[Intrigue] L’armada du crépuscule [GROUPE 1]

Les éclats de bois volant de tout côté, le rugissement des tirs à ses oreilles, les crissements de ferrailles un peu plus loin… Ilhan se forçait à se concentrer, mais il sentait une suée courir le long de son échine. Et soudain, le craquement sinistre du bois résonna devant lui. Alors que son chant prenait fin, après qu’il y ait mis toute son énergie et toute sa volonté. S’il avait cru… cela possible ! Était-ce bien lui qui… ?

Il jeta un regard de côté. Oui, il avait réussi son petit sortilège basique, lui, piètre mage, alors que l’elfe à ses côtés, bien meilleur dans cet art que lui, avait… échoué ? Parce que clairement le navire sombrait...mais les champignons n’avaient pas explosé. Les champignons n’avaient pas explosé ! Ilhan observa l’elfe auprès de lui se passer une main sur la nuque. Avait-il un souci ? Avait-il mal quelque part ? Mais il n’eut guère le temps de lui poser plus de questions, malgré les centaines qui le taraudaient soudain, que cinq rescapés du navire sautèrent sur le leur. Fichtre ! Il ne les avait pas tous eus.

Aussitôt toutefois, Sigvald réagit et ses ordres fusèrent. Le Général avait l’oeil partout, semblait sur tous les fronts. Si déjà, en temps ordinaire, Ilhan avait une certaine estime pour le grand délimarien, en cet instant il sentit un regain d’admiration flamber en son coeur. Pas étonnant que ses hommes le suivent sans réfléchir. Lui et Tryghild formaient un magnifique duo.

Les elfes sous un geste d’Aldaron obtempérèrent et neutralisèrent les cinq chimères. Mais Ilhan ne put suivre la suite. Il sentit une onde de fatigue le draper de son manteau glacé, le paralysant presque, tandis qu’un léger vertige l’assaillait. Tant et si bien que la suite se passa pour lui dans un immense flou artistique. Il entendit vaguement l’annonce de renforts sans vraiment comprendre tout, les sons se firent un court instant distants, diffus… Il entendit des flèches siffler, un rugissement non loin. Son œil aperçut la silhouette de Dame Dalis tournant le dos à un adversaire, deux flèches crépitant de foudre fusant vers le traître qui l’attaquait de dos…

Puis la chute d’un corps non loin de lui, des bruits d’agitation et de bataille. Un clignement de cils, et il aperçut Aldaron à terre, un vampire sur son cou. Un vampire ! La chimère ! Les elfes qui avaient laissé échapper leur proie déjà se relevaient, et deux gardes chargés de la sécurité d’Ilhan s’avançaient eux aussi armes tirées pour leur prêter main-forte.

Ilhan s’apprêtait à intervenir à son tour, un geste clé sur le bout des doigts… Mais s’arrêta en plein mouvement. Non, pas de magie. Le petit miracle qui lui avait permis de réussir son premier sort ne se renouvellerait sans doute pas deux fois. Au mieux il échouerait et sa pathétique magie n’aurait servi à rien, au pire… il risquait de blesser l’elfe ou ceux qui déjà lui venaient en aide. Non, pas de magie. Sauter dans la mêlée ? Pathétique idée aussi, il était pire encore une arme à la main et avait plus de chance de s’embrocher lui-même avec sa dague… Non, lui n’était pas fait pour ce genre de combat.

Non, lui, ses combats il les gagnait… Il les gagnait… Il porta soudain un regard à son anneau alors que l’idée, folle idée, émergeait en son esprit. Non, cela ne pouvait marcher. C’était… de la pure folie.  Cela n’avait aucune chance d’avoir un quelconque effet… Mais après tout… Qu’avait-il à perdre à essayer ? A part passer pour un fou. Ou éventuellement jouer diversion, attirer l’attention des satanées chimères sur lui et pas sur… ceux à qui il tenait.

Une voix retentit soudain en son esprit. La même qui avait visité son rêve. Cette phrase…

"Tu préfères croire en ton esprit plutôt qu'en ton coeur, mais ton coeur n'est pas sans esprit."

Oui, c’était pour cela aussi qu’il était là. Pour ceux à qui il tenait. Dont un certain nombre étaient sur ce bateau. Et ce maudit elfe à terre, possiblement vampirisé, était du compte, bougre d’idiot ! Lui qui avait dit pas d’attache, pas d’emprise…


"Tes poings retrouveront leur pouvoir. "


C’était fou, insensé, mais après tout… Ilhan se gifla alors mentalement, et passa à l’action. Serrant le poing, il activa le souffle spirituel de son anneau et en appela à son dauphin, de toute sa puissance, qu’il prenne tout son potentiel.


Il porta l’index de sa main droite à son cou et lança un Forte Voix pour que sa voix prenne plus de puissance.


– Suffit chimères, hurla-t-il de sa voix de stentor. Cessez les combats, baissez vos armes et retournez sur votre navire !


Et si jamais cela marchait, qu’on coule ce satané navire ! Futile, inutile et fou ! Il était complètement fou. Il en vacillait presque.


Il profita d’un mouvement de flottement et que les intervenants s’activent à maitriser le vampire pour se glisser au côté de l’elfe, sa chair tourmentée en main. Il s’empressa d’un geste tremblant à glisser l’objet dans la paume de l’elfe et lui souffla à mi-voix :


– Si vous avez besoin d’aide pour supporter la douleur, je peux… peut-être...

Si jamais il y avait une petite chance que l’elfe soit immunisé, et qu’il ne devienne pas vampire… Autant que son corps puisse guérir des blessures reçues. lhan n'en garda pas moins les yeux rivés dans ceux de l'elfe, guettant le moindre changement, le moindre signe d'alerte, qu'il sombrerait dans les ténèbres. Et qu'Ilhan perdrait peut-être un ami...

Dernière édition par Firindal le Lun 4 Fév 2019 - 21:33, édité 2 fois

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#1 'MJ' : 22

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#2 'MJ' : 16

Qui eut cru qu’un conseiller Délimarien puisse faire un couler un navire de par sa magie ? Toryné ne savait guère si les mages l’accompagnant avaient aidé Avente à la réalisation de cette prouesse et il n’en avait que faire ! Cet exploit libérait beaucoup de pression pour leur troupe, l’attaque sournoise des chimères venaient d’échouer ! Cependant, qu’un bateau est pu ainsi arriver par l’arrière était inquiétant, en effet s’il s’agissait bien là de téléportation, il était alors possible que d’autre arrive pour les attaquer, ou même que certain est passé leur ligne de défense pour rejoindre Tiamat… Cependant, il n’avait guère le temps d’entrevoir cette possibilité, de toute manière si cela s’avérait exact, il ne pouvait rien y faire. Autre chose pour les moins étranges était l’échec d’Aldaron dans son entreprise, immédiatement, le vampire pensait au venin vampirique… les effets étaient-ils déjà présent ? La douleur, avait-elle interrompu la canalisation du sort ? Pourtant, le vampire n’avait pas vidé l’elfe de son sang, par conséquent le venin allait devoir mettre du temps à agir, si cela n’était pas le cas, la situation allait se compliquer.

Il agirait en conséquence de ce qu’il adviendrait par la suite, pour le moment, l’attention de l’androgyne était pleinement dans le combat, mais également sur les cinq naufragés du bateau qui avait coulé. Bon sang, pourquoi fallait-il les garder en vie ? Toryné n’approuvait aucunement le général dans cette décision, cela était bien trop risqué et surtout sans aucun intérêt, ils étaient en guerre, le luxe de garder des prisonniers, même sur le court terme n’était pas envisageable. Hélas, il n’était pas le maître de ce vaisseau et il n’allait pas s’interposer entre les Caladoniens et les chimères, l’heure n’était pas à la zizanie, tous devaient rester unis. Très vite, son attention revint sur les combats.

D’autant plus que le vampire était dans un état presque seconds dans ses affrontements. Cela était… jouissif. Oui, il prenait un plaisir obscène à combattre, un sourire dément sur les lèvres, chaque fois que sa lame venait trancher ou pénétrer la hideuse chair pour en boire le sang, plus il se sentait extatique. Était-ce l’alliage si particulier de Ténèbre Larmoyante qui lui faisait cet effet ? Ou bien était-ce après tout sa nature de vampire, créature violente et destructrice, qui se réveillait dans ce conflit ?

-Un instant général ! Cria-t-il à Sigvald quand celui-ci l’appela pour son plan, il semblerait que les chimères ne soient pas très enclines à se passer de moi pour le moment ! Loin de toute provocation quelconque envers le Delimarien, le vampire ne pouvait pas se permettre de juste quitter le front pour courir vers le Glacernois, il fallait qu’il passe le commandement provisoire de son escorte à l’un de ses gardes et surtout, il devait se dégager de la mêlé, chose qui n’était pas simple, surtout dans l’état du vampire.

Il n’avait pas le souvenir d’une telle ivresse par le passé quand il n’était que soldat. Que ce soit durant les charges dévastatrices au côté du fléau rouge, ou bien dos à dos avec Keziah au milieu des rangs ennemis, rien n’était semblable à cette sensation. Il fallait dire qu’il avait été également bien différent à cette époque, froid et discret, il n’était pas l’être aussi flamboyant qu'aujourd'hui, bien au contraire. Son défunt prince serait sûrement bien étonné de le revoir épée à la main, quelque part, il aurait aimé qu’il soit là pour le voir, mais s’il avait été en vie, alors sûrement lui ne serait pas ici. Toryné en avait d’abord beaucoup voulu à Keziah de mourir, ou plutôt de mourir de la sorte, il avait jeté le royaume vampirique dans une situation des plus tendu. Il y avait d’abord cette humiliation, mourir de la main d’un Graarh, peuple esclave, qui avait su non seulement rentrer à Aerthia, tuer son dirigeant, mais ensuite il avait réussir s’enfuir non sans avant discréditer le titre du prince des cendres… Puis il y avait la succession du pouvoir, Irina sortant de l’ombre et profitant de l’instabilité pour s’asseoir sur le trône de la nuit… Oh oui il avait maudit le nom de son vieil ami pendant des semaines durant, mais aujourd’hui, il l'en remerciait. Tout cela l’avait forcé à radicalement changer sa vision des choses, d’un conseiller oeuvrant dans l’ombre, il était maintenant une matriarche que tous pouvaient contempler au grand jour ! Sa quête de pouvoir n’avait véritablement commencé qu’à la mort de Keziah Soen

Cependant, il n’avait guère le loisir de se perdre plus longtemps dans ce mélange de nostalgie et d’introspection de son parcours, ses adversaires n’étaient pas des moindre et il se devait de rester vigilant. Il lui semblait gagner petit à petit du terrain, sa lame tranchait de plus en plus aisément ses grotesques adversaires et la ferveur que son escorte employait dans la bataille lui faisait honneur. Tout comme lui, c’était le sourire aux lèvres qu’ils pourfendaient leur ennemi, trop longtemps, ils n’avaient pas véritablement guerroyé, des adversaires tel que les innommables devaient non seulement leur offrir un beau défi, mais surtout la vengeance tant attendue après la débâcle de Dureroc.

-Contempler votre ultime erreur chimère ! Cria-t-il en défi. Contempler Ténèbre Larmoyante, pendant qu’elle s’abreuve du sang qui n’est pas votre !!! Les chimères, ressentaient-elles la peur ? Les immondices qu’ils affrontaient semblaient tous dénouer de raison ou d'intelligence, mais leur manière de combattre prouvait néanmoins une certaine ruse.

Et suffisamment, de fourberie, ce fut le bruit des flèches du bourgmestre qui l’alerta, tardivement, de la menace qui avait réussi à se glisser dans son dos, par chance, son futur fils l’avait sauver… En regardant le cadavre gisant à ses pieds, le vampire reconnut l’une des chimères qui aurait dû être attaché par les Caladoniens. Toryné étouffa une insulte destiné au général et à la garde Caladonienne, cette bande d’incompétent les avait tous mis en danger. Et la suite confirma le fond de sa pensée, Aldaron, en le sauvant, se fit à son tour attaquer, par un autre vampire chimérisé, plantant ses crocs dans la chair de l’elfe. Si l’intendante n’était pas intervenue aussi rapidement avec ses Hommes, le céleste se serait ruée sur l’ordure qui osait mordre celui que lui avait déjà mordu, c’était une insulte pour lui, qui allait de nouveau devenir mère… Mais ironiquement, cette chimère lui “sauvait” la mise, désormais, il avait une parfaite excuse pour justifier la transformation d’Aldaron en enfant de la nuit et avec une ribambelle de témoin. Certes, l’aîné serait sûrement en colère que l'androgyne n’ai pas empêcher cela, mais cela restait bien moins grave que d’assumer d'être le véritable auteur de la transformation. Il allait cependant garder un oeil sur les Glacernois, sait-on jamais… Toryné avait perdu trop d’enfants pour qu’on lui en retire un de nouveau. C’était assez, étrange en y repensant, il y avait quelques heures de cela, le Dalis n’avait que de la rancœur pour le bourgmestre, mais maintenant qu’il l’avait mordu, tout était différent. Il ne serait plus cet Aldaron qui lui avait volé sa fille et le mettait dans des situations plus que compliqué, non, bientôt cet Aldaron là serait mort, c’était son fils qui le remplacerait. Un fils qu’il ne pourrait sûrement pas élever, mais qu’il aimerait dans l’ombre, comme n'importe quelle mère aimait son enfant. En fin de compte, ce n’était pas Aldaron pour lequel Toryné s’inquiète, mais pour le fils qui allait venir au monde.

L’instant qui suivit fut pour les moins aussi étrange que les sentiments qu’il éprouvait, était-ce le froid ou la voix d’Ilhan qui marqua cette brève pause dans les combats, cela eu au moins pour effet de calmer l’ardeur du vampire, prenant bel et bien conscience qu’il s’en était fallu de peu pour qu’une chimère de le mettre en fâcheuse posture, il devait se montrer plus prudent et contenir ses pulsions. Les renforts arrivaient, jamais il n’aurait cru voir la légion du Nyn venir les aider et il aurait préféré de ne pas combattre aux côtés d’animaux, mais après tout, c’était l’ultime bataille pour sauver leur monde…

Et en parlant d'ultime bataille… les portes de la citadelle de la frégate ennemie s’ouvrirent, cela sembla requinquer les chimères, car ces dernières reprirent le combat au même moment… Cette grande ombre dont il ne percevait pour le moment que la forme, cette main griffue… Sans nul doute, le capitaine de son navire, ou peu importe son titre, venait enfin participer aux réjouissances. Cela eu l’effet d’une poussée d’adrénaline puissante, de nouveau le céleste sentit ses pulsions de prédateur ressurgir, c’était le moment, son moment !

Il brandit sa lame en direction de ce nouvel arrivant et cria “Aberration ! Tu sors enfin de ta cachette sombre lâche ?! Viens donc affronter ton destin, viens donc m’affronter moi !!!”. Un sourire carnassier se dessina sur ses lèvres, son regard brillait d’une lueur mauvaise ampli de défi, alors que son pouce se posa sur son cou, remontant lentement et suavement jusqu’à son menton, il était l’heure d’user de sa magie. Et si malgré tout cette chimère se refusait à lui, alors il bondirait pour aller chercher ce couard. Il en oubliait complètement le général Delimarien et son possible plan dans lequel il devait faire diversion, seul sa mégalomanie dictait ses paroles, c’était son caprice... et on ne refuse jamais le caprice du monstre affamé.

Le refus lui fit grincer des dents, mais pas autant que la soudaine panique qui gagna l’autre bord du navire. D’un rapide coup d’œil par dessus son épaule, le Général entrevit la scène et sentit son sang se glacer immédiatement dans ses veines. Entre le vampire chimérisé qui était en train de mâchouiller la gorge du Bourgmestre et son épouse qui rompait la formation pour aller aider la-dite fougère… le glacernois ne savait plus à quel dieu se vouer ! Pendant une fraction de seconde, il hésita à abandonner lui aussi son poste afin de rejoindre le petit groupe, mais la clameur des combats sur le front qu’il défendait le raisonna aussi sec. Les responsabilités qui lui pesaient étaient trop grandes pour qu’il cède aux émotions. Serrant les dents, il se concentra sur les Chimères qui continuaient de pousser les lignes défensives sans que ces dernières ne cèdent un pouce de terrain. Malheureusement, ses hommes étaient humains et la fatigue ne tarderait pas à émousser leurs convictions. Il fallait à tout prix prendre l’avantage…

Et cette opportunité se présenta lorsque le roulis du navire s’interrompit brusquement. Un court silence s’abattit sur les ponts avant qu’une clameur de rugissements bestiaux ne s’élève depuis les flots prisonniers d’une épaisse couche de glace. Le coeur de Sigvald se gonfla d’une joie aussi sauvage que les bêtes qui gravissaient les coques et rejoignaient les fronts libres afin de combattre les Chimères. S’il avait déjà contemplé des graärh, jamais il n’en avait vu de Nyn-Tiamat et fut forcé d’admettre qu’ils en imposaient. Farouches, immenses et sanguinaires, les natifs de l’Archipel se jetèrent dans la mêlée après quelques accrochages mineurs à l’encontre des autres troupes alliées. Les rancœurs avaient la dent dure, heureusement pour tous la laideur des Innommables fut suffisante pour que tous mettent de côté les vindictes de hier et se battent côte à côte pour s’offrir un lendemain. A son tour le Général Délimarien refit chanter la corde de son arc alors que le vent glacé porté par les graärh lui rappelait sa Glacern perdue.

Parmi les soldats portant les hauts boucliers qui maintenaient les monstres en bordure du pont, une voix de stentor s’éleva pour scander l’hymne de leur ancienne patrie. Un timbre profond, semblable au mugissement des vents qui battaient la montagne jadis invincible. Des paroles chantées en glacernois, avec les syllabes lourdes et les « r » qui roulaient comme le vacarme d’un tambour. Progressivement, d’autres voix se joignirent au soldat et ce fut bientôt à l’unisson que tous les hommes et toutes les femmes hurlèrent le chant de Glacern. Les lances frappèrent les boucliers, les pieds marquèrent le rythme alors que les guerriers piétinaient et s’époumonaient sur cette hymne à la mélancolie d’une terre perdue, mais jamais oubliée. Lorsqu’ils terminèrent une première fois, ils reprirent dans la langue commune pour que même les Almaréens puissent se joindre à eux. C’était un chant rappelant les pics glacés, les steppes immortelles et la gloire d’un peuple farouche qui jamais ne rompait ou ne reculait. Le rappel des gloires forgées dans le sacrifice et l’honneur.

Lorsque le second chant s’arrêta, les almaréens entamèrent à leur tour l’hymne qui jadis appelait à leur patrie perdue. Les voix ne flanchaient pas alors que le fracas des combats se poursuivait. Les bras ne faiblissaient pas alors que les armes s’entrechoquaient. Les regards ne se détournaient pas alors que les monstres s’agglutinaient aux boucliers. Puis, alors que les troupes en étaient rendues à l’hymne de Délimar, clamant les valeurs de l’Océanique à la face putride des Innommables, une haute silhouette se dessina dans l’embrasure de la capitainerie adverse. Lentement, le silence gagna les deux ponts lorsque toute l’attention se concentra sur l’horreur qui se révélait aux yeux de tous. Seul Toryné Dalis, gorgé par la folie du combat et la soif de sang, brisa le flottement incrédule pour provoquer celui qui s’annonçait comme un « Maître-Valet ». Sans attendre, Sigvald utilisa cette diversion pour se tourner vers certains de ses hommes, n’ayant aucun mal à reconnaître les blasons cousus ou poinçonnés sur les armures.

« - Ulver ! »

L’appel fut bref, mais le sens qu’il contenait n’échappa nullement aux concernés. Quatre spirit du Loup se dégagèrent de la masse et reculèrent sur les lignes arrières dans un ensemble parfaitement coordonnés. Ils étaient tous au niveau trois de leur Esprit-Lié, étaient des chasseur émérites et savaient ce qu’ils devaient faire. Nulle question, nulle attente. Dans le même temps, Amarok créa autant de copie de lui-même qu’il avait de cavaliers à transporter et alla trouver ces derniers d’une foulée souple, plongeant d’une ombre à une autre dans la plus parfaite discrétion. Il était un prédateur, il était le traqueur ultime. Malheureusement, ses interventions ne pouvaient être belliqueuses alors à la place il aiderait ses protégés à atteindre leur objectif. De son côté, la chimère se lança dans un monologue, encouragée par les provocations du Monarque flamboyant et la meute manœuvra en silence pour rejoindre le Général sur le gaillard arrière. L’avatar de Loup était aussi haut qu’un cheval, il ne lui fallu que quelques foulées pour combler la distance.

Mais il lui manquait quelques alors Amarok se présenta aussi à Tryghild, fourrageant son museau sous son bras pour la détourner du Bourgmestre et du terrible sort qui s’était abattu sur lui. Contaminé par le venin vampirique, privé du seul remède pouvant le sauver… il ne venait à l’esprit des Glacernois qu’une seule solution. Le loup cependant souhaitait d’autres plans pour l’Intendante et il serra dans sa gueule son poignet en une étreinte délicate alors qu’il cherchait à lui montrer les actions de Sigvald, à quelques dizaines de mètres seulement. Ce dernier ôtait son arc pour le confier aux marins qui chargeaient les canons, puis tira au clair « Haut Protecteur ». D’un bond, il fut sur le bastingage et l’instant d’après, les autres Loups étaient à ses côtés.

« - Si nous échouons, ordonnez aux canonniers de faire feu. Tous les canons, soldats. »

L’ordre ne souffrait d’aucune contestation. Le visage fermé et le regard glacé, il prit une profonde inspiration avant d’en appeler aux dons de son Esprit-Lié. Il n’était plus temps d’hésiter ou d’avoir les pieds froids. Leur véritable ennemi venait de se présenter à eux, il serait impoli de ne pas aller le saluer ! Lorsqu’il expira, lui et ses hommes étaient tous devenus invisibles. Chevauchant Amarok et ses copies, ils n’eurent aucun mal à rejoindre l’autre navire d’un bond, ce dernier étant tout aussi bloqué qu’eux dans la glace. Sur le pont ennemi, les glacernois se positionnèrent en arc de cercle afin de pouvoir charger sur la Chimère de toute part. Ils avaient conscience de la différence de force, mais ils étaient nés et avaient vécus avec pour seul objectif l’extermination de vampires. Tous mesuraient plus de deux mètres, la différence de taille ne serait donc que peu en leur défaveur. Tous étaient prêts à sacrifier leur vie pour la sauvegarde de leur Liberté.

Accroupi sur le dos d’un Amarok lancé au galop, le Général fit tournoyer ses épées d’un mouvement ample des poignets afin d’assurer sa prise et d’assouplir son articulation. Au dernier moment, les loups éthérés freinèrent et Sigvald bondit en avant pour porter un coup meurtrier à son adversaire. Porté par l’élan ainsi que son poids, il espérait mettre suffisamment de force et jouer de l’élément de surprise pour briser la défense de son adversaire. Distraitement, il espéra aussi que la Chimère ne soit pas un mage : il avait déjà goûté aux murs d’énergie que ces derniers pouvaient dressé et n’était pas enclin à reproduire l’expérience au regard de tous ses soldats. De la dextre, Sigvald chercha à lui fendre le poitrail tandis que de l’autre lame, il lui visa une épaule. Plutôt que de chercher à le tuer, lui et ses quatre compagnons désiraient avant tout l’handicaper afin que les forces soient rendues égales dans le terrible combat qui s’annonçait. Un cri rauque lui échappa au moment de porter sa double attaque et il leva son invisibilité pour économiser son énergie ainsi qu’apparaître pleinement face au Maître-Valet.

« - Tu as appelé et je suis venu, mais sache que je connais déjà mon destin et en ce jour, ce n’est pas la mort que je vais saluer ! Quant à me soumettre, je suis navré, l’ami… mais massacrer tous tes hommes m’a refilé une mauvaise crampe à la cuisse et je crains de ne pas pouvoir ployer le genoux pour toi… »

Lorsqu’il acheva sa réplique, les quatre Loups embusqués vinrent attaquer simultanément.

Dernière édition par Le conteur le Mer 13 Fév 2019 - 8:06, édité 2 fois

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#1 'MJ' : 8

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#2 'MJ' : 19

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#3 'MJ' : 95

Dernière édition par Irina Faust le Dim 17 Fév 2019 - 16:53, édité 2 fois

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'MJ' : 97

Dernière édition par Le conteur le Dim 17 Fév 2019 - 22:05, édité 1 fois

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'MJ' : 50

Forcément… son dauphin avait été totalement inutile. Un tribut vain, comme l’avait prédit Tryghild. Même s’il avait su en son for intérieur que ce geste stupide serait d’une vacuité sans nom, il sentit une forte pointe de déception. En ce monde, tout n’était que guerre et sang, et jamais paix ne parviendrait à prendre sens. Un poids lourd tomba en son coeur et une chape de plomb s’abattit sur ses frêles épaules.

Ce fut un contact doux, délicat, qui le sortit de sa léthargie.

« Je n'en ai pas besoin... L'affection qu'on me porte sait déjà guérir bien des maux. »

Ilhan en aurait hurlé alors. Car au-delà de ces mots, il entrevoyait un autre aveu, plus terrible encore. Le venin faisait son effet. Aldaron allait se transformer. Partir, à tout jamais. Son ami, comme jamais il n’aurait cru possible de l’appeler ainsi, allait le quitter au moment où enfin ils se trouvaient…

« Mais qui sait ? Si je survis, peut-être en aurai-je, cette fois, besoin. »

Ilhan fronça les sourcils, sonda un court instant le regard de l’autre, dans l’incompréhension totale. Puis reporta son regard vers l’objet dans sa main. Non… les objets, réalisa-t-il, en ouvrant doucement sa main. Dans sa paume trônaient la chair tourmentée, qu’il avait été près de donner en cadeau à l’elfe… et une autre pierre, sertie dans un arbre de vie. Il reconnut rapidement ce symbole, pour l’avoir lui-même trouvé… Le blason d’Achroma, que le vampire avait offert à son époux en mariage. Mais la pierre en elle-même lui disait aussi vaguement quelque chose. Il avait déjà vu ce type de pierre… Mais où ?

Il n’eut guère le temps de s’appesantir sur la question que Tryghild se tournait, menaçante, vers Aldaron. Ilhan, près d’eux, se sentit pris entre deux feux, en spectateur impuissant. Il rangea d’une main tremblante les deux objets et darda un regard inquiet sur Aldaron et Tryghild.

Un court instant, il songea à son dauphin. Son spirite, s’il avait été sans effet sur la chimère, pourrait maitriser Tryghild, il le sentait. Sur elle, son effet apaisant pourrait fonctionner, il avait encore son plein potentiel. Mais… non, ce n’était pas le moment. Ce serait la trahir, trahir toutes les convictions de sa Reine et de son peuple. Ilhan se retrouvait devant deux êtres qui lui étaient parmi les plus chers au monde et devait choisir. Il était tant à ce dilemme et ce déchirement, dans un moment de flottement psychique, qu’il entendit à peine l’arrivée, toute d’arrogance parée, du Maitre-Valet, et la répartie provocante de Dalis. Il tourna légèrement la tête vers la gigantesque silhouette, entendit les mots sans les comprendre, et n’entrevit qu’à moitié la belle attaque du Général avant qu’il ne disparaisse. Spirite du loup sans doute, analysa un coin de son esprit. Mais bien vite celui-ci retourna toute son attention à ces deux êtres qu’il aimait tant, et qui se faisaient face, prêts à s’entredéchirer.

Ilhan sentit son coeur se déchirer devant ce choix qu’il avait devant lui. Mais il savait, au fond de lui, qu’il avait en fait déjà choisi. Sa Reine, son espoir, le peuple humain incarné… C’est donc le coeur saignant qu’il ne fit rien, attendit, laissant sa Reine peut-être tuer son ami…

Quand soudain une immense silhouette se profila sur sa Reine. Le coeur battant, Ilhan se sentit saisi par l’elfe, tiré en arrière, et entendit un choc lourd résonner près de lui. Le bruit lui vrilla les tympans et le fit trembler de tout son corps. Il aperçut alors sa Reine, là devant eux, les protégeant de son bouclier. Il vit le bras de la nordienne trembler, mais toujours levé, vaillant. Sa reine… Magnifique, magique, sublime ! Et la peur de voir sa Reine ainsi menacée se chahuta avec l’admiration sans bornes qui monta plus encore en lui. Sa Reine, majestueuse, magistrale, en puissant Bouclier de l’Humanité !

L’elfe en profita pour les quitter, en un bond, et de son arc tirer. Ilhan se sentit de nouveau désemparé, dépassé, abandonné… Jusque-là dans le combat il avait tenté de suivre l’exemple de l’elfe, mage-archer habitué au combat, et de l’imiter ou s’en inspirer autant que faire se pouvait. Si son repaire, dans ce chaos confus qu’était la bataille, le quittait… Il vit l’elfe soudain faire un mouvement vif alors qu’il lâchait sa flèche… une flèche qui fonçait tout droit… sur Tryghild ! Non, sur lui ! Sur lui ! Il n’eut même pas le réflexe de réagir, et se sentit, de nouveau, tirer en arrière, avant que la flèche ne siffle devant lui et change sa trajectoire. Depuis quand une flèche changeait sa trajectoire de telle manière ? Mais quand il la vit se diriger droit sur la chimère, sûre d’elle, sans hésitation, Ilhan ne se posa pas plus de questions et accompagna la flèche en pensée et en prière, crispant les poings. Action toujours aussi inutile, il devait en convenir, mais… Elle devait l’atteindre, elle devait…

Mais la chimère sembla d’un geste souple esquiver la flèche au dernier moment. Au tout dernier moment, d’une simple petite torsion du corps. Ilhan aurait parié que la chimère avait encore usé de son vortex ou avait su infléchir le temps. Impossible autrement ! Mais elle avait bel et bien réussi à esquiver et la flèche ne fit alors que l’effleurer. Ilhan en aurait hurlé. Il reporta bien vite son attention sur Sa Reine. Était-ce lui ou le bras de Tryghild tremblait ? Avait-il résisté sous le choc si violent ? Les glacernois étaient solides, certes, mais tout de même… Elle devait souffrir ! L’inquiétude grimpa en flèche et Ilhan hésita un court instant à se porter près d’elle, lui offrir sa chair tourmentée ou tenter un soin sur elle, mais… Magie ferait s’écrier Tryghild. Que la bouse de dragon étouffe ces maudites têtes de pioche de Délimariens ! Si têtus, si engoncés dans leur certitude anti-magie, si… si déroutants… et si attachants. Si…

Si froid. Il faisait si froid, réalisa-t-il brusquement. Un étau de glace enserra sa poitrine, son esprit, courut le long de son échine pour envahir ses sens. Les emprisonnant dans sa gangue gelée. Ilhan se sentit tétanisé. De corps et d’esprit. Et compréhension fusa soudain en lui. La chimère ! La chimère que Tryghild avait tuée… s’emparait de lui ! Elle avait dû profiter d’une brèche dans son esprit. Avec tout ce chahut d’émotions qui l'agitaient, ses barrières s’étaient comme effritées. Et la chimère en avait profité. Il était incapable du moindre geste alors. Mais…

Mais, ce n’était pas comme la dernière fois, lui souffla une petite voix. Lorsqu’il avait libéré Autone de sa possession et que la chimère avait pris possession de lui en retour, il avait totalement perdu conscience de ce qui se passait et s’était réveillé à terre une fois qu’Autone l’avait libéré. Là… C’était tout autre. Il était en cet instant toujours totalement conscient. Désespérément conscient.

Il sentait la chimère batailler pour le pousser au loin, aux frontières de son esprit, pour le chasser de son enveloppe charnelle et spirituelle. Pour le posséder entièrement, totalement. Dans un sursaut de survie, Ilhan braqua toute sa force mentale. Mais de vives émotions vinrent le frapper de toute part, le balloter, le tirailler. La peur de perdre ces êtres chers, la peur de les voir mourir, la peur de voir périr tout le peuple humain dans une lente agonie, peur, douleur, souffrance et peine, et ses plus vieux cauchemars reprirent vie…

La chimère avait conscience de sa présence, mais se riait de lui. Elle le nargua et lui montra toute l’emprise de son pouvoir sur son corps. Sans qu’il ne puisse l’en empêcher, elle fit un pas. Le regard braqué sur une lame d’acier. Il se sentit étouffé, flagellé, écrasé de toute part, enfoncé toujours plus loin dans les tréfonds de son âme. Il s’agrippa à tous les souvenirs, les images, qui défilaient, toutes ces vives émotions qui le vrillaient… et compris qu’étrangement c’était grâce à ces émotions, alliées à son mental si longtemps forgé, qu’il parvenait à ne pas se noyer.

Pour autant, son corps ne lui appartenait plus. La chimère déjà se penchait sur le sol pour ramasser une lourde épée à deux mains. Impuissant, surnageant dans le peu de conscience qu’il lui restait, Ilhan sentit clairement les intentions de la chimère. Sa cible. Tryghild. Elle voulait frapper sa Reine. Mais son corps n’eut pas la force de soulever le lourd acier. Ilhan exulta presque de joie quand ses vieux os se récrièrent et laissèrent tomber l’épée. Sigvald pourrait se réjouir que ses cours aient si peu porté leur fruit ! C’était soudain une bénédiction d’être si faible, pour une des rares fois de sa vie !

Mais… il sentit aussi la chimère se braquer. A la fois contre cet assaut d’émotions vives qui venaient soudain la bruler, et contre la réalisation que ce corps possédé était bien piètre guerrier. Ilhan comprit qu’il avait alors le pouvoir de repousser la chimère s’il combinait tous ces éléments. Ses émotions, sa force psychique et sa faiblesse physique… La chimère allait se désintéresser de lui d’ici peu, et..

Et quoi ? En posséder un autre ? Quel autre avait-il autour de lui ? Il n’y avait là que de fiers combattants, de rudes et puissants guerriers ou des mages avérés ! Il n’y avait là que des potentiels possédés bien plus dangereux physiquement que lui ! Au final, ne valait-il pas mieux… la garder ? Aussi douloureuse cette idée soit-elle… son égo en prendrait une claque. Tous en Délimar le voyaient déjà comme un faible, physiquement du moins, ce qu’il était assurément. Mais de le voir possédé, chimérisé… Jusque-là il avait pallié sa faiblesse physique par son intelligence et sa psyché. Se laisser posséder, même si en apparence, allait balayer aux yeux de tous cette seule force qu’on lui accordait.

Non Ilhan, de telles considérations égoïstes et égocentriques n’ont plus lieu d’être. Pour une fois dans ta vie, être une quiche au combat est un atout ! Alors prends-le et sers-t’en. Intelligemment. Garde cette maudite chimère… Et tente d’orienter ensuite ses actions…

La chimère s'était figée. De son regard sombre scrutait autour d'elle.

Mais pour cela déjà, il faut te calmer. Te calmer… Contrôler tes émotions. La chimère va t’échapper sinon. Tu t’es entrainé toute ta vie à cela, tu peux le faire. Inspire, expire, et contrôle ce flot torrentiel. Regarde tes émotions, prends-les… Non ! Ne les jette pas, garde-les. Là. En sécurité. Au fond de toi. De cette conscience presque noyée.

La chimère se détendit, reprit confiance, quand elle sentit la pression émotionnelle s'estomper.

Là. Oui, précieuses émotions, venez. Sous clé, si bien gardées. Garde-les. Une à une, prends-les. Gardes-en juste un peu à flot, pour rester conscient. Oui, là…

Déjà, la chimère se baissait pour saisir une fine lame, bien plus légère, bien plus à sa portée.

Jugule tes émotions. Et relâche-les, toutes en même temps s’il le faut, au moment crucial. Telle une arme. Forge ta volonté. Tu peux le faire. Laisse la chimère agir. Pour le moment.

La chimère s’avança, personne ne l’arrêta. Personne ne prêtait réellement attention à lui, petit althaïen si faible danger… sans doute le peu qui le virent se demandèrent, avec une once de condescendance, ce qu’il pouvait bien faire, lui si médiocre avec les armes ?

Forge ta volonté. Tu peux le faire. Laisse agir… jusqu’au...

Mais ils avaient plus urgents à gérer qu’un petit humain diplomate. La chimère avança sans être arrêtée et parvint à pas de loups près de Tryghild.

Jusqu’au bon…

La chimère leva son bras armé.

Moment...

Et l’abaissa avec toute la maigre force de ce corps frêle...

Maintenant ! pensa Ilhan. Il braqua alors toute sa volonté, toutes ses émotions si bien gardées, toute sa force mentale, pour dévier le geste. En direction du Maitre-Valet lui aussi tout près. Si près.

Pour Délimar, rugit Ilhan en son for intérieur. Ou l’avait-il vraiment hurlé ? Il n'en sut rien. Tout à sa prière vers tous les esprits pour que son geste ait porté… sur le Maître-Valet.

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'MJ' : 16

Réussite

Ilhan reste posséder, mais il parvient au dernier moment à déstabiliser suffisamment la chimère pour que Tryghild le voit venir et esquive.

Toryné avait déjà participé à bien des batailles durant sa carrière militaire, mais si déjà une bataille navale était nouveau pour lui, celle-ci en était pas moins unique en son genre. Désormais, les guerriers de tous les camps foulaient la banquise pour en découdre, pendant que d’autre profitait de l’occasion pour attaquer d’autres navires. C’était sans aucun l’œuvre de ces animaux de Graarh, chose qui ne plaisait pas au céleste, de tel capacité chez un peuple qu’il voyait toujours comme son ennemi n’était pas bon… De quelle manière pouvait-il encore influencer l’environnement ? Pouvait-il faire tomber une pluie de flamme du ciel ? Faire s’écarter la terre sous leurs pieds ? Finalement, l’incident de Cordont aurait très bien pu être de leur œuvre…. il allait lui falloir plus d’information sur ce peuple qu’il avait bien trop sous-estimé.

Cependant un autre peuple lui faisait face, un peuple qu’il n'avait en revanche pas assez surestimé, il semblerait. Lorsque la dite “maître-valet”, au titre si ridicule, lui montra cette elfe du nom de Hartea, Toryné n’afficha qu’un sourire provovateur.

-J’applaudis votre tendresse, valet… se moqua-t-il de cette stupide tentative pour les soumettre, ainsi que du titre de la rapace. Elle n’avait pas peur ? Très bien, alors il fallait y remédier, les rapaces s’inclineraient et supplieraient pour leur salut, mais les Ambarhùniens n’écouteraient pas et éradiqueraient une fois pour toute leur engeance. Malgré son attitude provocatrice, le vampire restait attentif à ce nouvel adversaire, cette dernière semblait bien différente des autres innommables qu’ils avaient combattu. Comme complète ou plus harmonieuse ? Son apparence restait hideuse et grotesquement animal, mais elle était loin d’un amas de chair assemblé contre-nature. Il était assez curieux de savoir par quel procédé les chimères recréaient leur corps.

-Votre Altesse ! L’alarma une voix féminine derrière lui. Se retournant immédiatement, Toryné vu la vampire qui l’avait interpellé lui pointer en direction d’Aldaron et ce qu’il vit faillit changer tout le cours de la bataille. Il avait relâché son attention de son futur enfant lorsque la chimère androgyne s’était montré, grave erreur. L’intendante, cette inconsciente, s’approchait de son infant, nulle doute des intentions qui l’animait, n’écoutant que son cœur de sauvage… Ilhan n’avait-il pas su inculquer à son peuple d’adoption un minimum de bon sens ? Futur vampire ou non, tuer le bourgmestre actuel de Caladon représentait une trahison, la plus haute qui sois, les coutumes barbares Glacernoise ne s’appliquaient qu’à eux, l'orgueilleuse pensait-elle être au-dessus de tout ? En revanche pour Toryné, ce n’était pas l’incident politique qui l’intéressait, bien que dans d’autres circonstances, il aurait jubilé quant à cette idée, l’intendante s’approchait de SA progéniture et également de l’époux de l’incendiaire, son devoir était double, il devait protéger Aldaron.

Ses Ailes se déplièrent entièrement puis commencèrent à prendre de l’élan, il allait se jeter sur cette chienne et il lui arracherait la tête, au diable l’alliance, au diable la paix ! Du moins, c’est ce qu’aurait envisager le vampire si son vrai ennemi n’était pas apparu derrière la louve pour l’attaquer. Son regard s’écarquilla devant cette scène, rapidement son visage se tourna vers là où aurait dû encore se trouver la chimère, mais seul le général et ses hommes s’y trouvaient… La téléportation lui vint immédiatement à l’esprit, tout comme il l’avait soupçonné pour le navire qui avait tenté de les attaquer par surprise plus tôt dans la bataille. Etait-ce un pouvoir qu’elle possédait personnellement ? Ou bien un quelconque objet qu’on aurait pu lui décerner de par son rang ? Y avait-il un délai avant qu’elle ne puisse de nouveau se téléporter ? Trop de paramètres étaient inconnus, cela allait leur compliquer la tâche.

Il fallait jouer en intelligence, Aldaron s’était éloigné de l’intendante, s’offrant non seulement une distance raisonnable pour tirer, mais s’éloignant aussi de la menace que représentait la louve. Quant à Ilhan… bon sang… Seul un idiot n’aurait pas compris ce qu’il se passait sous ses yeux, le conseiller Avente venait de se faire posséder et désormais, il s’en prenait à l’intendante, trop occupé avec la maître-valet pour le remarquer. Par “chance", Ilhan était le plus piètre guerrier de ce navire, Toryné se demanda à quoi avait pensé la chimère en prenant possession de cet individu, l’effet de surprise ? Dans une tel cohue, n’importe quel guerrier aurait fait la faire et aurait été efficace. Malgré tout, l’échec d’une attaque aussi facile l'interrogea… Ilhan, arrivait-il à résister d’une quelconque manière ? Quoiqu’il puisse en être, Ilhan représentait désormais une gêne pour tout l’équipage, une menace, certes moindre, mais dont Toryné ne désirait pas s’en handicaper. Il ne pouvait pas se permettre de tuer le conseiller, non seulement les Delimarien lui en tiendrait rigueur et se servirait de cet acte pour les trahir, mais il était bien trop pour que son cher ami ne quitte ce monde.

Se servant du manche de son épée comme forme cylindrique pour sa malédiction des chaînes, le vampire comptait bien immobiliser le possédé afin de libérer de l’espace pour l’intendante. Cela ne serait sans doute pas suffisant, la louve ne pourrait pas vaincre la commandante chimère toute seule, il devait intervenir… Cependant, quelque chose était étrange, la glace… craquelait ? L’androgyne s’approcha du bord du navire afin d’en constater la véracité, mais ce qu’il vit ne coïncidait pas du tout avec ce qu’il observait. C’était même tout le contraire, la glace semblait plus solide que jamais, associé avec cela un cor, derrière l’intendante, semblable à un rugissement d’un gros félin… Quelle surprise leur réservait encore leur allié bête de fortune ? La situation était bien trop chaotique pour qu’il se lance à l’assaut de ce maître valet tête baissée… Il lui fallait temporiser, gagner en information pour ajuster sa réaction. En revanche, il ne pouvait pas rester passif, toujours à distance du conflit opposant les deux belligérantes, Toryné traça un de son index une ligne entre la lame de la chimère et cette dernière, s’il pouvait créer un lien contaminé pour désarmer son adversaire, il donnerait un léger avantage à l’intendante. Il se doutait que même sans son arme, la maître-valet devait sûrement avoir d’autre carte à jouer, mais pour le moment, il voulait juste gagner du temps et si possible des informations.

-Ne vous laissez pas impressionner ! La peur sera leur dernier présent de notre part ! Hurla-t-il pour encourager les siens dans cette lutte.

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'MJ' : 90

Résultat : Echec.

Toryné tente d'agir contre Ilhan en faisant surgir des chaines afin de réduire ses mouvements en l'emprisonnant. Malheureusement ceci ne fonctionne pas, les chaines apparaissent bien trop lentement et l'humain possédé a le temps d'esquiver.

En tentant de s'en prendre magiquement à Wargen, le vampire sent l'énergie magique de son sort être happé et dissipé.

La monstruosité avait disparue.

Devant lui se tenait ses quatre Loups et tous se regardaient avec cette même stupeur lacée de frustration. On venait de leur refuser un beau combat, on venait de les juger inférieurs et inaptes à honorer leur adversaire d’une confrontation à sa hauteur. L’insulte ne serait pas oubliée et tous rongeaient leur frein alors qu’ils gardaient une posture défensive, ne pouvait mettre de côté les risques d’un piège. Crispant les mains sur la garde de ses épées, le Général poussa un juron bien sentit, puis commença à balayer le pont d’un regard de plus en plus féroce. Où cette chienne sans honneur était-elle partie se cacher !? Son attention fut accrochée par la flaque d’ombre qui avait donné naissance au Maître-Valet et il resta à contempler l’entrée de la capitainerie avec hésitation. Un pas dans sa direction, puis un autre avant que la voix d’un de ses hommes ne l’arrache à ses pensées et qu’il ne revienne sur l’instant présent. Le fracas des armes à quelques mètres, les hurlements et les cris, tout ça lui revint comme une gifle glacée. Il tourna la tête vers son propre navire, ignora les lignes compactes de son armée pour s’arrêter sur la silhouette au bouclier qui, seule, faisait face à la créature.

Son cœur fit aussitôt un bond et il sentit son corps tout entier se tendre d’une rage froide. Au delà d’être l’Intendante de son peuple, au-delà d’être son épouse et la futur mère de son enfant… Tryghild Svenn était la raison même de son existence ; elle était ce pourquoi il avait été mis au monde, forgé et travaillé des mains même de Havard Svenn pour devenir son épée. Elle était le bouclier de Glacern et lui devait être son arme. Que faisait-il seul sur ce pont maudit !? Quelle folie… Quel orgueil l’avait-il pris pour quitter ne serait-ce qu’une minute ses côtés !? D’un sifflement sec, il appela Amarok à lui et le loup réapparu dans son brouillard constellé. L’immense canidé avait les oreilles couchées et les babines retroussées, grondant et hérissant sa fourrure avec une rage qui faisait écho dans l’âme et l’esprit de son maître. D’un bond, Sigvald fut sur son dos et il arracha son regard du combat pour revenir à ses hommes.

« - Fouillez la capitainerie et prenez tout ce qui vous semble important. Vous n’avez que quelques minutes… nous coulerons ce navire avec ou sans vous. »

Il leur laissait les doubles de sa monture pour revenir plus vite et ne doutait pas qu’ils donneraient leur meilleur pour cette mission. Lui, de son côté, avait une guerrière au bouclier à rejoindre ! Pressant des cuisses sur les flancs du loup géant, ce dernier bondit en direction du navire délimarien par le même chemin qu’à l’allée, rejoignant les gaillards en quelques foulées puissantes. Alors que ses pattes atterrissaient sur le bois familier, Sigvald descendait aussitôt pour attraper un marin par le col et le tourner vers les mâts de la frégate. Par dessus le vent qui soufflait de plus en plus fort, ignorant les flocons qui commençaient à lui cingler le visage, il asséna d’une voix assez forte pour se faire entendre du matelot :

« - Bordez les voiles ! Tempête magique en approche ! Et dans cinq minutes je veux que vous me couliez ce navire ennemi !!! »

Il ne manquerait plus qu’une bourrasque ne fasse gîter le navire à cause de cette foutue tempête graärh. Il n’avait pas la moindre idée de ce que ces sauvages comptaient faire, mais il était hors de questions qu’ils essuient des dommages collatéraux inutiles. La voix de son épouse lui vint et, s’il fut surpris par sa vulgarité et l’aspect totalement hors caractère qu’elle revêtait en agissant ainsi, il ne pu qu’exploser d’un rire sonore. La situation ne se prêtait certainement pas à un éclat pareil, mais c’était probablement un jeu des nerfs ou bien l’absurde de la scène ? Lui-même ne le savait pas et n’y prêta pas plus attention alors qu’il sentait une profonde affection pour Tryghild lui redonner de la rage aux tripes. Ajustant la prise sur ses armes, il descendit les marches qui le séparait du pont où se trouvait l’Intendante et la Chimère et marcha à grandes enjambées jusqu’à eux.

Il comptait rejoindre sa paire et ne plus l’abandonner. Tout deux possédaient une synergie redoutable lorsqu’ils combattaient dos à dos. Lui avec ses doubles épées, elle avec son bouclier. Elle encaissait, déviait et bloquait tandis que lui taillait, tranchait et paraît. Si cette chose voulait combattre Tryghild, elle allait devoir le compter dans la danse.