Dear god in the sky... I did it !!!! x_x
Spoiler :
Elle se souvenait de leur première année sur Calastin, lorsque Thelem était encore de ce monde, et qu'ils travaillaient à établir leur citadelle, leur ville, leur peuple tout entier en un lieu sûr et sécurisé, digne d'eux, capable de pourvoir à leurs besoins. Elle se souvenait l'enthousiasme et la détermination des leurs à construire, comme une armée d'abeilles au printemps, récoltant le miel des bourgeons tout juste éclos, butinant pour bâtir leur ruche. Ils avaient investis cette côte avec efficacité et sans jamais se plaindre. Même les Glacernois qui, à son image, avaient soufferts aux beaux jours n'avaient pas émit de protestations. Et pourtant, que Loup lui en soit témoin, elle aurait comprit. Et pas que de leur part d'ailleurs, de tous. Ils avaient tous eut des problèmes, les premiers mois, la première année. Il y en avait encore d'ailleurs hélas. Il y en aurait toujours. Mais les premiers temps avaient vraiment été les plus éprouvants. Pour eux, fils et filles du nord, le climat de Calastin était difficile. La chaleur érodait leur endurance, car ils n'avaient jamais connu pareille aridité à part dans le désert d'Esfelia. La canicule de l'été avait manqué avoir raison de leur capacité à résister car ils ne possédaient pas de moyens pour lutter contre. Fort heureusement, c'était leurs frères et sœurs, almaréens et lyssiens, qui étaient venus à leurs secours en un exemple parfait de ce que Délimar souhaitait être. Leurs cousins estivaux avaient été de bons professeurs, pour leur apprendre à user des berges océaniques pour pouvoir accéder à une eau plus fraîche que celle des lacs, brassées et blanche d'écume, à se dissimuler sous des manteaux d'algues qui absorbaient une partie de la chaleur. Elle-même se souvenait d'une mémorable occasion au cours de laquelle Alek Syrène, Thelem, Elle et quelque autres étaient partis en bateau[/i] au large pour un [b]bain de minuit[/i] vivifiant. Elle qui n'avait jamais été une grande [b]baigneuse à Glacern, pour des raisons évidente, elle s'était prise d'affection pour ce milieu aquatique si riche et avait même demandé à Alek de lui apprendre à nager.
Elle se souvenait avec une certaine nostalgie de ces premiers mois. Ils avaient été si occupés… terriblement occupés même. Mais ils avaient également pu savourer ce nouveau territoire et elle en avait eut besoin. Elle avait eut besoin de ne pas le voir comme une nouvelle trahison, d'apprendre à aimer ce lieu, à lui trouver du charme. Elle y avait mit tout son cœur, non pour oublier d'où elle venait, mais pour relativiser. L'autel du renouveau avait été la consécration de cet effort en plus d'être un lieu sacré aux yeux des Délimariens. Il ne s'agissait que d'une élévation de roches, près de la plage sur laquelle ils avaient débarqués. Une construction simple, sur laquelle étaient déposées des offrandes diverses. Des coquillages, des galets blancs et des écailles de poisson mais également des offrandes périssables, surtout après les moissons. Il ne s'agissait pas même de gaspillage. Ces offrandes n'étaient pas faites aux Dieux, ou aux Esprits-liés, mais aux camarades et compatriotes. A tous ceux qui étaient citoyens de la ville. Ils échangeaient et donnaient librement parce qu'ils n'étaient jamais matérialistes. Le rituel s'était instauré de lui-même, sans même qu'ils le forcent ou le surjoue, simplement comme un moyen de rapprochement et ils n'étaient pas rares, en dehors des heures de labeur, que des familles ou des voisins viennent aux abords de l'autel, en particulier après les semailles et lors de la saison chaude, telles des couleuvres lézardant au soleil. Là, ils dégustaient les grappes raisin importé depuis Caladon et Roseä, un des rares fruits non local que le peuple de l'Océanique appréciait. Sa récolte coïncidait avec ces mois les plus ensoleillés qui voyait le lieu du débarquement aussi populeux. Non que ce fut un mal ! C'était une saine façon de commémorer. Profiter des bienfaits de la nature, lorsqu'on savait les apprécier, était une forme de respect. Elle-même appréciait de s'y promener ou de s'isoler seule sur la plage, mais elle le faisait davantage lorsque l'autel était délaissé. Beaucoup appréciaient ces retrouvailles rituelles en ces lieux, elle en était heureuse, mais elle était d'une minorité plus compliquée.
La mer avait été une découverte récente, qui resterait gravée dans sa mémoire. Les rivages du vieux continent s'étaient alors présentés à ses yeux grands ouverts, tandis qu'elle chevauchait vers les ruines de Lyssa la Vagabonde pour contempler la ruine causée par la perle de Néant. Les rivages de Tiamaranta étaient différents, sans qu'elle l'explique tout à fait. Peut-être était-ce simplement qu'ils ne portaient pas la même morosité endeuillée. Ils le portaient moins. Ici, le zephyr ne semblait pas porter l'écho du désespoir de milliers d'individus. Au bord de l'eau il n'y avait que le bruit apaisant, berçant des vagues, le sifflement lorsque la brise marine se levait, chargée d'iode. C'était une bonne chose. En particulier pour les almaréens. Un lieu neuf, qui ne rappelait pas les horreurs commises au nom de la folie. Un lieu où elle avait l'espoir de les voir enfin regarder vers l'avenir pleinement et sans crainte. Ils commençaient, lentement, et c'était une excellente chose. Tiamaranta était une promesse, tel un phare dans la nuit. Il y avait tout à construire ici, tout du moins c'était ce que Délimar avait promis à ses enfants. Tout le monde repartait sur des bases saines. Les flots avaient emportés bien plus que des exilés. Ils avaient emportés une promesse qu'il suffisait d'accepter en son cœur pour aller de l'avant. La promesse qu'à présent, tout était possible. Ils avaient eut peur, ils avaient souffert au cours de leur voyage elle n'allait pas le nier. Quand chaque orage était monstrueux, en haute mer, que la sécheressede l'iode dans le vent accentuait la soif jusqu'à vous cuire le palais, que la chaleur se faisait étouffante jusqu'à la suffocation, le doute et la peur avaient été présents. Elle s'en souvenait également très bien. Elle se souvenait avoir rêvé, alors, du moindre ombrage vivifiant pour se dissimuler, elle se souvenait avoir fêté chaque averse, chaque pluie et chaque précipitation pour le rafraîchissement qu'elles apportaient à leurs réserves à sec, elle se souvenait avoir été sur le qui-vive à chaque brume océanique après qu'ils aient apprit à leurs dépends combien elles étaient dangereuses, parfois davantage que les tempêtes…
Lorsqu'elle repensait à l'Alliance, elle repensait également à tout cela, et à bien davantage. Elle pensait au bien de son peuple, et aux souffrances qu'il avait enduré. L'Alliance était une protection, pour eux, mais aussi pour d'autres peuples dans des situations similaires. L'herbe n'était pas plus verte dans le jardin d'à-côté. Ils avaient tous les mêmes considérations et objectifs. Et ensemble, ils avançaient. Délimar était une version miniature de l'Alliance, à l'heure présente. Ses souvenirs étaient son moteur, un carburant à sa détermination et sa droiture. Elle les chérissait, bon comme mauvais et un souvenir s'entremêlait à un autre et ainsi desuite, inextricablement. Et ses souvenirs de cette première année étaient plus vivaces encore que tous autres. Leur première récolte de blés quand Thelem avait manqué se couper un doigt avec sa faucille en allant aider aux champs. Leur première excursion en forêt avec Sigvald pour cueillir des fraises ou leur première ouverture de mine dans la montagne. Elle se souvenait aussi de son premier été, quand elle avait passé une semaine sans dormir, n'étant pas habituée aux multiples grillons, cigales et criquets qui ne cessaient de chanter, puis à l’automne quand elle avait été contrainte de faire face à ses premiers moustiques et mouches et avait failli confondre son époux avec l'un d'eux parce qu'il ronflait. Mais il n'y avait pas, en Calastin, que de l'inconnu. Elle qui avait toujours parcourut les pâturages[b] de haute montagne à Glacern afin de monter la garde sur les champs et les [b]troupeaux qui paissaient contre les prédateurs, elle s'était prise de plaisir à parcourir sur son destrier la campagne de Délimar, à se dissimuler, parfois, de l'éclat brûlant du soleil sous les verdoyants feuillages de leurs forêts. Même si ce n'était pas Glacern, c'était un beau lieu, un lieu où un leur peuple pouvait fleurir, uni, soudé.
Un peuple, et non plus des ethnies réunies. Déjà, parfois, cela se sentait, comme au port lorsque l'activité battait son plein et que les pêcheries ouvraient pour proposer leurs produits, l'air parfumé par l'iode, les oiseaux de mer venant tournoyer dans le ciel et se poser près des bacs pleins et riches, attirés par les senteurs. Cela se sentait aussi dans le travail commun de la terre, et les efforts également répartis, portés à fructification par la volonté commune de voir leur ville grandir. Au ramasse des foins et tournesols, on voyait alors tout un chacun se prêter main forte, grimaçant sous la chaleur torride mais pas moins présents. Les bateliers chargeaient leurs embarcations qui descendaient le fleuve avant que les charretiers prennent le relais jusqu'en ville, les roues parvenant à peine à aplatir la florissante végétation qui déployait son éblouissante verdure, quand elle n'était pas brûlée par la chaleur. En été, les labeurs de plein air réunissaient souvent, donnant une autre dynamique que la vie industrieuse du coeur de la ville où s'étendaient les industries et les commerces. Bien sûr, le labeur était omniprésent à Délimar qui avait un code moral stricte à ce sujet-là, mais cela ne signifiait pas qu'ils ne savaient pas se détendre non plus. L'art était tout aussi présent que la peine en leur ville. Au solstice comme à l’équinoxe, de grandes fêtes étaient organisées, pour changer du quotidien, durant bien après que le clair de lune ait pâlit à l'horizon et que l'aube ait débuté son efflorescence. Ils savaient s'amuser, mais toujours dans le respect. Elle-même appréciait de partager un hydromel mûr avec ses compagnons d'armes et ses frères et sœurs de patrie pendant que les enfants couraient nu-piedssur le sable en faisant voler des cerfs-volants, pendant que les femmes lyssiennes tressaient des lanières végétales nouées de graines dont elles tiraient des mélodies sur la voix de rossignol d'une almaréenne…
Elle se souvenait. Et ce fut pour cela plus que pour sa logique qu'elle avait accepté l'Alliance. Pour que tout cela perdure, que d'autres souvenirs s'y ajoutent… Et chaque fois que quelque chose lui déplaisait dans l'Alliance, elle y repensait. Ainsi, elle n'oubliait jamais, ni ce qu'elle avait vécu, ni pourquoi elle agissait. Et si l'homme face à elle n'avait pas la même exacte source de motivation, elle le savait tout aussi bienveillant. Quoi qu'il veuille lui dire, cela ne changerait jamais.
« Ce n'est pas tant que cela. J'ai simplement l'impression qu'ainsi, on entretient moins la mémoire. Je ne vous en empêcherais pas cependant »
Et il semblait qu'elle avait eut raison de se replonger dans ses souvenirs. Son conseiller était excessivement actif, mais dès qu'il s'agissait de l'Alliance, il avait à peu près autant d'idées qu'ils y avaient de Contes dans l'histoire du Renne et des cents et une lune. Elle inspira profondément, se focalisa de nouveau et hocha la tête pour lui dire de continuer, indiquant ainsi qu'elle s'accrochait et était bien avec lui, autant que possible.
« Si la diplomate Sélénienne avait été moins sotte, ça aurait été plus simple pour Aldaron, surtout »
C'était sortit tout seul mais elle n'avait pas réussi à s'en empêcher. Oui, l'elfe avait mit l'alliance dans une situation complexe mais enfin tout de même, il n'aurait jamais eut à faire ça si les Séléniens avaient agit correctement. Qu'Ilhan veuille y revenir ou non, elle n'admettait pas qu'on pu mettre en doute le bourgmestre. Ronchonne un fois de plus, ell retourna à sa couture en lui jetant de petits coups d’œil. Dire que Cordont était une affaire sensible et délicate était un euphémisme. C'était une plaie à vif qui guérissait lentement.
« Avente... »
Ouille ouille et ouille… comment lui expliquer ? Il avait une très bonne idée, mais cela oubliait, à raison puisqu'il ne savait pas, les mesures prises par Aldaron et par elle d'un commun accord, sur les fondements de l'Alliance. Elle allait devoir lui en parler. C'était une bourde de sa part, elle aurait déjà dû le faire mais avait complètement oublié ce… détail ? Pas vraiment un détail. Bien plus qu'un détail. Bon d'accord, elle n'aurait pas du oublier, mais elle l'avait fait. A sa décharge, il s'était passé beaucoup de choses ces derniers temps ! Soupirant, elle se concentra d'abord sur son propos présent.
« Je suis… Je comprend votre point de vue. Je ne doute pas de son bien fondé. Mais… il y a nombre de questions en suspend dans cette construction que vous imaginez. Nous sommes sensés être égaux, tous, même si Caladon et Délimar protègent l'Alliance. Un nombre de sièges différent serait une entorse à cette volonté. Ensuite, si ce sont les dirigeants qui se mettent d'accord, c'est pour une bonne raison. Je ne crois sincèrement pas qu'il soit bon de les muselés en mettant d'autres personnes avec les mêmes droits décisionnels qu'eux. Nous avons tous des conseillers que nous entendons et respectons, mais si la décision finale revient à une tribune et plus un seule personne, alors il y a un risque que la décision manque d'unicité, de force… je n sais pas si je m'exprime bien mais… un dirigeant doit rassembler, après discussion avec ses conseillers, un seul avis. Avec un tel conseil, cela est dilué et qui nous dit que quoi que ce soit sera fait ? C'est la même chose quand nous devons nous mettre d'accord pour une action extérieure, non ?»
Pour le coup, elle voulait bien en entendre davantage immédiatement. Et puis, ne lui avait-il pas dit une fois que discuter des idées était la meilleure façon de les rendre plus solides ? Elle voulait qu'il lui explique davantage ce qu'il avait en tête, ses idées et qu'il réponde à ces potentiels problèmes. Elle même de son côté savait qu'il fallait avoir une base d'idée pour réagir, même séparément vis à vis de l'étranger, mais de là à ce qu'un conseil décide de tout ? Là il y avait un monde.
« J'étudierais vos parchemins bien sûr mais… je voudrais en discuter un peu plus, avant que nous n'allions plus loin, si cela ne vous gêne pas. J'entends votre demande, si ce que vous voulez aborder ensuite est personnel, nous pourrons aller dans la cour intérieure, par exemple. Pour avoir plus de tranquillité, si cela vous convient ? »