il y a quelque chose d'inhabituel entre nous. Cela doit te paraître... Niais et naïf mais... » Il haussa les épaules : « Il s'appelle Ivanyr, tu devrais le voir souvent, il est officiellement mon garde du corps et il... A quelques soucis de mémoire. Il s'agit d'Achroma Seithvelj, le dragonnier. La dragonne de l'Orage Skade l'aurait ramené à la vie mais ses souvenirs sont extrêmement brouillon et douloureux. Il essaie de se construire. Je ne sais pas s'il... Aime les enfants et si tu pourras le considérer comme un second père mais... Essaie. Doucement. Avec prudence. Sait-on jamais. » Peut-être que cela lui ferait du bien à son vampire...

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Valmys acheva d'essuyer de son poignet le contour humide de ses yeux. N'avait-on pas idée de lui infliger tant d'émotions, si promptement après le réveil, et après une nuit aussi courte ! L'Enwr se connaissait assez bien pour deviner que les prochaines heures -les prochains jours ?- composeraient sans doute entre la fatigue de son corps et l'excitation intenable de ses nerfs. C'est que tout allait devenir spécial ! Se lever en tant que fils, manger comme un fils, se balader comme un fils... Tout serait différent, maintenant qu'il savait que, par-delà son petit être, un elfe plus âge veillait sur lui ! Il en était sûr !
Un mouvement de tête affirmatif accueillit la réponse d'Aldaron quant au terme à adopter pour le désigner. Un très bref rire ponctua le lien qu'il fit entre leurs communes envies de communiquer. Tandis qu'Aldaron explicitait les conséquences de son adoption, Valmys prit le temps de s'assoir/se laisser tomber sur sa chaise, avec toute la grâce et l'allure que pouvait avoir un roturier épuisé, si Sainnûr soit-il. Ses bras lui paraissaient lourds. Il ne savait pas s'il avait faim ou s'il était bien trop occupé avec sa joie pour avoir encore des besoins terrestres. La tartine attendrait un peu.

Au final, il gagnait en protection autant qu'en risques. Valmys ne savait pas trop s'il devait ou pouvait se réjouir. Il ne croyait pas vraiment Aldaron quand ce dernier parlait de tenir les pirates en respect. Sa tête n'était pas aussi connue que celle de son père. De même, s'il y avait des gens pour vouloir s'en prendre à un baptistrel, et fils de bourgmestre, ce devaient bien être des forbans sans royaumes, et capable d'échapper aux flèches d'Aldaron. Les pirates étaient tous désignés pour cela, non ? Au final, Valmys avait intérêt à rester aussi prudent qu'à l'accoutumée, n'ayant guère envie d'être perpétuellement escorté par des gardes offerts par son généreux adopteur. Ceci dit, l'idée de pouvoir se blottir dans ses jupons et pointer le méchant du doigt après s'être fait molester était assez plaisante, même s'il ne s'imaginait guère l'appliquer. Oh, lui ne songeait pas à des flèches.

"- Je croyais avoir l'habitude de faire attention. J'imagine que c'est encore plus vrai maintenant. Je préfèrerais ne pas avoir à faire appel à vos flèches, et m'en sortir par simple magie." Il souriait à Aldaron. Avait-il cessé de sourire depuis l'annonce qui lui valait de renifler ? "J'essayerai de ne pas oublier, néanmoins. Sait-on jamais..." Une pensée le traversa, fugace, qui pouvait les rassurer tous deux: "Au moins avec le système politique acutel, je n'ai pas à craindre que l'on veuille s'en prendre à moi pour éliminer vos successeurs, n'est-ce pas ?"

Il ne craignait guère que l'on se montrât plus distant envers lui. De même, il imaginait facilement d'autres personnes tenter de se rapprocher de lui de façon peu naturelle. Il se faisait confiance pour savoir distinguer le vrai du faux, et se lier à ceux qui lui feraient de bons compagnons d'aventure. De ses actuelles amitiés, rares seraient sans doutes celles qui se détourneraient de lui à l'annonce de son bonheur. Au contraire il imaginait relativement bien Ilyanth vouloir rencontrer cette nouvelle partie de la famille. Quelques Cawrs, peut-être, verraient d'un mauvais oeil son lien avec un homme politique. Un simple coup d'oeil à leurs deux chants-noms suffirait sans doute à apaiser leurs craintes.

La couverture financière était un luxe dont il doutait abuser, mais qui lui retirerait bien des tracas qu'il avait pu avoir jusqu'alors: manger suffisamment pendant ses voyages, avoir un toit et quatre murs pour le protéger. Ce ne serait pas désagréable. Au moins son esprit pourrait consacrer l'énergie de son inquiétude à d'autres choses, plus intéressantes. Il ne pouvait le nier: la richesse de son nouveau père avait au moins ceci de bon.

L'aveu quant au vampire lié à Aldaron fut accueilli par une lueur amusée dans le regard de Valmys. Tous deux savaient sans doute qu'il ne pouvait être le juge de telles inclinaisons. Il avait beaucoup trop miré le torse nu d'Aeglos pour cela, et ce malgré une mésaventure qui aurait pu le vacciner. Est-ce que ce point commun aidait également Aldaron à se sentir à l'aise en sa présence ? Si tel était le cas, il était hors de question que cela change. C'était surtout assez amusant de voir Aldaron, le bourgmestre de Caladon, l'impitoyable totem saumon, l'héritier de la Triade, parler de son amoureux. Il était plus commun de l'imaginer parler d'amour comme d'un outil et d'une obligation, plutôt qu'apercevoir cette petite faiblesse de son coeur, ce fragment de romantisme. Au fond, entre son enfant et son homme, Aldaron était un sentimental qui le cachait très bien.
Une image passa brièvement dans l'esprit de Valmys. L'image d'un Aldaron pioupioutant, un petit inséparable tout coloré qui papillonnait gaiement dans un univers surréaliste. Ce pouvait-il que son père soit à la recherche d'une moitié qui lui manquait profondément, et l'ait trouvé à travers un vampire ? Valmys remit en doute ce qu'ils avaient vu en rêve: et si ce qui manquait à Aldaron était plutôt un lié d'âme, un dragon ? Cela ne l'aurait même pas surpris. Oh, il ne remettait pas en question l'intuition d'Aldaron. Il lui imaginait juste quelques vies supplémentaires. De toutes façons, si le vilain vampire venait à briser son petit coeur en pièce d'or, Valmys serait désormais là pour le soutenir !

Le nom d'Achroma calma un peu le petit Valmys, ramenant quelque chant oublié à sa mémoire. En lieu et place de son père, il revit un autre elfe, plus petit et pâle, une vièle posée devant, le regard lointain tandis que ses lèvres s'agitaient à peine pour murmurer les lamentations d'une dragonne lumineuses. Même sans être vif d'esprit, ou particulièrement sensible aux émotions, deviner celles qui passaient derrière les grands yeux gris du Chanteciel n'avait pas été complexe. Désormais, son chagrin était celui qu'avait connu Silarae. Un commun destin les attendait, sacrifiés sur l'autel d'un lien déchiré.
Ce furent ces sentiments-là qui accueillirent le nom de Seithvelj. Valmys savait qu'il était le survivant d'un combat où même les dragons tombaient. Plus que de l'estime, ce fut surtout une sincère envie que ce dragonnier-là puisse s'en continuer de s'en sortir qui préoccupa Valmys. Sa mémoire effacée était sans doute le meilleur don que la dragonne de l'Orage ait pu lui faire, après la vie.  "J'aviserai. J'essayerai d'être aussi délicat que possible." Et, comme un encouragement pour son père, il ajouta, bien plus sûr de lui: "Je vous souhaite bien du bonheur, à tous les deux." Du bout de la cuillère, il agita l'eau de sa tasse de thé. Sa gorge refusait toujours de laisser passer quoi que ce soit, occupée à se remettre de ses larmes de joie. "Pensez-vous qu'il s'agisse de votre inséparable ?"

Reprenant une bouffée d'air pour rafraîchir son pauvre cerveau assailli par toutes ces émotions, il dut avouer, en reprenant son sourire en coin. "Je ne pensais pas que cela m'arriverait un jour." Une pensée lui vint. Se redressant un peu, il demanda, un peu gêné: "Est-ce que je peux garder mon nom de famille, en plus du vôtre ? J'ai mon cousin au Domaine, ma tante..." Il était certain qu'ils apprécieraient Aldaron, une fois que la nouvelle aurait circulé. Mais ne voulant présager de rien, il ne pouvait commencer à organiser un voyage pour Ilyanth en Caladon. Ou... Un voyage d'Aldaron au Domaine. Eh, cette dernière idée lui plaisait plutôt bien. Toute sa famille serait réunie, et il pourrait montrer à Aldaron l'environnement naturel des baptistrels sauvages; leurs salles de musique, les sanctuaires, les bibliothèques, et le recoin de pierresoù Valmys avait fait sa cachette, son atelier de sculpture. S'ils avaient le temps de sa vie devant eux, alors Aldaron devrait prévoir au moins de passer au Domaine. Songeur, tartine en main pour se motiver à manger, Valmys demanda à cette dernière. "Valmys Neolenn Leweïnra.. Leweïnra Neolenn ? Neoleweïnra..." Il pouffa de rire, bon public de son propre humour. "Quand fêtons-nous tout cela ?"

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    L'elfe avait été entendu, dans sa volonté de protéger son fils d'adoption. Qu'il rechigne à appeler son aide, il le comprenait. Au demeurant, Valmys pourrait avoir besoin de lui plus souvent qu'accoutumé... Ou peut-être était-ce déjà son instinct de père qui le poussait à craindre le pire. Maintenant qu'il ouvrait son cœur, donnait son affection aux êtres qui l'entouraient, il n'avait pas envie qu'on lui arrache ce qu'il construisait. Il en avait assez de souffrir... Et c'était pourtant une prise de risque notable, ce qu'il faisait avec Ivanyr, Valmys ou Eleonnora... Il se rendait vulnérable par eux. Cela faisait bien longtemps qu'il avait trouvé plus facile d'être presque intouchable, imbrisable... Mais à présent ? La peur ne lui faisait pas perdre la tendresse de son sourire. Le gain était plus puissant que sa crainte et même s'il en venait à se brûler les ailes, il savait qu'il s'était suffisamment bien entouré pour qu'on le rattrape dans sa chute. Il avait un peu plus foi en l'avenir mais ça ne lui ôtait pas cette boule d'angoisse qui germait dans son ventre, sournoise. Il pensait être capable de vivre avec. « Effectivement, tu n'as rien à craindre de ce côté-là. Si cela avait été vrai, cela ferait longtemps qu'on aurait ennuyé celui qui partage mon sang. » confirma-t-il au sujet de son successeur et de son fils biologique. Il n'en demeurait pas moins vrai qu'une personne qui avait décidé de lui faire du mal s'acharnerait au delà de l'entendement et ça, l'enwr ne devait pas le sous-estimer. Les prunelles dures du bourgmestre tendaient à le souligner, même s'il le faisait avec bienveillance.

    « Je te remercie. » souffla-t-il, bas, tant pour son acceptation à y aller piano avec Ivanyr que pour ses vœux de bonheur. L'elfe enfila le tabard que son fils lui avait offert et en lissa soigneusement le tissu. C'était très saillant par dessus son costume. Il pourrait porter une cote de maille elfique légère, en dessous et son armure reposerait parfaitement sur ses épaules. Le vêtement était sublimement brodé sans pour autant être trop tape à l’œil. Cela lui convenait. Sa silhouette, fine et élancée, était mise en valeur, loin des carences que lui avaient coûté Morneflamme. Ses prunelles cherchèrent un miroir, avant de se dire qu'il y en avait un dans le couloir... Mais il stoppa net sa recherche au terme d'inséparable. Ses joues vint à rougir, très légèrement, à cette évocation. « Il se pourrait, en effet... Disons que... Nous n'avons pas encore fait la cérémonie visant à appeler cet esprit-lié. Nous le sentons tout deux, cet appel l'un vers l'autre et surtout... Le manque quand l'autre n'est pas là. Mais nous ne voulons pas précipiter les choses, tu comprends ? Nous préférons nous laisser le temps de... Nous ajuster. Il y a encore beaucoup de points de tensions entre nous, des choses que nous avons besoin de comprendre, pour mieux... Façonner notre avenir. Lui comme moi. » Lorsqu'il repensait à la précédente nuit, avant l'arrivée de sa boîte à musique. N'avait-il pas pleuré longuement dans les bras d'Ivanyr en lui relatant toute l'horreur de Morneflamme comme il n'en avait jamais parlé à personne par le passé ?

    « Lui-même a besoin de se construire, se reconstruire avec son amnésie. Il est encore hanté par des souvenirs d'outre-tombe qui le terrorisent. L’existence d'Achroma n'a pas été faite que d'instants merveilleux... Surtout sur la fin. Je crois qu'il ne portait pas les baptistrels dans son cœur mais... Ivanyr n'est pas Achroma. Il met un point d'honneur à s'en scinder. Il ne le rejette pas mais disons... Qu'il veut se construire par lui-même. Forger sa propre identité. Aussi ai-je foi que si tu lui apportes suffisamment de bonnes choses par ta présence, il sera en mesure de se forger sa propre idée et non se cantonner aux a priori que lui évoquent maladroitement les souvenirs d'Achroma. » L'elfe eut l'air un bref instant pensif avant de reprendre son chemin jusqu'au couloir et contempler ce tabard sous toutes ses coutures. C'est que son Valmys avait du talent tout de même, ça lui allait comme un gant. Il revint rapidement, avec un sourire aux lèvres et vint s'asseoir à table, sans défaire son nouvel habit. « Bien sûr, tu peux garder ton autre nom... A condition de me présenter ce cousin et cet tante. » proposa-t-il avant de porter sa tasse de thé à ses lèvres. « Fêtons cela avec eux, une grande réunion de famille. Lorsque je t'aurai présenter Ivanyr... Et Eleonnora. » ajouta-t-il soudain. « Eleonnora Ostiz, la fille de Crissolorio est aussi chère à mon cœur et si elle porte encore le nom de son père et non le mien, c'est qu'elle a désiré qu'il en soit ainsi. Je la considère toutefois comme ma propre fille... Profite de ton séjour à Caladon pour faire sa connaissance. » La proposition était sincère, mais il précisa toutefois : « N'oublies pas de lui faire un cadeau. C'est le meilleur moyen d'entamer une bonne relation avec elle... Elle a un côté très matérialiste. » railla-t-il, un sourire en coin, presque joueur et plus détendu à présent que Valmys était un membre de sa famille.

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Il allait faire de son mieux pour Achroma. S'il l'avait proposé de prime abord de son plein gré, n'engageant que ses propres avis et motivations, les mots d'Aldaron ancraient en lui une volonté plus forte, liée à son envie de ne décevoir ni ne blesser son père en sus de l'ex-dragonnier. Si dans ses décisions cela ne risquait pas d'apporter un poids plus lourd que celui qu'apportaient déjà ses valeurs, cela risquait, en revanche, de lui mettre subtilement un peu plus de pression quant à ses actes. Valmys ne le percevait pas encore, peut-être même que le moment venu il ne ferait pas le lien. Mais l'impact était là, en lui, dormant.

Valmys haussa un sourcil, légèrement surpris quant il fut question du lien entre Achroma et les baptistrels. De tels a priori sur l'Ordre n'étaient pas communs... Et comme par hasard, il fallait que cela tombe dans son entourage, et sur une personne dont l'avis était important. Que ce monde était farceur. Dans la mémoire du petit Enwr, rien ne lui revint de plus qui aurait pu le guider afin de savoir ce qui avait pu pousser l'Aîné à ne point apprécier les siens. Sans doute un désaccord philosophique qui s'était mué en crainte de voir ladite philosophie incarnée. Ou une mauvaise expérience... Tous les baptistrels, et toutes leurs décisions, n'étaient pas fatalement à l'image du "bien" du reste des bipèdes. Les propres a priori de Valmys lui firent douter que ce soit quelque chose d'aussi puéril. Il aviserait. Sa curiosité en était émoustillée, en tout cas. Et lui, il en était troublé, sa crainte de mal faire trouvant déjà de quoi s'alimenter.

Ce n'était néanmoins pas l'heure pour les angoisses. L'heure était à l'anniversaire d'Aldaron, à célébrer ce dernier, et ne pas lui faire regretter d'avoir fait de lui le petit dernier des Leweïnra, le poussin sous son immense aile. N'était-ce pas l'aspect plaisant de sa compagnie qui les avait amenés jusqu'ici ? Valmys était loin encore du temps où sereinement il ne chercherait plus à "plaire" à ses parents, à les séduire comme le faisaient les orphelins. La crainte de l'abandon. Tout était encore trop récent pour qu'il soit confiant, pour qu'il ait en lui cette conviction qu'avaient d'autres enfants que, toujours, il y aurait un adulte pour eux.
Le sourire qu'il vit sur le visage de son père lui indiqua que son cinéma, à questionner sa tartine, avait fonctionné. Ce léger sourire était suffisant pour apaiser un peu ses inquiétudes. En revanche, cela ne l'aidait pas à résoudre son dilemme. Il le tirerait à pile ou face en temps venu. Le hasard était le meilleur allié de ce genre de choix.
La notion de "grande" réunion de famille surpris à nouveau Valmys. G-grande ? Aldaron avait encore beaucoup de monde à lui présenter ? N'était-il pas rejeté par sa famille originelle ? ...Soit. Combien de personnes avait-il adopté ? Le petit immaculé commençait vraiment à avoir l'impression de s'être engagé dans quelque chose de tellement grand que son petit esprit ne pouvait pas le concevoir. une "Eleonnora" s'ajoutait à l'équation. "Dois-je en déduire qu'elle est désormais... Ma soeur ?" L'annonce de son côté matérialiste fit sourire Valmys. Innocent, il n'imaginait pas encore que cela pouvait être un euphémisme. "J'essayerai de la croiser, alors. Quel âge a-t-elle ? Quels sont ses centres d'intérêt ?" Avec un peu de chance, c'était une enfant amatrice de poneys, et une figurine de bois lui irait. Valmys se voyait mal offrir un cadeau avec de l'argent qui n'était pas le sien, et l'argent qu'il avait était très limité. Concevoir son cadeau lui semblait être la meilleure des solutions, mais encore fallait-il que cela plaise.
Portant enfin la tartine à ses lèvres, Valmys se montra songeur à la réponse qu'on lui apporta. Soit, il aviserait... A voix haute, il murmura ses pensées, d'un ton badin qui ne portait guère d'importance quant à ses conjonctures. "Mh... La réunion de famille... Peut-être plutôt au Domaine... Ilyanth étant un Cawr, je crains que Caladon soit dures à ses sens... Ou alors entre le Domaine et Caladon... Moitié de trajet, et moins de risque de blesser plusieurs Cawrs d'un coup sur un mensonge..." Son esprit fit quelques bonds, et certains durent le pousser à réaliser, enfin, qu'il parlait tout seul. Avec un nouveau fin sourire à Aldaron, il lui demanda: "Du coup... Avez-vous votre journée pour vous ?" Détournant le regard, comme s'il s'apprêtait à demander quelque chose d'inavouable, il continua: "Peut-être pourrions-nous... Enfin, si vous le voulez, nous pourrions peut-être aller en ville. J'ai jadis essayé de vous présenter ce qui me semblait plaisant à voir au sein d'Endëaerumë... Peut-être pourriez-vous me montrer ce qui vous plait le plus au sein de la cité que vous dirigez ?" Son ton s'était adouci sans doute plus que nécessaire. C'était que, normalement, ce n'était pas lui qui faisait les doléances, aujourd'hui. Mais si Aldaron n'avait pas de meilleure idée, c'était sa proposition. Son sourire était là, sincère, et son regard se tournait timidement vers son père.

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    L'elfe à la peau sombre prit une belle tranche de pain doré, encore légèrement chaud du four dont il sortait. Il avait la bonne odeur du blé et du beurre et un fin sourire se dessina ses lèvres. Morneflamme avait été son monde d'horreurs, retrouver ces plaisirs du quotidien l'émerveillait toujours, même après ces années à se reconstruire. Il craignait tant le goût du sang, à nouveau, que celui des mets délicats et authentiques lui rendait toute son âme, en une inhalation. La petite cuillère d'argent étala délicatement la confiture aux fraises, emplissant la mie de sa saveur fruitée. Une bouchée, le regard posé sur son fils adoptif, lui rappelait leur petit jeu. Il ne lui ferait pas subir pour l'heure, mais il testerait régulièrement sa psyché au cours de son séjour, pour vérifier l'état de sa progression. « Tu peux considérer qu'il s'agit de ta sœur, oui. Elle a à peu près de ton âge, et elle a hérité des désirs vénaux de son père biologique. Crissolorio Ostiz était percepteur des impôts avant d'être le régent. Je pense... Qu'un bijou ou une belle étoffe saura lui apporter satisfaction, si cela est ta question. Elle est aussi très aventureuse et curieuse, elle n'a pas froid aux yeux. C'est un sacré bout de femme que j'ai la joie d'avoir pour Conseillère. » Un sourire en coin arqua ses lèvres au souvenir de leurs nombreuses conversations, tantôt houleuses, tantôt tendres.

    Il avait connu Eleonnora depuis sa naissance, il l'avait vue grandir et s'y était forcément attaché avec beaucoup de tendresse. Crissolorio avait été un ami cher, un ami qui n'avait pas hésité à l'accueillir sous son toit alors que les disciples de Néant l'auraient fait exécuter si la traîtrise avait été découverte. Il avait pris un grand risque pour lui et Aldaron avait toujours été homme à mieux jauger de l'amitié de ses amis à l'impact de leurs actes qu'aux promesses de leurs mots creux. « Au Domaine, cela devrait être possible. A savoir manier les mots, je pense qu'il sera dans mes cordes de ne formuler verbalement que des vérités. Ce n'est qu'un exercice rhétorique comme un autre... Et il me plairait de découvrir l'univers où tu travailles et t'épanouis. Si tu le veux bien, évidement. Je peux entendre que tu aimes à profiter de ton jardin secret. Tout le monde a besoin d'un havre où il peut se retrouver avec lui-même. » Un sourire triste semblait avouer qu'il réalisait ne pas en avoir un pour lui, à Caladon. Quelque chose de véritablement symbolique et cher à son cœur. Peut-être devrait se créer cela, un jour. Un endroit isolé de la Cité où il puisse respirer en paix et recouvrer une certaine forme de liberté.

    Il se secoua pour ne pas s'enfoncer dans une léthargie et poursuivit son petit déjeuner. La chaleur du thé nimbait son corps d'une sensation de confort en cet automne naissant : « Je n'ai pas toute la journée mais je... Vais au moins m'octroyer la matinée. Cela te laissera l'après-midi pour récupérer du sommeil qui te manque. » Le regard de réprobation qu'il portait sur lui était doux et paternel. Il serait bon pour lui de se complaire dans une sieste bien méritée après le repas de midi. Aldaron, lui, avait beaucoup à faire et faisait beaucoup trop l'école buissonnière dernièrement. L'avant-veille, il avait quitté le travail plus tôt pour une ballade avec Ivanyr... Qui avait duré jusqu'à l'heure du déjeuner. Et ce matin, il se permettait encore cette largesse. Une chance que le Magistrat du Marché Noir soit un homme extrêmement efficace pour gérer les affaires caladonienne dans l'ombre de son patron. Parfois, il était bon de savoir qu'il pouvait compter sur lui pour prendre loyalement le relais. Morneflamme avait créé entre lui et Aaron, un lien indestructible. « Je vais te faire visiter... Et t'habiller un peu. » fit-il avec un sourire en coin. Il était loin de vouloir le couvrir de honte, mais son enfant devrait être un minimum présentable. Aldaron n'était pas un adepte des fanfreluches et des dorures à outrances. Il arborait un style vestimentaire simple et humble. Aussi Valmys n'avait pas de craintes à se faire : il n'aurait pas de bigoudis à porter pour le bon paraître.

    Une fois le repas achevé, il enfila des bottes et se cape neigeuse, d'un bleu irisé qui reflétait les rayons du soleil lorsque celui-ci sortait de sous les épais nuages. A la sortie de sa maison, il fut bien vite escorter par deux gardes caladonniens et l'elfe posa une main sur l'épaule de Valmys pour l'intimer à ne pas s'en occuper. Il finirait par avoir l'habitude. Il lui présenta les rues du quartier intérieur, là où de nombreuses habitations et immeubles étaient encore en construction. Tout se faisait pas à pas dans ce nouveau monde. Sur la place du marché, la vie était omniprésente. Les senteurs, les cris des vendeurs, les couleurs se mélangeaient dans un chaos à la fois effrayant et merveilleux. Il s'approcha d'une vitrine et entra à l'intérieur pour saluer chaleureusement la gérante. Il lui présenta son fils et réclama qu'on l'habille. Si bien que Valmys eut droit à plusieurs tenues au tissage coûteux et aux coupes sobres qui pourraient former sa future garde-robe... Au moins lorsqu'il serait à Caladon. Marchandant aimablement avec la gérante, l'elfe s'en tira à bon prix avant de réclamer qu'on fasse porter les emplettes chez lui. Valmys, quant à lui, portait un costume terrae fait sur mesure.

    Le tissu, au maillage solide de soie et de cachemire, était d'un vert-gris, semblable ceux des statues qu'on trouvait au sein d'anciens temples. La silhouette de Valmys était rehaussée d'élégance sans pour autant attirer l’œil aguiché. Les manches longues sont serrées jusqu'aux poignets, et la tunique tombe avec souplesse jusqu'au dessus du genoux. Elle se ferme sur l'avant par des fibules d'argent, délicatement ouvragés en forme de feuille. Un pantalon de même teinte est près du corps tout en ayant l'élasticité nécessaire à des mouvements confortables. Il invita Valmys à s'observer devant un haut miroir : « Qu'en penses-tu ? » demanda-t-il, même s'il était lui-même tout à fait convaincu que cela lui allait parfaitement. La richesse était dans la qualité du tissu sans être exhibé et le vêtement n'était pas saillant, pour répondre à la crainte de Valmys d’attirer trop le regard. Il avait l'air d'un petit noble plein d'humilité. D'un signe de tête, il l'invita à le suivre, pour quitter la boutique. « Je me disais qu'un nouveau compagnon te ferai du bien... » Un peu plus à l'écart du marché, il y avait une grande animalerie d'où s’échappait une odeur caractéristique et de nombreux piaillements d'oiseaux. La volière accueillait un petit nombre de résidents, mais ils semblaient tout à fait faire un boucan, comme s'ils étaient mille. A nouveau, comme de nombreuses fois dans la rue, il présenta son fils adoptif sans tarir d'éloges à son égard.

    « C'est pour lui que j'ai réservé Deïa. » annonça le bourgmestre et le dresseur s'en fut à l'arrière de la maisonnée, vers le parc, chercher le bel animal. Deïa s'avéra être une superbe chienne, un huskies glacernois aux poils noirs et blancs et des yeux d'un bleu céruléen. Loyale et bien dressée, elle servait à la guerre, sans nul doute : elle serait là pour défendre son maître. L'elfe s'assit sur un petit tabouret, croisant les bras sur son torse tandis que Valmys faisait connaissance sa nouvelle compagne. Le dresseur lui enseignait de nombreuses choses pour prendre contact avec l'animal et se faire entendre, sous les yeux attendris du père.

descriptionAdoption [Valmys] EmptyRe: Adoption [Valmys]

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Ainsi donc la dénommée Eleonnora avait des goûts de luxe. Cela n'allait pas spécialement aider le dernier membre de la famille Leweïnra à créer des liens avec elle. Pas qu'il soit pauvre, mais... Bon... Un peu. Ses poches contenaient juste assez pour subvenir à ses besoins. Il allait devoir donner quelques concerts pour se faire adopter par sa nouvelle soeur. Demander de l'argent de poche à Aldaron était hors de question: qu'aurait valu son présent s'il était issu du labeur d'un autre ?
De ce qu'il entendait, Valmys pensait pouvoir créer des liens avec elle. Leur principale différence se trouverait sans doute autour de l'argent et des biens matériels. Un sujet à éviter. Mais si elle était curieuse, et aventureuse, les divers voyages et carnets de croquis de l'Enwr pourraient l'intéresser et tenir leur conversation. L'allure de leur rencontre, idéalisée, se dessinait dans l'esprit de l'apprenti baptistrel.
Valmys fut un peu surpris d'entendre que sa soeur était également conseillère. Oh ? C'était permis et accepté ? Il aurait juré que de tels liens auraient joué en sa défaveur, remettant en question son objectivité. Son caractère devait vraiment valoir le coup d'oeil ! De même, l'histoire de son lien avec Aldaron devait avoir sa part d'épique. Avait-elle essayé de voler un poney, elle aussi ? Il le demanderait, un jour.

Il cacha sa honte d'avoir pensé à voix haute en privant sa bouche de parole, engouffrant une tartine dedans. Néanmoins, l'image d'Aldaron venant au Domaine lui plaisait. "J'ai envie de partager cet endroit avec vous, et vous présenter les gens auxquels je tiens," affirma-t-il afin de rectifier les idées qu'aurait pu avoir son père d'adoption. Avec d'autres personnes, ç'aurait été différent, mais lui... Il était son protecteur. Il devait voir ces endroits, il devait en faire partie. Il devait découvrir ce à quoi il s'était lié. Hélas, sa venue ne dépendait pas que de la seule volonté du petit immaculé. "J'en parlerai au Gardien." Utiliser le futur était dangereux, mais Valmys était sûr de lui. Il ne pouvait pas dire quand, comment, mais c'étaient là des détails. Ce serait fait.

Un sourire légèrement teinté de confiture, et un regard pétillant, répondirent à Aldaron quand il lui accorda sa matinée. S'ensuivit un regard plus fuyant et une mine faussement innocente à l'évocation de son sommeil manquant. Oh... Cela se voyait tant que ça ? Ah, les pères ne comprenaient rien de toutes façons: le gamin avait plein de raisons tout à fait valables de ne pas dormir ! Bizarrement, Valmys ne protesta pas trop, tout de même. La sieste n'était pas si malvenue.

Ce fut avec confiance que Valmys suivit son nouveau père. Il l'avait déjà habillé à Keet-Tiamat, et il comprenait la nécessité de lui trouver un nouvel apparat plus adapté à son nom de famille, et au climat. Les derniers habits qu'Aldaron lui avait offerts avaient été à son goût, pratiques, solides, et assez discrets, tout en étant de qualité. Il s'attendait à quelque chose d'équivalent, aux couleurs de Caladon.
Fruit de l'attention des couturières, il se laissa faire un peu maladroitement, peu coutumier de ce genre de moments. Les mesures, la concentration, les gens qui s'activaient pour lui... C'était étrange. Il ne savait plus trop où se mettre et, souvent, interrogeait du regard Aldaron, essayait de se rassurer des réponses tacites de son père. Un sourire sincère offrit bien plus que des réponses lorsqu'on lui remit ses habits finaux. Ils étaient beaux ! Ils lui allaient bien ! C'était un plaisir même pour lui de se regarder lorsqu'il était dedans ! Il lui vint brièvement à l'esprit qu'il devrait les montrer à cet elfe masqué, s'il le revoyait un jour. Il ne comprit pas cette envie. Tout à sa joie, il demanda à pouvoir porter dès maintenant ce joli costume vert-gris qui permettait de se changer en statue. Il allait très bien avec son teint, et il aimait beaucoup la silhouette que cela lui faisait. "J'aime beaucoup !" répondit-il à Aldaron, en admirant ses manches, et les fibules qui fermaient son costume. "Ca me fait bizarre, je n'ai pas le souvenir d'avoir un jour aussi bien porté un habit... Qu'en pensez-vous ?" Son avis importait, et les mots qu'il allait choisir l'aideraient.
Sur le chemin qu'ils suivirent, Valmys passa du temps à jouer nerveusement avec le tissu de son costume, en admira encore les plus fins détails. Il ne tenait pas en place. L'idée d'un nouveau copain le rendait intenable de curiosité et d'impatience. Aldaron fut questionné, le petit Enwr tentant de se figurer l'identité dudit compagnon. Combien avait-il de pattes ? Avait-il du poil ? Quel était son nom ? Et ses oreilles, elles ressemblaient à quoi ? Comment Aldaron l'avait-il rencontré ?

Entrant dans l'animalerie, son attention fut attirée par tous les potentiels copains qui résidaient là. Ses pas suivaient son guide par la présence qu'il dégageait, mais ses sens étaient préoccupés par les petits yeux qui se posaient sur lui. Il tendit les mains vers des oiseaux, vers des créatures plus ou moins habituelles, plus ou moins poilues. Ce n'étaient pas des choses qui se disaient, mais il aurait volontiers embarqué l'animalerie complète avec lui, au manoir familial. Le dresseur s'esquiva vers l'arrière-boutique, et Valmys resta là, debout, comme un i, à guetter son retour, le coeur battant, comme un marié qui attendait de voir pour la première fois sa femme en tenue de mariée.
Il l'aima dès le premier regard. Qui n'aurait pas ressenti de même ? Elle était si adorable avec ses oreilles dressées, son poil tout doux, ses taches de couleur, et ses beaux yeux clairs ! Il n'avait qu'une envie: enfouir ses mains et son nez dans les nuages qui faisaient sa fourrure, et lui dire qu'elle était une des merveilles de ce monde. Ce n'étaient néanmoins pas des gestes qui se faisaient avec les inconnus. Instinctivement, Valmys se mit à sa hauteur, et lui proposa sa main à renifler. Suivant les conseils du dresseur, il s'adapta, à l'éducation qu'avait reçu la belle. Il comprit qu'elle répondait à de nombreux ordres, mots-clefs. Nombreux étaient orientés vers les situations de combat, et Valmys doutait les utiliser. Il comprenait très bien ce qu'Aldaron avait voulu faire, et échangea avec lui un regard amusé. Soit. Si son père voulait avoir sa voix et son instinct auprès de lui, il laisserait faire. Mais si, libérée de ses fonctions, et auprès d'un maître pacifiste, Deïa finissait par se montrer moins protectrice, Valmys ne l'en empêcherait pas non plus.

Après quelques instants de présentations maladroites, mais pleines de bonnes intentions, Valmys comprit qu'ils ne pouvaient rester ici toute la matinée. D'un autre discret signe de tête à son père, il lui fit comprendre qu'il était prêt et que, s'il le voulait, il pouvait régler les derniers détails et se charger de les guider dehors tous les trois. Lorsque ce fut fait, il osa enfin laisser son coeur parler:

"- Merci beaucoup, père." Un sourire ponctuait sa phrase. "Pour les habits, pour Deïa... Et pour le cadeau de ce matin. J'ai la sensation d'avoir été le plus gâté de nous deux !" Il en riait. Ca le mettait un peu mal à l'aise sur l'instant, mais il savait une chose: "J'espère pouvoir, à mon anniversaire, vous rendre la pareille."
Il commença à s'aventurer dans la ville, suivant naïvement Aldaron, sans même savoir où ils allaient. A chaque pas, il vérifiait si sa nouvelle amie était bien là. "Elle me suit...?" Il osa faire quelques pas sans la regarder. La belle était sur ses talons. "...Elle me suit." Cela semblait beaucoup l'émouvoir. Un léger tremblement dans sa voix, comme s'il n'en revenait pas. Elle le connaissait à peine, et déjà lui faisait confiance. Il aimait beaucoup le regard qu'elle posait sur lui. Un peu moins le regard inquisiteur qu'elle portait parfois aux alentours. "J'aimerais beaucoup lui apprendre des jeux. Je connais surtout celui où on leur envoie des objets et où ils les ramènent... Hm..." Il parut réfléchir. "Le vendeur n'a-t-il pas dit qu'elle savait pister ? Peut-être pourrions-nous jouer à cache-cache, un jour, avec elle." Aujourd'hui, ou demain, selon le bon vouloir et l'emploi du temps d'Aldaron. Modulant légèrement sa voix pour la faire paraitre plus enfantine, Valmys ennuya son pauvre père d'un: "Voudrez-vous partager nos jeux ? S'il-vous-plaaaaait..." Le pauvre bourgmestre n'avait peut-être pas pu vivre cela, il fallait bien lui offrir l'occasion de se rattraper ! Par une heureuse coïncidence, ce fut le moment que choisit Deïa pour lever son museau vers Aldaron, ses grands yeux clairs venant soutenir le regard faussement suppliant de Valmys. Ah, les enfants...

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    L'acceptation de lui faire visiter le domaine fut accueillie avec un sourire paisible. Il se demandait quand ses fonctions de bourgmestre lui permettraient un tel voyage, mais il le ferait, c'était certain. Outre le plaisir de découvrir l'environnement dans lequel s'épanouissait son fils adoptif, nouer des liens avec le Domaine pourrait s'avérer prometteur. Il connaissait la neutralité des chanteurs... Mais elle n'était qu'une façade factice : toute le monde était influençable et personne n'était totalement neutre. Chaque être humain avait sa propre subjectivité et fermer les yeux sur ce biais, c'était se mentir à soi-même. C'était aussi un moyen de prouver au domaine qu'il n'était pas un mauvais allié de paix. Ou du moins était-il un allié pour la sécurité de l'archipel à défaut de prêcher uniquement pour la paix.

    Attendri, il complimenta la tenue de son fils avec soin, et plus tard, il le contempla découvrir la chienne qui serait sa nouvelle amie. L'apprentissage fut rapide, il fallait dire que l'animal était bien dressé. En son for intérieur, l'elfe se satisfaisait de savoir que son enfant ne souffrirait d'aucune défaillance dans sa défense : les blessures que le baptistrel ne pourrait infliger, le canidé les offrirait sans le moindre remord. Elle était dressée pour cela. « Je jouerai. » répondit-il avec un sourire en coin : « Elle n'a qu'à apprendre mon odeur. » fit-il en tendant prudemment la main vers la chienne pour qu'elle le renifle. « Voilà qui devrait être bon. » Un clin d’œil plus tard, il ajoutait : « Tu pourrais lui apprendre à chercher certaines choses. Comme des champignons ou quelques plantes médicinales. Montre lui l'odeur et elle se souviendra. Je dois y aller à présent, mes fonctions me réclament. Amuse-toi bien. » Le regard qu'il portait sur lui lui réchauffa le cœur de cet indicible lien protecteur. Il adorait cet enfant, avec lui, il apprendrait sereinement à être père.

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