Un matin de mai, plage de Néthéril
Le soleil tapait avec violence, enflammait la surface de l'eau d'une lumière blanche, s'étalait en reflets et étincelles le long des rochers, faisait trembler la ligne d'horizon.
Sur ce dernier point, néanmoins, Valmys n'était pas totalement sûr que le soleil soit seul fautif. Son crâne lui faisait affreusement mal, de façon continue et non-localisée. Trop de lumière pour un organisme aussi épuisé, trop de sel dans son petit corps, trop de faim et trop peu de réserves. Être à l'intérieur de son organisme était un calvaire. Pourtant, une part de lui était heureuse comme jamais elle n'avait dû l'être. Même s'il devait mourir ici et se faire gober par le premier autre être vivant venu, il s'estimait victorieux. Il avait mis fin à son calvaire sur le Maelstrom.
L'étui de son psaltérion était porté en bandoulière. Malgré son état, le musicien ne pouvait le trouver lourd. Après tout, c'était une partie de lui, un peu plus fragile que les autres. À pas lents, timides, prudents autant que difficiles, l'Enwr se frayait un chemin parmi les roches qui composaient la plage, vers les herbes hautes et ocres qui dansaient mollement au loin. Au moins ces forbans avaient eu l'obligeance de naviguer non-loin de Néthéril. Restait à espérer qu'ils le tiendraient pour mort, et ne viendraient pas l'y chercher.
Les herbes et arbres étaient prometteurs. Valmys fantasmait de trouver un fruit, une racine, n'importe quoi. Son chemin vers le Domaine n'était qu'un détail. Il avait passé assez de temps sur les routes pour savoir trouver la sienne. Il fallait juste tenir jusque là. C'était bien ce qui s'annonçait compliqué.
Il avait sans doute fière allure ! Nu, portant des hématomes ici et là, des reflets de sel et d'autres minuscules cailloux et coquillages. La chaleur avait séché l'eau qui l'avait couvert, laissant à ses cheveux une consistance poisseuse, poissonneuse, et l'odeur qui allait avec. La bouche entr'ouverte, essoufflé par les malheureux pas qu'il faisait, il portait au fond de ses yeux des étincelles d'un espoir fou, d'une joie qui ne pouvait s'exprimer. Il y croyait, il croyait pouvoir s'en sortir, parce qu'il n'y avait plus que cela à croire, et parce qu'il avait réussi là où jadis l'espoir n'existait pas.
Un coup d'oeil sur sa gauche lui fit remarquer deux ombres qui n'avaient pas été là lorsqu'il avait rejoint la plage. Difficile à discerner d'ici. Sur cette partie de Néthéril, les ombres n'étaient normalement pas hostiles... Normalement. Valmys avait beau plisser les yeux, il ne voyait rien d'autre que l'obscurité du contre-jour.
Il sentit le désespoir s'approcher de lui, et lui murmurer qu'il n'en finirait jamais. Que ces deux-là venaient pour lui, et que tout allait recommencer. Malheureusement, l'autre partie de Valmys, celle qui avait pris goût à l'idée de survivre, rejeta cette idée. Non, tout allait très bien se passer ! Il allait s'enfuir, se cacher, et tout serait merveilleux. L'elfe aux oreilles rondes tenta alors trois pas de course, qui virent cette dernière s'achever contre le sol, heurtant ses genoux aux galets, protégeant son crane de justesse. Alors sa petite voix d'espoir se fit plus discrète, avouant à mi-mots que rejoindre le Domaine allait peut-être s'avérer compromis.
Au moins aurait-il peut-être la chance de mourir ici, dignement, et non pas entre les mains des pirates. S'il se débrouillait bien, il devait pouvoir le faire, et mourir avant que les deux ombres ne le retrouvent. C'était un peu dommage... S'il avait su, peut-être ne se serait-il pas embêté à nager, pour simplement laisser l'eau s'approprier ses poumons. Ç'aurait été plus simple. Là, pour mourir... Il pouvait toujours essayer de se trancher les veines avec un galet. Bizarrement, son optimisme et son pessimisme se rejoignaient sur un point: ce n'était peut-être pas la stratégie la plus efficace. Il avait plus vite fait de s'y essayer avec les ongles.
Les silhouettes paraissaient plus lointaines, non ? Il gagnait du temps... Sa main s'approcha de son poignet, au moment où une pensée passa dans son esprit, l'air de rien: et si, plutôt que des pirates, ces silhouettes étaient des baptistrels ? Ils étaient tout de même des habitants de cette partie de l'île, avec les Graarh. Les silhouettes avaient l'air vaguement humanoïdes... Peut-être passait-il à côté de son unique moyen de survivre !
Cette hypothèse, si stupide soit-elle, eut le mérite d'arrêter Valmys dans son élan, le faire réfléchir un peu. Entre une potentielle survie, et une potentielle survie qui valait moins que la mort, il pouvait tirer son existence à pile ou face. Son instinct parla à sa place, lui rappelant que dans le pire des cas, il pourrait cette fois s'achever proprement. L'Enwr glissa ses doigts sur sa gorge, usant de la magie à sa porter pour pouvoir murmurer un appel à l'aide, et entendre celui-ci sortir de sa gorge avec le volume d'un hurlement.
Le son vrilla les tympans de son crâne déjà douloureux. Maladroitement, il se redressa, s'appuyant sur un bras. Il réitéra son appel, usant à nouveau de forte-voix malgré la douleur.
Son bras céda sous lui. Inconscient, il n'allait pas pouvoir savoir dans l'immédiat de quel côté la pièce était tombée.
Le soleil tapait avec violence, enflammait la surface de l'eau d'une lumière blanche, s'étalait en reflets et étincelles le long des rochers, faisait trembler la ligne d'horizon.
Sur ce dernier point, néanmoins, Valmys n'était pas totalement sûr que le soleil soit seul fautif. Son crâne lui faisait affreusement mal, de façon continue et non-localisée. Trop de lumière pour un organisme aussi épuisé, trop de sel dans son petit corps, trop de faim et trop peu de réserves. Être à l'intérieur de son organisme était un calvaire. Pourtant, une part de lui était heureuse comme jamais elle n'avait dû l'être. Même s'il devait mourir ici et se faire gober par le premier autre être vivant venu, il s'estimait victorieux. Il avait mis fin à son calvaire sur le Maelstrom.
L'étui de son psaltérion était porté en bandoulière. Malgré son état, le musicien ne pouvait le trouver lourd. Après tout, c'était une partie de lui, un peu plus fragile que les autres. À pas lents, timides, prudents autant que difficiles, l'Enwr se frayait un chemin parmi les roches qui composaient la plage, vers les herbes hautes et ocres qui dansaient mollement au loin. Au moins ces forbans avaient eu l'obligeance de naviguer non-loin de Néthéril. Restait à espérer qu'ils le tiendraient pour mort, et ne viendraient pas l'y chercher.
Les herbes et arbres étaient prometteurs. Valmys fantasmait de trouver un fruit, une racine, n'importe quoi. Son chemin vers le Domaine n'était qu'un détail. Il avait passé assez de temps sur les routes pour savoir trouver la sienne. Il fallait juste tenir jusque là. C'était bien ce qui s'annonçait compliqué.
Il avait sans doute fière allure ! Nu, portant des hématomes ici et là, des reflets de sel et d'autres minuscules cailloux et coquillages. La chaleur avait séché l'eau qui l'avait couvert, laissant à ses cheveux une consistance poisseuse, poissonneuse, et l'odeur qui allait avec. La bouche entr'ouverte, essoufflé par les malheureux pas qu'il faisait, il portait au fond de ses yeux des étincelles d'un espoir fou, d'une joie qui ne pouvait s'exprimer. Il y croyait, il croyait pouvoir s'en sortir, parce qu'il n'y avait plus que cela à croire, et parce qu'il avait réussi là où jadis l'espoir n'existait pas.
Un coup d'oeil sur sa gauche lui fit remarquer deux ombres qui n'avaient pas été là lorsqu'il avait rejoint la plage. Difficile à discerner d'ici. Sur cette partie de Néthéril, les ombres n'étaient normalement pas hostiles... Normalement. Valmys avait beau plisser les yeux, il ne voyait rien d'autre que l'obscurité du contre-jour.
Il sentit le désespoir s'approcher de lui, et lui murmurer qu'il n'en finirait jamais. Que ces deux-là venaient pour lui, et que tout allait recommencer. Malheureusement, l'autre partie de Valmys, celle qui avait pris goût à l'idée de survivre, rejeta cette idée. Non, tout allait très bien se passer ! Il allait s'enfuir, se cacher, et tout serait merveilleux. L'elfe aux oreilles rondes tenta alors trois pas de course, qui virent cette dernière s'achever contre le sol, heurtant ses genoux aux galets, protégeant son crane de justesse. Alors sa petite voix d'espoir se fit plus discrète, avouant à mi-mots que rejoindre le Domaine allait peut-être s'avérer compromis.
Au moins aurait-il peut-être la chance de mourir ici, dignement, et non pas entre les mains des pirates. S'il se débrouillait bien, il devait pouvoir le faire, et mourir avant que les deux ombres ne le retrouvent. C'était un peu dommage... S'il avait su, peut-être ne se serait-il pas embêté à nager, pour simplement laisser l'eau s'approprier ses poumons. Ç'aurait été plus simple. Là, pour mourir... Il pouvait toujours essayer de se trancher les veines avec un galet. Bizarrement, son optimisme et son pessimisme se rejoignaient sur un point: ce n'était peut-être pas la stratégie la plus efficace. Il avait plus vite fait de s'y essayer avec les ongles.
Les silhouettes paraissaient plus lointaines, non ? Il gagnait du temps... Sa main s'approcha de son poignet, au moment où une pensée passa dans son esprit, l'air de rien: et si, plutôt que des pirates, ces silhouettes étaient des baptistrels ? Ils étaient tout de même des habitants de cette partie de l'île, avec les Graarh. Les silhouettes avaient l'air vaguement humanoïdes... Peut-être passait-il à côté de son unique moyen de survivre !
Cette hypothèse, si stupide soit-elle, eut le mérite d'arrêter Valmys dans son élan, le faire réfléchir un peu. Entre une potentielle survie, et une potentielle survie qui valait moins que la mort, il pouvait tirer son existence à pile ou face. Son instinct parla à sa place, lui rappelant que dans le pire des cas, il pourrait cette fois s'achever proprement. L'Enwr glissa ses doigts sur sa gorge, usant de la magie à sa porter pour pouvoir murmurer un appel à l'aide, et entendre celui-ci sortir de sa gorge avec le volume d'un hurlement.
Le son vrilla les tympans de son crâne déjà douloureux. Maladroitement, il se redressa, s'appuyant sur un bras. Il réitéra son appel, usant à nouveau de forte-voix malgré la douleur.
Son bras céda sous lui. Inconscient, il n'allait pas pouvoir savoir dans l'immédiat de quel côté la pièce était tombée.
Dernière édition par Valmys Neolenn le Ven 17 Nov 2017 - 9:37, édité 1 fois