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Suite directe de : Collier brisé
et de : Donner sa langue au graärh


L'étroitesse de la pièce l'étouffait, ce plafond bas aux planches noircies par la suie des bougies l'angoissait d'une peur instinctive, presque viscérale alors que lui venait le sentiment d'être enfermé, privé de son droit le plus fondamental. Une sensation absurde, puisque le Bourgmestre avait sciemment évité les cellules ! Pourtant, avec les meubles pauvrement disposés qui rongeaient le peu d'espace au sol disponible, la porte close et les barreaux aux fenêtres, Purnendu éprouvait de plus en plus d'angoisse. Si ce n'était pour l'odeur épicée du bois frais qui constituait les murs ou la présence magnétique de l'elfe à la peau sombre ; l'immense graärh aurait depuis bien longtemps abandonné toute maîtrise et fuis loin, très très loin ! D'une gorge sèche, il tenta d'avaler sa salive et termina par tousser très légèrement, s'attirant un regard courroucé de la part de Boromir donc l'éclat avait interrompu la diatribe. Le fauve cendré haussa un peu des épaules comme seule excuse à son intervention involontaire et l'invita à poursuivre d'un geste tout aussi désinvolte de la main. Dès que l'autre cessa de s'occuper de lui et pour l'énième fois durant l'heure passée, il s'agita discrètement sur son siège avec un inconfort presque douloureux tant la chaise ne lui était clairement pas destinée. Trop petite, il avait eu le plus grand mal à glisser sa queue entre les barreaux du dossier et plus encore à y asseoir son postérieur. Avec ses grandes pattes arrières repliées comme une grenouille, ses genoux tapaient le bord de la table et le pauvre mâle ne savait pas quoi faire de ses mains. Le plus simple serait de croiser les bras, mais il ne souhaitait pas donner l'impression de se fermer au débat qui s'éternisait, alors il vint maladroitement les poser sur ses cuisses et prit un air dépité à fendre le cœur de n'importe qui. Les oreilles abaissées vers le bas, truffe humide penchée sur la table, mais les yeux relevés sur les personnes présentes à la façon d'un chat poté, sa grande carcasse se secoua d'un lourd soupir avant qu'il ne se concentre sur la conversation.

Le Bourgmestre et lui étaient arrivés deux heures plus tôt, remontant l'avenue principale depuis le Port jusqu'au cœur de la magnifique Caladon. Si les quartiers populaires étaient encore en construction, de même qu'une grande partie des échoppes et bâtisses bourgeoises, les quartiers intérieurs réservés à la noblesses étaient, sans surprise, tous terminés. Le Centre de Garde ne faisait pas exception même s'il était sur la liste d'attente pour de lourdes rénovations ; seules les cellules de dégrisement ou les geôles du sous-sol étaient murées de lourdes pierres, parfois même renforcées de glyphes afin de contenir les utilisateurs de magie ou des êtres aux forces physiques incroyables. Le reste de l'imposante bâtisse était de bois brute avec quelques renforcements de métal cloutés pour les portes extérieures ou de barreaux pour les fenêtres. L'ambiance à l'intérieur avait déstabilisé le graärh qui découvrit une effervescence étourdissante avec dans la grande pièce une zone de réception qui précédait plusieurs bureaux et bancs disposés en géométrie aussi stricte que le rangement de paperasse était chaotique. Des civiles attendaient pour des plaintes, des agents bureaucrates rédigeaient les rapports, les témoignages ou s'interpellaient d'un service à l'autre pour quelques informations manquantes. Des gardes prenaient leur pause en riant, détendus voire même négligeant, tandis que d'autres veillaient sur des suspects avec sévérité. De part et d'autre de cet immense hall, des escaliers donnaient sur un premier étage ouvert sur la salle où les bureaux et salles d’interrogatoire se voulaient un peu plus isolées, mais toujours aisément accessibles en cas d'urgence ou d'évacuation. Ce fut directement par là que se dirigèrent le Bourgmestre et sa petite escorte, les épaules de Purnendu brûlées sous le regard de dizaines d'yeux interloqués et vaguement inquiets. S'il n'était pas rare de voir Aldaron fourrer son nez par ici, il l'était bien plus quand l'elfe semblait mener lui-même l'affaire !

Mal à l'aise, le fauve dû se pencher pour passer le cadre de la porte et regarda la petite pièce aux vagues allures de salon : un table, trois chaises dont deux du même côté et une petite commode qui devait contenir le nécessaire pour la prise de note. Le temps de retirer sa cape et de se contorsionner pour réussir à s'asseoir, l'on avait déjà envoyé les deux gardes d'escorte chercher Boromir à l'infirmerie. Une poignée de minutes supplémentaire et le jeune vampire rappliquait, drapé dans une dignité tout juste défroissée. Ce fut avec réluctance qu'il s'installa au côté du fauve herboriste et les deux hommes s'échangèrent un regard tiède avant de tourner d'un seul ensemble l'attention sur le Bourgmestre, assis en face d'eux. Chacun son tour, ils furent invités à faire leur déposition et eurent l'interdiction formelle de couper l'autre, même si l'intervention semblait pertinente ou urgente. C'est ainsi que Purnendu laissa le vampire commencer, n'étant pas très motivé à recommencer son récit si vite après l'avoir déjà couché aux oreilles de l'elfe. Mais voilà, l'autre parlait et... parlait encore ! Un véritable moulin à eau qui ne faisait plus des huit pour arriver au point final, mais bien des seize et des trente-deux. Plusieurs fois Purnendu fut tenté de l'assommer sur un angle de la table, mais les regards équivoques d'Aldaron suffirent à lui calmer les humeurs et il se contentait alors de s'agiter sur sa petite chaise avec un désespoir muré dans le silence. Quand il fut son tour de parler et d'expliquer les raisons qui l'avaient poussé à malmener le damoiseau qui froufroutait à quelques centimètres de lui ; la porte de la salle d'interrogatoire s'ouvrit après que l'on eut pris la peine d'y toquer sèchement. Un humain passa la tête par l’entrebâillement, observa un instant les personnes présentes puis concentra son attention sur le Bourgmestre. Il arborait une expression de chouette avec les yeux ronds et l'air totalement déboussolé. Lorsqu'il ouvrit la première fois la bouche, ce fut pour seulement gargouiller un amas de mots incompréhensibles, vint à rougir furieusement de sa bévue, se racla la gorge avant de reprendre d'une voix bien plus affirmée :

- Monsieur... Dame Falkire est ici et vous mande expressément... Il s'agirait d'une histoire grave concernant un vampire étranger accusé de trouble à l'ordre public, agression d'agents de paix, tentative de kidnapping d'un membre du Conseil -en la personne de Dame Falkire-, saccage d'un commerce tiers en la libération de graärh sur les quais... et... et je crois bien que c'est tout.

Acheva-t-il après avoir compté le nombre de chefs d'accusations sur ses doigts. Au même instant, l'on entendit un « bonk » sourd quand Purnendu abattit son front directement sur le bord de la table, puisque la paume de sa main ne suffisait même pas à signifier combien il était dépité par ce qu'il venait d'entendre. Par tous les Esprits-Liés ! Il n'y avait que son intenable vampire amnésique pour cumuler autant de fautes en si peu de temps. Expirant un lourd soupir mêlé à un feulement rauque, il leva la truffe vers le garde interloqué et lui demanda la description physique du-dît coupable. Sait-on jamais... sur un malentendu ! Malheureusement, mais sans plus de surprise, on lui détailla un vampire de grande taille, ayant des cheveux platines et des yeux bleus céladon. Le graärh soupira encore et se releva péniblement pour attraper avec tant de force le frêle dossier de sa chaise, qu'ils purent tous entendre un craquement sinistre retentir sous la paluche griffue. Maronnant une vague excuse, l'herboriste reposa le mobilier malmené pour se diriger vers la porte qu'il ouvrit en grand dans une humeur visiblement fort mécontente. Bien sûr, il laissa Aldaron passer le premier, mais lui emboîta le pas malgré les piaillements outrés d'un Boromir qui se faisait proprement abandonné. Il n'y avait aucun doute pour lui quant à l'identité du coupable et il hésitait encore entre le serrer dans ses bras ou l'étrangler. Probablement les deux en même temps, histoire d'économiser du temps et de l'énergie.

Ce fut donc la mine sombre qu'il entra dans le couloir qui s'ouvrait en mezzanine sur le reste du vaste hall d'entré. Ses yeux d'absinthe percèrent immédiatement la foule et n'eurent aucun mal à trouver la haute silhouette de son ami, lourdement escorté et tenu à l'écart du reste de la population puisqu'il représentait un danger pour le public. Les oreilles du graärh se couchèrent et il plaqua une paume sur le devant de son museau, secouant le chef tandis qu'il s'engageait dans les escaliers et... manquait de trébucher sur le Bourgmestre figé comme une statue de marbre.

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Elle avait suivi les gardes, ainsi que Ivanyr jusqu’au poste de garde central. On avait bien pris le temps de vérifier si elle avait besoin de soin et elle avait répondu que même si ça avait été le cas, elle aurait pu s’en charger seule. Et c’est là qu’avait commencé le conflit car monsieur le capitaine commençait à en avoir assez que la veuve veuille tout faire elle-même. Évidemment, elle ne se comportait pas comme une bourgeoise et une noble l’aurait fait. Elle était trop habituée à agir de manière indépendante et ne faisait pas preuve de suffisamment de prudence. Et comme de raison, elle n’aimait pas demander à un garde de faire rapport de la situation à Aldaron. Non, ce serait elle qui viendrait lui parler directement. Elle n’aimait pas que trop de personnes soient impliqués dans la transmission d’un message, ça pouvait déformer des mots et des situations.
Les bras croisés, un sourire calme aux lèvres, qui n’avait d’ailleurs rien du sourire d’une dame sereine et satisfaite, elle se disputait avec le capitaine qui était venu quémander son aide au départ. Son sourire n’avait rien de rassurant, à vrai dire.

« J’insiste sur le mot tentative. Je m’en suis sortie et sans votre aide alors il n’y a aucune raison de me couver. La raison pour laquelle je veux être présente est que j’anticipe la réaction du Bourgmestre. Je ne doute pas de vos capacités à livrer un rapport juste, cependant comment croyez-vous qu’il réagira lorsqu’on lui dira que l’une de ses conseillères a été victime d’une tentative de kidnapping?

Oui, mal. Et malheureusement, il n’y a que des hommes dans ce bureau. Et vous savez ce dont vous manquez? De délicatesse. »  


Elle n’était pas vraiment un contre-exemple, puisqu’elle laissait la colère lui monter à la tête. Mais elle ne faisait pas d’efforts pour chasser sa frustration. C’était plus crédible qu’elle soit en colère, en ce moment et elle ne devait pas se révéler.

« Et je tolère mal que vous me demandiez de me retirer de la situation. Vous avez fait appel à moi et je ne laisse pas mes responsabilités dans les mains des autres sans m’assurer de ce qui se passera ensuite. Qui plus est, l’incident me met en droit d’être présente. »

Elle s’interrompit lorsqu’elle entendit des pas dans les escaliers. Pendant qu’ils s’obstinaient, l’un des gardes était allé prévenir Aldaron. La veuve des rivières se retourna et croisa le regard d’Ivanyr dans son mouvement, elle détourna rapidement les yeux pour ne pas avoir l’air complice.

« Aldaron… »

Sa voix s’affaissa lorsqu’elle le vit figer nette. Puis ses yeux dérivèrent sur le Graärh qui lui était inconnu. Elle leva un sourcil interrogatif et pencha la tête sur le côté. Un Graärh? Qui était-il, que faisait-il en compagnie d’Aldaron? Son corps s’était relâché, elle n’avait plus ce sourire effrayant sur les lèvres et ses bras se décroisèrent naturellement.

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    Long. C'était définitivement beaucoup trop long. A quel moment s'était-il muré dans un silence régalien pour laisser Boromir épancher sa soif de palabres interminables ? Ah oui, partir du moment où il avait défini, arbitrairement, en son for intérieur, que chaque minute qu'il passait ici, en sa présence, coûtait de l'argent à Caladon et que cette somme globale serait déduite, évidement, des indemnités que Boromir pourrait percevoir au terme de son argumentation. Oui, vraiment, à partir de ce moment, ce fut presque amusant de voir les aiguilles de l’horloge tourner. Il imaginait déjà la tête que l'autre tirerait, au final. Il ne pouvait s'empêcher de jeter quelques coups d’œil au Graärh. Une part de lui comprenait son inconfort, lui-même le ressentait de temps à autre. L'aventure et les paysages de plein air lui manquaient affreusement. C'était une vie qu'il avait mis sur le bûcher, ce jour où il avait brûlé la dépouille d'Achroma Seithvelj. Son regard, planté dans celui du vampire, devint plus ferme, plus tranchant. Une attitude, simple mais charismatique, et il obtenait le silence qui fut magistral dans sa pureté rarissime. L'elfe avait pris la parole, des mots choisis avec soin pour que son discours soit court mais percutant. Il jugeait, décidait, affirmait. Un rôle de leader qui lui allait comme un gant et pourtant, il n'aspirait pas à ce genre de grandeur. Tout était si fade. Tout était si superficiel.

    L'arrivée du garde et le nom d'Autone ravivèrent l'éclat dans ses prunelles, intenses comme une forêt verdoyante. Il serra les dents et se leva immédiatement. Son visage fermé avait du mal à masquer son inquiétude lorsqu'il invita, d'un signe de tête, le Graärh à le suivre... Graärh qui en avait, de toutes évidences, déjà décidé de même tout seul. Inspirant lentement, il tâcha de se résonner, de se dire que si Autone avait des séquelles gravissimes, il en aurait été déjà informé, et ceux avant qu'on lui donne la quantité incroyable de chefs d'accusation qui reposait sur ce fameux vampire. Décidément... Cette journée allait être laborieuse. Les regards se tournaient vers lui, dans le hall. Il n'y prêtait plus attention maintenant. Son visage était aussi connu que celui d'un roi, même si l'elfe n'avait pas l'égo mal placé à vouloir faire imprimer son portrait sur la monnaie de la Cité. La cape caladoniene enveloppait une carrure masculine qui avait été fanée par ce quelque chose d'horrible qu'on devinait à la vue de ses doigts émaciés, du creux parfois visible sur ses joues d'un rose cendré ou encore dans l'éclat lointain de sa psyché brisée, flamboyant, dans ses yeux émeraude, tel le volcan de Morneflamme. En dépit de cette horreur couvée, sa présence se marquait d'un sceau remarquable de solidité, celui de son esprit renforcé autour de la douleur, comme une cage indestructible et d'une dignité sans faille, pour garder en son sein, un monstre de souffrance. Par son aura, on devinait le poids insupportable des épreuves, des choix et des responsabilités et pourtant, son corps se dressait dans une prestance sublimée d'une force régalienne. Le paradoxe renforçait certainement cette apparente invincibilité. Mais il était humain. Et c'était en humain qu'il descendait cet escalier.

    Escalier où le temps sembla s'arrêter, comme si chaque pas qu'il faisait, chaque marche le faisait choir vers le bas, dans un gouffre immense. Que disait-on, autour de lui ? Bourdonnement. Écho. Pourtant, il y avait du monde dans ce hall. Ses lèvres fines et ternes s'ouvraient sur quelques millimètres pour laisser lentement l'air entrer dans ses poumons. Si son paternalisme avait été rassuré à la vue d'une Autone entière et debout, son attention s'était rapidement focalisée sur des prunelles d'un bleu céladon, mille fois rêvées, jamais oubliées. Son cœur manquait un battement. Un frémissement féroce parcourrait sa colonne vertébrale, dévoreur, qu'il refusait de laisser se raidir. De quoi aurait-il eu l'air, à rester là, pantois ? Telle une mécanique instinctive, ses pas se faisaient vers l'avant, fluides, réguliers mais lents. D'aucune précipitation, il ne venait se jeter à son cou pour l'étreindre ou bien le tuer, mais il avançait toujours, il s'avançait même de trop pour que la garde ne s’inquiète pas. Cet homme n'avait-il pas déjà malmené une Conseillère de sa ville ? Peut-être était-il inconscient de se laisser absorber. Mais rien ne pouvait le retenir, le préserver de son désir de proximité. Cet homme avait été un arc majeur de sa vie, une histoire aussi merveilleuse que tragique. Un fantôme. Déjà, il se trouva près de lui et figeait ses jambes lorsque sa main tendue put se refermer sur le bras du vampire, comme s'il avait cru à une hallucination, un spectre, un rêve éveillé. Il ne put cacher la surprise qui écarquilla un fragment de seconde ses yeux rivés dans les siens. Il était palpable, il était physique. Son cœur manqua un second battement.

    Sa main glissa le long de son bras jusqu'à effleurer ses doigts froids, s'introduisant au creux de sa paume. Les sensations lui revenaient, les souvenirs douloureux étaient déterrés comme autant de morbides cadavres dont les mains glacées venaient étrangler sa respiration. Le troisième battement de cœur manquait aussi à l'appel, comme une erreur qui tournait au drame. Derrière lui, une vampire de sa garde était à deux doigts d'alerter de la situation si le cœur ne se remettait pas en marche de lui-même. Elle appellerait un soigneur, ignorant sûrement que Purnendu serait le plus prompt à réagir. Les doigts de l'elfe aux cheveux blancs tremblaient faiblement à son contact frôlé, de toute ce qu'il contenait en lui et qui manquait d'exploser. Il refusait de les montrer et paradoxe, dans ses yeux, qui avouait la tourmente. Il le détestait, il aurait voulu le frapper de venir si tard et de l'ébranler jusque dans ses fondements fragiles, à peine reconstruits ces dernières années. Sa langue goûtait une bile amère, un venin qu'il aurait voulu lui cracher au visage. Il aurait voulu le lacérer, lui arracher la peau, le faire souffrir mais il ne bougeait pas. Il n'y arrivait pas. Car au milieu de la rancœur étouffante, il y avait autre chose de plus doux, de plus tendre, de plus faible. Il y avait ce lien sibyllin, si sacré. Cette affection sincère et pourtant morte-née. « Capitaine. » fit-il sans lâcher du regard le revenant.

    Un quatrième battement de cœur manquait. Il décrispait sa mâchoire. Il ne s'était pas rendu compte qu'elle s'était serrée avant qu'il n'ait besoin de parler. Sa voix était raide mais ferme : « Libérez cet homme, je me charge de sa caution. » Il n'entendit pas la réponse. Pas plus que la vampire qui donnait enfin l'alerte. Il n'entendait même pas sa propre voix, tout n'était qu'un bourdonnement de plus en plus envahissant. Sa main se crispait dans celle du vampire, cette fois, pleinement saisie, dans un instant de peur, comme si son corps comprenait ce qui lui arrivait et que son esprit n'avait pas encore percuté, trop obnubilé qu'il était. Sa respiration s'agitait, étouffée. Un cinquième battement de cœur manquait. Il sentait des mains, de grosses mains velues, qui l’attrapaient en arrière pour le tirer et le mettre au sol. Son corps se raidissait alors qu'il s'y opposait. Dans certains cauchemars, on le tirait ainsi pour l’éloigner d'Achroma. La panique le parcourrait alors, non pas pour son propre état, mais pour cet éloignement forcé. Son autre main vint agripper avec une force viscérale les vêtements d'Ivanyr : « Non, Achroma... »

    Les larmes gonflèrent la surface de ses prunelles émeraude, en un fragment de seconde, avant de couler le long de ses joues d'un chagrin immense qui l’effondrait d'un seul coup. « Reste... » supplia-t-il mais c'était lui qui partait. C'était lui qui mourrait d'être tant resté.

    Il y eut un cri de panique générale dans le hall lorsque le corps du bourgmestre s'effondra.

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Il s’ennuyait déjà et ça ne faisait pas une heure qu’il avait ces fers aux poignets. Le moins que l’on puisse dire, c’était que ça s’annonçait mal pour la suite. La majorité du trajet jusqu’au poste de garde central avait été productivement passé par le vampire à essayer d’y voir un peu mieux et à ne plus risquer de se prendre les pieds dans tout ce qui traînait alentours. A présent que sa vision lui était majoritairement rendue, il testait sans en avoir l’air la solidité des fers anti-magie qu’on lui avait passé, découvrant avec une pointe d’ironie qu’ils n’étaient pas suffisants pour le contenir totalement. Bien… il avait donc encore la possibilité de s’échapper. Mais bien entendu, il était bien trop gentil pour ça, maintenant qu’il avait accepté de les accompagner pour la petite humaine. Comment ça on ne lui demandait pas son avis ? Mais bien sûr que si enfin ! Il avait toujours un avis à donner ! Et puis qu’est-ce que ces humains pouvaient parler et faire du bruit… la cacophonie emplissait désagréablement ses oreilles, tandis qu’il observait la foule d’un air maussade. Ça ne l’intéressait pas vraiment, il n’avait qu’une hâte : en avoir fini avec tout cela, et pouvoir ressortir à l’air libre. L’idée de se laisser enfermer dans une autre cellule lui donnait des sueurs froides, alors qu’ils avançaient de nouveau, tout en continuant de discuter et en le traînant derrière eux. Que cela se finisse vite…

Puis soudainement, il s’arrêta, apercevant tout d'abord la silhouette de son compagnon de route et ami, auquel il dédia un large sourire plein de crocs, sans rien montrer de repentant. C'était que le chaton lui avait manqué, mine de rien ! Et il avait manqué de sacrés événements, également. Un sourire qui flétris rapidement, lorsque ses prunelles se posèrent sur l'individu qui accompagnait Purnendu. Qu'est-ce qu'il avait cet elfe, à tirer une tête de six pieds de long ? Pourquoi est-ce qu'il l'observait ainsi ? L'autre approchait, venait vers eux, lui faisant froncer les sourcils alors qu'une poigne se refermait, violente, sur sa colonne vertébrale, le faisant frisonner. Qu'est-ce que c'était ? Pourquoi avait-il soudainement tant de mal à rester immobile, pourquoi son torse se comprimait-il d'un étaux désagréable ? L'autre arriva finalement à son niveau, et il ébaucha un geste pour reculer, se figeant à l'instant où le contact se fit. Un second battement rata dans le cœur de l'elfe, et cette fois, l'angoisse manqua étouffer Ivanyr. La question tournait en boucle en lui, de plus en plus violente, de plus en plus fiévreuse et angoissée, évoluant lentement, gagnant en force, pour se transformer. De simple curiosité, elle devenait invective lancée, crachée, hurlée. Pourquoi ?

Ses lèvres s'ouvrirent sur un semblant de souffle mais il était incapable de parler. Son regard s'écarquilla légèrement, et il manqua rétracter ses doigts lorsque l'autre les frôla, non de dégoût, mais pour s'empêcher de lui prendre la main. Pourquoi ? Son regard ne le lâchait pas, alors même que son esprit enregistrait le troisième battement de cœur manquant. Purnendu… il devait le prévenir, l'alerter. L'elfe aurait besoin de soin… Mais impossible de défaire son regard de lui, impossible de bouger, de réagir. Il restait là, suffoquant de peur à l'idée de voir périr l'être en face de lui, perdu dans ses propres réactions, les yeux écarquillés de surprise et d'incompréhension. Le son de sa voix le fit sursauter, comme s'il venait de recevoir une gifle. S'arrachant finalement un instant à sa contemplation, il chercha des yeux le Graarh sans parvenir à émettre le moindre son. Un instant plus tard, l'autre se crispait près de lui, tombait. Il l'attrapa de justesse avant qu'il ne tombe, et s'il restait muet, il débordait pourtant de reconnaissance envers Purnendu de réagir, le rejoindre immédiatement pour s'occuper de l'elfe. Alors qu'il allait reculer pour laisser la place au guérisseur, il se trouva attrapé et fut contraint et forcé de suivre alors que son esprit recevait de plein fouet ce qui venait de se passer.

Tout autours d'eux, l'agitation était total, alors qu'il restait là, à observer le félin agir, complètement démuni, vulnérable. Perdu, les paroles de l'elfe tournaient en boucle dans sa tête. Achroma ? Qui était Achroma ? Pourquoi le cœur de l'elfe s'était-il ainsi arrêté ? POURQUOI ? Qu'est-ce qui se passait? Et surtout… Pourquoi pleurait-il, lui? Ravalant un sanglot qui l'emplissait de détresse par sa simple existence incompréhensible, il recula de plusieurs pas, se tournant naturellement vers Autone puisque Purnendu était déjà occupé. Il lui décocha un regard plein d'une innocence éplorée, une question silencieuse hurlée par ses prunelles, voulant comprendre ce qui se passait…

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Quelque chose clochait.
Le constat fut évident alors que le Bourgmestre reprenait sa marche dans les escaliers, évoluant comme un somnambule dont les yeux, accrochés à ceux du vampire à l'autre bout du hall, rappelaient les ailes d'un phalène hypnotisé par la flamme d'une bougie. Purnendu pencha la tête d'un côté, puis lentement de l'autre afin de s'offrir littéralement un autre point de vue sur cette scène singulière. Ivanyr aussi perdait l'éblouissant sourire qu'il lui avait lancé quelques instants plus tôt et paraissait troublé, sinon perplexe à la vue de l'elfe. Et bien... se connaissaient-ils ? Cette perspective inattendue fit légèrement sursauter le graärh qui sentit son cœur s'accélérer en réponse. Quelles étaient les chances pour qu'ils trouvent si vite un des contacts de son ami ? Après tout, le vampire était ancien en plus de posséder une magie puissante ; de tels atouts avaient dû lui assurer une place importante sur leur ancien continent et donc ouvrir la possibilité qu'il connaisse le Bourgmestre, même s'il ne s'en rappelait plus aujourd'hui. Pour autant, ce n'était pas de la joie qu'il lisait dans la posture de ce dernier, mais plutôt de la peur et de l'incrédulité. Pouvait-on le blâmer si Ivanyr était porté disparu depuis au minimum une année complète ? C'est qu'ils en avaient mis du temps à se décider pour venir sur Calastin... l'avait-on considéré comme mort ?

Ils étaient arrivés dans le Hall maintenant et le silence gagnait progressivement l'assemblée dont l'attention ne se décrochait plus de l'elfe et du vampire. Toutes les affaires étaient interrompues. L'on n'entendit bientôt que le bruit de leurs pas et celui des respirations, du craquement sec des planches de bois et du léger grincement de quelques poutres, à l'étage. Lentement, les gens s'écartaient de leur passage et si Purnendu ne pouvait voir l'expression qu'arborait son hôte, il devinait à celle des spectateurs qu'elle ne s'arrangeait pas. Au contraire, la raideur des mouvements semblait s'aggraver et l'herboriste pu sentir un malaise gonfler, voire une vive inquiétude gagner les autres vampires attroupés là. Entendaient-ils quelque chose qui lui échappait ? S'il dressa les oreilles et huma l'air d'un rapide coup de truffe, il ne remarqua rien d'anormal... et pourtant, ses poils se hérissaient sur sa nuque et ses pattes. Bientôt, la frêle silhouette de l'elfe tituba, ses doigts graciles tremblèrent quand il leva une main vers Ivany et ils paraissaient plus pâles, comme dénués d'afflux sanguin. Le fauve cendré contourna lentement le Bourgmestre, jeta un regard intrigué vers son ami dont la situation semblait lui échapper au même titre que lui, puis revint sur l'homme de pouvoir... juste à temps pour l'entendre s'adresser au Capitaine de la garde. Un homme qui ne semblait pas comprendre davantage ce qu'il se passait et qui poussa un hoquet d'horreur à la vue de son dirigeant qui défaillait. En un battement de cil, l'un des gardes rapprochés d'Aldaron sonna l'alerte alors que déjà Purnendu levait une main pour retenir l'elfe entre les omoplates, l'empêchant de basculer en arrière et de se faire possiblement très mal.

Ivanyr était là, tenant la fine silhouette comme s'il s'agissait de la chose la plus précieuse qui lui était donné de posséder et qu'il risquait de perdre. Le graärh se figea quelques secondes, choqué par la vue de son ami dans un état aussi fébrile, puis il posa une main sur son épaule et la lui serra avec force pour l'enjoindre à lui donner Aldaron, mais aussi à se calmer. Il était là et il ne laisserait pas cet homme mourir. Alors qu'il manipulait avec précaution le corps frêle, il sentit vaguement qu'on essayait de le lui retirer des pattes. Aussitôt, il fit le dos rond avec la fourrure ayant triplé de volume, babines retroussées sur dentition carnassière impressionnante alors qu'il poussait un rugissement à faire trembler les murs du Centre de Garde. A la panique générale qui avait succédé la crise du Bourgmestre, retomba un silence choqué avant que lentement tous ne reculent face à l'image imposante du félin courbé par dessus la Triade, queue battant furieusement le sol et souffles rauques exhalés en avertissement. L'elfe était sien désormais et personne... PERSONNE ne l'approcherait sans son consentement. Pour l'heure, seul Achroma et la femelle qui l'accompagnait pouvaient se tenir à ses côtés. Purnendu ne savait pas pourquoi il acceptait l'étrangère, mais lorsqu'il croisa son regard, il su instinctivement que jamais elle ne représenterait une menace pour son patient. De plus, elle était vivante et pouvait donc répondre à une question aussi abrupte que singulière :

- Est-ce que... Est-ce que tous les bipèdes ont le cœur au même endroit ?

Et bien quoi !? Il aurait l'air con s'il s'escrimait sur une zone non éligible à un massage cardiaque... et son patient risquait d'aimer encore moins le ridicule et l'inutile d'une telle situation ! Il désigna donc le thorax d'Aldaron et quand il eut l'approbation de son aide improvisée, il hocha simplement du chef avant de se mettre habilement à exécution. D'un coup de griffes, il trancha les vêtements du pauvre elfe au niveau de la gorge et de l'abdomen afin de ne pas gêner ses voies respiratoires quand elles reprendraient du service. Il se pencha ensuite pour écouter son souffle, puis enfin entama les premiers soins pour que le cœur reparte au plus vite. Des pressions rythmées et puissantes sur son torse se succédèrent plusieurs secondes avant qu'il n'ouvre en grand la gueule et n'approche du visage d'Aldaron... donnant l'impression qu'il allait le lui gobber d'une seule bouchée. Il s'arrêta cependant à la dernière minute et plaqua les oreilles en arrière, frustré au constat que son anatomie était peu ergonomique avec celle de son patient pour l'exercice qu'il s'apprêtait à lui offrir. Penaud, il fixa l'humaine une fois de plus.

- J'ai besoin que tu plaques ta bouche sur la sienne et que tu y souffles trois fois avec force. Bouche son museau... heu, son nez et tiens lui bien la tête en arrière. Quand tu as fini, garde sa tête dans la position et laisses moi continuer le massage... puis à mon signale, tu reviens souffler et on fait comme ça jusqu'à ce qu'il revienne parmi nous.

Le ton se voulait doux et il l'était si l'on ignorait l'inflexion naturellement grave et rocailleuse du graärh. Pour autant, la demande ne souffrait pas de refus alors que l'état de son patient était aussi critique. S'il ne demandait pas à Ivanyr de l'aide, c'était bien parce que l'autre ne respirait plus depuis très, très longtemps et qu'ils avaient une chance sur deux pour qu'il ait oublié comment faire ! Décidément, il ne voulait pas risquer une maladresse et déjà il reprenait son massage cardiaque avec application, venant parfois plaquer la joue sur le torse pour capter un son, même infime avant de reprendre inlassablement et ce, jusqu'à voir tous les vampires se redresser avec soulagement. Le cœur du Bourgmestre reprenait du service, quoique encore faible et palpitant. Purnendu soupira et sembla dégonfler en volume quand sa fourrure cessa de se hérisser sous l'adrénaline et la panique. Un vague sourire ourla ses babines alors qu'il défaisait sa cape pour enrouler l'elfe dedans, le transformant pour l'occasion en Bourg-ito.

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La veuve resta interdite devant la scène presque mythique. Son cœur se serra, elle avait relevée la poitrine, tendue et nerveuse, elle regardait Achroma sans vraiment comprendre et son regard criait sa confusion. La conseillère n’osa pas faire un pas en avant, et toutes les apparences étaient tombées là. Elle se fichait à présent d’avoir l’air complice et ses yeux ne cachaient plus rien, alors qu’il y avait quelques minutes, elle faisait tout pour empêcher son propre regard de la trahir.

Lorsqu’elle vit son seul supérieur tomber, Autone sortit de sa stupeur et se précipita vers Aldaron. Elle se cogna sur l’attroupement et marcha maladroitement sur sa robe avant de s’arrêter. C’est là qu’elle croisa un regard d’innocence et de détresse qui lui fendit le cœur. Elle posa une main sur son bras, sans savoir comment le réconforter. Elle se sentait plus petite à présent qu’elle voulait le prendre dans ses bras et qu’elle ne pouvait pas le faire aussi facilement qu’avec un enfant. Elle essuya une larme, sans vouloir le dissuader de pleurer. Autone entendit le grognement et tourna la tête en restant immobile, alors que les gardes s’écartaient.

Puis ses yeux s’écarquillèrent d’avantage et lentement, sa tête se releva vers le vampire.

Achroma.

Comme si elle venait tout juste de l’entendre elle le regardait à présent et figeait à nouveau. Elle avait entendu son nom, était-ce le moment de lui dire? Sa bouche voulait questionner mais ses lèvres tremblaient, entre ouvertes dans son mutisme. C’était impossible. Il était mort, non? Il était mort, ou alors peut-être pas. Le bourgmestre avait-il halluciné?

Elle murmura pour elle-même sans vraiment y croire « Achroma Seithvelj, l’aîné… Le reconstructeur de la caste… » Puis elle tourna la tête vers la garde, sa voix autoritaire retentit dans la stupeur. « Allez me chercher un guérisseur, toi, trouves moi de l’eau et un linge, rapidement. »   L’endroit se dégagea sous ses ordres, de quelques personnes, il était déjà plus facile de respirer. Elle se précipita auprès du Bourgmestre et posa la main sur le cœur de son ami. La jeune femme pâlit en l’absence d’un battement. Peut-être ne le trouvait-elle simplement pas? Comment lui avait-on montré, déjà? À présent qu’elle se trouvait devant la crise, elle oubliait les moments où on lui avait appris à guérir les blessures dans le désert. C’était les entraînements militaires qui lui revenaient en tête. Elle se répéta mentalement, le désert, le désert, le désert.

Le désert

Le désert

La veuve grogna devant sa tête qui n’était pas capable d’un moindrement de concentration. Aldaron avait connu Achroma? Était-ce réellement lui, ou quelqu’un de trop ressemblant? Non, il ne serait pas tombé dans les pommes s’il n’avait pas été absolument certain de l’identité du vampire. Aldaron était plus résilient que cela, non?

Elle releva la tête vers Purrnendu en entendant la question inattendue qui interrompit le fil emmêlé de ses pensées. Autone leva un sourcil et cligna des yeux deux fois mais hocha la tête sans faire de remarque. Elle se gratta la nuque en le voyant faire. Puis sa demande la déstabilisa, mais elle n’avait pas vraiment envie de faire tout un plat. Ce n’était pas le moment d’hésiter, si la vie d’Aldaron était en danger, quelle importance réellement que ses lèvres touchent les siennes? C’était tout de même embarrassant, mais il ne fallait pas y penser. Le moins possible. Elle avait déjà fait ça, il lui semblait qu’on lui avait appris. Elle fronça les sourcils, revoyant les lits de fortunes, les baptistrel, les campements.   « Je me souviens. » Affirma-t-elle.

Elle se détacha du regard du Graärh en songeant qu’elle avait l’impression de l’avoir vu quelque part. À la fois, elle était persuadée de ne jamais l’avoir rencontré. Autone attrapa le menton d’Aldaron en pinçant son nez. Elle leva le menton avant de lui prêter son souffle en équipe avec la grande boule de poil qui elle, pressait son cœur.

C’est quand ce cœur se remit à battre qu’elle remarqua que le sien commençait à reprendre un rythme normal. Elle sentait les pulsations dans toutes ses veines et réalisait à présent qu’elle avait eu peur. La veuve avait l’impression de respirer plus clairement que jamais.  « Il respire? »  prononça-t-elle toute espoir.  « Il ira bien? Il n’y a plus de danger? » Elle regarda Purrnendu avec reconnaissance. Elle avait l’impression de lui être en dette. Autone n’avait jamais pensé à la possibilité de perdre Aldaron. Son seul supérieur, le Bourgmestre, il devait toujours trouver moyen de s’en sortir. Toujours…

L’imbrisée vit arriver l’eau qu’elle avait demandé en réalisant que c’était peut-être inutile. Ce n’était pas un coup de chaleur ou un malaise. C’était son cœur qui avait flanché, tout son cœur.

« S’il y a quoi que ce soit que je puisse faire pour vous remercier de cet immense service… Je ferai de mon mieux pour vous aider ou je vous procurer la récompense qu’il vous plaira. »  Offrit-elle au Graärh, dont elle ne parvenait toujours pas à retracer la familiarité.  « Si vous avez besoin d’un endroit où vivre, vous serez la bienvenue dans la résidence Falkire. »  

Elle entendit son capitaine pester, ce à quoi elle répondit par un contact visuel direct et sévère.
« Il faut qu’il rentre à présent… »  

La veuve était encore confuse de toutes les questions qui tournaient dans sa tête. Elle regarda Achroma, un air inquiet dans les yeux.

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Il tremblait toujours sourdement, incapable de bouger, prit de terreur à l’idée de voir mourir une personne devant lui. L’ironie et le ridicule de la situation lui échappaient totalement, il n’y avait rien de plus en son esprit, sur l’instant, que cette peur viscérale et sauvage. Le toucher sur son bras le fit à peine ciller, à peine frémir, la regardant toujours comme si elle pouvait lui expliquer ce qui lui arrivait. Mais le pouvait-elle seulement ? Elle semblait aussi perdue que lui. Il papillonna des yeux, alors qu’elle effaçait une larme sanglante de sa joue, surpris de sentir la traînée humide sur sa peau. Son corps avait réagi sans qu’il ne s’en rende compte, et le vampire ne comprenait pas vraiment pourquoi il pleurait ainsi. En raison de sa peur ? Ou bien était-ce autre chose ? Le grondement soudain l’arracha enfin à son hébétude, il redressa la tête, cligna des yeux comme une chouette, et observa Purnendu comme s’il le contemplait pour la première fois de toute son existence. Oui, il allait pouvoir sauver l’elfe, c’était aussi certain que le lever du soleil, alors… il n’avait pas besoin de s’en faire autant non ? Il avait confiance en ce Graarh-là. Purnendu avait réussit à le soigner lui alors il réussirait avec son nouveau patient, il n’y avait pas de difficultés pour lui.

Laissant les deux êtres s’occuper de l’elfe, il recula progressivement, et essaya de se reprendre de son mieux. Inspirant profondément, il effaça les traînées rouges sur ses joues et déglutit péniblement avant de se forcer à se concentrer. Un instant plus tard, les derniers fers tombaient. Pourtant, il ne se sentait pas l’humeur de s’en rengorgeait. A la place, il observa les deux formes prostrées sur l’elfe, s’occupant de le ramener parmi les vivants. Que c’était-il passé ? Qui était cette personne ? Pourquoi venait-il de manquer mourir… pourquoi… le regardait-il ainsi, comme s’il voyait un fantôme, comme s’il voulait l’attaquer… il ne comprenait rien, strictement rien à ce qui s’était passé, à ce qu’il se passait encore sous ses yeux. Muet, il n’osait plus avancer, de peur que le cœur de l’elfe ne reparte jamais s’il se trouvait près de lui. C’était une crainte enfantine et stupide, mais il ne pouvait s’en empêcher. Entendre de nouveau le battement fut un soulagement qui manqua avoir raison de lui et il expira, s’affaissant légèrement et se passant une main sur le visage. Il n’était pas le seul, semblait-il, à être réconforté par l’issue de cette crise, l’attroupement alentours se détendit visiblement dans le même mouvement.

Qu’est-ce que c’était que cette ville de déments ?

Falkire posait les questions à sa place, mais cela ne le dérangeait pas, il voulait les réponses lui aussi. Il en avait cependant d’autres, aussi, sans bouger de son coin, il prit la parole à son tour sous le regard de la conseillère, tentant de contenir une hargne défensive compréhensible après tout ce qui venait de se passer en si peu de temps.

« Qui est-ce ? Pourquoi… pourquoi son cœur s’est-il arrêté ainsi ? Pourquoi me libérer si aisément ? Pourquoi… »

Il ravala de force une colère pulsante, se sentant piégé et acculé par tout ce qu’il ne comprenait pas mais qui l’obligeait à subir frappe après frappe. Il n’aimait pas ça ! Inspirant profondément, il chercha du soutient chez Pur’ persuadé qu’il pourrait l’aider.

« Pourquoi étais-tu avec lui ? Que s’est-il passé ? Ils t’ont fait du mal ? Ils ne t’ont pas mis un collier au moins ? »

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    Vivre. C'était presque nouveau. Survivre, c'était encore tout ce que la Triade parvenait et quand la lumière aveuglante du renouveau s'offrait à lui, il n'y avait que le trépas obscur qui l'accueillait comme une ironie macabre. Les bruits autour de lui étaient sourds, étranglés. Il ouvrait ses prunelles larmoyantes. Le flou de sa vision discernait à peine les poutres de bois qui composaient la charpente du grand hall. Le bourdonnement lui donnait la migraine mais ça n'était pas le pire. Il avait l'impression d'être fait de pierre. Ses muscles raides étaient si douloureux à mouvoir. Chaque battement était une souffrance agonisante qui lui arrachait un cri étouffé. L'air dans ses poumons le brûlait, le mouvement de sa respiration était aussi complexe d'une épreuve de sport intensif. Au début ce fut chaotique, physiquement. Ses sens se contredisaient, lui donnait une information puis son contraire. Cri de foule, silence infini. Jour ou nuit. Tourment et insensibilité. Glace au contact de cette main vampirique... Roche ardente de Morneflamme qui l’entraînait dans les tréfonds de la peine. En définitive, la douleur physique était si peu de chose. Une piqûre de moustique à côté de ça ! Ça qui déambulait dans son esprit, ça qui ravageait tout, qui perturbait tout ce qu'il croyait. N'était-il pas mort, Achroma ? Ne l'avait-il pas vu s'éteindre en libérant la Dragonne de l'Orage du joug du Tyran Blanc ? Ne l'avait-il pas accompagné sur le bûcher ? Ne l'avait-il pas regardé s'embraser jusqu'à ce que le vent emporte ses cendres ? Un sanglot revenait dans sa gorge, il ne parvenait pourtant pas à l'expectorer. Ça restait là, à mi-chemin et c'était terriblement pénible.

    Un homme richement vêtu s'était approché en écartant la foule, semblant faire figure d'autorité. Autone le connaissait puisqu'il s'agissait de l'un des Conseillers de Caladon. Mais elle savait aussi qu'il travaillait pour le Marché Noir. Il était cet homme qu'on appelait dans l'ombre le Magistrat, celui qui suppléait Aldaron dans la gestion de la ville et qui jouissait d'une renommée remarquable et d'un tempérament serein, même pendant la tempête. Il semblait évaluer la situation avec justesse. Il fit venir un brancard pour que le corps de l'elfe ne reste pas ici au milieu de la foule. Chez lui, il serait bien mieux, avec les soins du graärh si celui-ci souhaitait poursuivre jusqu'au terme l'aide qu'il avait apportée. Il serait bien ingrat de le mettre en retrait. « Personne n'a mis ni mettra un collier à celui qui a sauvé le bourgmestre, Sir, je peux vous l'assurer. » répondit-il d'une voix ferme au vampire. Oh non, la vie du roi du Marché Noir était bien trop précieuse pour les fourmis qui travaillaient pour lui. L'organisation veillerait à ce que Purnendu ne soit pas importuné pendant son séjour à Caladon. Le Maître des Murs serait rapidement avisé et la milice mise en place. Le Magistrat se penchait sur Aldaron, posant un genou au sol pour diriger son oreille vers l'être qui peinait à s'exprimer. Le regard de l'homme se redressait soudain sur Ivanyr, surpris par ce qu'il entendait, avant de confirmer, plus bas, à l'elfe qu'il s'occupait du vampire et cela sembla apaiser les spasmes du patient. Il laissa des petites mains soulever le corps tremblant d'Aldaron pour le transporter et le conduire chez lui. Le Magistrat posait une main sur l'avant-bras du soigneur : « Si vous souhaitez rester à ses côtés, ses domestiques veilleront à ce que vous ne manquiez de rien. »

    A ces mots, il continua son avancée jusqu'à Autone pour lui offrir un baise-main : « M'est d'avis qu'il serait bon que vous suiviez... Tous les deux. » Son regard percutant avait coulé sur le vampire à ces derniers mots. Il le détailla quelques secondes, songeur, avant de revenir sur Autone, semblant appuyer une demande implicite et complice. Celle de garder le vampire à l’œil. D'un signe de tête, il leur indiqua la direction que le soigneur prenait avec l'elfe.

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S'il respirait ? Oui, mais faiblement. S'il allait bien ? Non, probablement pas. Par contre, il s'en sortirait car il veillerait personnellement à ce que ce soit le cas. Tenant farouchement l'elfe entre ses bras, il vint lui renifler le front, l'arrête du nez puis bifurqua sur une temps qu'il pressa de sa large truffe avant qu'il se vienne humer le parfum unique de ses cheveux, essayant d'imprimer en sa mémoire infaillible toutes les subtilités de son odeur. Les yeux mi-clos, il surveillait la haute et tremblante silhouette d'Ivanyr avec une sourde inquiétude dans le lustre verdoyant de ses iris. Lui aussi, il allait devoir s'assurer qu'il aille bien ! Le choc qu'il venait de subir risquait de faire reculer sa thérapie de plusieurs mois et une somme colossale de travail risquait de l'attendre... mais il était patient, il savait déjà comment procéder ; il lui suffirait d'attendre que l'autre l'approche, puis il l'engloutirait dans ses bras et le laisserait déverser ce qui lui pesait, ce qui l'étouffait. Pour l'instant, il avait cependant plus urgent à traiter et les questions de son ami lui firent dé-serrer les babines :

« - Il s'agit du Bourgmestre de cette ville. Celui qui la dirige, visiblement. Et... »

Il n'eut pas le temps d'en placer une autre qu'un humain l'interrompait. Les oreilles dressées à la surprise de ses propos autant qu'à la fermeté dans sa voix, Purnendu le détailla de la tête aux pieds, puis des pieds à la tête sans afficher la moindre inimité à son égard, pas plus qu'une réelle chaleur. Qui était-il ? Visiblement quelqu'un d'importance vu le respect qui lui était accordé par le reste de la foule. Pour autant, son contact lui hérissa le poil -littéralement dans son cas- et il émit un vague grondement afin de l'avertir de ne pas récidiver et surtout, de retirer sa main sur l'instant. Qu'avaient-ils tous à le toucher ainsi à la fin !? Ils voulaient le phéromoner ou quoi ? Franchement, les us et coutumes dans cette ville étaient au mieux déstabilisant et au pire inquiétants. Malgré son aversion, il concéda à abandonner Aldaron aux mains de ceux qui approchaient avec un brancard et se redressa avec fluidité pour se tenir entre l'inconnu et Ivanyr. Son ami était à deux doigts de la panique, ce qui présageait généralement d'une explosion de magie ou d'une fuite abrupte... et pour tout l'or du monde, Purnendu souhaitait que la seconde option soit choisie par le vampire amnésique.

Ce fut le cas. Par les Esprits-Liés, ce fut le soudain départ du blond qui permit à Purnendu de se détendre alors qu'il suivait du regard la haute silhouette battre en retraite. Il dissuada quiconque de l'arrêter d'un feulement grave, rauque et angoissé alors que lui-même combattait farouchement son désir de décamper pour suivre le brancard et son patient alité. Il était bien plus solide qu'il ne l'avait cru à la vue de sa frêle constitution ! Pouvoir se réveiller si tôt après un arrêt cardiaque et en plus savoir formuler des mots intelligibles ? Oui, définitivement, ce petit bout d'elfe était plus coriace qu'il ne le paraissait. Avec de grandes enjambées, offrant son bras à l'humaine si elle désirait les accompagner, le fauve couleur de cendre jeta un dernier regard par dessus son épaule massée, en direction de la sortie empruntée par son ami.

« - Laisse le. Qui que tu sois, ne le fais pas suivre. Ne me l'accules pas... Tu aurais dû te taire et me laisser faire. Cet homme est mon ami, mais aussi mon patient. »

Il s'adressait à l'homme intervenu tantôt et le fixa droit dans les yeux sans égard à sa noblesse, son poste ou quoi que ce soit. Il ne lui avait rien prouver pour l'heure, si ce n'était une autorité mal placée et qui venait de faire plus de mal que de bien à Ivanyr. La fourrure sur sa nuque était toujours hérissée alors que sa queue battait l'air dans son dos en un rythme vaguement agacé.

« - Il reviendra quand il le sentira. C'est ainsi que l'on fonctionne. N'interfère plus dans mes soins. Je n'interviendrai jamais dans ton travail, aies le même respect. »

Il souffla par la truffe à son visage puis se détourna pour rejoindre le Bourgmestre allongé, se penchant au dessus de lui pour l'observer d'un œil critique. Il questionna les brancardiers qui lui annoncèrent se diriger à la demeure privée de leur dirigeant afin qu'il y trouve repos et confort. Purnendu hocha la tête, approuvant la démarche et s'assura de dresser la liste de ce dont il aurait besoin pour s'occuper de l'elfe une fois qu'ils seraient installés.

[Poste de clôture pour moi.]

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Entre la panique d’Ivanyr, l’impulsivité animale du guérisseur et la débarque imprévue d’Aaron, Autone commençait à être étourdie et l’angoisse remontait dans sa tête. En fronçant les sourcils, elle cessa de tourner la tête de tous les côtés pour comprendre ce qui se passait et regarda le visage d’Aldaron. Lui, devait être très confus à présent. Le poil du Graärh se hérissait au contact du conseiller. Comme elle aurait voulu avoir les mêmes caractéristiques quand lui, prenait sa main. Elle se sentait encore froide, mais se contentait d’hocher la tête une seule fois, comme pour imiter la révérence qu’elle ne pouvait pas faire sur ses genoux. Elle comprenait que tout cela faisait partie du monde noble dans lequel elle était entrée. Mais elle ne s’y était jamais fait.

La veuve comprit qu’elle n’aurait pas ses réponses. Elle allait devoir déduire qu’il avait été sauvé et être patiente pour constater de son état plus tard. Elle attendrait son réveil. Et à voir l’attitude du guérisseur, Autone n’avait n’avait pas envie de le déranger.

L’imbrisée avait compris le regard implicite de son collègue, mais fut rapidement distraite par la fuite d’Ivanyr. Elle soupira, son inquiétude commençant à se diviser sur plusieurs personnes. Ses yeux en étaient teintés, alors qu’elle échappait un soupir. Elle profita de la main D’Aaron pour se relever puis ressentit un malaise à voir comment Purrnendu parlait au magistrat. Elle-même, avec son caractère enflammé n’aurait pas osé lui parler ainsi. Elle croisa le regard de son collègue et hocha la tête, comme pour lui dire de lui faire confiance. « Ce sera plus sécuritaire pour tout le monde ainsi… »

Autone remercia Purrnendu de son offre et prit son bras après avoir refait le même hochement de tête qu’elle venait de servir au magistrat. Puis elle se rendit compte à quel point elle était ridiculement petite. Il y avait de quoi se sentir intimidée. Elle se mettait sur la pointe des pieds pour garder un œil sur le bourgmestre, voir son visage et chercher des signes qu’il respirait toujours.

Elle ne demanda pas à entrer et s’assied à l’extérieur de la chambre. Elle attendrait sagement des nouvelles avant de rentrer. Il y avait Satie et Yolande pour s’occuper des enfants. Et la nourrice attendrait.

Le reste pouvait attendre.

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