Valmys avait été appelé par Cordont ainsi que par ses adelphes à rejoindre la Chue, afin de se joindre aux explorations qui allaient s'y mener.
Il n'avait pas fallu lui demander deux fois. Le Serment avait rapproché le tout jeune Cawr de la terre, et il n'appréciait que davantage la présence et le contact de cette dernière. Alors se blottir au cœur de la Grande Mère... ! Comment pouvait-il refuser ? S'il avait été privé d'une telle exaltation, sans doute aurait-il pu justifier sa présence par moult arguments bien plus pragmatiques. Jadis, quand il parcourait le continent maudit, l'exploration de ruines, de grottes, de lieux oubliés, avait été sa spécialité. Il était également dit que les Chanteterre pouvaient apprendre énormément rien qu'en écoutant leur élément. Sitôt que l'aval lui avait été laissé, le dernier maître s'était attaché à apprendre à écouter. Cela l'occupait, puisqu'user de magie était encore risqué. Une prohibition qui avait valu la création de la Loge... Une organisation que Valmys regardait avec compassion. Il estimait que tout cela ne venait que d'un malentendu, et que tous auraient pu s'unir sous une même bannière au nom du Savoir, si seulement les membres de la Loge avaient eu la patience de laisser les Douze s'assurer de ne pas faire exploser le monde avant de s'intéresser à la magie.
Dans les faits, se priver de magie était une torture, et un défi. Il avait grandi en utilisant la magie comme on use de ces lois qui font tomber les objets et s'envoler les feuilles mortes, sitôt que la magie était revenue en Ambarhùna. Cela lui avait paru si simple, de manipuler la trame ! La magie des elfes, la magie des humains, tout était si aisé à appréhender, plus encore que n'avait dû l'être la marche ou la parole. Désormais, il devait faire sans. Comme si ses mains restaient menottées dans son dos, comme s'il ne pouvait plus que contempler cette merveille qui berçait le monde. Il appréhendait l'instant, fatidique, où au fond du groupe, dans une situation critique, un geste-clef lui viendrait par réflexe.
Il s'était équipé comme il l'avait pu, "à l'ancienne" autant qu'avec des objets qui, lui semblaient-il, n'avaient perdu leurs propriétés. Dans sa besace, il avait fourré amulettes, diamants, et autres pierres glyphées, ainsi que la flûte de Prashakoradarma. Il avait cousu une poche à l'intérieur d'une tunique solide pour y blottir l'Éclat de Vie qu'il avait hérité d'un Chanteciel. Le reste était classique : de quoi s'éclairer, de quoi tracer des marques, de quoi se nourrir en cas de besoin, de quoi récupérer de l'eau... Et une cape plus chaude que nécessaire. Les souterrains étaient glacés et, s'il craignait moins l'hypothermie depuis que les veinules cuivrées couvraient son corps, quelque camarade humain serait peut-être ravi de trouver ceci. En sus, quelques ustensiles de premier secours, ainsi qu'un carnet et de l'encre, venaient achever les capacités de sa pauvre besace.
C'était avec un peu d'avance que le Chanteterre était arrivé à Cordont, afin de pouvoir reposer ses jambes fourbues avant la grande aventure. Le jour tant attendu avait été un déchirement, à l'instant où sa chienne avait compris les intentions de son protégé de partir face au danger sans elle. Elle avait fini par céder, avec moult couinements désapprobateurs. Valmys était parti avec une boule de regret dans le ventre. Il n'aimait pas se séparer d'elle, et c'était exactement la raison pour laquelle il ne voulait pas qu'elle vienne.
Lorsqu'il releva le nez, et força son sourire pour faire bonne figure, il fut surpris de la compagnie qui lui avait été attribuée (ou l'inverse) pour cette exploration extrême. Non pas qu'elle manquât de pertinence, loin de là, mais certaines têtes lui étaient connues. Kälyna Vallaël, la presque-mère d'Aranwë, qui n'avait certainement pas intérêt de trépasser, par exemple. Dans un contexte aussi différent que celui qui les avait fait se rencontrer, Valmys n'osait se montrer trop cordial, ignorant ce qui pouvait ou non porter préjudice à la Dame. Il la salua selon le protocole elfique, et répondit avec humilité :
"- Mon organisme est prêt, mais j'ignore si l'esprit peut véritablement être prêt face à ce qu'il ne peut envisager. Et vous, Sombréclat ?"Il voulut saluer Lómion selon le même protocole, mais le jeune elfe tout fou de découvertes ne l'observant pas, il n'insista pas, et lui offrit un sourire poli, n'osant gaspiller des forces qui pourraient s'avérer précieuses en démonstrations d'enthousiasme.
"- Je suis content aussi."Et pour cause. Même sans connaître l'humain étrange qui les accompagnait, Valmys savait avec ces trois-là qu'il était bien entouré. Des membres de la Loge, et la passion de Lómion. Des gens qui respecteraient leurs explorations et qui montreraient le même intérêt que lui. Orfraie Kohan Ataliel parut occupé, aussi Valmys maintint ces salutations-là pour plus tard. Ç'avait été une sensation étrange que de pouvoir mettre un nom sur son visage en n'ayant que de flous souvenirs de leur rencontre. Dawan avait "possédé" Valmys, lors du mariage de la Liée de Firindal avec Luna Kohan. Si Orfraie se souvenait de "lui", la réciproque n'était pas complètement vrai, et l'avis du jeune Cawr à son sujet était encore empreint de neutralité. L'humain encore inconnu, Valmys le salua avec la même politesse que leurs collègues, adaptée aux humains.
"- Salutations. Je suis Valmys Neolenn Leweïnra, Chanteterre."Que l'autre lui révèle son identité ou non, ses raisons ou non, peu importait au Cawr, tant que les vibrations ne lui murmuraient pas de sombres intentions. Mais cet homme-là avait une toute autre mélodie. Comme... Comme du pragmatisme pur, que les émotions n'auraient souillé. C'était troublant.
Lorsque tous furent réunis, Valmys se permit de demander, à l'intention de celles qui semblaient être les têtes dirigeantes du groupe :
"- Avons-nous un plan à observer ? Des stratégies à observer en cas de situations critiques ?"En cas d’éboulis, par exemple, en cas de réveil de golem, en cas d'isolement, ou juste s'ils ne parvenaient plus à se repérer.
Lorsque ce fut décidé, et qu'ils purent s'avancer, Valmys se permit de s'avancer, en bon détecteur de danger. Mais ils n'étaient que sur le seuil. Beaucoup de monde était passé avant eux, et il n'y avait encore rien d'intéressant qui parvint à capter son attention ou son audition. Tout était calme. En revanche, on leur laissa un premier choix : ils pouvaient passer par un chemin, assez long, mais plus progressif, le long du golem qui se tenait encore droit et fier. Ils pouvaient également abuser des monte-charges pour se laisser descendre jusqu'en bas. Ils auraient tôt fait d'arriver trois niveaux plus bas, ainsi, et s'économiseraient quelques forces. Valmys émit un bruit de succion de dents emprunté à quelques Esfeliens, en signe de désapprobation. Il avait encore envie de tester l'intégralité de ses pouvoirs, et ne pas passer à côté d'une information qui pouvait être capitale... Tout comme il n'avait pas envie d'épuiser ses camarades. Il leur jeta un coup d'oeil... Et songea qu'ils pouvaient toujours faire une pause si le besoin se faisait sentir. Aussi proposa-t-il au groupe de suivre le chemin le plus long, par prudence. Ses pas montrèrent la voie, et il s'adaptait à ceux qu'il percevait derrière lui pour ne laisser personne trop loin derrière, ou trépigner. Sa main restait posée contre la pierre du golem, qu'il essayait d'écouter au mieux, comme il avait jadis écouté le sol labouré d'un sentier pour deviner qui était passé par là précédemment, sous quel ciel, par quelle émotion. Grande était sa concentration. Ses lèvres restaient résolument closes, et son visage fermé, alors qu'il guidait le groupe sur le chemin de l'émerveillement, ou de la perte.
Spoiler :
La catastrophe de Cordont. Cet événement a fait le tour de l’archipel, non seulement en raison du drame, mais également de ses conséquences. Non content d’avoir failli raviver les flammes de la guerre entre le royaume Sélénia et l’Alliance des Cités libres, le gouffre de Cordont a également exposé la véritable nature de l’île de Calastin : une terre pouvant s’effondrer à tout instant.
Tiamaranta est une terre pleine de mystères, ainsi que de danger. Et Cordont n’est plus ni moins qu’une épreuve imposée à tous ceux souhaitant y vivre. Un test que de nombreux hommes et femmes ont décidé de relever. Aujourd’hui, Valmys va faire partie de ces individus.
Les alentours du gouffre ayant été sécurisés, plusieurs expéditions ont pu être menées. En ce jour une nouvelle expédition va avoir lieu, à ceci près qu’elle va être différente des précédentes. Les autorités de Calastin affichent à travers cette nouvelle opération, leur volonté de dépasser les limites. Les choses stagnent à Cordont et cela doit cesser.
C’est pour cette raison d’ailleurs qu’une missive a été envoyée au domaine, demandant la présence d’un chanteterre. Et c’est Valmys qui y répondra. Pourquoi ? Seul lui le sait.
Ainsi le jeune immaculé se retrouve plusieurs jours plus tard aux abords du gouffre, assistant au briefing du comité de tutelle, avant que l’expédition ne commence. Celle-ci devra se diriger vers le nord-est, progressant dans l’immensité ténébreuse, devant aller plus loin que les précédentes. Pour ce faire, une cartographie du terrain déjà exploré est exposée. On y trouve notamment la présence de golems titanesque, semblable à ceux ayant détruit Cordont. Il est toutefois précisé que ceux-ci sont inactifs. Ces derniers font office de bon point de repère dans l’immensité ténébreuse où il est fort aisé de se perdre.
La réunion se termine et pendant que les derniers préparatifs étaient bouclés, Valmys a eu le temps de s’entretenir, s’il le souhaitait, avec les autres membres de l’équipe.
Le gouffre de Cordont vous fait à présent face et il est temps d’y descendre. Mais pour ce faire, deux chemins s’offrent au groupe. Le premier est long et consiste à descendre le long du titan triomphant, plusieurs charpentes ayant été installés accroché à son flanc afin de créer un chemin. Le deuxième est revanche est beaucoup plus rapide puisqu’il consiste à utiliser les monte-charges comme des ascenseurs (Il y a trois niveaux donc au moins trois monte-charges à utiliser pour descendre jusqu’à en bas).